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Logiquement après l’article précédent, m’est apparue l’idée de relater mes questionnements vis- à- vis du gluten.
D’après le Grand Robert de la langue française, il se définit comme matière visqueuse de nature protidique qui subsiste après l’élimination de l’amidon des farines de céréales. Son taux est très important dans le blé largement consommé à travers le monde. Si mes souvenirs sont bons, cette céréale a été découverte au Proche- orient il y a des milliers d’années et est cultivée par l’homme depuis le néolithique. Consommé en grains, gruau, semoule, farine d’où pâtes, galettes et pains, il est à la base de l’alimentation de beaucoup d’humains. Ma mère est emblématique d’une certaine tradition puisque pour elle, il est carrément impossible d’envisager l’absence du pain à la maison, purement et simplement. « Long comme un jour sans pain » dit l’adage. Adapté, transformé aux différents climats, le blé a évolué au gré des expériences humaines, au fil des siècles. Aujourd’hui, c’est le froment, élément blanc du grain, dénué de son enveloppe (et de tout nutriment et fibre du coup) qui donne les farines blanches majoritairement utilisées.
Du fait de sa structure, le gluten permet une élasticité dans les pâtes s’il est travaillé d’où son importance dans de nombreuses préparations. Je prends pour exemple, la pâte filo : ma voisine turque la fabrique elle- même avec une dextérité que je lui envie. Si la recette de base est extrêmement simple (farine, eau, sel), l’étalement en une fine couche avec un rouleau type manche à balai n’est pas évident du tout. Je m’y suis essayée souvent pestant de mon incapacité à ne faire rien d’autre que de la dentelle. J’ai tenté l’expérience à la maison avec d’autres farines mais mes complètes et autres céréales ne donnent pas l’élasticité nécessaire ce qui entrave d’autant plus ma réussite. Tant pis, j’ai besoin de temps, encore et encore.
La prépondérance du blé est une évidence et pourtant, il est jugé (avec le lait de vache) responsable de bien des maux dans des médecines alternatives. Si l’allergie au gluten est rare et facilement, rapidement repérable, beaucoup d’entre nous seraient intolérants au gluten sans le savoir ; au fur à mesure, insidieusement, sa consommation engendrerait des maladies fort disparates et variées (physiques et mentales) du fait de sa toxicité sur le système digestif particulièrement.
La maladie chronique en particulier conduit à s’interroger sur les raisons de sa présence et les moyens de se préserver au quotidien. Si je suis persuadée, sans aucune preuve ou donnée scientifique, que Devic est dû à des pollutions chroniques liées à l’environnement en général, je me suis forcément grandement questionnée sur l’alimentation. Certes, bien avant la maladie, j’avais consulté une diététicienne pour des fortes rondeurs aux hanches sur un corps tout maigre passant ainsi de la taille pantalon 46 à presque 38 (Lise Bourbeau donne d’autres explication qu’alimentaire sur les types physiques, j’en reparlerai à l’occasion), mon régime alimentaire en avait été grandement modifié et je me suis notamment désintoxiquée définitivement du sucre (une drogue majoritairement ignorée !!). Je tâtonnai donc déjà dans ce domaine quand survint la maladie. L’apprenant grave et chronique, je me suis révoltée en criant intérieurement que décidément, mes efforts de vie saine étaient vains, me demandant également si cette démarche alimentaire n’avait pas contribué à l’arrivée de Devic. Puis, j’ai farfouillé de ci de là, découvert Kousmine et Seignalet, côtoyé naturopathes et micro- nutritionniste, abordé la question avec les neurologues, j’en parle régulièrement avec mon médecin traitant et évidement j’expérimente (ces dernières apparaissent en pointillé au gré des circonstances et je reparlerai de certaines en particulier). La médecine allopathique est en général méfiante voire réfractaire à ces pistes alternatives arguant qu’aucune étude scientifique réelle n’existe, qu’il n’y aucune preuve de leur efficacité, je n’y ai pas trouvé de réponse à mes questionnements. Sur la toile, les débats sont virulents, entre des défenseurs de ces méthodes à la limite sectaires et des détracteurs radicaux, j’ai beaucoup de difficultés à y trouver des réponses objectives, posées. Autant dire que la question est entière, le flou, le doute, l’incertitude constamment présents.
Je n’ai pas envie de me lancer dans des explications techniques faciles à trouver sur la toile, qui s’en souciera cherchera et j’avoue être très dubitative cependant, dans le doute et l’incertitude, je tâche quotidiennement de diminuer ma consommation de gluten. Je n’y renonce pas radicalement parce que j’ai grand plaisir à manger du pain frais croustillant, des spaghettis, des plats préparés par d’autres ignorant cette question, par exemple, j’en diminue néanmoins grandement la place cherchant et testant des mélanges variables d’où mes expériences sur le pain, les pâtes et galettes précédemment évoquées. Pareillement, j’évite d’en cumuler les sources au quotidien et privilégie les pommes de terre, le millet, le riz, le maïs (lui aussi décrié par ailleurs), les légumineuses, le sarrasin, le petit épeautre, entre autre. J’ai également changé ma pensée sur mon rapport à l’alimentation et dans une dynamique de vie et non plus de mortification, j’ai tourné ma révolte en pensée positive : ma démarche de vie saine contribue fortement à ma récupération, à la stabilisation de mon état et à ma joie de vivre pleinement le temps qui m’est imparti. Elodie, de toute façon me l’avait dit : « Le corps a une mémoire. Si vous l’avez bien traité, il s’en souviendra. ». Alors, hors de toute volonté de contrôle chimérique, je teste, observe, continue mes recherches, mes expériences, je les partage avec qui veut entendre et m’ajuste à ce qui apparait être le mieux pour moi. J’écoute la voix de mon corps, la voie de mon intégrité personnelle, loin de tout dogme, je choisis la voie du milieu.
L’alimentation est loin d’être une question anodine, véritablement.
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Par hasard, j’ai reçu, il y a quelques années un petit livre de recettes et trucs en cadeau via un organisme quelconque. J’y ai farfouillé allègrement en quête de solutions écolonomiques au quotidien et comme d’habitude, j’ai bidouillé ces conseils avec d’autres lectures à ma sauce. Une des recettes en particulier m’avait intriguée et je traînais cette idée longtemps avant de me décider parce que j’accrochais au problème de la cuisson : faire son propre pain au levain maison.
