• Avec l'expérience des déménagements incessants et les inévitables  réappropriations des lieux, je compris la nécessité de réfléchir au positionnement des meubles, un agencement bien pensé rendant la vie plus agréable. Ainsi, au déménagement de janvier 2004, j'ai coupé des petites étiquettes de chacun de mes meubles à une échelle pratique et dessiné le plan de notre appartement ; l'effort s'avéra très porteur car cet appartement fut raisonné, pensé, très agréable et équilibré, il était nôtre pleinement.

     

    Bêtement, l'arrivée dans cette maison suscita la même envie. Certes elle était grande, certes nous avions largement la place pour y mettre nos affaires, certes quelques nouveaux éléments pouvaient s'y ajouter. Certes. Toutefois, je pensais que réfléchir à nos modes de vie, nos habitudes, nos centres d'intérêt respectifs pouvait nous conduire à trouver un équilibre, une harmonie entre ces murs. Spontanément, je fis un plan de chacune des pièces à la même échelle que celle des étiquettes de mes meubles et je lui proposais d'y inclure les siens.   Ce fut à peine s'il me rit au nez, «  Mais pourquoi faire ? Ça sert à quoi ? Ça sert à rien ». Dans ma grande innocence, je lui expliquai combien il était judicieux d'y réfléchir, nous avions chacun de notre côte des vies installées, nous pouvions nous éviter des erreurs aux conséquences insidieuses, blabla. Il sourit et refusa mes propositions, gentiment. J'y réfléchis dans certaines pièces où il me laissait libre, « ça m'est égal, fais pour toi. » Cuisine, chambres, atelier, salle à manger. Je lui demandai son avis et nous eûmes quelques accords, beaucoup de rejet. Je me pliai à ces remarques ne voulant pas de conflit pour des broutilles. Les enjeux des pièces prétendument communes, hormis celles déjà évoquées ici et , se jouèrent simplement,  au plus profond de nos êtres, dans la complicité malsaine d'un schéma relationnel pourri dès le départ.

    Côté sud, il y a une longue pièce à grandes fenêtres coupée en son milieu par une léger porche ; après le récit de l'organisation des lieux au temps des grands- oncle et tante, nous convînmes d'un partage entre la salle à manger au plus près de la cuisine et le salon au fond. Mes étagères bourrées de livres, la commode assortie trouvèrent leur place malgré les difficultés liées aux prises de courant, de téléphone, d'antenne. Je me souviens de la friction engendrée par un trou à percer et des câbles à tirer, tout le monde était pourtant concerné par l'utilisation du téléphone et de l'internet.

    Il refusa catégoriquement l'installation de l'aquarium dans la salle à manger, imaginant le pire d'un tel volume d'eau et des odeurs susceptibles d'en émaner (euh... question odeur, la maison bat des records à elle- seule !).  Par la suite, ce choix nous aurait évité de nombreux désagréments quand il fallut installer la chambre en bas ; dormir pendant des mois avec cet aquarium n'a pas été très agréable, j'avoue.

    Une salle à manger étant plus opérationnelle avec table et chaises, je m'interrogeai sur le mobilier à placer entre ces murs. J'avais déjà acheté un bureau assorti aux étagères, bureau dont j'avais rêvé longtemps, bureau que la place et les moyens antérieurs ne m'avaient pas permis. Je me réjouissais de prendre des aises avec l'impression qu'accompagnée, je pouvais enfin me faire plaisir sans craindre le dangereux rouge des comptes, je me réjouissais de partager avec lui ces choix mobiliers. Cependant, il se désintéressa complètement du choix des table et chaises ; j'avais beau lui montrer quelques idées, lui demander ce qui  pouvait nous plaire, il ne s'en occupait pas. Par hasard, à la sortie d'un magasin peu coutumier aux meubles, je vis une table ovale à un prix défiant toute concurrence, je m'en enthousiasmai, lui demandai son avis. « Si elle te plait, fais comme tu veux », je crus y entendre un choix partagé et je l'achetai dans la foulée. Il la chercha, nous l'installâmes et je trouvai plusieurs semaines après des chaises en osier, par dépit dans un catalogue. Deux ans après, j'y ajoutai un vieux tapis en laine que ses parents voulaient jeter et que j'avais nettoyé vaillamment. J'en avais imaginé un autre  mais pourquoi en acheter un quand nous pouvions en récupérer un pour rien ? C'est contre ma nature.  Il rechigna, prétextant que ce n'était pas utile ; le jour où je le roulais pour cause de visite n'enlevant pas les chaussures, il me fit une scène parce que ce tapis habillait la pièce et qu'il ne voulait pas l'enlever (une vraie girouette  bougeant au gré du regard d'autres, grrr).

     Très rapidement, il ne supporta plus mon étalage de machine à coudre et tissus, mon bazar créatif; dans une bonne intention dont je ne doute pas, il se prit à vouloir me faire un meuble spécial  afin que je pusse travailler dans cette autre pièce mal définie au rez- de- chaussée. Il se donna donc cette peine et je me réjouis de cette attention touchante. J'avais désormais un espace clairement défini pour mes activités à bazar ; dans sa cohérence générale, tout débordement extérieur à cet atelier devint une intrusion qui lui tapèrent sur les nerfs insidieusement.

    Au final, dans la salle à manger, les couleurs me déplurent, c'était trop chargé surtout avec ce papier jaune aux motifs dorés (cf. les possibilités des papiers peints), ma tentative de rideaux assortis n'y changeait rien. Était- ce parce que très vite ces lieux devinrent pareillement aux autres le théâtre d'une territorialisation inconsciente des espaces détestable?

    « Je veux un coin à moi ! » clama t-il d'entrée de jeu à l'emménagement, revendiquant le salon. Aveugle et complice inconsciente de notre travers relationnels, je n'y vis aucun problème. Néanmoins, très vite, je m'agaçai. Il posa quelques gros appareils hi-fi et plusieurs paires de haut- parleurs, sa télévision, ses décodeurs, ses magnétoscope et lecteurs divers, le tapis de sa chambre de garçon ainsi que quelques éléments de cette même chambre. Il acheta une étagère sans me demander mon opinion, une table basse et un meuble de télévision dans le même style copeaux pressés recouvert papier clair que je n'aime vraiment pas d'autant que ce sont des meubles de basse qualité, qu'il a les moyens de se payer les meubles qu'il dit aimer (design, genre années 70). Incrédule, j'écarquillai les yeux quand il m'annonça qu'il voulait s'acheter un ensemble canapé-fauteuil en cuir de buffle très carré et foncé.

    Il passa des mois, des mois à traîner dans tous les magasins possibles et impossibles pour tester et chercher LE canapé qui lui conviendrait, celui de ses parents en référence absolue-sauf la couleur. Grrrrrr, qu'est- ce qu'il m'énerva !!! Je n'en pouvais plus de le voir chicaner pour tout et rien, aller- et -venir sans fin. Au bout de plusieurs mois, je lâchai mon agacement et lui dis ouvertement que ce qu'il voulait n'allait ABSOLUMENT pas avec les meubles qu'il avait installés dans SON salon. Il se renfrogna quelques instants sous des airs faussement désinvoltes et finit par acheter un canapé en tissu nettement moins cher et moins décalé d'avec les meubles.  Je n'ai décidément rien compris de cet épisode.

