• Plat de pauvres


    Cette semaine, en dehors de ce pot-au-feu diurétique dont voici un aperçu en ses plus belles heures, je me suis attelée, comme toujours à faire des repas écolonomiques. Cohabitant avec une personne qui n'a jamais connu la disette et les misères économico-sociales, il n'est pas toujours évident de se comprendre. Quand il fait ses achats aux envies, au mythe du temps gagné en préparation et saleté minimales, je réfléchis chaque repas à ne pas gaspiller, jeter ou consommer déraisonnablement. Nos arts de vivre entrent régulièrement en conflit, enjeux autour de la nourriture sur le pouvoir, le territoire et la place de chacun.


    Rapide compte-rendu des menus de la semaine :


    -       Que faire de restes de riz et d'une tranche de saumon fumé ? ...

    1.     Je mélange de l'eau et  du concentré de tomates, une pincée de sel, du piment de Cayenne, un bouillon et je chauffe. Quand c'est chaud, j'y jette une bonne dose de lentilles corail et le riz. En fin de cuisson, quelques brins de persil plat et voilà  une soupe complète idéale pour le soir.

                                                                                                                       

    2.    Je cuis des épinards en branches avec de l'ail et du sel. L'unique tranche de saumon est coupée en lamelle et mêlée à de fines lamelles d'oignons, de l'ail, du persil plat et une bonne dose de fromage blanc. Servi avec les épinards, ce mélange se marie très bien. Il ne manquerait qu'un peu d'aneth. ( paas de photooooo)


    -       Préparation de lentilles vertes avec des carottes, des  navets et  du poireau, quelques  lardons revenus dans la casserole au départ donnent un petit goût « animal ». (c'est le reste de ces lentilles qui a fini dans la dernière casserole de bouillon, slurp !) et une salade d'endive. Un vrai plat d'hiver, mine de rien. Ne manque que le chou que les gaillards n'apprécient pas, à mon grand désespoir.. en dehors de la choucroute. ( pas de photoooo)


    -       A propos de choucroute, variation en individuel entre la rigolote du fiston jamais en reste pour mettre bonne figure en ses assiettes et la mienne au filet de grenadier du cap. Le bon vin blanc sec se marie si bien avec toutes nos variations : et quel légume est-il plus économique que celui-là ?  D'ailleurs, j'ai rencontré un américain marié à une française née en Suisse qui tous les mois prépare lui-même sa choucroute ! Elle serait tellement meilleure... C'est du boulot et Stéph deviendrait fou avec ce bazar... un jour ça me prendra d'essayer... hihi      Pour finir le chou blanc mijoté tant d'heures, j'ai préparé des quenelles avec 2 farines (épeautre et sarrasin) et j'y ai mélangé la dernière  pomme de terre écrasée comme ma voisine turque fait ses spécialités en ravioles ou galettes.  Ils ont tout mangé sans broncher...     Vous voyez le bonhomme aux yeux de patate et le nez en saucisse?



    -       Accommodement des restes avec des salades de betteraves cuites, de champignons frais et de mâche, des pommes de terre vapeur, le tout servi avec un condiment à l'avocat. J'ai écrasé un demi fruit restant que personne ne mangeait avec de l'ail, une goutte d'huile, du sel. Il a relevé tout le repas. Miam miam. Quant aux betteraves, je les prépare toujours la veille. Râpées avec de l'ail et de l'oignon, elles macèrent dans le vinaigre de vin. C'est une découverte empirique car j'ai remarqué qu'elles étaient meilleures le lendemain. Ma mère, fana de gastronomie m'a appris bien plus tard que les grands chefs les préparaient de la sorte pour leur enlever leur gôut de terre.  H éhé, j'étais fière de moi. 

                                                                   Quelques graines de lin sur la salade, c'est bon !



    -       Escalopes de poulet à cuisson douce au four bien plus onctueuses qu'à la poêle, avec du riz, de la mâche, quelques cubes d'avocat et des haricots verts vapeur. Rien de très recherché mais ça en jette !              


    -       Potée de lapin avec des champignons frais, de la julienne de légumes et du vinaigre de cidre, ail, oignons, bouillon. Mijoté et remijoté, il se bonifie au fil des réchauffages à la casserole. Comme le pot au feu, c'est le genre de plat qui régale les papilles pendant plusieurs jours avec ses accommodements variables. (pas de photoooo)


    Voici enfin, celui qui m'inspira le titre de cet article : le pain perdu.