Ainsi, j’ai espéré trouver des alternatives plus ou moins mobiles à un four à pain, vainement. Et puis, j’ai rencontré Olivier, chauffeur de taxi originellement cuisinier d’étoilés et autres grands restaurants. Lors d’une conversation culinaire, nous abordâmes la question du pain, il me racontait comment il le préparait lui-même et je m’étonnai d’une cuisson au four classique :
- Et comment faire pour avoir de la croûte ? Parce que c’est ce que je préfère dans le pain, la bonne croûte croustillante et bien cuite ! Avec une cuisinière ou une machine à pain, c’est impossible !!!
- Quand vous enfournez votre pain, vous jetez un bol d’eau à l’intérieur du four avant de fermer la porte et vous aurez de la croûte.
Zou, c’était bon pour moi, je décidai donc de me lancer dans l’aventure, curieuse.
Avant toute question de pain ou autre pâte levée, il s’agissait de faire un levain naturel.
Pourquoi s’embêter quand il existe des levures de toute sorte ? L’envie d’essayer et surtout de retrouver ce goût particulier du levain naturel.
La recette est simple : mélanger 4 cuillères à soupe de farine bio avec 1 cuillère à soupe d’huile d’olive, ½ cuillère à café de miel, 3 cuillérées d’eau et une pincée de sel. Laisser reposer ce mélange 3 jours à température ambiante à l’abri de l’air.
Hum, j’adaptai à mes conditions : pas de miel, du sucre complet + une pincée de bicarbonate.
J’ai farfouillé sur la toile les articles sur le sujet et j’ai tâtonné.
Pour le protéger de l’air, je l’ai mis dans le plat à tajine en terre.
Premier mélange :
Au fur et à mesure des jours, j’ai ajouté de la farine, de l’eau histoire de l’entretenir et j’ai bidouillé du bout des doigts aléatoirement. J’avais lu quelque part que le levain est effectif quand il commence à faire des bulles à la surface, j’avais une croûte sans bulle. Au bout de trois ou quatre jours, j’ai pensé que c’était foutu alors j’ai préparé de la pâte à pita et - Ô SURPRISE !- dans le four, mes pâtons se sont mis à gonfler ! Le levain était donc réussi et en plus, il avait bon goût ! Je pense que je n’avais pas mis assez de sucre finalement entravant de ce fait la fermentation. Fiston fut épaté :
« Oh maman, tu as même fait les pitas toi- même ! ».
Quelques mois plus tard, nous n’avions plus de pain et pas d’argent pour en chercher donc, j’ai remué mes placards afin d’en extraire un lot de farines diverses et variées. Nouveau levain et préparation d’un premier pain :
Comme il leva bien ! (Je lui laissai tout son temps entre chaque étape de pétrissage, il est inutile de forcer)
Façonnage en pâton à la main avec des réminiscences de l’atelier aux Amanins
Puis en zig- zag parce qu’il était trop long pour mon four avec éparpillage de graines dont nous sommes amateurs ici :
J’ai bien jeté de l’eau sur le plateau du bas avant de fermer la porte sans toutefois obtenir une jolie croûte comme je les aime. C’est simplement que nos cuisinières ne peuvent atteindre les températures d’un four à pain, dommage. Toujours fut- il que l’intérieur était réussi et le pain fut dévoré goulûment par un fiston enchanté.
J’en ai refait un plus tard, en miche. S’il fut pareillement apprécié, il resta compact et durcit rapidement.
( Remarquez le bol en dessous avec la dite eau)
Conclusion :
Pour tout ce qui est pita, pâte levée en galette, tarte ou autres, c’est vraiment très chouette avec ce petit goût aigre caractéristique du levain naturel.
Si mes pains sont bons, c’est parce que je choisis des farines à notre goût mais franchement, la bonne croûte manque d’où la persistance de l’idée qu’un bon four à pain est nécessaire, à minima. De plus, s’ils dépannent, amusent, ils ne valent pas le bon pain d’un artisan professionnel exigeant et connaisseur au métier et savoir- faire ancestraux. Ne s’invente pas boulanger qui veut... Chapeau bas les artisans, je vous salue.
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Formation professionnelle, lectures, pistes d’études m’interrogent grandement sur l’intelligence, les fonctionnements mentaux, leurs modes d’expressions et nos adaptations dans le monde en général. Etre au clair avec soi étant le préambule à toute approche de l’autre, je me penche sur mes propres fonctionnements.
Parmi les multiples problématiques soulevées, j’observe les modes opératoires internes et extérieurs de ma créativité débordante (et envahissante). D’où vient cette pulsion aventureuse qui m’anime quotidiennement ?
Quelque chose dans mon cerveau s’opère inévitablement au regard de mes activités et productions. Je n’ai rien compris aux forces en physiques et j’élabore des amoncellements incroyables en équilibre improbable avec les objets du quotidien, je fabrique des structures et des meubles ; j’étais mauvaise en langue à l’école et aujourd’hui, j’en apprends quatre en même temps (et pas des plus simples) sans compter l’aisance à me repérer dans des langues inconnues ; mes productions en arts plastiques n’étaient pas remarquables, je produis depuis des années des créations uniques en testant constamment de nouvelles techniques avec au bout du compte une foule de travaux ; j’ai été classée littéraire alors que je mesure, pèse, m’oriente à l’œil , construit des volumes complexes en plusieurs dimensions dans ma caboche et suis arrivée en tête des tests de raisonnement logique de mon collègue de math; j’ai cinquante mille idées à l’heure plus saugrenues les unes que les autres , celle-là entrainant celle-ci avec son lot de questions pratiques (construction, adaptation, mise en œuvre technique), éthique ( quels enjeu porte-t-elle ? Quelle conséquence à petite et grande échelle ?) dans un foisonnement dynamique, vivant, vivifiant d’autant que je crée des liens et des parallèles inédits, originaux, inattendus constamment. Une inadéquation entre l’école et moi est une hypothèse de plus en plus prégnante, ses fonctionnements et représentations ne me correspondent pas (Je le mets au présent car encore aujourd’hui, cette inadéquation se révèle dans ma non- titularisation persistante et je vous raconterai un épisode particulièrement révélateur à ce propos en son temps). Toujours est- il que mes expériences quotidiennes ont une réalité pratique et matérielle ainsi qu’une vision métalinguistique, exolinguistique. En cuisine, notamment, il ne s’agit pas de simplement préparer à manger, de se nourrir, au –delà du goût, des sens et du plaisir, se vit une expérience chimique, artistique, culturelle, politique, métaphysique. Rien que ça.
