• Relatif

    Fin février, je sentis venir un rhume alors que l’hiver se passait tranquillement au milieu des éternuements et mouchages d’autrui. J’agis comme à l’accoutumée en prenant mes remèdes sans plus y réfléchir avec l’expérience paradoxale que je suis moins souvent sujette à ce genre de maux banals que d’autres en parfaite santé. Petit à petit, cependant, il s’installa me fatiguant beaucoup car je dormais mal le nez bouché, l’appétit était déconfit, j’étais à plat au point que mes stagiaires ( c’est ainsi que nous nommons les personnes en formation chez nous) m’en firent la remarque. 

    Comme à leurs yeux je ne me soignais pas, je reçus du sureau en sirop et en fleurs séchées pour des tisanes et de la bière ( où infuser les fleurs de sureau) pour des inhalations, je m’y pliai avec plaisir, touchée par ces attentions. Si le mal s’atténua, il n’en resta pas moins tenace et j’eus droit à de nouvelles remarques du souci des stagiaires à mon égard, jusqu’à quelques remontrances ( voir un médecin, se reposer). Je répondais invariablement par “Ce n’est qu’un rhume, ça passera.”, je n’allais pas m’arrêter pour si peu. “De toute façon, tu fais ce que tu veux!” reconnaît fiston. Je continuai donc mon petit bout de chemin. Au rendez- vous de contrôle chez le neurologue, je le lui relatai hilare. Rien de notable de sa part hormis l’augmentation de prise de vitamine D devenue mensuelle sur la nouvelle ordonnance. Un érysipèle l’été dernier éveillait peut- être quelque méfiance envers ce système immunitaire anarchique, je l’ignore ( et oui, je sais, avec mon silence traînant, se loupent de multiples épisodes que je ne prends pas le temps de relater ici!)

    Toutefois, des pensées fugaces prirent de la place dans mon quotidien non parce que je m’inquiétais ou m’en préoccupais mais bien parce que les stagiaires et quelques amis me firent des remarques fréquentes sur mon état de rhume, de fatigue, mon manque d’énergie ou ma triste mine. Pour avoir vécu une expérience puissante dans la maladie au point d’avoir été privée de quasiment tout, pour être marquée du souvenir de s’être sentie quitter la vie petit à petit, je relativise beaucoup. Ainsi, bien des tracas du quotidien me semblent si mineurs que je répète qu’ils sont, au contraire d’un problème, la preuve que je suis vivante et donc, au lieu de m’en plaindre , je m’en réjouirais presque. Où se trouve de ce fait la limite? A partir de quand serait- il judicieux de s’arrêter et de se poser des questions relevant de ce bien précieux qu’est la santé? 

    Certes, j’exerce un métier qui me passionne, que j’aime, qui a du sens et que je juge utile avec une pénibilité moindre par rapport à bien d’autres. J’en reviens mieux qu’avant d’y être allée, j’y suis appréciée tant pour mon travail que pour mes qualités humaines, ce truc en plus reçu par les stagiaires et les collègues au- delà du simple travail pédagogique ou d’équipe. Certes, je suis impliquée dans de nombreuses autres activités sportives ou associatives ( oui, oui, il manque beaucoup d'épisodes par ici pour ceux qui ne me connaissent que par blog interposé, pardon!!) qui ont elles aussi leurs valeurs  soit de victoire sur le handicap, la maladie, soit de conviction profondément ancrées dans mon ensorcellement du mondeMais ce rhume de fin d’hiver aura duré plus de deux semaines et chaque jour, je dus rester vigilante sur une éventuelle dégradation de mon état en quelque sinusite, bronchite, angine, otite.  Le goût fut perdu pendant plusieurs jours ce qui me désole à un point que je ne saurais dire ( Ma mère nous a transmis- à ma soeur et moi- ce plaisir inestimable de choisir ses produits, cuisiner, expérimenter, savourer, déguster et je lui en suis grandement reconnaissante); j’étais véritablement très fatiguée, mes levers réguliers dans la nuit pour soulager une vessie hyperactive et hypersensible n’aidant pas non plus à bénéficier d’un sommeil réparateur. Dans ce contexte, où positionner la limite du banal, du commun à laisser passer? 

