•  L’hospitalisation pour les 2g supplémentaires tombait pile sur le week-end des Eurockéennes pour lesquelles nous avions trois billets, Sandrine, SeN et moi. Le programme nous avait enthousiasmés depuis des semaines : Dépêche Mode !!!  Sans compter Philippe Katerine, Camille et un groupe japonais, Morrissey. Mes amis étaient bouleversés par ce qu'il s'était passé ces dernières semaines et mon état leur semblait incompatible avec une sortie nocturne pour des concerts, je ne l'entendis pas de cette oreille.

    J’entrai à l’hôpital le samedi, pour deux jours en théorie et tâtai le terrain auprès des infirmières, surtout Marie-Jeanne avec qui je sympathisai très vite grâce à une paire de sandales rouges que je portais et qui lui plurent. Je l’avais marquée de suite car attendant un endroit où m’installer (il n’y avait pas de chambre disponible immédiatement), je m’étais assise sur le sol dans le couloir, ne tenant plus sur mes jambes, elle poussa des hauts cris et  ainsi nous fîmes connaissance. Je fus heureuse de constater que, dans cet hôpital, les aiguilles pour installer des perfusions étaient petites et je ne souffris pas comme la première dans l’hôpital précédent. Cela n'a l’air de rien, sur des régulières, tous les mois, c'est loin d'être négligeable. La perfusion était également raccordée à un petit robinet qui permettait de détacher les tuyaux pour la nuit et d’être libérée de la potence, sans avoir à traîner des bidons de glucose ou autre en attendant le produit. De plus,  Gilles avait donné pour consigne d’y aller doucement ( il a tenu compte de ce que je disais, lui ! C’est tout à son honneur), je supportai bien cette fois-ci le traitement.

    Je la jouai fin, l’air de rien, comme je sais le faire. Était-il possible de rentrer à la maison pour le soir et revenir le lendemain matin ? Evidement, il suffisait de signer un papier où je déclarais m’engager à rester tranquillement chez moi… J’avais trouvé là une astuce et depuis ma chambre, je contactai en douce mes amis pour confirmer notre sortie le soir même. SeN hésitait, Sandrine ne savait si c’était une bonne idée, j’insistai et organisai le tout : louer un fauteuil roulant pour la soirée, récupérer le macaron handicapé auprès de ma mère (je n’avais pas encore le mien), caser le garçonnet, se donner rendez-vous et zou, sur les chapeaux de roue ! SeN courut en quête d’un fauteuil et finalement, au soir, nous nous retrouvâmes dans la voiture. Bien sûr, j’avais juré, promis de rester au calme, à la maison en signant le dit- papier, le plus innocemment du monde.

    Je fus heureuse d’être à ces Eurockéennes attendues et espérées, avec mes amis, bien vivante,  pour enfin voir un groupe apprécié depuis des années… Et la maladie ne m’avait pas empêchée d’y être. 

    Nous passâmes une soirée merveilleuse.

    Tout était bien organisé, il y avait des estrades bien placées, nous étions quasiment devant la grande scène, les artistes à peine à quelques mètres, des déplacements faciles sur une route VIP, s’il vous plait, passant à l’arrière du site, sans les lacets et les commerces. Quand la volonté existe, tout le monde a sa place.

      Morrissey a été loupé en partie  pour cause de retard, le concert de Katerine  extravagant, torse nu avec son boa rose, délirant comme il sait l'être, celui de Dépêche Mode puissant avec la mégalomanie et l’égo surdimensionné de Dave Gaham dirigeant la foule en délire, hilarant,    
     Camille virevoltante  au milieu de ce groupe japonais dans des expériences originales sur le plan vocal et musical (elle a chanté en japonais). J’étais déchaînée, je chantai à tue- tête, dansai en sautillant sur le fauteuil comme une folle, tellement vivante… et dopée à fond par la cortisone, qui sait ?
    Entre deux concerts, comme mes amis cherchaient à manger, je me retrouvai seule, tranquillement assise dans le fauteuil. Tout à coup, un jeune homme s’ avança vers moi et me tint ce discours : «  Oh, je peux t’embrasser ? (ce que j’ai accepté). C’est pour te remercier, c’est tellement super que tu sois là. » Il n’était pas ivre et je ne compris pas ce qu’il voulait dire. Je fus pourtant ravie de cet échange fugace car il est à l’image des relations entre humains qui me plaisent, directes, sincères, spontanées. Merci à toi, inconnu.  

     Mes amis purent profiter pleinement des concerts alors qu’ils pensaient tout annuler plutôt que d’y aller sans moi. Pour toutes ces raisons, je ne regrette absolument pas mon parjure ; si c’était à refaire, je le referai, autant pour eux que pour moi.

           Au matin, je retournai à l’hôpital, l’air de rien, sans avouer quoi que ce fût.