Récurrence, redondance à mes articles Miam miam inhérentes au support du blog ? Je radote alors ? A moins que ce ne soit le leitmotiv de la conscience et la présence aux actes quotidiens en démarche méditative, la joie, la grâce, l’illumination au spirituel de la vie, ici et maintenant.
Zou, assez de dialectique, je vous prépare le récit des faits. (Pourvu que fiston me laisse l’accès à l’ordi !!)
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L’année dernière, des changements comportementaux vis- à- vis des rituels alimentaires s’étaient opérés alors que nous étions inscrits aux Restos du cœur. Confirmés depuis, ils n’avaient donc rien à voir avec les restrictions et les limitations financières. Mes rencontres multiculturelles quotidiennes ne sont pas anodines, je pense, à notre éloignement des dogmes et principes soit- disant traditionnels (nous avons le traditionnel que nous voulons) et bien des lectures nourrissent mes réflexions et méditations sur le manger.
« Dis- moi ce que tu manges, je te dirai ce que tu es. »
Brillat- Savarin dans Physiologie du goût, 1825.
Dans l’ensemble, les préoccupations sur la qualité des ingrédients n’ont pas changé et de ce fait, les variations de plats conservent les mêmes fondamentaux que ce que j’ai déjà exposé ici. Nous avons nos impondérables : opulence de légumes,
mélange de farines avec détachement du blé, cuisines aux saveurs lointaines, moules frites,
soupe turque au yaourt,
pizzas maison et galettes diverses,
tamagouilles en mélange soupe ou sauce, légumineuses,
céréales et diversification des produits animaux limités (j’ai d’abord écrit milités en cafouillage des doigts sur le clavier !! )… En l’occurrence, nous en sommes en moyenne à un morceau de viande par semaine ; il y a des semaines à plus, d’autres sans.
Par contre, une des différences fondamentale est que je vis ces expériences culinaires en liberté, en autonomie relationnelle et affective. Je ne me soucie plus de vouloir faire plaisir à tous systématiquement, je fais, je propose et si quelqu’un n’aime pas, cela le regarde ; en outre, j’ai souvent un service à la française, c’est- à- dire une multiplicité de produits et plats sur la table où chacun pioche selon ses envies et goûts.
Les crudités en sont révélatrices : préparation séparée sans sauce, mise sur la table de nos 5 bouteilles d’huile et 4 vinaigres tous différents ainsi que des condiments variables.
Spécialement vilaine mère indigne, je ne tiens pas compte des goûts (changeants) du fiston au quotidien - tout comme je ne range plus sa chambre qu’il aime en bazar depuis des mois ou ne repasse plus son linge qui finit systématiquement en boule par terre ou dans son armoire. En période scolaire, il est ravi de manger à la cantine « parce qu’on y mange normalement » ; en période fériée, il n’en fait qu’à sa tête. Dans l’opposition fréquente, il raille ma folie des légumes, mes mélanges et refuse les produits de l’Amap. Rien que mes pommes de terre ne sont pas bonnes qu’elles soient cuites en robe de chambre, en purée ou en frites. Refusant d’entrer dans ce genre de débats stériles, j’ai décidé de vivre à la slave : je prépare à ma guise et selon les circonstances des plats laissés en libre-service pour qui en veut, à l’heure qui lui convient. Si fiston n’est pas satisfait, il a compris et se prépare lui- même ce qu’il préfère : pâtes, œufs, pain, fromage, flageolets, bouillon aux vermicelles, fourchette directement dans la boite de conserve… Je relève également qu’il ne râle jamais sur l’absence de tel ou tel produit chez nous, il s’adapte en fouinant dans les placards, frigo et congélateur. De toute façon, il me l’a dit il y a peu : manger pour lui, c’est se remplir le ventre. Je le laisse expérimenter car je sais que quand le plat lui convient, il sait l’apprécier et partager avec ses compagnons de table. Ses récits de la cantine sont à ce propos révélateurs : « Je suis le seul à finir mon assiette et quand je n’aime pas quelque chose, je cherche quelqu’un avec qui faire des échanges. Et parfois, je prends des trucs que je n’aime pas parce que je sais que mon copain l’adore ». Le gaspillage et l’attitude méprisante de certains à l’égard de la nourriture le choquent souvent. Son bourrage de ventre à la maison n’est qu’une passade d’adolescent en construction par l’opposition à sa mèèère, cela lui passera ; les bases, elles, restent.
J’agis également dans l’absolu allant jusqu’à manger des trucs dont je ne me serais pas cru capable il y a quelques années. Pour exemple, une tête de lapin. Préparée par le boucher qui me la recommanda vivement, je l’ai décortiquée de ses chairs et suis allée jusqu’à la cervelle ; ma mère mange la langue, je n’y ai pas pensé… aurai- je pu d’ailleurs ? Ce fut savoureux en bouche et complexe, déroutant en tête.
Les assiettes restent des palettes de couleurs et nous nous amusons souvent de mes travers ou surprises volontaires ou non :
blague pour retardataire:
de ce cake débordant:
quelque patte de poulet:
et escargots en fuite:
Manger biologique a la réputation d’être coûteux et j’ai souvent été confrontée à des personnes soit- disant tellement intelligentes criant ce genre de détractation ; pour eux, c’est continuer à manger (et vivre) comme ils en ont l’habitude en passant simplement à des produits bio ou écologiques. Avec mon budget riquiqui, nous mangeons bio et local au maximum. Je ne vais que très rarement au supermarché, nous mangeons simplement autrement. Je crois au fait qu’un produit de bonne qualité en moindre quantité nourrit mieux qu’un autre plus volumineux et de moindre qualité.