    Au fur et à mesure de la cohabitation, terme des plus appropriés en ces circonstances, ce salon me devint insupportable. Très vite, il me reprocha les affaires que j'y laissai, entre ouvrages à lire et travaux manuels, il reprocha au fiston de s'y étaler, criant et pestant quand nous posions nos pieds nus sur le canapé ou le fauteuil, interdisant la moindre consommation liquide ou solide dans cette pièce... sauf quand nous avions de la visite et qu'il décidait d'y prendre ses apéros ou qu'il y mangeait ses desserts personnels. Il nous reprochait sans cesse de lui abîmer ses affaires, d'avoir cassé une roue de la table basse en nous asseyant dessus, d'avoir tâché son tapis et son canapé, d'être incapables de prendre soin des mobiliers. Je ne comprenais pas quand il laissait entrer ses invités en chaussures alors que je suis de ceux qui ne supportent pas les chaussures à l'intérieur, surtout pas sur les tapis. Y aurait-il des chaussures venues de l'extérieur toujours propres et des pieds d'intérieur toujours sales ? Finalement, je compris que ce qui importe est l'intégration du propriétaire des pieds dans l'univers intime de monsieur, les nôtres éternellement sales, ceux de sa famille (dont forcément nous ne sommes pas) éternellement propres.

    La cerise sur le gâteau arriva il y a peu quand mon désir de quitter cette maison devint une évidence. Par mes revenus, mes possibilités matérielles, je sais pertinemment que dans un appartement à ma portée,  la place risquerait d'être restreinte, certains meubles n'y trouveraient pas leur place, des choix se feraient malgré moi. Je lui parlai des affaires que je risquerais de laisser, des échanges envisageables, de ce dont il pourrait allègrement profiter seul dans ces cinq pièces. Et là, après des années de silence sur le sujet, il m'expliqua qu'il n'aimait ni la table de la salle à manger, ni les chaises, ni le tapis, qu'il ne les avait jamais aimés et qu'il ne voulait pas les garder, je n'avais qu'à me débrouiller.  !!!!!!!!!!!! «  Mais pourtant, je croyais que nous les avions choisis ensemble ? » articulai- je péniblement. «  Et ben non, je t'ai laissé choisir parce que ça te plaisait. ».

    Finalement, la salle à manger est une simple réserve où s'entassent mes  affaires « intellectuelles », elle prend trois ou quatre fois dans l'année un air de fête, le bureau est occupé par son ordinateur et je ne l'utilise pas, le salon est un bric-à- brac  musical  sans style, plus proche de l'entrepôt que du salon, mon garçon et moi n'y passons que le temps de regarder quelques séries télévisuelles ou films de temps en temps. Absence totale de partage et d'ergonomie, les éléments y sont entassés  sans logique. Quand il rentre et nous y trouve, il nous fait comprendre que nous avons à déguerpir, que c'est à lui d'occuper les lieux. Ses soirées et dimanches se passent entre son canapé télé/ écoute musicale et le bureau internet pour chercher des appareils hifi.  fiston et moi nous réfugions dans ce qui est l'atelier case bordel ; spontanément, l'air de rien, désormais, dans les dénominations du fiston, il y a son salon et mon salon...

     

    C'est qui déjà qui sait faire tout ce qu'il faut quand il faut et comme il faut ? Nous  savons depuis belle lurette que ce n'est pas moi. 

     

     


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  • Avant de vous parler des dernières boissons délectables, je tenais à évoquer mes bains de culture inattendus. Lire tel livre, écouter tel disque, voir tel film relèvent d'une démarche réfléchie et mûrie, du moins en ce qui me concerne. Par contre, j'ai eu deux belles surprises ces dernières semaines à qui je souhaite également consacrer quelques unes de mes bafouilles.


    Poésies.

    Par hasard, lors d'une attente dans quelque endroit administratif, je découvris un petit tas de papiers jaunes annonçant une après midi poétique dans la bourgade du coin ; curieuse, affreusement curieuse, je me piquai d'y aller. Je m'y fis donc déposer en catimini, seule et je m'installai à l'arrière de la salle.

    Une association locale de poésie fêtait ses 20 ans d'existence cette après- midi- là, des membres lisaient leurs poèmes accompagnés d'interludes musicaux chantés. Francophone de naissance, je ne compris pas les lectures en dialecte devinant toutefois quelques bribes de ci de là et riant des intonations humoristiques parsemées dans quelques textes. Passés les mignons poèmes sur les oiseaux des vergers et jardins, arrivèrent quelques odes à la région et à l'amour que lui portent ces habitants, terre riche et opulente. Pourtant, la terre qu'ils évoquaient est déjà en perte d'identité : les lotissements fadasses rasent les couronnes de vergers autour des villages devenus simples dortoirs pour les travailleurs multinationaux ; la paysannerie a disparu, les paysages se sont urbanisés, les potagers font place aux gazon et thuyas stériles, la voiture individuelle est devenue la reine absolue des campagnes avec ses ballets pendulaires incessants, les habitants se renferment, derrière leur haie épaisse et haute en été barbotant dans leur piscine privée dont ils parlent , qu'ils ne partagent pas et cachent, derrière leurs murs et portes fermées en hiver ; la communauté villageoise se meurt avec ses anciens. Car oui, ce cercle de poètes était composé de personnes âgées, voire très âgées. Certaines avaient besoin d'aide pour venir au micro, certaines ne parlaient pas français, beaucoup avaient la guerre profondément ancrées dans leur souvenir de jeunesse.  Ils évoquaient la nature, ces paysages ruraux qui leur sont chers et où leurs contemporains ne voient plus qu'un cadre de vie calme loin des horreurs et dangers  de la ville où ils travaillent ou font leurs courses. Ces poètes amateurs étaient touchants dans leur fragilité devant ce temps qui échappe à tous, avec leurs forces inégales, leurs coquetteries surannées, leurs yeux brillants quand ils lisaient leurs textes.  Etonnants furent les poèmes coquins de certaines dames très âgées relatant leurs attributs de jeunesse passés, virant avec la vieillesse.

    Dans le public, il y avait quelques dondons à brillants dorés, quelques écouteurs polis, connaissances en visite et regards lointains, quelques filles ou petites filles armées d'appareils photos, quelques complices riant aux larmes pendant la lecture des textes piquants et drôles, un député faussement discret s'appropriant le verre de l'amitié avec des propos démagogiques sur l'amour du pays et le talent des orateurs, enfin,  de nombreux écouteurs attentifs.

    Sensibles et drôles, qu'ils soient homme ou femmes, ces personnes m'ont touchée et je ne regrette absolument pas cette après- midi passée en compagnie d'anciens  dont certains portaient cette odeur si particulière des vieilles maisons de la région. Alors, même si mon enfance s'est passée dans un tout autre contexte de mentalités,  dans un autre coin, avec d'autres sonorités langagières, j'ai aimé regarder les alentours à travers leurs yeux et non plus à travers ceux d'autres plus jeunes âpres au  gain, aux biens, à la belle surface lisse des apparences bourgeoises, envieux d'une vie à l'américaine prétendument moderne. J'ai aimé trouver ces anciens émus des vergers où volent des oiseaux gourmands guettés par des chats à l'affut, ces prairies où paissent les vaches, ces rires et solidarités d'autrefois. Avec l'âge, les miroirs aux alouettes se ternissent et les esprits  reviennent à l'essentiel, pourquoi pas ?


    Danse.

    Grâce à mon amie Delph, nous sommes allés le 18 avril à un gala dansant et toute l'équipe était de la partie, petits et grands, hommes et femmes. Nous avons grignoté quelques pâtisseries en sirotant eau, soda et café, bavardé avec nos voisins de table et surtout profité pleinement d'un spectacle varié de danses en couple, groupe, individuel.  Entre bal viennois et hip-hop, évoluèrent sous nos yeux des danseurs amateurs, novices ou confirmés, de nombreux champions de France et un couple vice- champion d'Europe.