    Fatiguée de mes folies nocturnes, je pus allégrement dormir tout mon saoul, la journée n’en passa que plus vite. J’avais tout gagné. Et ce n’est pas fini, ce genre d’escapade, vous verrez… Je ne suis pas souvent appelée folle pour rien. C’est le zeste de fantaisie qui me caractérise. Alors, pourquoi pas ?

     

     

     

     


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  • Ce retour fut des plus pénibles, le désarroi nous étreignait, nous étions perdus. Je ne pouvais pas me tenir assise sans avoir un malaise, passais mes journées allongée sur le divan, ne pouvant rien faire, ne sentant aucune amélioration de mon état; mon entourage était désemparé. Comme je ne pouvais effectuer aucune tâche domestique, ma mère vint tant qu’elle put pour s’occuper de nous quand SeN travaillait. 

    Une première visite de généraliste n’eut guère d’effet positif sur mes malaises, par contre, il m’enleva les fils de l’intervention chirurgicale sur la hanche, laissés là, en passe de provoquer une infection (quel beau travail les mecs !). J’essayais de me renseigner sur la sep, par ci par là et sur cette MNO de Devic portée en conclusion au dernier rapport d’hospitalisation, diagnostic proposé par téléphone par une neurologue de Strasbourg. 

    Devant SeN impuissant, démuni, dans l’impossibilité de décider, je donnais des directions d’action et c’était horrible d’être aussi mal en point en ayant encore à prendre des décisions pour les autres. Face à ma détresse  chaque jour plus grande, alors que je le suppliai de faire quelque chose, il se décida  à appeler le dr. D. afin de lui demander de l’aide. Pour seule réponse, ce cher D. lui conseilla d’augmenter les anti-dépresseurs. Nous étions révoltés et je ne suivis pas ce conseil d’autant que je ne les avais plus pris, en cachette  dès que je sus en avoir sans en être informée. Je ne les  jugeais pas utiles, je ne me sentais pas dépressive et il était hors de question que ce traitement fut la réponse à toutes nos questions. Je me retrouvai effondrée, et décidée à ne plus avoir de contact avec ces gens-là (encore du Brel dans les parages : «Faut vous dire monsieur, qu’avec ces gens-là, on ne vit pas, monsieur, on ne vit pas, on compte. » Je ne pensais pas si bien dire... vous verrez plus tard).

    Le samedi, El. ne supporta plus de me voir ainsi et prit la décision d’appeler le généraliste ; il ne put rien faire, mon cas dépassant ses compétences et préconisa le Samu, les urgences. Les ambulanciers arrivèrent et firent leur travail ; pour eux, ils intervenaient sur une dépression. Je refusai de rester à la maison dans cet état, de retourner à l’hôpital qui m’avait laissée rentrer dans de telles circonstances et demandai à être conduite à un plus grand hôpital, aux urgences, avec tout mon dossier. Je voulais trouver un interlocuteur capable de gérer et la maladie et mon humanité.

    SeN et moi attendîmes quatre heures, le ventre vide, éreintés. Finalement, une jeune médecin s’occupa de moi, m’ausculta et posa les questions usuelles. Je lui montrai mon dossier : « Aidez-nous ! Je n’y comprends rien, nous sommes perdus ». Elle feuilleta les papiers et me lança : « C’est normal que vous soyez perdue, nous (les médecins) on n’y comprend rien ! Il y a des indices qui évoquent la sep et d’autres qui disent le contraire… Je vais contacter un neurologue pour qu’il s’occupe de vous ». Elle a été formidable avec nous, drôle et efficace ; j’ai oublié son nom, son visage, ses expressions, sa voix par contre resteront gravés dans ma mémoire. J’étais soulagée de savoir qu’un spécialiste  prendrait la situation en main.


    Je rentrai dans la souffrance, ce trajet en voiture se révélant abominable, allongée sur le siège rabaissé au maximum et la tête comme prise dans un étau,  la nausée omniprésente, véritable chemin de croix qui dura près d’une heure au côté d’un SeN perdu  face à ma souffrance.

    Quelques jours plus tard, je fus contactée par Gilles, neurologue chargé par son chef de service de s’occuper de mon cas, un rendez-vous prochain fut convenu. Au téléphone, il était mesuré, posé,  j’attendis de voir à qui j’avais affaire. 