D’autre part, certains réactionnaires profitent de l’aubaine écolo pour renvoyer les femmes à la maison entre gosses et fourneaux, je n’en suis pas. Si je prépare la quasi-totalité de nos mangeailles à partir de produits de base, je refuse de m’enfermer à la cuisine. Majoritairement, je vais au plus rapide, au moins fatiguant d’où ces tamagouilles mijotant doucement sans surveillance.
Mes pâtes, galettes, pizzas et autres préparations sont liquidées en quelques minutes et souvent, j’ai plus vite à manger qu’avec des préparations toutes faites à réchauffer… sans les mystères chimiques qui s’y trouvent.
usage immodérés des feuilles de bricks fort à propos en l'occurrence, en gratins, tartes et feuilletés:
Les plats nécessitant des temps longs sont exécutés par étapes et comme je suis incapable de respecter les recettes traditionnelles, ma cuisine se transforme en atelier d’alchimiste, l’expérience en devenant fort intéressante, souvent joyeuse puisque je ne sais jamais où elle va me conduire, quel en sera le résultat.
Nous mangeons énormément de fruits et légumes crus ou à peine sautés au wok, je ne fais pratiquement pas de sauce en dehors des jus de cuisson. Il m’est également important d’utiliser un minimum de vaisselle aussi, il arrive que nous mangions directement dans la poêle ou le plat, certaines préparations s’y prêtant particulièrement.
Omelette turque à manger avec du pain directement dans la pôele:
Tajine et couscous:
Inévitablement, ces pratiques se répercutent sur la matérialité de la cuisine, je vous parlerai plus tard de quelques choix dans ce domaine. Pour l’instant, je constate mon détachement des gadgets électro- ménagers, notamment du micro- ondes dont je négocie la disparition après son lâchage (il n’a pas loin de 10 ans), mon ras- le- bol de l’accumulation de vaisselle. Si ma mère ne me refilait pas les trucs dont elle ne sait plus quoi faire, j’en aurais vraiment très peu. Bien sûr, les beaux services flattent mon regard, autant que les appareils à trucs ou à machin ; je me demande constamment si j’en ai véritablement besoin, si l’alternative utilisée jusque-là n’est pas plus intéressante en termes d’efficacité et de gain de place. Passé le désir, je les oublie rapidement, preuve de leur in importance et c’en est fini. C’est fiston qui reste le plus attaché à des trucs conventionnels alors que sa vieille mère dinosaure sort des sentiers battus.
Surtout, je ne suis pas intégriste. J’apprécie les plats traditionnels avec crème et farine blanche, les tourtes et saucisses des producteurs locaux, les pizzas du restaurant, une belle baguette fraîche tartinée de beurre frais, le chocolat chaud mousseux des cafés, les chips, quelques biscuits achetés, les repas préparés par mes hôtes au beurre, au fromage, les gâteaux ou tartes pleines de sucre blanc, un verre de soda de temps en temps… parce que ce qui importe c’est le partage de ces denrées dans un contexte amical, détendu, savoureux. Si mon foie, mes intestins, ma langue me rappellent à l’ordre plus ou moins bruyamment régulièrement, ces excès sont facilement rattrapés par mon mode de vie quotidien et je garde de beaux souvenirs de ces instants.
En conclusion, je songe à mon dernier rendez- vous avec un pharmacien- naturopathe-iridologue. Dans mes yeux, il a vu l’équilibre, un mode de vie sain en particulier sur le plan alimentaire. Seuls le système nerveux et le stress si proches logiquement sont marqués. Les peurs et inquiétudes matérielles ou avec le fiston auraient plus d’impact que je ne me l’imagine ? Peut- être bien. La sécurité est après tout un besoin fondamental. Néanmoins, la méditation quotidienne, le détachement des principes, la mesure et la conscience dans les actes ainsi que le choix constant d’être en harmonie de l’intérieur à l’extérieur, de l’extérieur à l’intérieur sont des remèdes puissants aux errements de l’esprit. Je ne suis donc pas près de revenir à une vie réglée et réglementée par des lois implicites subies et non choisies, je ne suis pas près de retourner en prison.
De toute manière, la vie nous donne ce que nous émettons. Voyez donc cette patate rigolote à gros bisou :
et cette poétique tasse de chocolat chaud de soirée d’hiver dont je me suis empressée d’en photographier le joli cœur :
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« A part des photos de bouffe, t’as pas autre chose sur ton portable ?? » s’exclama ma sœur quand je me dépatouillais péniblement afin de lui montrer des images du chat. Effectivement, j’en ai des centaines sur le mobile… et sur mon pc. « C’est pour mes chroniques Miam miam du blog » me défendis- je mollement. Force est de constater que je ne suis plus dans la même démarche depuis des lustres. Certes, j’avais remarqué des récurrences dans le flot de mes expériences culinaires et décidé d’éviter les doublons, je crois cependant que ce changement d’approche est principalement révélateur de mon positionnement différent vis- à- vis de la nourriture.
Du temps de ma cohabitation avec SeN, j’avais besoin de prouver que ce que je cuisinais avait du sens, était une expérience de vie, un don de soi, de partage, de réflexion et d’intuition vivifiante. Via internet, je cherchais l’assentiment d’autres afin de supporter l’indifférence, les critiques acerbes d’un homme qui ne jurait que par ses gadgets alimentaires et la cuisine de sa mère. Ce temps est révolu et en déménageant, je quittai non seulement un homme mais aussi une vie cloisonnée et étouffante, des cadres étroits et limitatifs, une mortification sans issue. Depuis, je m’en donne à cœur joie et ma cuisine déborde de mes expériences tant sur le plan alimentaire que sur le plan matériel. En boutade, la maison aux multiples possibilités a laissé la place à une vie restreinte matériellement, financièrement... et, je m’éclate comme une fofolle que je suis parce que les critères prétendument objectifs se révèlent complètement inappropriés.
Meublée de bric- et- de broc, débordante de partout, s’y étalent en mouvement perpétuel mes expériences et méditations sur la vie, le corps, la relation à soi et à l’autre. L’air de rien, bien de de nos choix sont évocateurs de ce qui se joue en soi (je ne dis rien d’autre dans mes dévidoirs). Fiston ayant lâché l’ordinateur aujourd’hui pour aller trifouiller celui d’un copain, j’en profite pour mettre de l’ordre dans mes photos et préparer les prochains articles de mes chroniques Miam Miam. Attention, ça va exploser de tous les côtés, en feux d’artifice !
