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Slumdog millionaire, Danny Boyle
... à Bombay...
en simple avis personnel, sans plus.
Dans un étonnant concours de circonstances, j'ai vu Welcome le samedi après midi et Slumdog millionaire le dimanche soir du même weekend. Inévitablement, le parallèle du hasard a pris une puissance particulière que je ne suis pas prête d'oublier.
A nouveau, j'y suis allée seule, entre le désintérêt de l'un et le renfermement dans la colère de l'autre, c'était préférable après tout. Cette fois-ci, nous étions 23 personnes dans une toute petite salle et je craignais de ne pouvoir profiter du film, sur un côté de rangée et très avant. Heureusement, il n'en fut rien.
Jamal participe au jeu Qui veut gagner de millions ? , son parcours est si brillant qu'il éveille les suspicions. Arrêté et torturé par la police persuadés qu'ils sont de sa tricherie, il raconte son parcours de vie depuis son enfance dans un bidonville jusqu'à ce jour: la perte de sa mère, la débrouillardise avec son frère, la rencontre avec Latika, leurs errances, leurs séparations, leurs retrouvailles contrariées; étrangement, tous les événements de sa vie prennent sens lui permettant de donner les bonnes réponses aux questions du jeu.
Les deux heures de spectacle sont rythmées, émouvantes, brutales, tendues, joyeuses, enrageantes, lucides et belles ; les enchaînements à travers le temps nous mènent dans un voyage incroyable. Cette histoire invraisemblable est une sorte de conte moderne où des archétypes ancestraux se jouent : la dualité des humains, la descente et la lutte acharnée pour remonter, le hasard des circonstances et des rencontres, l'amour bravant les événements, rien de très original d'autant que l'aîné qui avait choisi la voie immorale se sacrifie finalement pour sauver Latika et son frère alors que Jamal constant et intègre réussit.
Néanmoins, j'ai trouvé les lieux du récit particulièrement intéressants, et c'est certainement ce qu'il me restera de ce film. L'Inde entre richesse éclatante et extrême pauvreté, les luttes acharnées du quotidien, les enfants des rues, les bidonvilles, l'insalubrité, le crime, la prostitution, les mille et unes astuces quotidiennes pour survivre. Après avoir vu Welcome la veille, je me demandais si les bien- pensants confortablement installés dans leurs maisons douillettes pouvaient seulement réaliser ce qu'est la misère quand ils se permettent de porter des jugements sur ceux qui la fuient.
Qui sait véritablement ce dont il est capable, qui il est quand il n'a pas été confronté à une épreuve ?
Je ne dis pas que la douleur - qu'elle soit sociale, physique, psychologique - est la seule voie possible dans la connaissance de soi, je pense simplement qu'avant de balancer des idées toutes faites, il est nécessaire de regarder d'abord en soi ce qu'il s'y passe.
En me relisant, je m'interroge également sur ces deux frères livrés à eux- mêmes, orphelins abandonnés de tous, livrés aux affres de la vie et aux profiteurs. Ils semblent être les facettes extrêmes d'une seule humanité oscillant entre quête effrénée, absolue, obstinée permettant de vivre et la voie du jeu avec la mort et les obscurités de l'âme. Mon ami Boris me traverse l'esprit, subtilement. Finalement, nous avons tous le choix d'être, ce sont nos cheminements variables à l'infini qui nous sont montrés dans ce film.
Quelle bestiole incroyable que cet homo sapiens sapiens !
Ce film me fit également cadeau d'une rencontre impromptue : devant la porte d'entrée, j'ai été interpellée par une jeune fille que je ne reconnus pas immédiatement. A ma grande surprise, je retrouvai une ancienne élève croisée quelques années auparavant dans un collège où je donnais des cours à des primo- arrivants. Elle était arrivée du Vietnam à 12 ans, nous avons cheminé quelques temps dans l'apprentissage du français ; je la découvris désormais ravissante jeune femme parlant très bien français et avec un travail.
Elle était accompagnée d'un jeune homme qui tenait un paquet de pop- corn avec un sourire jusque derrières les oreilles, les yeux ébahis de nous voir ainsi dans un échange si chaleureux... Et oui, quand je retrouve une de mes anciennes victimes, nous illuminons tous.
Ma petite Nga, tu as grandi et je suis tellement fière de toi !
Tags : film, frere, seule, jeune, jeu
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Commentaires
J'ai bien aimé ton coup de griffe aux "bien pensants"...
Oui, tous ces gens qui sont là pour donner un avis totalement déconnecté de la réalité que tu vis.
Ca me renvoit à ma propre expérience, j'en rigole (intérieurement). Notre monde est un vrai paradoxe !