    SeN m’accompagna à cette consultation avec tous les papiers en notre possession. J'eus droit aux exercices connus désormais. Toucher mon nez de l’index, les bras tendus ne posèrent aucun problème, longer le mollet avec le talon de l’autre pied fut catastrophique. J’avais perdu de la sensibilité au pied droit, j’étais incapable de dire quel orteil il touchait et dans quelle position il se trouvait quand je fermais les yeux. Pour utiliser une référence commune, je dirais que c’était comme des jambes engourdies, endolories après une mauvaise position sans que les fourmis ne viennent annoncer une amélioration. Au bilan, je croisai mes doigts sous mes bras espérant toujours une nouvelle moins alarmiste que celle entendue jusqu’à ce jour. Gilles regardait les irm en se frottant le menton, il réfléchissait. « La sclérose en plaques est l’hypothèse la plus probable », encore et encore, je ne pouvais y croire. Comme je cherchai les mots dans ma gorge serrée, il me rassura : il n’y avait pas lieu de s’alarmer, cette maladie était contrôlable désormais, des traitements existaient, les personnes en fauteuil étaient malades depuis vingt ans, je pouvais partir en vacances, reprendre le travail et faire un enfant dès récupération. Mes malaises étaient dus aux ponctions lombaires: la diminution du liquide céphalo- rachidien provoquant la descente de la matière cérébrale;  je pouvais me soulager avec du paracétamol, ouf ! Il préconisa une nouvelle irm de contrôle pour mi-août et un complément de cortisone dès que possible, 2g supplémentaires pour être sûr. Nous n’étions pas rassurés, l’avenir semblait tellement sombre et confus malgré la confiance que nous mîmes en Gilles : il nous avaient considérés, écoutés et encadrés humainement ce qui au regard des espériences passées était un cadeau du ciel.  

     


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  • De remuer ainsi la mémoire, il m’est revenu un épisode.

    A la première dose de Solumédrol,  je me mis à gonfler et à rougir exactement de la même façon que lors de mes allergies médicamenteuses. Je m’en inquiétai auprès de l’infirmière qui transmit le message au dr. D.; il me raconta que c’était normal et pendant les trois jours de perfusion, il ne fut absolument pas tenu compte de ma difficulté à supporter le traitement.

    Mes inquiétudes étaient grandes, qui n’en aurait pas eu en de telles circonstances ? Les larmes me montaient facilement aux yeux quand j’essayais de discuter avec les médecins ; ils ne se gênèrent pas d'ailleurs pour noter dans le rapport d’hospitalisation que j’étais particulièrement sensible, que je pleurais beaucoup. Ah oui, quelle patiente pénible ! Elle est secouée par ce qui lui arrive, elle pose des questions, elle est un peu intelligente (c’est une prof qui a fait des études- mais pas autant que médecine, bien sûr), elle ne dit pas amen à tout ce qu’ils disent, elle ne boit pas leurs paroles et ne les vénèrent pas comme des bienfaiteurs ! D’accord, je veux bien croire que j’ai pu mal ressentir nos interactions en raison de ce qui se jouait, purent- ils eux simplement se poser cette question ?

     


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  • Après une dizaine de jours passés à l’hôpital, les médecins m’accordèrent une sortie en fin de  semaine avec obligation de revenir le dimanche soir pour refaire une nouvelle ponction lombaire le lundi matin. Je ne me souviens plus de ce week-end, de ce que j’ai fait, de ce que j’ai pensé. La mémoire fait le tri avec le temps.

    Au retour, j’avais enfin une chambre avec des toilettes et plus de calme. Une jeune fille était installée dans le lit à côté, sa mère et son amie à son chevet. Elles étaient gaies, devisant et défaisant les nattes de la jeune fille. J’avais de la tristesse à devoir affronter de nouveaux examens, les doutes et les questions. Je pleurai dans les bras de SeN; j’avais bien du mal à laisser mes hommes loin de moi. L’infirmière essaya de me réconforter, le médecin de nuit également, mais que pouvaient-ils faire de plus ? Nous savions tous dans quelle situation je me trouvais. Très tôt le matin, la ponction fut faite sans me faire le moindre mal, je pus dormir tranquille ensuite.

    Dans la même semaine, je fus envoyée chez le neurologue pour faire des tests aux niveaux des nerfs optiques (potentiels visuels évoqués) : il me plantait des aiguilles dans le cuir chevelu, je regardais des carrés sur un écran et la machine calculait ; rien à signaler de particulier. Je pris le temps de discuter avec lui afin d'obtenir des informations sur le diagnostic. Dès mon arrivée avec le courrier de ses confrères de l’hôpital, il semblait exaspéré ; il le rejeta même sur son bureau. Il marmonnait : 

    « Mais pourquoi ils s’entêtent avec la sclérose en plaques ? Ils rament, ils rament- Il dit un chiffre de cellules que je ne connais pas- C’est trop bas ; dans la SEP, c’est au moins, x - Je ne sais pas, ce n’est pas mon domaine- Mais il y a tellement de maladies, comment savoir laquelle c’est ? ». Je lui demandai de confirmer que pour lui, ce n’était pas une sep, ce qu’il fit. Il pensait que cet examen n’était pas judicieux et avec ses conclusions, il me donna  la photocopie d’une page d’un de ses livres où se trouvait une liste de maladies neurologiques annotée : «  Sep ? Bof ». Je repartis requinquée, confiante parce que pour moi, je ne voulais pas croire en la sclérose en plaques… Les hésitations et la succession des avis contradictoires m’avaient certainement beaucoup affectée, je ne savais pas à quel saint me vouer.

    A l’hôpital, le dr. D. n’a rien voulu écouter de mes questions ; pour lui, c’était une sep, il y avait de nombreux cas dans sa famille et il savait. 