    Petite, je rêvais de faire de la danse, malheureusement, entre refus et impossibilités financières, ce désir profond resta une grosse frustration (Force est de constater que mes goûts artistiques étaient incompatibles avec les capacités financières de ma mère, boudiou, pas étonnant que je sois révoltée !). Avec l'âge, j'espérais trouver un partenaire pour apprendre les danses de salon, fascinée que je suis devant ces quatre pieds virevoltants de concert sans jamais se heurter. Rien à faire. D'ailleurs, ce soir- là, quelques larmes pointèrent aux coins de mes yeux quand je me souvins subitement d'une promesse au pire de la maladie. Je ne marchais plus, je ne savais pas ce que m'attendait et je pleurai de ne plus jamais pouvoir  apprendre à danser. SeN me promit que nous irions à un cours dès que je serais debout capable de marcher ; j’avais osé y croire.  Finalement, il ne tint pas sa promesse, balayant mes espérances de son  indifférence, son inertie, ses refus.

     Il n'est pas dans ma nature de m'avouer vaincue et malgré mes déséquilibres, ma vessie capricieuse (j'avais prévu la grosse artillerie !), j'ai dansé autant qu'il me fut possible, un bal étant ouvert entre chaque séquence du spectacle. A la frustration de la valse aux pas mal connus et sans tenue, succédèrent une salsa joyeuse avec Delph, une marche antillaise avec SeN, une marche lumineuse avec mon fiston et un apprentissage de mambo avec Vince court- circuité par un pipi urgent et malvenu (grrr, nous y étions presque, punaise !).

    J'ai dansé avant de marcher (article à venir en son temps), c'est dire combien je suis amoureuse de la danse. Cette soirée fut merveilleuse, parce que j'ai dansé, parce que j'ai vu du spectacle, parce que j'étais en bonne compagnie.

    Merci Delph et Vince !

     Et puis mince alors, je finirai bien, un jour ou l'autre par atterrir dans un cours de danse même seule.  


    Evidemment ces surprises n'ont rien à voir avec la grande littérature, l'opéra, les ballets ,  un lieu où se congratulent les grands penseurs, elles n'en restent pas moins porteuses de culture accessible à tous. Entre les petits poètes locaux amateurs et les couples heureux de partager leur passion, les yeux brillaient,  pétillaient. Il n'y a pas que de la culture populaire médiocre et de la culture élitiste pédante  hermétique ; entre les extrêmes, chacun est libre de trouver sa voie. La culture n'est pas un luxe ou un bien de consommation galvaudé, c'est un besoin fondamental de l'être.

       Je finirai aujourd'hui sur cette belle citation de  Bertolt Brecht:


    Pourquoi vouloir dès maintenant nous montrer si intelligents quand nous pourrions tout juste être un peu moins bêtes?


    C'est tellement évident.


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  • Le dernier album de Dépêche mode est sorti en ce début de semaine (l'est déjà complet sur Deezer, Sounds of the universe) et nous l'écoutons en boucle à la maison depuis son arrivée entre nos murs. Comme les précédents, plus je l'écoute, plus je plonge avec délice dans ces univers particuliers entre onirisme éthéré et violence des sentiments profonds plus ou moins contenus. Oui, évidemment, je sais, ce n'est que de la musique ! Très volatile variété dirait- on.

     

    Et pourtant, quoi de plus merveilleux que cette capacité humaine à ensorceler le monde ?

     

    Martin Gore et Dave Gaham ensorcellent leurs univers internes, entre manipulation, sincérité, démagogie, aspiration au profit, recherche artistique et authenticité ;  chacun de nous y transpose son interne et les désapproprie de leurs initiales idées. Dans cette chanson, je m'ingénie à revendiquer mon caractère atypique, singulier en pied de nez  à tous ces biens pensants faisant toujours ce qu'il faut quand il faut et comme il faut  dont je ne suis pas. 

     

     

    Je ne suis pas ce personnage masqué, bouche collée, prisonnier d'une voiture reculant et détruisant aveuglément ; les plus mal placés ne sont pas toujours ceux que l'on croit parce que nous n'avons pas tous la chance d'ouvrir les yeux et de se libérer.

     

    Parce que là où ils ont peur, je marche la tête haute, là où ils voient le gouffre abyssal de leurs pires angoisses, je chemine furtivement, la peur au ventre, toujours en avant, en pleine conscience, VIVANTE et en accord avec moi- même malgré le désespoir, la tristesse, les peines, les blessures, les pertes... simplement pour tendre la main vers ceux qui sont au-delà du gouffre.

     

    Toujours décalée, dans la galère d'une vie tempétueuse tortueuse et rédhibitoire, je vis, j'existe et je suis.

     

    En marchant de travers quand la bonne moralité veut des routes toutes droites, en ouvrant les bras quand la bonne moralité alimente la peur de l'autre, je rencontre de merveilleux humains éclairant mon interne et illuminant mon univers.

     

    Que de merveilleux malheurs pour un vilain petit canard dans un monde magnifiquement ensorcelé!

     (Merci mon ami Boris)


    I was born with the wrong sign
    In the wrong house
    With the wrong ascendancy
    I took the wrong road
    That led to the wrong tendencies
    I was in the wrong place at the wrong time
    For the wrong reason and the wrong rhyme
    On the wrong day of the wrong week
    I used the wrong method with the wrong technique
    Wrong
    Wrong

    There's something wrong with me chemically
    Something wrong with me inherently
    The wrong mix in the wrong genes
    I reached the wrong ends by the wrong means
    It puts the wrong plan
    In the wrong hands
    With the wrong theory for the wrong man
    The wrong lies, on the wrong vibes
    The wrong questions with the wrong replies
    Wrong
    Wrong

    I was marching to the wrong drum
    With the wrong scum
    Pissing out the wrong energy
    Using all the wrong lines
    And the wrong signs
    With the wrong intensity
    I was on the wrong page of the wrong book
    With the wrong rendition of the wrong hook
    Made the wrong move, every wrong night
    With the wrong tune played till it sounded right yah
    Wrong
    Wrong

    Too long
    Wrong

    I was born with the wrong sign
    In the wrong house
    With the wrong ascendancy
    I took the wrong road
    That led to the wrong tendencies
    I was in the wrong place at the wrong time
    For the wrong reason and the wrong rhyme
    On the wrong day of the wrong week
    I used the wrong method with the wrong technique

     

    Depeche Mode

     

    Quoi qu'on en dise, le cheminement des bien pensants m'est utile tout comme le mien leur est utile.


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  • Avec les papiers peints et leurs possibilités (voir ici), j'évoquai déjà la salle de bains. Pourtant, ce ne fut pas le seul révélateur d'enjeux inconscients, les sanitaires devinrent rapidement les prétextes à des scènes effarantes de non- dits, mésaventures entre cuvettes des toilettes et baignoire de bas étages et d'égouts.

    Au sol, le carrelage criait avec le reste de la pièce et j'évoquai l'éventualité de carreler par-dessus.

    - C'est trop compliqué, il faudrait raboter la porte, se casser la tête pour faire le niveau avec le couloir.

    - Il existe des peintures spéciales, il suffirait de les peindre en blanc..

    - Ah, non, c'est du sale travail et ça ferait vraiment bricolage mal fichu. Je vais  poser un lino par-dessus.

