• Eurock humaines.


     Aux Eurock., j’aime l’ambiance bon enfant, le mélange des genres, des générations, y croiser d’autres représentations du monde. Il y a les bourrés, les fumeurs de chichon, de cigarettes, les coincés, les hésitants, les débridés, les discrets, les braillards, les excités, et tant d’autres. Nous y venons avec des intentions diverses, par curiosité, par goût de l’ambiance, par intérêt pour quelques artistes en particulier, pour accompagner, découvrir, partager, s’amuser… Que sais-je ? J’aime regarder la foule, les attitudes, les comportements, je souris devant cette multitude d’individus uniques. De ce flot humain, je ne peux que relater mon propre périple.

     

    Le premier jour, à mon arrivée, mes handicaps invisibles m’ont amené à justifier mes passages en lieux privilégiés avec la carte d’invalidité à chaque porte. Après m’avoir parlé rudement, ils devenaient doux et souriants. J’ai marché tout du long de la voie externe sous la chaleur et suis arrivée sur les rotules au stand d’accueil des handicapés. J’y retrouvai des accompagnateurs de l’an passé ravis de me revoir. Rapide tutoiement, soucis de ma personne, enthousiasme de recommencer l’aventure ensemble. géoletteRetrouvaille également avec la géolette, espèce de pousse- pousse tout terrain très agréable dans ce genre d’expédition parce que nous y sommes plus hauts que sur un fauteuil.

    Vous imaginez- vous assis au milieu d’une foule mouvante ?

    En fauteuil, nous ne sommes visibles que de près et dans la cohue, je suis constamment soucieuse de mon intégrité physique et de celle de ceux qui rencontrent le fauteuil, surtout les repose- pieds.

    La prise en charge aux Eurock est très chouette. En 2008, j’avais promu l’AAL lors de mes pérégrinations accompagnées. En 2009, j’avais entamé l’utilisation de la géolette avec joie;  ce samedi, je suis repartie avec pour un petit tour. Croyez- le ou non, je n’ai pas arrêté d’autoriser les photos, les films, j’ai été interviewée par France Bleue, par un reporter télé au sujet de mon expérience des Eurock au point qu’un gars sur la plate- forme du chapiteau m’a demandé en boutade s’il pouvait avoir un autographe parce que j’étais une vraie star. Ben non, je suis devenue la porte- parole de la géolette. Au journaliste qui me filma, je lançai un « C’est que j’ai besoin d’une maquilleuse aux Eurockéennes  maintenant! ».

    Ma campagne a été efficace... parce que finalement,  dimanche, je n’ai pas pu en bénéficier. Pourtant, que j’étais heureuse de lire le bonheur de ceux qui l’essayaient à leur tour !

     

    Ma vessie a été incroyablement sage le samedi, j’en fus étonnée. Etait- ce parce qu’il faisait tellement chaud que la transpiration moite, permanente de cette lourde journée évacuait mes liquides ? Les toilettes n’étaient pas si nécessaires, tant mieux !  Le dimanche, par contre, elle se révéla plus capricieuse et je passai très souvent aux toilettes (D’ailleurs, j’y faisais le ménage en arrivant et les rendais systématiquement plus propres que je ne les avais trouvées).  Je lui en veux de m’avoir oppressée lors d’une chanson explosive de Mika (je l’ai entendu s’exclamer « Putain, je me suis fait mal au cul ! » Il est tombé je crois). Elle m’empêcha également de danser et sauter sur ses chansons entraînantes. Passage précipité en pestant intérieurement pour me soulager et DSC05750.JPGaprès, je m’en suis donné à cœur joie malgré les déséquilibres et les muscles pas trop contents d’être tout à coup si vivement sollicités : comme une folle, j’ai dansé et sauté, sauté coincée entre d’autres fauteuils plus que bienvenus en cas de perte d’équilibre. Un monsieur notamment à ma gauche s’est beaucoup amusé de me rattraper de temps à autre en me prêtant son épaule. (je suis en orange sur la photo en début de concert). Ma réputation dans notre petite troupe n’était plus à faire, je les avais déjà soufflés en dansant sur El Tambura et Hindi Zahra la veille. Cette jeune fille, amie d’un accompagnateur  partagea ce petit moment joyeux, me déclarant son maître de danse (orientale). C’était génial !

    danse avec moi

    En plus, ce qui est vraiment pratique dans ces spectacles, c’est que le son est tellement fort que je peux péter allègrement sans crainte de gêner qui que ce soit-  c’est à peine si on s’entend causer.    mdr.gif

     

     Le samedi, j’étais venue avec mon panier repas perso me méfiant des stands certes intéressants (cuisines d’horizons multiples) mais dont l’hygiène ne m’inspire pas toujours (cf. l’article suivant à propos des musiciens de Mika, hihi) ; Voyez l’état de ma salade !!! Elle était cuite par la chaleur !!

    Salade cuite

    Le dimanche, je suis allée m’acheter une barquette de saumon norvégien préparé avec du riz, des légumes et une sauce au pesto, miam miam. J’ai décidé de traverser le couloir séparant les stands toute seule, à pied, embarquant le fauteuil en déambulateur. Parce qu’il y a une foule incessante qui va-et-vient là. Au retour, j’ai posé la barquette sur le siège car il ne m’est guère aisé de marcher en tenant quelque chose dans mes deux mains et  il était hors de question que je prisse le risque de faire tomber mon saumon en cas de bousculade involontaire, non mais ! Je suis revenue tout sourire avec cette image cocasse en tête « ça mérite une photo pour le blog », nous nous y sommes repris à trois ou quatre reprises avec mon appareil énervant pour vous montrer la scène.