    Comme je revenais à l’avis du neurologue, il balaya cette idée en expliquant que 99% des maladies avaient été écartées, qu’il ne restait que des maladies rares ou très rares, qu’ils n’y croyaient pas. Ce fut lui aussi qui ne répondit pas aux questions de SeN. Ne sachant que penser de mon état, il était allé le trouver pour obtenir des informations. Le médecin lui ressortit son leitmotiv : « C’est compliqué, c’est compliqué »

    - Mais pourquoi ne la transférez- vous pas dans un service de neurologie ?

    - Parce qu’ils ne feraient rien de plus que nous. 

    Quand nous commençâmes à poser des questions, à chercher des réponses ailleurs qu’auprès de sa science, il ne plus prit le temps de venir me voir, uniquement pour me dire que j’avais une sclérose en plaques, que je prendrais des risques inconsidérés en ayant un autre enfant. Au bout de la semaine, Orlando m’informa que le diagnostic était désormais clair, la sep ; je recevrai des boli de 1g de cortisone par jour, pendant 3 jours. Je posai la question sur la suite, il ne put que me conseiller d’attendre, que seule une deuxième poussée pouvait justifier un traitement de fond souvent lourd. La perfusion fut mise en place avec une grosse aiguille douloureuse et je connus le premier traitement au Solumédrol accompagné de son fameux régime sans sel et sans sucre.. Beuark… J’en attendais beaucoup, ce traitement avait des effets immédiats d’après les médecins.

    Au bout des trois jours, je marchais de plus en plus mal, qu’avec de l’aide et je souffrais de maux de tête. Dr.D. fit ajouter de quoi me soulager et je découvris également que les gouttes que j’avais à prendre étaient des anti-dépresseurs.  Clopinant difficilement dans les couloirs, je cherchai à dire aux médecins qui ne venaient plus, combien mon état se dégradait. Le dr.M. fut décontenancé et ronchonna que normalement, ce traitement était radical, avec des effets immédiats. Je crois bien qu’ils fuyaient confrontés à leurs limites.

    Me sentant de plus en plus mal, je suppliais SeN de me sortir de cet hôpital où je ne voulais plus rester d’autant que Caroline était partie. Une femme atteinte d’un cancer recevant sa chimio, mal en point, était à côté, c’était trop dur. Nous partîmes précipitamment alors que je n’arrivais plus à rester debout, ni à m’asseoir sans me sentir défaillir. Ce fut en pleurs que je cherchai la copie de mon dossier médical, payante qui plus est ; ce fut dans une souffrance physique et psychique que je rentrai à la maison avec le sentiment que c’était loin d’être terminé.


    Caroline est cette jeune fille qui partagea la chambre en cette deuxième période ; nous sommes devenues amies et  liées malgré les distances. Revenue d’Afrique avec une pneumonie, elle connaissait Orlando ; nous constatâmes combien les patients étaient traités différemment selon les copinages par le jeune dr.M. Nous regardâmes ensemble The others tard dans la nuit sur son ordi portable, nous eûmes des fous rires, mirent un bazar très personnel dans notre chambre au grand dam des personnels, nous pestâmes sur la médiocrité des repas. Nos conversations étaient riches et variées, je lui fis passer un oral de préparation pour son diplôme.

    Nous avons partagé, nous nous sommes rencontrées, elle a été un soutien très important. Sa mère m’offrit un magnifique bouquet des fleurs de son jardin que je laissai à grand regret en partant. Caroline a été un véritable rayon de soleil, je lui en suis très reconnaissante.

    Voici en particulier un épisode de nos aventures :

    Le dr. M. faisait sa tournée dans les chambres, il était très prévenant avec la jeune patiente, amie de son supérieur, ne m’accordait que peu d’importance, j’étais le cas compliqué sur une emmerdeuse à la bouche trop ouverte ( les agrumes ) . Je lui fis remarquer que, ne remettant pas en cause leur travail médical, je les invitai à changer d’attitude envers les patients. « Si vous annoncez vos diagnostics comme ça à une personne fragile psychologiquement, elle finira par sauter par la fenêtre. C’est une question de communication, de respect de la personne, de prise en compte de sa globalité, il n’est pas possible de se comporter de la sorte ».  Il sourit d’un air méprisant et tourna les talons en riant sous cape, l’air de me dire « C’est ça, cause toujours » Je le vis prendre la direction de la porte et lui lançai «  Platon a dit que seul l’homme intelligent sait qu’il ne sait pas. ». Sans quitter son sourire narquois, il nous quitta. Caroline éclata de rire, « Bien envoyé ! ». Encore aujourd’hui, je ne regrette pas d’avoir dit ce que je pensais ; la médecine n’est pas une science à machine. Tant pis pour eux s’ils ne comprennent pas; un jour,  ils seront aussi malades, confrontés à leur humanité fragile. Il est compréhensible qu’un médecin se protège des drames de leurs patients,  d’autres, heureusement,  plus tard ont montré des choix différents.