    - ola, attention aux joints ! Nous avions fait ça chez ma mère et du coup, l'eau s'est infiltrée dessous, tout a été abîmé sans que nous en apercevions

    - Oh, mais non !

    Il posa son bout de lino, et je m'évertuai à coller les joints en plastique autocollants qu'il ramena peu à peu. J'attendis un an avant d'avoir le tour complet et ce fut encore moi qui m'y coltina tout comme pour le recollage des carreaux décollés du mur (mais bon, c'était derrière l'armoire et personne ne le voyait, donc, pas important pour lui).

    Après les travaux de peinture en 2004, la baignoire se révéla très abimée et sale. L'émail était devenu rugueux, poreux, absorbant toutes les taches, toutes les traces. Fiston et moi, amateurs aléatoires et sporadiques de bain nous y raclions l'arrière train en glissant sur ce fond brut et il m'arriva souvent de m'ouvrir la peau des fesses (et oui, de porcelaine et fine est ma peau délicate). Quelle drôle d'idée avions- nous de nous baigner d'ailleurs ?  La douche suffisait ; « Chez nous, ça fait longtemps que plus personne ne prend de bain ». Blablabla, ils sont la référence absolue dans le savoir- vivre et ce foutu schtroumpf à lunettes nous barbe ! J'ai passé des années de lutte acharnée à chercher des solutions pour la rénover, pour la nettoyer, rien n'y fit. A la brosse, à l'éponge à récurer, à l'éponge fine, à la microfibre, au gel javellisé, à l'anticalcaire, à la poudre, au vinaigre et bicarbonate, au produit en bombe, au produit wc..... j'y ai usé mes doigts et mon dos, EN VAIN ! Poser une autre cuve par-dessus l'ancienne, la repeindre avec des peintures spéciales ? Blablabla, c'est trop compliqué, il faut tout arracher, il faut tout changer... j'enrageais, j'enrageais. Et avec un bébé, je ferais quoi, heim ? Je le baignerais dans cette poubelle ?? Pas de bébé et aucune réaction de personne. Statut quo habituel. 

    Lourdement handicapée par la maladie, la toilette dans la baignoire devint un calvaire puis impossible.  Maud fit sa visite d'ergo pour évaluer les aménagements nécessaires, l'éventualité de refaire entièrement la salle de bains fut proposée avec financement.. «  Tu remarcheras ! » affirma t-il en terme de refus quand ses parents- propriétaires en acceptaient l'idée. Heureusement, j'ai pu retrouver mes capacités motrices après des mois de galère.

    Quatre ans plus tard, une visite d'une de ses tantes fut un déclic. Comme il lui faisait visiter la maison en la présentant si merveilleuse, je me mis en colère. Devant la porte de la salle de bains, il fit barrage afin qu'elle ne vît pas son état. Amatrice des salles de bains, peut être, elle le taquina et entra malgré tout. Je la précédai et fis voler le rideau de douche qu'il avait tendu pour cacher la misère. Coup d'éclat et grosse scène ! Comment pouvais- je me permettre de me comporter ainsi ? Il était outré ; je lui répliquai qu'il n'était nullement gêné de nos bains depuis 4 ans là- dedans, pourquoi se gêner de la montrer ?  Tant pis pour la scène, il m'importait uniquement que ces travaux se fassent par respect pour NOUS TOUS.  A l'été 2008, je partis quelques jours avec mon garçon dans les Vosges et il s'y mit.

     

    Ah, ça, j'ai eu droit à son dur labeur : poncer la baignoire en inhalant les poussières toxiques, poser la nouvelle résine, arracher le vieux lino pourri dessous à cause de l'eau qui s'y était infiltrée (Ah ? Tiens... mais bon,  c'était notre faute étant donné que nous sommes incapables de nous laver sans tout éclabousser), fixer les nouveaux meubles et lavabo, mettre le joint en silicone entre murs et sol, etc.  Il a fait du bon boulot, c'est certain, elle ressemble enfin à une pièce correcte. Cependant, nous étions à peine rentrés que les finitions s'arrêtèrent. Finie la rénovation ! Stoppés le changement des robinets, de la prise de la machine à laver, finie la suite des meubles. Serions- nous un frein à ses entreprises ?

    Plusieurs semaines plus tard, je nettoyais les sanitaires lorsqu'il se mit à juger mes manières : «  Je me casse les pieds à refaire la salle de bains et toi, tu passes ton temps à tout abîmer et rayer ! ». Olala, je suis partie dans une fureur noire ! «  Mais si ça ne te plait pas, pourquoi tu ne le fais pas toi- même ? Pourquoi n'es- tu pas capable de me le dire autrement ?» Grrrrrrrrrrrrrrr

    Evidemment, je me suis renseignée, évidemment j'ai vu que les récurages ne sont pas bons pour les sanitaires et évidemment, j'ai changé mes procédés. A aucun moment, il n'a nettoyé les sanitaires et alors que je suis malvoyante et handicapée, c'est encore moi qui vois les saletés, qui me tords le dos et les mains à frotter avec la microfibre et du vinaigre au bicarbonate.  Là franchement, je me dis que je suis très très conne.

    Les toilettes ne sont pas en reste et couronnent ce tour désastreux des sanitaires. Il y en a deux, une sur le palier avec évacuation dans la fosse sceptique, un autre avec un broyeur dans la salle de bains.

    D'abord, il a enlevé toutes les clefs, arraché le verrou au palier pour que le fiston ne s'y enferme pas en cas de crise (il est colérique ce p'tit, je sais).  Il entre à sa guise dans la salle de bains quand nous y sommes et entre dans une colère noire quand le fiston le dérange alors que ce sont les seules toilettes qu'il lui autorise puisqu'il est soit- disant incapable de tirer la chasse d 'eau comme il faut. Entre intrusion et non respect de l'intimité, il ne reconnait pas ses incohérences contradictoires.

     Longtemps, il a pesté contre le broyeur, cet engin affreux qui moud du caca et du papier plein de pipi,  une horreur pour un obsessionnel d'autant que ses odeurs remontent par la baignoire. Il s'imagine des bourrage quasi intentionnels pour boucher la tuyauterie parce que nous sommes incapables de faire comme il faut quand il faut. . Pourtant, les toilettes du palier posaient un problème tout autant tragique : tirer deux fois la chasse sur une journée et tous les effluves de la fosse remontent dans la maison, nous inondant des odeurs des déjections et eaux sales. Combien de sermons sur l'art de tirer la chasse d'eau furent lancés à l'encontre des enfants ? Combien d'ordres contradictoires à quelques heures d'intervalles nous avons entendus pour permettre la bonne évacuation de nos déjections ? Comment s'étonner finalement que mon garçon finisse par aller uriner dehors ?  Je m'en suis arrachée des cheveux à ne plus savoir où aller, je me suis révoltée devant tant de contradictions : parce qu'en plus, ce sont nos déjections qui puent et non les siennes. Non mais, de qui se moque t- on ? Et je ne vous parle pas des remarques sur mon incapacité à contrôler les allers-et- venues aux toilettes des visiteurs... une belle histoire de merde, je vous le dis !

    Au bout du compte, heureusement que le broyeur était là quand j'allais mal, heureusement que je pouvais entrer dans la salle de bains en fauteuil roulant, heureusement, que je résistais pour continuer à me laver, malgré tout parce qu'il était question de ma dignité.