    En parallèle, quoi qu’il m’arrive, subsiste constamment le traitement contre cette foutue maladie de Devic qui est, je le rappelle, un immunosuppresseur. Affaiblie par je- ne- sais- quelle- infection- persistante,  j’avale le comprimé quotidiennement, en relevant le paradoxe de cette situation où j‘ingère ce qui va endormir un système immunitaire alors qu’il a besoin de ses ressources pour lutter contre ce microbe, cette bactérie ou ce virus. Ma bonne étoile me donne la chance de diminuer grandement le nombre de comprimés par jour depuis longtemps m’évitant ainsi bien des contrariétés vraiment pénibles à supporter pour vivre une vie à peu près normale, elle n’empêche pas le paradoxe auquel je suis confrontée à chaque souci banal touchant mon organisme ou simplement dans le quotidien. 

     

    Depuis septembre 2009 et la reprise de mon poste à mi- temps thérapeutique, il y a plus 10 ans, je n’ai pris aucun arrêt maladie malgré les rhumes, les infections urinaires, les grandes fatigues, l’accompagnement de ma mère en fin de vie ( Ah si! J’ai pris les trois jours d’arrêt pour décès d’un ascendant). Je pousse la conscience jusqu’à vivre mes “gros” soucis pendant mes congés ou les jours fériés. Sur mon temps libre, je m’active dans plusieurs sports, je marche pour aller au travail, au sport du mercredi, à la pharmacie. Mensuellement, j’anime un atelier bénévole, participe à des Repair Café, envisage la participation à une deuxième association. Chez moi, je couds, tricote, brode, bricole tout en assurant ces foutues tâches domestiques qui me gonflent. Je mesure mes actes, gère la fatigue et avec ma lenteur, j’avance loin par goût de la vie, par volonté d’en savourer les possibilités qui s'offrent à moi car à mes yeux,  il y a urgence à vivre. Je suis consciente et actrice de mes choix, je sais dire non, m’arrêter quand je le sens nécessaire pourtant quand survient un souci banal de santé, constamment revient cette question de limites que j’évalue à l’aune de mes épreuves de 2006. Serait- ce une question d’échelle?

     

    J’en étais là quand survinrent les échos d’un certain coronavirus…

     

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  • Commentaires

    1
    Samedi 25 Avril 2020 à 02:47

    Vous semblez décrire les symptômes de l'infection par Covid-19 : fièvre & perte de goût + grosse fatigue en sont les signes les + évidents. Moi, j'ai cru à une alerte il y a deux semaines : symptômes légers sans perte de goût & état fébrile diffus. Mais envie de me racler la gorge... Ça ressemblait à une Rhin-pharyngite. En fait, cette infection Covid peut avoir cette apparence au départ. En ce qui me concerne, ça n'a pas été + loin : 4 jours avec les sinus & le pharynx un peu irrités puis + rien. Pas de fatigue, pas de fièvre. Chaque année, j'ai une rhino-pharyngite ou une rhinite-sinusite vers cette période de toute façon. Sans doute est-ce juste ça ? Mais peut-être aussi que je suis porteur sain.

    Les recherches continuent sur ce virus. Et peu à peu, on s'aperçoit que ce n'est pas le système respiratoire qu'il attaque mais le système circulatoire (sang + globules + parois des artères), d'où pourquoi le cœur est si sollicité & que l'oxygénation (échange sanguin intra-circulatoire) est si mauvaise, ce qui finit par mettre les poumons en état de stress également. Ce virus, bien que classé dans les virus grippaux, a une manière d'agir tel le VIH, virus du sida : il attaque la paroi des cellules-cibles qu'il vise, en particulier les globules blancs (système immunitaire) comme le sida).

    Portez-vous bien quoi qu'il en soit. 

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