     


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  • Les premiers jours s’installèrent tranquillement et après le week-end de la Pentecôte, je repris le travail. Le trajet en voiture ce mardi matin me posa un réel problème au point que je me dis qu’il était trop dangereux désormais de prendre le volant. Or, sans pouvoir conduire, je me retrouvais très isolée et incapable de travailler au regard de la situation géographique. L’idée d’arrêter mon emploi quelques temps faisait son petit bout de chemin

    Ce mardi matin, depuis le travail, préoccupée, je m’arrangeai pour prendre le temps de téléphoner au neurologue le plus proche, dr. K. Il n’y avait pas de rendez-vous avant quinze jours. J’insistai sur l’urgence en donnant le nom du médecin qui m’envoyait, la secrétaire ne pouvait pas faire plus. Je raccrochai dépitée et les larmes me montèrent aux yeux, j’étais inquiète et perdue dans cette méconnaissance de ce qui se passait en moi. Je contactai Orlando qui se chargea de faire le nécessaire, ce n’était pas à prendre à la légère. Quelques minutes plus tard, il m’ordonna d’aller le lendemain matin chez ce neurologue. J’étais très embêtée, j’avais prévu une épreuve de CAP pour l’un de mes groupes avec convocation à examen et note comptant pour le diplôme. Je m’organisai avec ma mère pour être conduite sur mon lieu de travail ( à 40km de mon domicile) après le rendez-vous du mercredi.  Je rentrai tant bien que mal non sans avoir rassuré les personnes présentes.

    Le mercredi, je pris toutes mes photocopies pour faire passer l’épreuve et nous partîmes chez le neurologue en expédition familiale, grand- mère, mère et enfant. (J'appris par la suite qu’il avait pris sur son jour de repos devant l’insistance de son confrère). J’expliquai encore ce qui s’était passé les dernières semaines ; il me piqua des aiguilles sur les nerfs dans les jambes et les fesses avec sa machine pour faire ses calculs. Il constata une effective difficulté sur les nerfs dont l’origine était située sur L5, S1, les racines sacrées des nerfs. Je le vis bien soucieux, se frottant le menton et réfléchissant en marmonnant pour lui-même : «  Ce peut être une hernie discale, il faudrait une intervention en urgence, est- ce que je dois vous envoyer en urgence en neurochirurgie pour agir de suite ? Et si ce n’était pas ça ? Ils sont tellement surchargés. Il faut faire un scanner, est-ce que vous avez porté du lourd ces derniers temps ? »   Evidemment, je ne pouvais rien lui dire, je n’avais rien fait de particulier dans les derniers mois de cet ordre. Finalement, il se décida à m’envoyer faire un scanner en urgence. Je lui expliquai que j’avais des obligations professionnelles, il m’a répondu qu’il fallait oublier cela pour l’instant. J’entraînai donc toute la troupe à 40km non pour m’y déposer au travail mais pour ce scanner.

    A mon grand soulagement, le radiologue m’indiqua qu’il n’y avait rien sur l’image, ce n’était pas une hernie «  Ouf ! je n’aurai pas à être opérée ». Je retournai presque heureuse chez le neurologue, en avertissant ma direction, par téléphone portable, sur le chemin, que je pouvais être retardée. Finalement, nous décidâmes d’annuler l’épreuve, c’était trop compliqué. Brandissant les images radio au neurologue , je clamai qu’il n’y avait rien de visible ; sa mine se fit encore plus soucieuse : « C’est plus inquiétant alors ». Je sentis les bras m’en tomber, je n’en voyais pas le bout, décidément. Il me dit que je devais aller à l’hôpital le plus proche pour y faire des examens plus approfondis, j’y étais attendue. Quelle déveine !

     Je me retrouvai vite dans une chambre à côté de la salle de travail des infirmières, les mains complètement vides. Un médecin, le dr. D. vint m’expliquer qu’une irm et une ponction lombaire étaient programmées pour le lendemain ainsi qu’une batterie d’examens ; je devais m’attendre à rester quelques jours dans le service. Après lui, ce fut le chef de service, le dr. K. qui partait en vacances le soir même et n’avait pas grand chose à dire, il fallait faire les examens. Je lui dis qu’il connaissait ma mère ; étonné, il changea de couleur quand je lui dis son nom. Il souffla simplement : «  Oh ! Elle a eu beaucoup de chance, il y avait des métastases partout. » J’ai ajouté que nous aussi avions eu de la chance parce qu’elle était encore là. Il m’a laissé avec un peu moins de froideur et je ne l’ai plus revu.  Quelques affaires me furent portées et je cherchai à me rassurer, à rassurer mes proches.

     Au réveil, une infirmière me posa un patch anesthésiant et quelques heures plus tard, le dr. D. vint me faire la ponction. A t-il mal piqué ? Je sentis une décharge puissante très désagréable tout le long du nerf. Il me conseilla ensuite de beaucoup boire, je demandai à quoi ressemblait ce liquide céphalo-rachidien : «  De l’eau de roche ». Avant midi, un ambulancier vint me chercher et nous partîmes encore à 30km pour faire cette irm. Dans la cabine, pendant la séance, je ne pouvais cesser de pleurer. Dans ma tête, cette phrase me poursuivait malgré moi : «  Je vais mourir, je vais mourir ». Je sentais venir la catastrophe, ma vie semblait partir en lambeaux.