     Dans cette salle de bains, il me porta, me lava, me déshabilla, m'habilla, me ramassa, me soutint dans des actes peu ragoutants; je voyais dans tous ces actes une abnégation absolue, un d'amour total, les larmes me montaient souvent aux yeux devant ce qu'il supportait et je lui vouais une reconnaissance absolue. Cependant, des mois après les pires périodes de la maladie, l'expérience et les connaissances acquises m'amenèrent à soulever certaines questions pratiques auxquelles nous n'avions pas pensé en ces périodes si dures, solutions qui nous auraient évité, à tous les deux, certaines épreuves douloureuses. Sa réaction me figea de l'intérieur, je réalisai avec effroi que ces gestes d'accompagnement n'avaient pas l'abnégation que je leur prêtai, il voulait seulement contrôler «  pour que tu n'en mettes pas partout ». Ses obsessions étaient -elles donc plus fortes que son affection pour moi ? C'est une baffe des plus mémorables dont je ne reviens pas.

     

     Maintenant, je vais et viens sur deux jambes, mon fils et moi utilisons les toilettes du bas et lui, reste le seul à utiliser les toilettes du palier... parce qu'il est le seul à savoir y tirer la chasse d 'eau, n'y tolérant pas même des invités de passage. La territorialisation des espaces est explicite désormais, pour moi, en tout cas.  Lui s'offusquerait de lire mes ensorcellements .

    Tant de petites anecdotes me traversent l'esprit, je pourrais en relater tant et tant ,finalement, j'en suis fatiguée. A quoi bon ? La territorialisation inconsciente des territoires se conjugue à l'insupportabilité de l'autre.  Nos saletés (celles inhérentes à la vie tout bêtement) sont les marques de notre place sur le territoire et ici, dans cette maison, elles sont devenues rapidement insupportables. J'en arrive à penser que nous sommes tolérés sur le territoire d'autres, qu'inconsciemment, nous sommes des étrangers au clan ; de toute façon,  notre étrangeté est clairement dite et le rejet s'était déjà exprimé avec la terrible gentillesse des bien- pensants sincères croyant faire ce qu'il faut, comme il faut, quand il faut.

    Et merde...

     


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  • Les événements s'accélèrent et je ne suis plus le rythme ! Du coup, les textes se bousculent dans ma tête où grouillent des flots de pensées, je vis pleinement mes ressentis physiques, émotionnels autant dire que chaque jour est une explosion  de vie, d'énergie puissante pas facilement canalisable. Et le temps me manque pour écrire.

      Je résiste encore aujourd'hui afin de rester cohérente, il n'en reste pas moins que le fil de ce blog éclate en des milliers de directions qui ne sont que le reflet de ma réappropriation du monde dans une identité retrouvée tant sur le plan physique, que mental, émotionnel et peut être bien spirituel. Je vais donc vous parler de ce film vu samedi dernier, toute seule.  (quand je vous dis que je ne suis pas consensuelle, héhé).

     

     

     


    L'histoire est très simple, une femme élève seule ses quatre garçons, nés de pères différents et attend un cinquième bébé. Leur vie est dure comme elle peut l'être à Sao Paulo  quand on ne nait pas dans les classes privilégiées. Elle fait des ménages et lutte quotidiennement pour rester digne. Ses garçons se cherchent dans un Brésil où la pauvreté est une réalité quotidienne omniprésente conjuguée  à l'indifférence. Chacun chemine sur sa voie, plus ou moins seul, la vie en famille se réduisant à se croiser dans le tout petit appartement, devant la télévision ou dans la cuisine. Ils n'en restent pas moins  des relations solidaires, jalouses, d'entre aide plus ou moins acceptée, de soutien et de rejet, d'affection et d'incompréhension.

     L'ainé met tous ses espoirs dans le football jusqu'à truquer ses papiers et mentir pour entrer dans une école, le second flirte avec des petits délinquants, tente de gagner sa vie en tant que coursier sur un scooter et hésite entre ses responsabilités de jeune père et ses envies de liberté. Le troisième se fige dans la religion au sein d'un groupe évangéliste, contenant laborieusement sa révolte, sa violence, ses désirs, ses frustrations. Le quatrième, noir, passe son temps dans les bus en quête de son père dont il ne sait rien.

    Misère du Brésil, misère universelle et lutte perpétuelle pour survivre avec l'espoir d'exister, de trouver et justifier sa place parmi les hommes. Quête d'identité et balancement entre espoir et désespoir, révolte et abattement, acceptation et colère.

     Les images sont belles, de cette beauté trouvée dans la misère où il n'y a que grisaille, ciel sombre et saleté, béton et poussières. C'est la beauté des êtres oubliés et ignorés : beauté des visages, beauté des larmes, beauté des sourires, beauté des mains, beauté des corps, beauté des sentiments. Quand la misère n'est pas exploitée pour rassurer les nantis sur leur sort confortable, quand elle est révélatrice de la dignité des êtres à vouloir rester humains malgré les barrières incessamment jetées sur leur route.

     Ce film est tout simplement magnifique.


    Nous étions deux spectatrices dans une grande salle, deux seulement quand la médiocrité remplit les salles à coup de publicité. De loin en loin, nous avons discuté, échangé uniquement avant le commencement car à la fin, ce film m'a laissée collée dans mon siège plusieurs minutes, submergée que j'étais par cette merveille, ce final puissant  où l'élan vers la vie de ces personnages résonne profondément en moi.  En avant !

     Il m'aura fallu plus de 20 minutes pour atterrir, sur le chemin du retour.



    J'étais venue découvrir Sao Paulo où vivent deux de mes amies, Ana et Thatianne, je désirais être plus proche d'elles. Je suis repartie emplie d'humanité, renforcée dans mes pensées sur la communauté et l'universalité des hommes, plus présente encore au sein de notre humanité.

    Ah que j'aime le cinéma alternatif et ces chemins de traverse...


    Ici, l'avis enthousiaste d'un professionnel... (euh, je crois)



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  • Après des mois de marasme familial, la liberté retrouvée de conduire me permet d'avoir des projets. Je retrouve cette imprévisibilité qui me caractérise, cette idée, cette envie de voir, de rencontrer, de prendre le large loin des contraintes quotidiennes qui tuent à coup d'habitude et de ronron soporifique. Ainsi, mercredi dernier, j'ai cherché mon garçon au collège avec deux de ses camarades en raison d'un retard énorme du bus (ils ne seraient rentrés qu'à 14h !). Chemin  faisant, je laissai mûrir en moi cette pulsion d'aller au cinéma avec mon fiston.


     Avant la maladie, nous étions habitués aux séances spéciales visionnant des films d'animation japonais, d'Europe de l'est, français tous plus improbables les uns que les autres, sans oublier les quelques films plus connus avec toutefois la même exigence de qualité. Quelque soit le sujet, je me renseigne toujours sur les critiques avant de me décider à y aller, ma petite culture me permettant également d'avoir une acuité de regard assez juste. Et il y a des films pris pour ce qu'ils sont, une simple rigolade pour faire plaisir.


     Mercredi dernier, donc, j'avais envie d'aller voir Monstres contre aliens, des studios Dreamwork et j'invitai la petite troupe. Nous nous retrouvâmes à trois l'après midi direction le cinéma le plus proche (20 km). Mon garçon n'en revenait pas, abasourdi et rayonnant à la fois, trop heureux des possibilités qui nous revenaient sans avoir à rendre des compte ou se justifier auprès de certains esprits chagrin. Dans ces virées sans Schtroumpf à lunettes, nous nous libérons, nous soufflons, nous respirons librement. Toute petite salle, un paquet de pop corn pour les deux jeunes, nous nous retrouvâmes entre des mères de famille ou des grandes sœurs, tatas et autres femmes accompagnant des enfants. Le film commença.