(Croisons les doigts pour que le temps soit avec moi et que fiston me laisse tranquille).
A bientôt !
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A la fin du mois de juin, j’ai participé à une démonstration de Qi Gong lors d’une manifestation locale. Notre toute jeune association a besoin de se faire connaître et comme je suis d’un naturel fidèle et engagé, il me semblait logique d’en être. De ce fait, je me suis retrouvée avec quelques camarades et notre enseignante autour d’une table, dans l’attente de notre démonstration ou afin de profiter de l’après- midi ensoleillée pour se voir en d’autres cadres que celui des cours.
Bla- bla aléatoires et puis, une conversation sur le positionnement de notre prof.
De grandes exigence et intégrité, elle refuse de participer à une vague intéressée de vente de pratiques à la mode telles que le Taï-chi-chuan ou le Qi gong. Son cheminement et celui qu’elle propose est une voie silencieuse, intérieure où l’expérience par le corps, la respiration, la pratique méditative de ces arts martiaux priment en vue de bien- être et d’équilibre. Elle expliquait en particulier sa grande pondération devant des promesses de santé vantées par certains enseignants, en particulier, le profit que tiraient certains devant la détresse de personnes gravement malades, désespérées en quête de solutions que la médecine n’avait pas. Elle- même avait entendu parler de prof. prétendant guérir le cancer, invitant à cesser les traitements allopathiques remplacés par une pratique intensive de Qi Gong thérapeutique. S’en suivit un flot de remarques dénonçant ces pratiques non exclusives aux arts martiaux parmi les interlocuteurs. Le thème récurrent était l’intérêt financier, la cupidité, le profit tiré de la détresse, de la faiblesse, du désespoir des condamnés par la maladie ; un vent de révolte planait au sein des protagonistes. Je saisis un petit blanc dans l’assemblée pour affirmer haut et fort ce que j’avais envie de dire à ce sujet :
« Oui, c’est cruel et inadmissible d’évoquer des miracles possibles aux désespérés mais ce que je trouve le plus inhumain dans ce genre d’histoire c’est la désappropriation de sa mort ! Parce que faire croire constamment à quelqu’un qu’il existe une voie possible, miraculeuse, promettant la guérison alors qu’il n’y a aucune alternative, c’est véritablement spolier cette personne de sa mort ! Et préparer sa mort, cela fait aussi partie de la vie ! »
Mes premiers mots semblèrent inaudibles, suivirent trouble, recul, silence. Je m’en étonnai quelques secondes puis pensai qu’à nouveau, j’avais fait virevolter le sujet vers un point de vue inattendu.
La conversation s’étiola rapidement.
La mort est décidément un tabou dans nos sociétés ; à force de l’occulter parce qu’elle nous angoisse, nous l’avons séparée et distinguée de la vie. Elle n’en reste pas moins une étape importante au même titre que la naissance largement célébrée, elle. Nous avons encore beaucoup à apprendre.
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Perdre la vue était l’une de mes plus grandes peurs et j’y suis tombée en moins d’une semaine. Malgré les limitations et empêchements d’autres, j’ai tâché de m’adapter en jouant sur les lumières, quelques accessoires, principalement sur l’écoute de mon corps et la volonté de ne pas rester en fatalité subie. Fort heureusement, j’ai eu la chance inouïe de la récupérer lentement. De cette expérience initiatique, m’est resté le plaisir d’écouter des livres lus que je dégotte avidement à la médiathèque. Est- ce un réflexe boulimique post famine ? Grande lectrice que je suis depuis plusieurs décennies, j’y vois une continuité logique. Et puis, ce support me permet de lire en travaillant de mes mains ou en m’endormant, ce qui multiple mes lectures. Bien des œuvres lues ou écoutées attendent leur article, je ne suis pas, débordée par les péripéties et expériences quotidiennes, un fiston accaparant l’ordinateur pendant les vacances. Pourtant, je bouleverse mes chronologies et profite des grasses matinées interminables du fiston- ado pour vous parler de ce livre aujourd’hui.
David Servan- Schreiber est jeune médecin aux Etats- Unis quand il apprend qu’il a une tumeur au cerveau, cataclysme dans une vie pleine de projets et d’ambition. En plus des traitements habituels, il décide d’expérimenter d’autres voies curatives et s’en sort. Dans ce livre, il explique les processus du cancer, comment s’alimenter, vivre pour s’en prémunir ou accompagner les traitements quand il est déclaré. Il évoque ses expériences personnelles, ses rencontres avec des médecins, des thérapeutes, des patients qu’il a lui- même accompagnés. Il donne de nombreuses références, des pistes de réflexion et surtout invite à l’amour de la vie que nous avons à vivre.
Vous trouverez beaucoup d’informations à ce propos sur la toile, en librairie d’autant que David Servan- Schreiber, après s’en être sorti à deux reprises (la deuxième était dite fatale) est actuellement en terrible rechute et prépare sa mort. Je n’ai donc pas tellement le goût de vous le résumer ou d’en faire une analyse critique, j’ai seulement envie d’en parler pour ce qu’il a de résonnance en moi.
En le découvrant par hasard parmi les autres, j’ai pris ce disque pour ma mère. Elle a eu deux cancers et a réchappé de justesse au deuxième. Je n’étais pas présente à sa maladie et de toute façon, elle ne m’en a quasiment rien montré, ni dit. Je ne culpabilise pas, notre famille est particulièrement touchée et l’hécatombe est évidente ; le cancer fait partie de notre patrimoine, il nous est familier et nous savons que la prévention est essentielle pour chacun d’entre nous en priorité. Par contre, j’ai, grâce à la communication bienveillante, ouvert mes esgourdes à sa souffrance psychologique, à sa profonde solitude, son chagrin, ses peines, ses angoisses quant au gâchis d’une vie par défaut d’accompagnement, de solidarité. Elle n’a d’ailleurs pas prêté attention à ce livre régulièrement évoqué, ce n’est après tout pas de la maladie, de la douleur dont elle a le plus peur ou le plus souffert. J’ai donc écouté ce livre- lu pour moi, pour mes proches, pour qui voudra le partager.