    Après le repas pris tard, le dr. D me retrouva dans la chambre. Il s’installa sur la chaise à la gauche du lit et commença son discours que je ne suis pas prête d’oublier :

    " Bien, je suis venu vous voir pour vous faire part des possibilités diagnostics vous concernant: soit vous avez une infection de la moelle, soit une sclérose en plaques, soit une tumeur. Il va falloir avoir une confiance inconsidérée dans la médecine. Des questions ?" 

    J’étais abasourdie, aucun mot ne pouvait sortir de ma bouche, c’était comme si la terre s’écroulait sous moi, comme si tout ce que je portais tombait brutalement. Je n’ai pu que faire non de la tête. Il ajouta que d’autres examens viendraient s’ajouter pour confirmer l’un ou l’autre mais que ces trois hypothèses étaient les seules vraisemblables  Il vit mon livre sur le lit, Le monde de Sophie de Jostein Gaarder, dont je lui avais expliqué le contenu la veille et lâcha un stupide « Et arrêtez la psychologie ! ». Il sortit, me laissant absolument seule ; le chagrin se déversa sans fin. A cet instant, ma mère et ma sœur arrivèrent, elles furent étonnées de me voir ainsi et chacune se plaça à mes côtés, ma mère à droite, ma sœur à gauche. Ma mère me demanda ce qui se passait et entre deux sanglots, je réussis à lui dire les trois possibilités. Elle ne put que me frotter la tête, son expérience de la maladie lui permettait de savoir ce que cela représentait. Ma sœur fut étonnante, elle toujours si négative me remonta en affirmant qu’avec tout ce que j’avais déjà traversé, cette nouvelle épreuve n’avait pas lieu de m’abattre. Mes seules pensées étaient pour mon fils : à 9 ans, il avait encore besoin de moi.  SeN arriva dans l’instant avec quelques affaires, mon patchwork notamment que j’avais demandé pour occuper mes journées. Quand je pus lui dire les trois possibilités, il se rapprocha de moi et souffla «  Je serai là, quoi qu’il arrive ! ». La sincérité se lisait sur son visage, je sus que je pouvais compter sur lui. Nous passâmes quelques heures ensemble, je montrai à mon fiston les images radio en précisant ce qui se passait, que ce pouvait être quelque chose de très grave, que je pouvais mourir aussi. Au téléphone, j’annonçai la nouvelle à El., belle-maman ; c’était un choc pour tous.

    Quand je fus seule, je questionnai un autre jeune médecin, dr. M. pour essayer de comprendre ce qui pouvait être à ma portée. Tous les résultats d’examen étaient là et je cherchai des réponses. Il prit la mouche, montant sur ses grands chevaux, se lançant dans un discours sur la médecine. Comment moi, totalement ignare je pouvais poser des questions ? Quand il me dit qu’il fallait au moins dix ans pour comprendre quelque chose, surtout avec un cas tel que le mien en dodelinant de la tête d’un air méprisant, je levai l’index et d’un ton ferme malgré les larmes qui pointaient, la gorge qui se serrait, je lui rétorquai : « Ah non ! Je vous arrête de suite, cela n’a rien à voir avec la médecine, c’est de la communication ! » Il se rétracta, contrarié et me dit d’une voix morne qu’il demanderait au dr. D. de venir me voir. Hypocrite.

    Les nuits étaient difficiles avec l’agitation des infirmières dans la pièce à côté, je ne pouvais m’empêcher de penser et je sentais mon état glisser doucement vers quelque chose de peu réjouissant : un pied toujours moins mobile, des besoins impérieux, des difficultés à me retenir quand les toilettes se trouvaient à l’autre bout du couloir. J’étais affreusement seule. La lecture ne m’apportait rien, c’était trop passif, n’occupait pas assez mon esprit. J’assemblais mes pièces de patch en écoutant Emilie Simon et son Végétal ; mes mains étaient occupées à quelque chose de concret, la musique m’emmenait dans des sphères intemporelles et immatérielles, loin de la lourdeur du corps et des douleurs de l’esprit.

    Le lendemain, j’eus un prélèvement d’os sur la hanche droite, un autre de moelle osseuse sur le torse. Le dr. D dut appuyer fortement, plusieurs fois sur ma poitrine pour la décoller. J’essayais de ne pas voir, me voilant derrière le drap posé sur mon corps pour la chirurgie, je n’avais pas le choix mais que ces examens me coûtaient. Je retenais mes larmes. En plus, ce ne fut pas très concluant, il n’y avait pas assez de moelle  ce qui est souvent le cas avec des personnes jeunes.

    Que pouvais-je faire d’autre que de prendre patience ?