              Au départ, Suzanne, une gentille et naïve jeune femme se prépare au mariage quand une météorite lui tombe dessus. Lors de la cérémonie,  elle se transforme en géante, explosant l'église et terrorisant tous les invités. Elle est embarquée par l'armée dans un centre ultra secret où elle se retrouve en compagnie d'autres monstres : docteur Cafard, un génial savant fou dont une expérience a mal tourné, une sorte de blob sans cervelle né d'essais chimiques agro- alimentaires, une chenille géante et limitée, un triton bipède pratiquant les arts martiaux. Suzanne est effondrée, recluse et désespérée.

    Débarquent alors des extras terrestres décidés à envahir la terre et éradiquer l'espèce humaine. Aucune arme ne les atteint, aussi, en dernier ressort, les monstres sont envoyés à la rescousse.


    Ce film d'animation est jouissif car les lectures y sont multiples. Les rires dans la salle fusaient d'ailleurs selon la perception de chacun. Les enfants riaient des gags et péripéties  premières, certains adultes d'autres et moi, toute seule, je m'éclatais des allusions incessantes à des films dont beaucoup m'ont certainement échappées tant ce film en est plein. Délires incessants autour de Rencontre du troisième type, Docteur Folamour, Men in black, E.T., La guerre des clones de la saga de La guerre des étoiles, Mars attack, Total recall, sont celles qui me sont apparues clairement. Un peu de ces monstres  géants dans la ville façon japonaise  de ci de  là et tant d'autres que mon ignorance ne m'a pas permis de voir.  Ce décalage incessant était vraiment très drôle. En plus, j'ai trouvé que les bons sentiments et les caricatures habituelles sur les Etats- unis sauvant le monde nous ont été épargnés plus que d'habitude. Restent quelques archétypes sur la découverte de soi, la coopération, la tolérance, les délires sécuritaires de l'armée et les jeux du pouvoir, la mégalomanie, je ne les ai pourtant pas trouvés trop envahissants...


    Avec ou sans enfants, il y a de quoi rire dans Monstres contre aliens. De plus, nous avons passé un super moment qui n'a fait que conforter cette idée récurrente et peu comprise de certains rigoristes préjugeant avec leurs principes :

    Je préfère un bon film d'animation tout public plutôt qu'un mauvais film pour adultes



    Ce film restera un excellent souvenir en soi et parce que c'est le premier que nous sommes allés voir sans dépendre de qui que ce soit, spontanément depuis des années : notre première virée cinématographique autonome depuis des années. Tant pis pour les coincés du principe. Nous, nous avons partagé un instant de plaisir sans prix.

     

     



     


     


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  • Mes péripéties aventureuses et trépidantes se multiplient, ma tête grouille de textes qui nécessitent du temps alors que je n'ai pas tellement envie de rester devant l'ordinateur quand il fait beau, que je peux  jardiner, vadrouiller, me cultiver, respirer, méditer, me nourrir d'air, de vent, de chocolat et autres naturalités essentielles matérielles et immatérielles.

    Je vous envoie simplement ce petit hommage à ceux qui souffrent AFFREUSEMENT en ces fêtes de printemps!

     




    Mangeons les tous !



     


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  • J'avais envie aujourd'hui de mettre deux créations humaines en parallèle. Très lointaines dans le temps, comme dans les circonstances, elles évoquent pourtant pour moi un sentiment personnel.

    Je suis une perpétuelle révoltée contre tout ce qui anéantit la beauté du monde et des humains.je ne me soumets pas à ce qui est stérile, destructeur comme les soit- disant règles de savoirs- vivre et les hypocrisies sociales. Je n'accepte pas les injustices, la vanité de ceux qui se croient être si importants, la lâcheté des bien -pesants. Certainement que mon histoire familiale y est pour quelque chose, je suis descendante d'ouvriers communistes, héhé. Ma révolte ne m'empêche pas de comprendre profondément l'acceptation, la nécessité de se détacher, de prendre du recul, pour réfléchir, pour méditer, se libérer.  Faire le ménage en soi change le monde autour de soi, inévitablement.

    Les bouddhistes tibétains luttent âprement depuis des décennies, subissant la torture et la répression tout en pratiquant la méditation et le détachement. Gandhi a conduit l'Inde à l'indépendance par la non- violence. Je crois en la capacité à changer le monde sans entrer dans la lutte guerrière ou les tractations de bas étages entre politiques avides majoritairement de  pouvoir  et d'importance personnels. Alors, aussi ténu, invisible et ridicule que cela paraisse, je vis mon engagement dans chacun des actes de mon quotidien :

    - Des choix alimentaires réfléchis, écolonomiques

    - A l'homéopathie depuis plus de 10 ans (sauf avec la maladie de Devic, inévitablement, encore qu'elle m'évite de nombreux travers consécutifs aux traitements et séquelles)

    - une vie sobre, non consommatrice des miroirs aux alouettes posés en modèle ou besoins prétendument nécessaires... ce qui est loin de rendre la vie au collège de mon fils facile. Vous rendez- vous compte ? Il n'a aucune affaire de marque, aucun gadget à la mode. J'aime à lui raconter comment Michel Serre explique dans son livre déjà évoqué ici qu'autrefois, les sociétés payaient des hommes pour se promener avec des marques ( les hommes sandwich), maintenant, les gens paient pour porter des marques ( !!!!!) . Il comprend et est plutôt atterré de l'inconscience de ses camarades.

    - la solidarité en règle fondamentale de vie par des petits ou des grands riens, la tolérance et l'ouverture aux autres d'où qu'ils viennent (la multitude, des couleurs, des religions, des nationalités, des milieux sociaux de mon entourage vous étonnerait), le don en toute occasion.

    - Un travail- sacerdoce n'apportant rien de ce que notre société pose en modèle de réussite  mais d'une richesse humaine incommensurable tant  donnée que  reçue


     L'authenticité en toute chose, je vous le dis et voilà pourquoi certains me trouvent insupportable, je suis le reflet de leur incapacité à être authentiques.


    Pourquoi s'agiter, réfléchir, se mettre constamment en danger quand la vie est si rassurante et confortable dans le ron ron d'un quotidien centré uniquement sur la satisfaction immédiate de désirs devenus fades et faciles d'accès par le jeu de la volonté consumériste?

    Parce que je veux pouvoir me regarder en face chaque jour, mourir en me disant que j'ai fait selon ma conscience, mes ressentis et non torturée par les remords de mes lâchetés à cause d'angoisses chimériques ou de peurs délirantes. Parce que je ne veux pas en arriver à dire que je savais et que je n'ai rien fait, tournant la tête ou restant bouche bée les bras ballants.


    Et je me trompe, et ma vie est jalonnée de galères, et je suis dure, et je ne possède pas grand-chose, et je mets souvent mal à l'aise, et certains finissent par me détester, et beaucoup ne me comprennent pas, ...

    Tant pis, parce que je suis VIVANTE et trop nombreux sont ceux qui ont oublié de l'être. Malade, handicapée, sans propriété immobilière, ni belle voiture, ni terre, ni assurance- vie accident ou autres, sans mari, sans chien ou chat, sans écran plat, sans meuble de style, ni vêtements à la mode ( les miens ont une espérance de vie de dix ans en moyenne et en prime, je les recycle quand c'est possible)... je regarde avec compassion ces vies  confortables où s'endorment les consciences, les vies proprettes en surface, ces vies  pleines de vides ouvertes seulement sur les écrans où se jouent les jeux du cirque moderne, les hypocrisies des nantis à faire de la charité quand ils expliquent le plus sincèrement du monde aux moins favorisés ce qui est essentiel dans la vie ou comment travailler sur soi pour sortir de la misère et/ ou des problèmes.


