• Juillet 2006

    Ce mois se déroula tranquillement après la joie d’avoir pu assister aux Eurock malgré tout. Les vacances d’été étaient bienvenues en temps normal ; là, je tenais à en profiter pleinement pour être d’attaque à la rentrée. Je voulais reprendre le travail: certaines femmes étaient en bonne voie pour apprendre à lire, le groupe préparant le cap petite enfance était à mi-parcours, plus tous les autres, plus mes collègues qui m’attendaient… Mon métier est une véritable vocation et je me rattachai à l’espérance d’y retourner.

    A la doléance de Gilles, j’avais  rendez-vous avec la cadre de santé du service fin août ; explication sur les  différents traitements aux Interférons, choix de l’un et mise en place ; schéma classique pour contrecarrer la sclérose en plaques. Cette perspective avait tout lieu de me rassurer ; cependant, au fond de moi, je gardai des doutes, une incertitude quant aux prochains mois avec ce sentiment omniprésent que ce n’était pas fini. J’essayai de penser à moi, me mesurant en toute chose. Le temps s’écoulait entre les activités quotidiennes au ralenti et mon patchwork qui prenait de l’allure à l’ombre du sapin, dans le jardin.

    Je récupérai à peine, mon état étant seulement stabilisé. Je ne sentais pas les coupures, par exemple et il m’arriva quelques fois de laisser des marques de sang sur mon passage jusqu’à ce qu’un autre remarquât que j’étais blessée. Adepte de la marche pieds nus, je rendais fou SeN qui ne comprenait pas cette obstination . Occasion râtée de monter un  spectacle de fakir.

     

    Avant de sortir de ce pénible mois de juin, j’avais envisagé reprendre contact avec un heilpraktiker français pratiquant en Allemagne et en qui j’ai confiance depuis des années. Reconnu par la Sécurité sociale nationale, les Allemands sont remboursés pour ces soins et consultations, ce n’est pas un charlatan. Il m’avait déjà aidée en d’autres circonstances, je voulais son avis, libre à moi d’en faire ce qu’il me plaisait.

    Lors de la prise de rendez-vous par téléphone, il me parut secoué par la suspicion de sclérose en plaques. A notre entrevue, je lui expliquai les événements des derniers mois; il écouta avec attention et me fit allonger sur la table d’auscultation. Il imposa ses mains, comme il le fait toujours et se concentra. Je voulais de l’aide pour me rétablir, de l’aide pour comprendre ce qui se passait, il chercha. Le travail lui demanda un effort, il me dit qu’il ne sentait pas la sclérose en plaques, à moins qu’elle ne fût toute petite ou cachée. Quelques secondes passèrent et il relâcha la tension. D’un geste d’exaspération, il me balança ces mots : « Dans un premier temps, je vous sens très sereine, pleine de vie et de sagesse et plus je creuse, plus je trouve de la tristesse et du chagrin, du désespoir. Il faut une psychanalyse parce que si vous arrivez à guérir de ça, vous ferez autre chose. Vous exprimez votre souffrance, la souffrance de vos parents et celle de vos grands- parents ! » . Il me conseilla de trouver un thérapeute en France pour une prise en charge puisqu’il était impossible de se faire rembourser pour des soins en Allemagne (l’Europe n’est pas encore au point). Je le quittai avec la conviction que la psychanalyse était une étape nécessaire, inévitable. « Elle ne me guérira pas, elle contribuera à m’aider à vivre mieux ». Dans cette perspective et également pour faire le point, je retournai chez Colette.

    Elle me raconta comment en rentrant de ses vacances, elle avait trouvé la « littérature » (je la cite) me concernant dans sa boite aux lettres et comment elle avait suivi au fil des pages l’évolution de(s) mes aventures hospitalières. Elle fut bien désolée d’entendre mes sentiments sur l’accueil qui m’avait été fait, la façon dont j’avais été traitée dans le premier hôpital. Elle me parla de circonstances particulières, entre un cas particulier et un moment particulier dans la structure même de l’hôpital. Très rapidement, elle me fit part de ses doutes concernant le diagnostic et jusqu’en décembre, elle parla de diagnostic «  peu évident ». Elle prescrivit un traitement d’accompagnement, une ordonnance pour des séances de rééducation, promit de trouver les coordonnées  d’un psychiatre adapté et de faire les démarches pour obtenir l’ald (affection de longue durée). J’espérai  passer  à autre chose: il y avait le voyage en Norvège pour le mariage d’amis, quelques projets de jardinage.

    Je commençai doucement la kiné et la vie se tourna vers nos vacances. Plus d’un fut étonné d’apprendre que je partais envers et contre tout, je voulais absolument que la vie continuât pour toute la famille. Je fis une petite infection urinaire avant de partir que l’homéopathie réussit à soigner. Je me souviens encore parfaitement comment, en préparant nos bagages, j’ai hésité à prendre ce traitement. Pour des raisons stupides, je le laissai à la maison en pensant que je n’en aurais aucune utilité puisque  j’étais soignée.

    Quelques amis vinrent me voir car je ne pouvais pas aller-et-venir à ma guise, d’autres me téléphonèrent pour me soutienir. Nous espérions tous que le pire était passé.

     

     

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