      Il lui arriva de répondre à quelques questions tout en prévenant que mon cas était très complexe, qu’il était difficile d’être certain à ce stade.

    Les prises de sang se succédaient, sans cesse, les résultats arrivaient, se contredisant les uns, les autres, un indice allait dans le sens d’un diagnostic et le suivant effaçait tout. Je sentais que les médecins étaient embarrassés; poussés dans leurs retranchements, ils ne pouvaient communiquer avec nous. Seul Orlando passait me voir rapidement, de temps en temps, pour évoquer la complexité des recherches, pour parler de ma vie qui basculait, de ce que je faisais et cela avec beaucoup d’humanité et de gentillesse.  Il s’intéressa à mon patchwork, dit son admiration pour cette activité que sa femme pratiquait également… Les deux autres jeunes m’insupportaient avec leur attitude méprisante, hautaine, incapables d’être humains, obnubilés uniquement par la performance de trouver le diagnostic dans un cas très particulier et complexe comme le mien. « C’est très intéressant pour un médecin. » Bla bla bla. Qu’est-ce que j’en avais à faire? Je ne savais pas ce que j’avais, mon état se dégradait lentement et insidieusement, aucun traitement ne m’était proposé. Il eut été préférable qu’ils fassent de la mécanique plutôt que de la médecine, ces deux jeunes p…-c….


    Pensée pour Brel et ses bourgeois 

     

    La semaine suivante, je fus conduite auprès d’une grande neurochirurgienne, à 80km, qui me reçut en consultation de façon toute à fait exceptionnelle. Elle n’avait pas cette morgue et me parla sérieusement, clairement. Elle me fit répéter mon histoire, je rajoutai que les douleurs commençaient à se faire sentir dans la jambe gauche depuis quelques jours, que la marche devenait problématique, avec des troubles de l’équilibre. Elle m’ausculta et regarda les irm, eles étaient trop floues pour être  parlantes.

     - Que vous a t-on dit au juste quant au diagnostic ?

    - Soit une infection de la moelle, soit une tumeur, soit une sclérose en plaques atypique

    - Quoi que ce soit, c’est atypique parce que je n’ai jamais vu ça, j’ai même demandé à mes collègues radiologues de me donner leurs avis. Ils n’ont jamais vu ça non plus. Peut-être faudra t-il ouvrir dans un premier temps pour voir si c’est tumoral… Mais juste pour voir et non pour vous soigner.

    J’ai pleuré et elle a parfaitement compris que j’étais inquiète, elle savait garder ses distances tout en me respectant ; cette femme m’a considérée et je lui en suis reconnaissante. Ce ne sont pas les meilleurs médecins les plus prétentieux, je le découvris à partir de ce jour.

    Retour sans réponse.


    Pendant ce premier temps d’hospitalisation, j’ai eu quelques échanges avec des infirmières dont deux qui étaient élèves au lycée où j’avais été surveillante des années auparavant leur laissant un souvenir positif. Pendant la journée, elles étaient prises par leur travail et le soir, à la nuit nous pouvions discuter. Elles étaient attentionnées et semblaient elles aussi embarrassées. Je me souviens surtout de cette anecdote : revenant d’un examen au loin, je voulais demander quelque chose (un repas je crois), je m’avançais, une des infirmières m’interrogea spontanément « Alors, ça y est ? Ils ont trouvé ce que vous aviez ? Parce que vraiment, ils ne savent pas où ils en sont ! » Evidemment, aucun des jeunes médecins n’avaient été capables d’avouer leurs limites. Merci à elle, elle a verbalisé ce qui était non-dit et pourtant si omniprésent.

     

    En dehors des membres de la famille, je n’ai pas vu grand monde. Ma supérieur hiérarchique ne me lâcha pas, gardant toujours le contact par téléphone, transmettant les messages des uns aux autres. Delphine et Vincent, Babeth ainsi que les deux Sandrine étaient là, à me soutenir de leur présence. L’une d’elle, pas religieuse du tout,  me toucha grandement quand elle évoqua une prière faite à Marie, pour moi, sur un site dans la forêt, près d’une source où elle s’était trouvée par hasard.

    Je sais également que j’ai évoqué ma mort avec certaines parce que je savais qu’avec un cancer des os, je ne vivrais pas très longtemps et je tenais absolument  à ce qu’elles sachent ce que je voulais pour ma fin et la suite de la vie des miens. Je mesure la lourdeur de ces mots, je sais également qu’elles ne m’en voudront pas. Quand l’éventualité d’une mort rapide est présente à l’esprit, bien des préoccupations de la vie tombent et ce qui est éludé par le train- train devient prépondérant, il n’y a plus lieu de prendre des chemins de traverse pour dire ce qui tient à cœur.