    Bref, je parle encore trop et mes deux créations humaines se font attendre.


    Le premier est pour ne pas oublier nos responsabilités respectives, les liens qui nous unissent qu'on le veuille ou non.

    Le deuxième pour crier que chaque être est important, riche et capable d'enchanter le monde, que personne ne peut être considéré nul ou inutile.


    1.  Texte attribué au pasteur Niemöller, écrit à Dachau en 1942


    Quand ils sont venus chercher les communistes
    Je n'ai rien dit
    Je n'étais pas communiste.

    Quand ils sont venus chercher les syndicalistes
    Je n'ai rien dit
    Je n'étais pas syndicaliste.

    Quand ils sont venus chercher les juifs
    Je n'ai rien dit
    Je n'étais pas juif.

    Quand ils sont venus chercher les catholiques
    Je n'ai rien dit
    Je n'étais pas catholique.

    Puis ils sont venus me chercher

    Et il ne restait plus personne pour protester.

     


    Forcément, je ne peux que continuer à réfléchir et ouvrir ma bouche quand le jeu sournois du bon comportement à avoir est là à se pavaner ou à faire la morale sur ce que chacun DOIT faire ou comment.

    Ouvrir ma bouche pour ne pas être complice de la destruction.


    2.    Björk, Declare independence (attention, ça pulse!)

     

     

     

     


    Declare independence!
    Don't let them do that to you!
    Declare independence!
    Don't let them do that to you!

    Declare independence!
    Don't let them do that to you!
    Declare independence!
    Don't let them do that to you!
    Justice

    Start your own currency!
    Make your own stamp
    Protect your language

    Declare independence
    Don't let them do that to you
    Declare independence
    Don't let them do that to you

    [x4] Make your own flag!

    [x6] Raise your flag! (Higher, higher!)

    Declare independence!
    Don't let them do that to you!

    Declare independence!
    Don't let them do that to you!

    Damn colonists

    Ignore their patronizing
    Tear off their blindfolds
    Open their eyes

    Declare independence!
    Don't let them do that to you!
    Declare independence!
    Don't let them do that to you!

    With a flag and a trumpet
    Go to the top of your highest mountain!

    And raise your flag! (Higher, higher!)
    [x5] Raise your flag! (Higher, higher!)

    Declare independence!
    Don't let them do that to you!
    Declare independence!
    Don't let them do that to you!

    Raise the flag!

     


    Où cours tu ? Ne sais -tu pas que le ciel est en toi ?  écrivait Christiane Singer

    J'ajouterai seulement que nous possédons tous la capacité de faire de nos vies un enchantement, profitable en soi, autour de soi et très très loin.


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  •  Un passager du blog, Philippe  (je suis abonnée au club des Philippe ) l'avait évoqué dans un commentaire, laissant un lien. Affreusement curieuse par nature, non pour contrôler mais par émerveillement devant le monde et les capacités humaines, je partis en visite sur ce blog dans la foulée.

     Les premières impressions furent diffuses, j'avais la flemme de lire tous ces articles et je me cantonnai à cliquer sur un lien vers une vidéo. Je faisais autre chose de mes mains, écoutant d'une oreille le débit de parole de ce petit monsieur de 50 kilos tout habillé et mouillé comme il aime à le dire. Très vite, mes deux oreilles se tendirent, mon cerveau se mobilisa et avec joie, je découvris que mon cheminement n'était pas chimérique, illusoire :

     

    un autre monde est possible.

     

    Un monde où l'homme est à sa place, ni dessous, ni dessus, simplement parmi les siens, en harmonie avec la nature et son environnement, humble et riche de sa puissance à réfléchir sur le sens de l'existence.

    Un monde où les relations avec l'autre sont régies sur la coopération, la solidarité, le respect, où l'autre n'est plus un adversaire à combattre, dominer ou vaincre, simplement un être complémentaire.

    Un monde où la terre est considérée et respectée, acceptée dans ses forces et ses faiblesses.

     Un monde où les hommes sont inscrits dans leur territoire, vivant du jardin qu'ils ont construit en s'adaptant au milieu où ils évoluent, libres et conscients de leur responsabilité.

    Un monde où règne la sobriété heureuse.

    Parce que celui où nous évoluons actuellement fonce droit dans le mur !

    Ici, ou là , par exemple, j'ai évoqué mes interrogations sur la décroissance, mes chroniques alimentaires soulèvent systématiquement la question de notre fonctionnement et de notre relation au monde. Je suis en  réflexion profonde depuis aussi loin que le permettent mes souvenirs.  Une entrevue avec un thérapeute en Allemagne avait été significative : ma vie effarante de tourments et de traumatismes  avait généré en moi pour défense l'envie de comprendre, par bonté et par intelligence. (Excusez du peu, c'est lui qui l'a dit). Je sais également que j'ai traversé toutes les blessures fondamentales de l'humain, la vie ne m'ayant rien épargnée gardant inévitablement en moi cette sensibilité et cette compréhension à l'égard de la souffrance des autres (Mon ami Boris sait si bien l'expliquer ). Reste que je ne suis pas égoïste, que j'ai souvent souffert du profit malsain et/ ou inconscient que certains ont su en tirer à mon dépend.  Seule la maladie a pu me faire prendre conscience de mon importance et de la nécessité à prendre ma place parce que je le méritais. Désormais, je vis avec cette conscience de soi sans pour autant perdre le sens du commun. Je continue ma réflexion et comme par enchantement, c'est en cette période que je découvre Pierre Rahbi. Je vous invite donc à visionner, écouter, digérer cette entrevue et à partager votre opinion.

     

     

     

     

    Quant à moi, je fais ce que je peux en moi, de moi, en pleine conscience de ma responsabilité.  N'étant pas dogmatique je change, évolue, n'hésitant pas à revenir sur des opinions quand elles s'avèrent inappropriées, je ne cesse de m'interroger, de regarder sous une multitude d'angles. Ainsi, dans cette démarche d'agro- écologie, d'humanisme, je pose toujours des questions, notamment celle de la place des personnes incapables de travailler la terre parce que handicapées, malades, faibles ou âgées. La solidarité est certainement prépondérante car chacun a quelque savoir à donner à la communauté humaine, je n'ai pourtant pas encore trouvé de réponse dans les textes de Rahbi.

     Je cherche, je chemine et je suis HEUREUSE de trouver quelqu'un qui montre par les faits qu'un autre monde est possible. Fouillez dans les sites de vidéos, vous trouverez une multitude de conférences filmées de ce petit grand monsieur, il a énormément à nous apprendre,  principalement  de ne cesser de réfléchir sur notre place dans ce monde  de ce que nous voulons réellement comme société humaine.

    Puisse t-il vous éclairer dans votre propre cheminement.

    Avancer, reculer, s'arrêter, rencontrer, accepter, refuser, virevolter

     

     

     sortez du carré 


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  • Subversivement, lentement, l’air de rien, un grand changement s’opère actuellement dans mon petit univers. Faussement insignifiant, il est d’une énergie puissante, révélateur d’une situation interne métamorphosant ma vie. Son récit basé sur des riens n’en reste pas moins long, profond ; il me demande du temps et comme ce blog est écrit selon une ligne d’écriture générale, je me contenterai aujourd’hui de vous raconter quelques faits de ces dernières semaines. Ils sont à replacer dans un contexte dont vous n’avez pas encore toutes les informations, cependant, pour ceux qui ont lu mes aventures depuis le début, ils pourront parfaitement en mesurer la portée.

