• Le bidon.

     

     

    Ma sœur avait rendez- vous dans cette ville et comme les trains y menant n’étaient guère arrangeants, elle me demanda de l’y conduire. Envisageant quelques  achats par là- bas, j’acceptai en embarquant le fiston ainsi que mon gros bidon de 10 litres.

     

    Voilà de nombreuses années que je n’achète plus d’eau en bouteille. Dans les villages passés, nous nous approvisionnions en eau de source aux fontaines. J’avais alors acheté ce bidon, avec un petit robinet en bas, comme au camping. Je le lave régulièrement, le passe à la javel deux- trois fois l’an pour en chasser les algues. Pareillement, je me procurai un petit chariot pour le transporter quand il était plein et que je m’entêtais à chercher l’eau à pied.

    En déménageant l’an dernier, nous nous éloignâmes des sources habituelles et mon garçon ne se faisait pas à l’eau du secteur issue des robinets. Parce qu’évidement, je ne voulais pas acheter de bouteilles (à part rarement de l’eau gazeuse, 12 en dix mois… dont 5 sont intactes). Profitant des visites à mes anciens voisins, je remplissais mon bidon régulièrement, rusant souvent en substituant l’eau dans la cruche avec celle du robinet coupée au jus de citron, à une pincée de bicarbonate ou simplement mise en carafe la veille.

    Les semaines passant sans projet de retourner dans ce patelin reculé, nous nous retrouvâmes dépourvus en eau de source. L’idée de faire 40 kilomètres pour remplir le bidon ne m’enchantait pas. Aussi, quand ma sœur parla d’aller dans cette grande ville, ma cervelle s’illumina : là- bas, l’eau du robinet est certifiée eau de source ! Peu traitée, contrôlée, il existe des carafes à son effigie. Au début de notre aquarium il y a 12 ans, elle m’était déjà vantée pour ses bienfaits. Pourquoi ne pas profiter de l’aubaine?

     

    Après les quelques commissions, je réfléchis activement à l’endroit où effectuer cette tâche. Sur une place, une fontaine offre l’eau potable mais son accès est long, les quartiers alentours ayant été rendus aux piétons. Je me voyais mal trimbaler mon bidon plein  sur plusieurs centaines de mètres … Ma sœur proposa d’entrer dans la première maison... Boutade… Fiston n’en revenait pas de mon idée et bloquait. La vigilance s’imposait à minima puisque le découpage des zones posait des grandes surfaces facilement accessibles sur d’autres communes environnantes et donc changeait l’eau courante. J’avais envisagé l’hôpital mais il nécessitait un gros détour, ce fut en  tournant autour d’un rond- point que je décidai joyeusement d’aller à l’université.

    Mes compagnons étaient estomaqués par cette idée saugrenue, ils me connaissent cependant suffisamment pour savoir de quoi je suis capable. Dans un joyeux désordre, je me garai derrière la maison de l’étudiant, pas trop loin d’une porte arrière. « Quelqu’un voudrait- il y aller pour moi s’il vous plait ? Je suis fatiguée ». Je ne récoltai que quelques rires nerveux ; ni ma sœur, ni le fiston ne pouvaient imaginer entrer, remplir le bidon à un quelconque robinet et sortir tranquillement sous le regard d’autres. Tant pis, j’y allai d’un pied assuré.

    Mon intuition fut bonne, la porte était ouverte (c’est que je connais les lieux pour les avoir fréquentés à plusieurs reprises, en diverses circonstances). Je longeai le long couloir étroit criblé de portes et m’arrêtai devant la porte des toilettes. Réservées au personnel, elles étaient occupées. Je continuai donc tranquillement mon chemin, passant les portes battantes menant au hall principal. De tout côté, de grandes baies vitrées et une mademoiselle passant là avec, à sa main, un gros bidon vide à robinet. Je le traversai et trouvai d’autres toilettes. J’entrai, rencontrai une jeune femme à qui je rendis le bonjour le plus naturellement du monde et découvris avec joie le robinet des toilettes : il était haut et mobile, je pouvais glisser mon bidon dans le lavabo. Petit rinçage puis  remplissage à gros flots. Ravie, je fermai le bouchon et repartis dans l’autre sens. Dans les bureaux, du monde s’agitait plus ou moins et je passai bonhommement  l’air de rien avec mon bidon de 10 litres plein au bout du bras ; le bas des fenêtres étaient opaques, je n’étais visible que depuis la taille. Un grand sourire aux lèvres, je rejoignis ma voiture où ma sœur m’accueillit en riant, elle pensait que je revenais bredouille. «  Ben non, regarde, c’est plein - répondis- je toute fière- Et personne ne m’a vue ». Elle s’esclaffa, mon fiston l’accompagna, incrédule ; sa mère était vraiment une folle répétait- il, n’en revenant pas de l’expédition. Je jubilai et nous repartîmes tranquillement avec de l’eau pour plusieurs jours.

    Dans la bonne humeur qui régnait, je décidai de relater l’épisode sur le blog et nous commençâmes par élaborer le récit cocasse du remplissage du bidon de 10 litres dans les toilettes de  l’université. Pour conclure, je voulus finir par ce comble : dans le couloir du personnel que j’avais traversé, il y avait, en face des toilettes, une fontaine à eau avec une grosse bonbonne renversée d’eau venue d’ailleurs. Non mais vraiment, quelle idée quand on a la chance d’avoir de l’eau de source au robinet!

     

     


    « Parce que le fric n'est pas LA vie!Nos enfants nous accuseront. »

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  • Commentaires

    1
    Coq
    Mercredi 18 Juillet 2012 à 12:03
    Coq

    Au début, j'ai cru que t'allais parler de ton bidon à toi (ventre). Du coup tout le récit je me suis imaginée, quand tu parlais du bidon, que c'était ton ventre. C'en était encore plus hilarant !

    2
    Je transfère
    Jeudi 15 Août 2013 à 20:41

    Presque du texte par l'absurde finalement!!

    Réponse de fée des agrumes le 10/06/2010 à 11h03
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