Si la maladie de Devic n’est pas un cancer, elle est aussi contrecarrée par des chimiothérapies, elle est aussi une maladie chronique dont les origines sont similaires à celles des cancers, il y est aussi question d’inflammation. Il ne me fut guère difficile de réfléchir à ces parallèles tant qu’il était dans des questions médicales, alimentaires, environnementales ; une autre attention s’éveilla quand il entama la question de la corrélation entre corps et psychisme et je vibrai avec lui dès lors qu’il aborda des questions fondamentales de présence à soi, au monde, à la vie. Les passages concernant les fins de vie me bouleversèrent et j’ai pleuré dans ma cuisine en faisant la vaisselle alors que je l’écoutai. Je vivais, je vibrais avec lui (il lit lui- même cette version audio). Parce que nous avons la même expérience de la proximité de la mort, parce que ce vécu métamorphose profondément, parce que c’est une expérience initiatique au- delà de tout ce que les sociétés humaines peuvent imaginer, j’étais reliée.
J’ai trouvé en ses mots un écho similaire aux miens, d’autres illustrations verbalisant et concrétisant les raisons fondées de ma colère, de mes souffrances relationnelles à SeN notamment et cette volonté farouche de vivre pleinement ce temps qui nous est imparti sur Terre non sur un plan narcissique d’égo désireux de contrôler pour vivre l’éternité mais bel et bien en tant qu’être, partie intégrante d’un tout, d’un monde, d’un univers, de la vie.
David Servan- Schreiber est un cas clinique qui a démenti les pronostics des médecins, il a gagné de nombreuses années de vie et couru le monde pour partager ses expériences. Certaines polémiques existent quant à sa démarche, certains de ses choix et de ses positionnements, je ne m’y attarde pas. A mes yeux, ne comptent que son engagement et cette humanité vécue pleinement dans sa vibration essentielle, sa finitude, son positionnement dans l’univers. Il renforce cette pensée récurrente à mon esprit : peu importe ce qui nous arrive, ce qui compte, c’est ce que nous en faisons. (Mon ami Boris évoque constamment cette nécessité de sens et de verbalisation sur nos parcours de vie)
Nul n’échappe à la mort, c’est notre lot commun, notre destinée à tous. La maladie, la douleur, la souffrance sont des réalités auxquelles nous ne pouvons échapper. Longtemps, j’ai répété : en dehors de la mort et la maladie, il n’y a de limite que celles que l’on s’impose. Depuis la maladie, le handicap, la douleur, la dépendance, la souffrance, le sentiment d’imminence de la mort, je sais que même dans la maladie et la mort, nous avons la possibilité d’être et de devenir. C’est également ce que répète David Servan- Schreiber dans ce livre et je suis heureuse de le partager avec lui, avec Christiane Singer, Colette Portelance et tant d’autres anonymes.
Si certains d’entre vous croisent cet ouvrage, vous penserez peut- être à moi à partir du chapitre 9.
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Dans ma démarche intérieure en mouvement perpétuel, je me penche depuis plusieurs mois sur mon rapport à l’argent, au matériel et ces trucs- là. Ils me préoccupent face aux factures, aux empêchements et limitations alors que je les oublie au quotidien étant d’un naturel peu enclin à la propriété, la possession (je résume pour rester en boutade). Depuis quelques jours, j’ai donc décidé de réciter en mantra une phrase afin de m’y pencher tout en y méditant :
Je mérite l’abondance et l’abondance vient à moi.
Nous méritons l’abondance, fiston et moi, et l’abondance vient à nous.
Et depuis deux semaines, nous connaissons l’abondance: l’abondance de poux !!
Ce sont les premiers pour lui, mes méthodes l’en avaient protégé toute son enfance, je n’en ai pas eu depuis 30 ans ou moins.
Ainsi, j’entame mes vacances sur un gros ménage général avec lavage des draps et linges en pagaille (abondance, abondance), les huiles sur la tête qu’elles soient grasses pour étouffer les bestioles ou essentielles pour les éloigner, les tuer, les lavages fortement vinaigrés de nos têtes envahies et les passages réguliers du peigne fin afin d’éliminer les macabés et écraser impitoyablement les survivants délogés. La tâche est fastidieuse et laborieuse mais si la fatigue me rattrape, je constate avec joie que ma résistance s’est renforcée, les heures debout ou à courir à gauche à droite s’allongent et je viens à bout du bazar comme une grande, toute seule.
Un cadeau ces poux ? Peut- être bien pour m’inciter à méditer sur la formulation des demandes à l’univers. Alors, je repars avec d’autres mantras :
Je mérite l’abondance matérielle et l’abondance matérielle vient à moi
Nous méritons l’abondance matérielle et l’abondance matérielle vient à nous.
Quelle sera la prochaine surprise ?
Vous avez des idées, vous, de formulation de demandes ? C’est un exercice faussement simple, croyez- moi.
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Le laboratoire Roche le nomme Cellcept, la molécule est mycophénolate mofétil. Ce n’est pas de la rigolade, au contraire, c’est du lourd. Evidemment, après les perfusions au bazooka, cela me semblait de la gnognotte, je ne me suis heureusement pas posé de questions ou tourmentée en le prenant ou en lisant la liste des effets secondaires, cela aurait été inutile voire destructeur. Je préférai mesurer l’aubaine d’un traitement permettant de contrôler une saloperie de maladie incurable, chronique, aléatoire, invalidante, virulente. Très cher (110 euros la boite avec la marque Roche, 2 à 3 nécessaires par mois), je louai à nouveau la Sécurité sociale, le tiers payant et la prise en charge à 100% pour les affections de longue durée ! Dans d’autres pays, même très riches, c’était la mort assurée d’abord sociale puis physique.
La première semaine, j’entamai les prises quotidiennes. C’était tellement facile, un verre et hop, c’est fini. J’avais la tête à la vie et je ne tins aucunement compte d’un quelconque effet secondaire.