     

    Il y a trois semaines, j’ai fait 8 km à vélo toute seule, il  y a quinze jours, j’ai pu marcher tout autour du village, seule comme une grande, sans encombre, quatre jours plus tard, tout au long d’un parcours de santé. A raison de trois ou quatre kilomètres peut être à chaque fois, je suis très très contente. Pourtant, ce n’est pas le plus notable, ni le plus remarquable. Une simple mise en bouche.

     

    Le mercredi, normalement, la camionnette boulangerie passe au matin. Pour je ne sais quelle raison, je ne l’ai pas entendue ce mercredi 18 mars. N’ayant plus de pain, nous étions embêtés avec mon fiston. Poussée par une intuition qui me taraudait depuis plusieurs jours, je lui proposai de m’accompagner EN VOITURE à la boulangerie, à 10 km de chez nous. Il avait peur mais comme nous sommes des courageux fous sur les bords (et les bords sont larges, hihi) , nous sommes montés en voiture.

    J’avais déjà conduit sur quelques distances de nuit, avec SeN, sur des routes désertes, histoire de reprendre le pli, simplement pour réactiver une petite sensation de liberté, poussée par des rêves incessants de voiture conduite par d’autres m’emportant n’importe où, n’importe comment, me laissant parfois seule dans un véhicule en pleine course. Dernièrement, j’avais rêvé que j’étais dans une voiture, seule côté passager ; elle allait dans tous les sens, le volant tournant anarchiquement ; agacée par cette situation, je m’étais déplacée derrière le volant et j’avais repris le contrôle de la voiture. Etait- ce un message de mon corps ? un signe ? Toujours est-il que ce mercredi, fiston et moi sommes allés sans encombre à la boulangerie acheter notre pain. C’était une véritable fête, incroyable sensation de s’ouvrir des portes formidables.

     

    Rassurés tous deux, j’émis le souhait de reconduire le dimanche suivant afin d’aller avec mes deux gaillards au parcours de santé dans ce même village. SeN acquiesça et sans encombre, encore, nous arrivâmes à bon port. Décidément, quelque chose de très spécial me chatouillait.

     

    Le 1er avril, nous avions un programme sur plusieurs heures et je voulus reconduire avec SeN à côté. 10 km jusqu’à la première petite ville. Je m’étonnai de ma capacité à voir, regarder, sentir l’environnement, les panneaux, les autres voitures, les piétons, les cyclistes. Des manœuvres près d’une route fréquentée et je repartis, grisée vers une autre ville à 20 km de la première. Peu de circulation, puis un peu plus, un peu plus, je me débrouillai. Quelle surprise de réaliser que je pus voir une voiture aux feux stop éteints ralentir, freiner et s’arrêter devant moi ! C’était incroyable, après des mois et des mois d’enferment, dans la dépendance totale à la bonne volonté des chauffeurs.

     

    Le plus formidable arriva… hier.  Mon garçon finissait à 11h et demanda à ce que je vins le chercher ; il ne craignait donc plus. J’interrogeai SeN sur ma capacité à le faire, il répondit simplement qu’il n’y voyait aucun souci. En plus, cela le déchargeait, il avait prévu une journée de vadrouille pour lui seul ce samedi.  Légèrement craintive, je me préparai donc en m’en remettant à la vie avant de partir. Chemin sans souci, j’avais les yeux écarquillés sur le monde.

     Je récupérai mon garçon dans le hall pour la première fois depuis son entrée au collège puis nous allâmes ensemble faire des courses, rien que nous deux, activité oubliée depuis deux ans et demi.

     Ce fut extraordinaire ! Mon fiston m’aidait en toute chose au point qu’à la caisse, un client s’en étonna. « C’est rare de voir des enfants se comporter ainsi avec leur mère ». Je fus étonnée que ce soit si étonnant puis, je fus fière de nous deux. Pour des personnes soit disant incapables de faire ce qu’il faut comme il faut quand il faut, ce n’est pas mal, non ? Il n’y eut aucun problème, mon garçon s’enthousiasmant d’acheter des légumes, des fruits, des conserves, quelques céréales, des fromages, des yaourts, des jus de fruits…personne pour nous faire la morale ou préjuger de nos choix, un véritable moment de bonheur !  Pareillement, il m’aida à rentrer et ranger les produits, « C’était vraiment une journée exceptionnelle Maman ».

     

    Peut être bien qu’aujourd’hui, nous irons encore plus loin à la rencontre de quelques uns de nos amis et famille. SeN ne refuse  pas de nous emmener, néanmoins, son agacement se fait sentir, son ennui également et nous nous restreignons sans cesse pour nous éviter des remarques faussement insignifiantes. Si nous le sentons dans notre for intérieur, fiston et moi partirons donc sans lui cet après midi faire quelques surprises.

     

    Il est certain que je n’ose pas m’aventurer dans les grandes villes, sur les grands axes très fréquentés, je ne veux pas prendre de risques inconsidérés. Je frissonne cependant à cette liberté retrouvée, depuis ce petit village enclavé où règne en maîtresse absolue la voiture individuelle.

    D’ici quelques jours je passerai un contrôle ophtalmologique et je suis curieuse d’entendre les conclusions du médecin (je vous raconterai les épiques péripéties en ophtalmologie dans un article, à l’occasion, ça vaut le coup !). Viendra alors pour moi le temps du passage au centre de rééducation où sera évaluée ma capacité à conduire. C’est principalement une affaire d’assurance, même si ma vieille voiture n’est qu’assurée au tiers, question de responsabilité.

     

    La vie nous offre ce dont nous avons besoin quand nous en avons réellement besoin. Cette phrase apaise dorénavant mes questionnements et doutes, apportant sérénité et calme en mon cœur. Le temps passé enfermée dans mon propre corps, le temps passé entre les murs de cette maison m’ont obligée à me recentrer sur moi- même, à ne plus courir après ce qui pourrait arriver, venir de l’extérieur dans une quête effrénée vers nulle part.

    J’avais une excellente vue avant la perte, je peux pourtant affirmer que je ne voyais pas ce qui se jouait. Dans le noir, puis dans le flou, ma vue revient lentement, lentement.  Le monde se révèle à moi tout à fait différemment à travers des yeux éclairés, découvrant des couleurs et des lumières extraordinaires, insoupçonnées, des visages aux traits lumineux et neufs, des voies nouvelles. Au fond de moi, je ne pouvais imaginer perdre la vue, goûteuse du monde telle que je le suis. J’ai appris à le sentir autrement, à mobiliser mes sens négligés auparavant, à trouver des solutions concrètes au quotidien afin de continuer à voir. Mes rêves et mes souvenirs ont d’ailleurs toujours été parfaitement clairs.  Je ne me suis jamais résignée à être aveugle.

     Un jour, aussi irrationnel que cela puisse paraître, j’ai exprimé à la psychiatre cette idée «  Je sais que je retrouverai ma vue quand je verrai clair dans ma vie. ». J’ai l’espoir fou d’être au bout d’un tunnel, le monde n’a pas changé, j’ai tellement changé, tout a changé et désormais, chaque jour est un cadeau inestimable que je savoure sans chercher à contrôler quoi que ce soit, ni maintenant, ni demain.

     

    Merci la vie de m’avoir offert cette incroyable expérience qui me rend chaque jour moins ignorante et plus vivante, pleinement en moi, pleinement en toi !

     

     

     

     

     

     


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