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  •   A la fin de ce mois, mon pied droit commençait vraiment à poser  problème tant pour me déplacer que pour conduire. Je me décidai alors  à appeler mon médecin, Colette. Elle me reçut en fin de semaine et me parla d’une sciatique : acupuncture et traitement (elle est acupuncteur homéopathe). Je repartis tranquille en attendant d’aller mieux. Je préparai mes sujets d’examens, c’était bien plus important à mes yeux. Malheureusement, le lundi, je rappelai Colette pour lui dire que mon pied prenait une allure étrange, pendouillant au bout de ma jambe lourdement. Elle ne s’étonna guère pensant qu’une deuxième séance d’acupuncture était nécessaire : rendez- vous le vendredi suivant en fin de journée.

    La semaine se passa en traînant du pied péniblement avec des crampes atroces tout le long de la jambe, et encore ces cauchemars terribles. L’entrevue du vendredi me donna l’espoir d’aller mieux car je commençais à douter de la superficialité de ces maux. Quand je la retrouvai, je lui expliquai que mon pied ne répondait plus et que j’avais des difficultés à le relever, comme s’il était mort.  Elle me fit allonger sur la table d’examen et commença à observer. «  Ca vient du dos ». Je m’exclamai que je n’avais jamais mal au dos. Elle ajouta très sérieuse que je faisais encore quelque chose de vraiment très original (elle me connaît depuis 10 ans). Elle réfléchit, me parlant de voir un neurologue rapidement, de ses vacances qu’elle prenait pour un mois à partir de ce soir-là. Troublée par ce qu’elle avait vu, elle me fit une lettre et prit un rendez-vous chez un confrère de l’hôpital pour le lendemain afin d’avoir un deuxième avis.

    Le lendemain, donc, j’annulai mon cours et me rendis auprès de ce médecin, Orlando. Lui, également fut perplexe et il me dit de voir un neurologue d’urgence. Il m’invita fortement à le faire dès que possible, il ne fallait pas attendre plus longtemps. Sortie de ce deuxième rendez-vous, je sentais poindre en moi des inquiétudes, le sentiment que quelque chose de vraiment mauvais se préparait. Je commençai à marchander : « Qu’on me coupe le pied et que je sois tranquille une bonne foi pour toute ».


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  • Ce n’était pas particulièrement une belle période malgré l’arrivée du printemps et des beaux jours. Je vivais avec le sentiment d’être enfermée dans une pièce sans fenêtre au bout d’une impasse, butant encore et toujours contre des murs. Toutes mes frustrations étaient évacuées dans le travail et le sport, courant et nageant à la moindre occasion pour aller au delà de ce sentiment de cul-de-sac. J’étais fatiguée, en quête d’une solution pour me sortir de cette vie, ne sachant plus où trouver une alternative.

    Ce dimanche, la perspective canapé- télé ne me fit aucunement envie, bien au contraire ; j’ai donc entraîné le fiston dans une petite sortie vélo pour lui, course à pied pour moi en espérant y trouver quelque chose de vivant. Il partit donc en avant sur le chemin, je le suivis en marchant pour m’échauffer, heureuse de sortir de cette maison où je me sentais peu à l’aise.

    Je ne me souviens pas du temps, il ne pleuvait pas. Quand je voulus commencer à trottiner pour rattraper le fiston qui roulait loin devant en m’appelant, je sentis une étrange sensation de fatigue, une incapacité pour mes jambes de porter le corps dans la course, aussi lente soit-elle. Je pensai que je n’étais pas assez échauffée et  repris une marche rapide quelques temps. Je reessayai de trottiner, rien à faire et pestai contre moi même: « Je ne suis donc pas capable de courir ! ». Comme la fatigue envahissait les jambes, je décidai de simplement marcher et le fiston pesta contre ma lenteur. Enervée, je pris la décision de rentrer ne supportant pas mon incapacité à faire ce que je voulais. Calmée, je mis cette fatigue sur le compte de la fin d’année, le stress des déplacements incessants sur les routes pour le travail, les préparations et les tensions d’examen. Rien de spécial quand l’enseignement est son métier. La vie reprit sans que j’attachai plus d’importance à cet échec.

    Quelques jours plus tard, je remarquai avec surprise une petite zone étrange sur le haut extérieur de mon mollet droit. La sensibilité y était semblable à celle de la peau  brûlée par le soleil, sans être rouge. J’en parlai autour de moi et les avis ont fusé : ces non- sportifs étaient tous d’accord pour me dire que j’avais forcé en sport.

    Une semaine passa, deux, trois, Je me sentais très fatiguée et ma jambe commença à me gêner. Des cauchemars apparurent, toujours les mêmes : je suis au bord d’un abîme noir et sans fond, tout au bord, je sens mon corps basculer dans le vide sans que je ne puisse faire quoi que ce soit. Je me réveillai à cet instant en sursaut, tenaillée par une peur peu commune chez moi. 

    Mai arriva et j’étais plus préoccupée de mon travail et de la gestion quotidienne que de ces soucis apparemment anodins. Après tout, je n’avais aucune raison de m’inquiéter, j’avais une santé du tonnerre, une hygiène de vie très saine, pourquoi m’en faire ? En plus, je venais d’avoir ma carte de donneur de sang, j’étais fière, cela me tenait à cœur depuis des années.

     


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