    Il n'y a pas de boulangerie dans le coin, la première est à 10 kilomètres et je ne peux donc pas y aller à ma guise. Je guette la camionnette deux fois par semaine dans l'espoir d'y trouver les bons pains originaux élaborés par un boulanger à l'imagination incroyable (mon préféré est le pain aux châtaignes et aux figues). J'avais pris un gros pain blanc pour les gaillards la semaine dernière et comme il devenait trop dur, ils l'avaient délaissé au profit de baguettes ramenées de temps en temps. Je ne pouvais me faire à l'idée de  perdre un si gros morceau et je décidai de préparer du pain perdu. J'en avais fait en 6e et je n'avais pas aimé le goût d'œuf trop prononcé; il suffisait de l'adapter à mes convenances. Je mélangeai un seul œuf avec du lait, du sucre vanillé, du sucre complet, j'y trempai les tranches de pain rassi et les fis griller à la poêle avec très peu de beurre. J'étais enchantée par l'odeur avenante quand j'entendis un « Mais qu'est-ce que tu fais encore ? ». Ben, du pain perdu.  Marmonnant dans sa barbe (qu'il n'a pas), il rajouta « Oh, mais c'est un dessert de pauvre ça ». Grrrrrrrr je m'obstinai et achevai la préparation en ajoutant des amandes effilées grillées et un nappage de Pralinoise fondante.....

                                                                     

    Croyez- moi, j'ai presque avalé les cinq tranches !! Et il n'a pas voulu y goûter. Tant pis pour lui. J't'en donnerai moi des plats de pauvres non mais ! Je suis moins prise au dépourvu que lui pour enchanter chaque jour envers et contre tout. (C'est ma méchanceté naturelle qui éclabousse là et je me contiens !)    

                                                                                         


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  • Commentaires

    1
    Je transfère
    Dimanche 11 Août 2013 à 17:59

    Commentaires

    Que "Dieu" fasse que ton "gaillard" de "compagnon" n'ait jamais à se mettre aux "régimes des pauvres".

    Au moins, ces temps difficiles auront au moins servis à remettre au goût du jour les recettes "pleines de bon sens" de nos grands-mères. Mais on s'en serait bien passé.

    A ma "pauvritude" il y a un ingrédient que je n'ai pu sacrifier... (va chercher ton chapelet, l''ail et le gros sel...), c'est... le pos de crème fraîche !
    Depuis la fin de mes gros travaux de reconstruction de la maison, cet usage de matière grasse "riche" me vaut de reprendre un "léger enrobage" mais de toutes façons... quitte à crever - seul - autant s'offrir ces petits plaisirs culinaires.

    Je t'assure qu'une cuilèrée de crème pour déglacer la gamelle de cuisson de l'escalope de poulet... ça fait passer la fadeur de la vie.
    Dans la mesure où il n'y a plus que les yeux de mon chien pour éventuellement apercevoir des bourelets qui vont résulter de ce régime... il est bien trop aveuglé par l'affection pour m'en faire le moindre reproche...

    Bon dimanche...
    P.S. préparer une vraie choucroute... c'est hyper simple, mais... cher au final, car si le choux est "pinuts" la viande... est ruineuse.

    Commentaire n°1 posté par philippe LE QUENTREC le 30/11/2008 à 09h07
    Je crois qu'il y a des personnes qui ne savent pas s'adapter du fait d'avoir toujours connu le confort matériel, ils sont démunis finalement. Je sais également que mon gaillard apprend beaucoup avec moi et mes comportements parfois étranges: lire les compositions, regarder les origines géographiques,   calculer les prix au kilo, chercher des produits de qualité au moindre coût, suivre les saisons... Il n'est évident pour personne de prendre du recul sur soi même et ses habitudes comportementales.
    Parfois aussi, il fait de l'autodérision de façon tellement cynique que je ne sens pas la plaisanterie.
    Ah, la crème fraïche ! J'en garde un souvenir terrible! Quand nous revenions des courses avec ma mère, nous mangions la crème toute fraîche à la cuillère et nous 'n'avions pas le temps de la cuisiner hihi.
    Maintenant, il m'a été conseillé d'éviter le lait de vache alors, je ne la croise que de loin, au hasard des rencontres et toujours avec grand plaisir.
    Pourquoi te priverais-tu de ce plaisir? Il y a manger et se nourrir. Relever chaque jour de délices simples est un enchantement qui nous lie aux autres, présents ou non, ceux qui nous habitent. Un bébé bien traité sans contact affectif, parole ou caresse développe d'abord des troubles du comportement, ne se développe pas physiquement puis se laisse mourir. Nous ne sommes pas des machines.
    Je m'interroge: n'y a t-il pas de lieu de rencontre, d'échange dans ton coin?
    Quant à la choucroute, je ne la fais pas à la cochonaille, je la mange comme n'importe quel légume, souvent avec du poisson, des quenelles maison.C'est un mythe que celui de l'opulente choucroute germanique; le chou a longtemps été le quotidien des pauvres sans vin, avec du vinaigre, du poisson, du blé et ses gruaux, des fèves, des oignons, des raves et navets.
    Bon dimanche.
    Réponse de fée des agrumes le 30/11/2008 à 12h12