La deuxième semaine, je commençai par prendre deux comprimés le matin histoire de me débarrasser de cette obligation au plus vite, je n’avais aucune envie d’y songer à plusieurs reprises dans la journée. D’emblée, je remarquai qu’un coup de massue me fauchait en début d’après-midi, une fatigue forte, irrépressible m’étreignait et où que je me trouvasse, j’avais envie uniquement de me coucher et de fermer les yeux. Le monde pouvait s’écrouler que je n’en avais cure, je ne voulais que me reposer. Bornée comme je suis, je n’ai pas cherché très loin, incrédule et assez indifférente en dehors des coups de massue. Ce n’est que lorsque j’étais contrariée dans mes projets que ce phénomène me questionnait. Je passai donc à la troisième semaine avec ses trois prises.
Catastrophe, deux prises le matin et un comprimé plus tard, j’étais un vrai zombie. Mon médecin généraliste m’expliqua, quand je l’interrogeai sur ces manifestations, que mon organisme ne supportait pas ces fortes doses et qu’il serait plus judicieux de les étaler dans la journée. Je pris donc trois comprimés, trois fois par jour, bien séparés. Passage en quatrième semaine et ses quatre prises journalières.
Un le matin, un le midi, deux le soir.
Désormais, en plus de ma volonté acharnée à récupérer au maximum ce qui avait été perdu sur le plan physique (marche, vue, souplesse, endurance…), de mon combat pour l’assainissement des relations à mon entourage dans une ambiance délétère et du marathon du retour à la vie sociale, j’engageai une lutte quotidienne contre cette fatigue, cette profonde lassitude.
Quelques mètres ou quelque activité me fauchaient littéralement très rapidement. Chaque effort était une expérience profonde afin de puiser la force nécessaire à mon objectif. Je faisais tout en pointillé, en négociation perpétuelle avec le corps. Le ménage par exemple était une épreuve. Ce que j’abattais avant en deux heures me prenait toute la journée contrainte par des pauses régulières d’assise. Ce fut d’ailleurs au cours de l’une d’elles que je réalisai combien j’avais nié mes besoins en mettant fin à l’aide à domicile parce que je n’avais laissé de place qu’aux angoisses de SeN. Nouvelle voie d’apprentissage.
Simultanément, je faisais régulièrement des malaises avec syncopes et perte de connaissance. Qu’importaient le moment, l’heure, le lieu, je pouvais tout à coup m’écrouler sans prévenir. Je me souviens en particulier d’un matin où une sœur infirmière était venue pour la prise de sang mensuelle. J’étais descendue joyeuse et bloom, je me retrouvai portée jusqu’au canapé ; je m’étais écroulée subitement. Heureusement, SeN était derrière moi par hasard et il n’avait eu qu’à tendre les bras pour me rattraper in extrémis, je ne fus pas blessée. Je n’ai aucun souvenir, simplement un trou noir- éclair. Par bonheur, ces chutes ne survinrent pas quand j’étais seule (ce qui était la plupart du temps) et n’entrainèrent jamais de blessure. Si j’étais croyante en quelque religion, je parlerai d’anges gardiens.
En parallèle, j’entamai la valse folle des infections urinaires.
Du fait d’une atteinte de la moelle épinière, mon système d’évacuation est détraqué, c’est mécanique. En raison de sphincters mal connectés aux ordres du cerveau, des résidus stagnants dans la vessie provoquaient déjà quelques infections régulières. Avec la prise d’un immunosuppresseur, ce sont nos fragilités qui se réveillent et chez moi, mon système urinaire en est un. Bébé, j’avais eu des staphylocoques incompréhensibles ; longtemps, nous avions cru que c’était de l’histoire ancienne et avec l’immunosuppression, cette vieille histoire revint sur le devant de la scène. Pendant des mois, elles se succédèrent avec une régularité énervante. Malgré les traitements et alternatives mises en place avec Solange en rééducation (auto-sondages, médicaments, etc.), elles étaient quasi permanentes. Par chance, je n’eus que peu d’antibiotiques puisque mon médecin généraliste est homéopathe. Je me suis donc gavée de teinture mère, de granules et autres doses pour contrecarrer ces foutues infections. Le neurologue évoqua opérations, traitements supplémentaires. Oula ! Au regard de ce que j’ingurgitais depuis des mois, je voulais m’éviter au maximum de nouvelles chimies en cocktail ; l’homéopathie me sauva la mise et il ne put que m’encourager sur cette voie. Et oui, les médecins confrontés à certaines pathologies lourdes n’ont absolument rien contre des alternatives permettant de soulager leurs patients du moment que la thérapie se fait de concert.
Evidemment, ces tracas avaient une portée importante sur mon quotidien. Les nuits étaient perpétuellement entrecoupées en raison de levers incessants aux toilettes aggravant la lassitude engendrée par le médicament en lui- même. Souvent, en pleine nuit, je n’arrivais pas à destination. Au mieux, je me liquéfiais sur place, dans le couloir, dans les escaliers, devant la cuvette des toilettes. A 2, 3, 4, 5 heures du matin, j’épongeais les traces de mes fuites tout le long de ma course à la salle de bains, je me lavais, je me changeais, parfois, je réveillais SeN pour changer les draps d’un lit inondé. Au pire, la tête tournait au point de m’écrouler dans une immense flaque d’urine ou dans les bras de SeN répondant à mes rares appels à l’aide. Même dans ces situations dangereuses, je ne tenais pas compte de mes besoins, je le passais avant moi sous prétexte qu’il travaillait, qu’il avait besoin de dormir. C’était un crève- cœur que de le solliciter et j’encaissais ses réflexions acerbes sans broncher, profondément triste.
Et puis, après plusieurs mois de ce cirque, il s’avéra un jour, par hasard que la pharmacie était en rupture de Cellcept. Comme il est à prendre progressivement, son arrêt ne peut se faire brutalement et je calculais combien il me restait de comprimés jusqu’à la date prévue d’arrivée des nouvelles boites… « Humm, en n’en prenant que 3 par jour, je peux y arriver ». Sans en informer les médecins, je m’y mis et mon quotidien fut transformé très rapidement. Mes soucis urinaires s’apaisèrent grandement, la vitalité me revint comme par enchantement, les efforts ne me coûtaient plus tant, je retrouvais bien des activités avec plaisir, je pouvais mobiliser mes forces vers les muscles, la motricité, la relation, les projets de vie au- delà les murs- prisons de cette foutue maison. Ce fut une magnifique surprise, un soulagement, un tremplin vers d’autres horizons désormais plus accessibles. Refusant la peur, je décidai par moi- même de rester à trois comprimés par jour.