    PICT2878

     

    A nouveau, j’ai constaté combien la langue des signes est utile dans ces circonstances, j’essayai de suivre les conversations des accompagnateurs bavardant par ce biais dans le vacarme ambiant. J’ai tellement envie de m’y mettre, scrogneugneu ! En plus, j’ai découvert qu’il existait des casques spéciaux pour les malentendants leur permettant de suivre les concerts comme tout un chacun grâce à un système s’adaptant à leur appareil auditif. La technologie là, elle est plus que bénéfique.

     

    Comme les autres années, j’entendis des  réflexions lors de mes déplacements en géolette sur la paresse de l’utilisateur. Ce genre de jugement me fait dorénavant sourire parce que celui qui l’émet est certainement insatisfait de lui- même, de sa fatigue ou autre truc qui lui appartient. La samedi, alors que nous nous rendions à la plage en géolette, un jeune homme coinça la roue gauche de son pied. Nous restâmes tous pendant quelques secondes  interdits devant ce geste, il souriait et nous regardait muet. Je fixai son pied puis levai les yeux vers lui attendant un mot, une explication, curieuse de comprendre. Il n’en eut pas le temps, l’une des accompagnateurs le repoussa fermement agacée. « Non mais c’est quoi ce comportement ! » s’exclama t- elle outrée. Je me demande si ce jeune homme savait pour qui étaient ces géolettes ; situation typique de non- communication.

    J’ai vu des valides utiliser les toilettes pour handicapés constamment ; ma foi, je laisse la place à leur besoin, que me servirait de les rouspéter ou de m’en énerver ?

    Dans la foule, j’étais réconfortée d’être accompagnée lors de mes déplacements  à pied ou en fauteuil. Le terrain est accidenté, la foule mouvante et je ne suis pas rassurée seule dans cette cohue alors que mon équilibre n’est pas fameux ou que mes bras pas musclés forcent sur les roues dans les chemins en herbe ou gravier. Je me sens pleinement vivante entourée par ces attentions et à postériori, je suis atterrée devant toutes ces années passées à me détester, me dénigrer. Qu’est- ce que nous pouvons être stupides nous pauvres humains !

    Mon amie Sabine venue de Norvège pour quelques jours se décida à me rejoindre ce dimanche soir pour quelques concerts de fin de journée ; il nous fut pratique de se retrouver dans cette foule avec les repères que je lui avais indiqués : les plates- formes, le stand d’accueil des handicapés. Faufilée sur la voie externe, elle ne put me rejoindre pour Mika mais s’annonça au stand où mon nom fut reconnu immédiatement, en plus j’y avais laissé mon chapeau. Nous nous promenâmes ensemble sur le site avec le fauteuil en papotant, riant sur la descente de la pente avant la grande scène, elle profita pleinement de Massive Attack depuis la plate- forme et nous rentrâmes heureuses de ce beau souvenir supplémentaire à nos 21 années d’amitié.

    SeN se présenta avant Massiv Attack pour échanger quelques mots, j’étais heureuse de le voir ici mais aucun de ses compagnons que je connais pourtant n’étaient près de lui pour que je les salue, dommage. S’il me déteste pour certaines choses, il sait à qui il a affaire et mon enthousiasme à le rencontrer ne le surprit qu’à moitié.  

     

    Pour conclure sur mon expérience personnelle de ces Eurock, je dirai que j’ai passé un très bon moment en compagnie de ces accompagnateurs souvent adorables et prévenants. Dans ces conditions, je n’ai aucun remord à payer plein pot mon billet. Ces rencontres parfois fugaces me renforcent dans l’idée que nous avons tous les moyens de rendre le monde plus beau, plus généreux ; la bienveillance est véritablement la seule voie possible.  Donner, recevoir, partager. Quel beau programme!  Là-dessus, me passent par la tête toutes les personnes rencontrées depuis 2006, et si après tout c’était moi qui attirais la bienveillance avec mes bras grands ouverts en confiance ? Olala, cela me ramène à tant d’autres épisodes ! Mon univers interne foisonne, j’ai tant à raconter, c’est malin…  

     

    Prochainement, quelques photos en vrac et ensuite, le récit d’un événement très particulier des Eurock 2010.   hausse-les-sourcils.gif

    « Eurockéennes 2010.Reportage pour Ana aux Eurock. »

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  • Commentaires

    1
    Magali
    Mercredi 18 Juillet 2012 à 12:03
    Magali

    En regardant à quoi ressemble cette fameuse géolette, je peux comprendre quelques réactions hostiles. Ca ressemble furieusement à un pousse-pousse, et doit faire resurgir quelques images du temps des colonies. Pousse-pousse, symbole de l'exploitation de l'homme par l'homme, moyen de locomotion des riches tirés par des miséreux. Après, il suffit d'être plus attentif et malin pour comprendre qu'il s'agit d'une aide pour les handicapés, et non d'un moyen de locomotion pour les flemmards.

    2
    fée des agrumes Profil de fée des agrumes
    Jeudi 15 Août 2013 à 21:08

    Tu crois?

    Ces raleurs sont certainement très fatigués de tourner et rester debouts toute la soirée sous la chaleur avec de la musique à toute berezingue! ils rêvent d'être chouchouté eux- aussi.

    Réponse de fée des agrumes le 09/07/2010 à 21h15
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