    Pour ce qui est de ton "compagnon", probablement qu'avec le temps, "la force des choses" il se mettra à repenser certaines de ses façons de faire et de penser. Je ne suis pas engagé dans le "bio" à tout prix.
    Ma formation agricole me pousse davantage vers une alternative entre le bio intégriste et le productivisme aveugle. C'est ce qui s'appelle "l'agriculture raisonnée" ! Ce qu'il faut quand il faut !

    A propos de lieux de rencontre, d'échange, dans mon pays, il doit y en avoir. Mais... aurais-je suffisamment de points communs avec les gens qui vont ?
    C'est toute la difficulté des relations humaines.
    Le replis sur soi... c'est la déssocialisation en marche...
    Je n'ai jamais été "foule"... sans être agoraphobe, mais conscient de ne pas être comme la majorité... je préfère rester dans mon coin et maugréer sur "la toile."

    Bien à toi.

    Commentaire n°2 posté par philippe LE QUENTREC le 30/11/2008 à 12h30
    C'est un choix de vie alors.
    Réponse de fée des agrumes le 01/12/2008 à 15h55

    Dire que c'est un choix... ce n'est ni totalement exact, ni totalement faux.
    Disons que lorsqu'on voit l'inconpréhension des gens pour les choses qu'ils ne vivent pas... je n'ai plus envie d'aller au-devant.
    J'aurai, de cent fois préféré retrouver une vie "normale", recréer une famille, mais... c'est visblement trop demander aujourd'hui, alors, si c'est pour entendre les fadaises habituelles, dans ce cas, o n peut dire que je fais le choix de la solitude.

    Comme bien d'autres...

    Merci de tes messages ; je vais sur mon blog pour te répondre...

    Commentaire n°3 posté par philippe LE QUENTREC le 01/12/2008 à 16h04
    C' est vrai qu'il est usant de se justifier et d'expliquer à des gens qui de toute façon s'en fichent.
    Réponse de fée des agrumes le 01/12/2008 à 17h23
    Plats de pauvres, plats de pauvres, il en a de bonnes, lui ! Il n'a qu'à te ramener tous les jours du pain frais ! Il verra à la fin du mois la somme astronomique qui sera passée de sa poche à celle du boulanger. Tu as raison d'enrager, chère cousine. En plus, le pain perdu, c'est super-bon, même juste saupoudré d'un peu de cannelle et de sucre roux et cuit au beurre (pas à cette saleté de margarine hydrogénée et pleine d'additifs qui l'empèchent de redevenir de l'huile !) 
    Commentaire n°4 posté par cousinphiphi le 01/12/2008 à 23h33
    Je reconnais bien là mon cousin si gourmand.
     
     
    Réponse de fée des agrumes le 02/12/2008 à 11h16
    Je voulais rajouter un extrait d'un sketch de Coluche qui, en parlant de son père, disait : "on n'a qu'à manger des artichauts, c'est un vrai plat de pauvre. Parce que quand tu as fini de manger, tu en as plus dans ton assiette que quand tu as commencé". En fait il avait raison. A l'occasion, je t'enverrai la recette du plat des pauvres portugais, la soupe aux cailloux, avec son origine.
    Commentaire n°5 posté par cousinphiphi le 01/12/2008 à 23h47
    Je suis impatiente de lire et essayer cette recette!
    Quant au sketsch de Coluche, je m'en souviens très bien, il m'a marquée.
    Etienne connait l'anecdote aussi et nous en rions chaque fois que ous mangeons de l'artichaut !!
     
    Réponse de fée des agrumes le 02/12/2008 à 12h22
    Toutes ces recettes mettent l'eau à la bouche. Je n'ai pas ton inventivité pour accomoder les restes, mais des restes je n'en ai pas pour autant, même si je cuisine simplement. J'ai un peu honte, mais pour ne pas gâcher, soit je termine le plat, soit je congèle... y compris le pain. Une habitude : si un plat peut faire plusieurs repas, préserver tout de suite la partie non consommée.
    Commentaire n°6 posté par Fardoise le 06/12/2008 à 01h45
    Bonjour Fardoise,
    J'ai déjà croisé ce nom au détour des commentaires des blogs que je visite. Bienvenue ici.

    C'est très bien de congeler; à mes yeux, le plus important est de ne pas jeter dans une consommation anarchique irrésolue.
    Réponse de fée des agrumes le 06/12/2008 à 12h44
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