Au rendez- vous suivant en neurologie, j’informai joyeusement et fermement Gilles que de mon propre chef et à l’écoute de mon corps, j’avais arrêté les quatre prises quotidiennes. « Ma vie en a été transformée ! ». Comme à son accoutumée, il m’écouta attentivement, répondit posément : « Si effectivement vous vous sentez mieux ainsi, vous pouvez continuer avec seulement trois comprimés par jour. La posologie normale dans cette pathologie est de quatre mais comme vous n’êtes pas bien grosse (pour rappel : 1m68 et 54-55 kilos), je pense que trois sont suffisants. » Youpi ! Je pouvais continuer sur ma lancée.
Jusqu’à nouvel ordre, c’est un traitement à vie, c’est- à- dire tant que la médecine n’aura pas d’autre proposition thérapeutique et cette prise est devenue une habitude, un geste mécanique. Néanmoins, de temps en temps, j’ai quelques pensées nostalgiques pour ce temps où je n’avais pas à songer constamment aux traitements, pilules et autres chimies à avaler, où les boites n’envahissaient pas ma cuisine, bien en vue. J’ai également des jours où j’oublie d’en prendre un avec ce désir constamment présent d’en finir avec ce truc pas léger du tout. Il suffit d’une douleur, d’une malaise quelconque pour que je me jure mordicus de ne plus le négliger, la peur de replonger me rappelant à l’ordre. Les prises de sang se font moins fréquentes les premiers mois ayant été bons, mon organisme surmonte l’épreuve et mes cellules se maintiennent à des niveaux normaux tendance moins. J’avoue avoir négligé les échographies cardiaques annuelles à partir de la troisième, la deuxième ? Je ne sais plus. Et puis, à la rencontre d’autres personnes atteintes elles aussi de Devic, j’ai pu mesurer ma chance. Non seulement je le supporte bien ce foutu immunosuppresseur, anti- rejet, mais en plus, je suis un des rares cas à répondre aussi favorablement aux traitements. Bon sang, pourvu que ça dure !! Et dans ma caboche de Carabosse bornée et acharnée de la vie, je songe souvent à cette petite remarque de mon ancien kiné de rééducation, Raphi : « Et guérir, pourquoi pas ? C’est aussi une possibilité… ». Ma guérison intérieure quant à elle est déjà bien en marche, quoiqu’il en soit
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Un mois après ma dernière perfusion de mitoxantrone, un rendez- vous était prévu chez Gilles, neurologue. Du fait de ce traitement lourd, de toute façon, j’avais à respecter un certain nombre de consultations, prises de sang et échographies cardiaques pendant cinq ans ; la maladie en elle- même, par ailleurs, nécessite un suivi régulier et constant à vie. Je m’y suis rendue guillerette en jolie robe d’été avec des sandales à talon en bois, léger maquillage, l’air ravi. Bien de ceux qui m’avaient connue au plus mal amaigrie, épuisée, les cheveux à demi perdus, le teint blafard, clouée au lit ou au fauteuil s’exclamèrent de me voir si enjouée ; c’était tout de même le moindre des cadeaux que j’avais à leur faire.
Gilles lui- même fut heureux de me voir ainsi, j’étais une belle réussite pour la médecine après tout et apparemment un sacré tempérament marquant les soignants puisqu’il insista pour que j’acceptasse l’idée que j’avais été très combative dans cette adversité. « C’est drôle, je ne le vois pas du tout comme ça, lui répondis-je dubitative, j’ai plutôt le sentiment d’avoir tout lâché. Il est surtout question pour moi de profiter pleinement de chaque instant et de ne plus rien gâcher désormais ».
Je me souviens notamment d’un appel qu’il passa au professeur de Sèze pour donner de mes nouvelles, nous étions tous heureux de pouvoir en parler à postériori si positivement et je souris grandement en entendant Gilles lui remarquer que je marchais avec des talons. A mes yeux, ce n’en était pas mais je me fiai à son regard de médecin avec bonheur.
Après ce tour général de mon état, de mes progrès et des difficultés trainantes à cet instant, s’entama une conversation sur le traitement de suite. Je fis part de ma demi- surprise puisque j’avais abordé à plusieurs reprises cette question dès lors que la chronicité de la maladie devenait évidente, son incurabilité une réalité suspendue aux progrès de la recherche. Hypothétiquement, cette question pourrait être le reflet de ces dit- progrès sur les quelques mois de ma propre histoire. Ainsi, quand la maladie se fit si virulente que seule la mitoxantrone paraissait adaptée à mon cas, j’avais posé la question ; il me fut répondu qu’avec Devic, il n’y avait pas de traitement puisque les interférons y sont inefficaces ; nous étions fin 2006. Quand les premières perfusions furent mises en place, je reposai la question et Gilles m’expliqua que les traitements d’attaque étaient la seule solution et qu’après eux, je n’aurais plus rien ; une loterie face aux nombreuses interrogations de la médecine face à cette pathologie rare ? Nous étions en janvier 2007. En juillet 2007, il en était autrement, un traitement de suite existait et était à prendre à vie tant que la médecine n’avait pas d’alternative. Alors, ou la médecine a fait des bonds en quelques mois, ou les médecins suivent l’évolution des patients et annoncent au fur et à mesure des constats la suite des événements. Qu’importe, en ce jour, je reçus la première ordonnance de Cellcept avec des indications précises d’entrée en traitement : la première semaine, un comprimé par jour, la deuxième, deux, la troisième, trois et à partir de la quatrième, quatre en durée indéterminée. Gilles m’expliqua également que des prises de sang régulières étaient obligatoires afin de surveiller le sang. Le tableau n’était pas alarmant, au contraire, j’étais ravie à l’idée de ne plus avoir à subir des piqûres, des perfusions et autre intrusion métallique dans mes pauvres veines qui de toute manière n’en pouvaient plus. J’étais confiante et je repartis la tête à la vie qui m’attendait au large des hôpitaux.
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