On a adulé l'Abbé Pierre, soeur Emmanuelle pour leur engagement auprès des "nécessiteux". On donne son obole à chaque occasion que la télé et les médias nous présentent pour se donner bonne conscience.
On soutient "moralement" le "commerce équitable" (quelle vaste arnaque que ce truc), séduit par le concept... et... on fait crever son voisin en cherchant toujours à payer moins cher ce qui est produit chez nous ! C'est ce qui pousse les agriculteurs dans les faubourgs, pour hurler une dernière fois avant de crever...
Moi, j'ai fermé ma boite faute de rentabilité. C'était toujours plus cher qu'un concurent inconnu. Faute de trésorerie... à cause d'échéances de paiement toujours repoussées.
Et ce sont les mêmes "bien pensants" qui ont dû aller verser une larmichette sur ces films.. eux aussi !
On en est pas à une contradiction près...
D'ailleurs, à propos de contradiction, il n'y a qu'à voir le résultat des Européennes ! Cette droite libérale qui est empêtrée dans une crise financière, bancaire, économique qu'elle a générée a été... très largement plébiscitée ! Va comprendre !
Le syndrome de Stockhom disent certains.
Alors, va pour Stocholm ! (sur mon blog... réssuscité, j'ai une autre version).
Au plaisir.
Ca me laisse méditatif ton article....l'Inde ...je connais un peu....j'y ai passé deux mois il y a très longtemps.....à cette époque il y avait beaucoup plus de misére que de luxe....paradoxalement pas la misére comme on l'imagine chez nous à travers films ou reportages.....pas la misére résignée vindicative et revendicative qu'on peut rencontrer chez nous...non....c'était tout autre chose...j'ai pu me promener de longues heures et à tout moment de la journée dans les immenses bidonvilles de Bombay ou Delhi sans aucune crainte....j'ai pu faire toutes les photos que j'ai voulu sans aucun problème....je n'ai rencontré qu'amabilité et sourires....une énorme joie de vivre....pas de quémandeurs qui t'accrochent plus ou moins menaçants comme j'en ai rencontrés au Maroc.....non....des gens qui n'ont rien mais qui ne se révoltent pas , qui se contentent du très peu qu'ils peuvent récolter.....c'est dans un de ces endroits qu'un gamin m'a couru après pour me rendre le portefeuille tombé de ma poche sans qu'il y manque un centimes....c'est aussi dans un de ces mêmes endroits que je me suis fait royalement arnaquer par un changeur de monnaie à la dextérité d'un illusionniste dans un grand sourire....et dans la bonne humeur...
Chez nous on parle du seuil de pauvreté au-dessous de 700 Euros....et c'est dramatique.....
Chez eux 80% de la population flirtait avec le zéro asolu....dans un joyeux fatalisme..
Je ne sais qu'en penser...je te livre mes réflexions comme elles viennent...sans en tirer de conclusions...4pandoraMercredi 18 Juillet 2012 à 12:07A Annie:
Tu nous raconteras !!
Réponse de fée des agrumes le 16/06/2009 à 22h22Oh oui, comme je suis d'accord avec toi.
Parfois, nous nous obstinons dans une voie en croyant dur comme comme fer qu'elle est la bonne. Nous n'écoutons pas les voix qui nous parlent et bloom, un jour, la claque est là, magistrale.
Le contrôle pourrit la vie et c'est dans le lâcher prise que se trouve le bonheur...
Incroyable de te rencontrer par le net, vraiment!
Réponse de fée des agrumes le 16/06/2009 à 22h26A Philippe:Quelle joie de lire ton blog à nouveau !!
Par contre, je n'ai pas trouvé où mettre des commentaires punaise !!!
Réponse de fée des agrumes le 16/06/2009 à 22h29A Bottle:Que te répondre?
J'ai également déambulé dans des quartiers pauvres d'Istanbul sans crainte avec quelques compagnons moins rassurés; pourtant, nous n'avons eu aucun souci.
Quelques amies de Sao Paulo m'ont raconté comment, au Brésil, il y avait des différences sociales énormes, une grande misère pour certains et malgré cela, tous gardaient la joie de vivre. Elles étaient étonnées de la morosité en France.
Ici, je ne parle que de ce que j'ai vu dans le film, je n'ai jamais été en Inde. Entre le montré et le vu, il y a les milliers de possibilités d'ensorcèlement.
Je reste, pareillle à toi, méditative.
Réponse de fée des agrumes le 19/06/2009 à 20h59A Pandora:Tu nous raconteras !!
Réponse de fée des agrumes le 16/06/2009 à 22h22
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Bonne journée et plein de bises!