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Du calme à la tempête.
Ainsi donc, cet été 2009 balança entre nonchalance et balades.
Je savais que c’était une accalmie avant l’agitation de septembre car les événements se préparaient en souterrain.
La rentrée au travail était en marche, loin de moi, par son cours naturel.
Je me préparai à la reprise des cours de Qi Gong.
J’attendais la série des séances de réentrainement à l’effort à l’hôpital pour six semaines avec la joie d’y retrouver Valérie et la possibilité d’y revoir les camarades des dernières années en hôpital.
Depuis plusieurs semaines, j’emballais mes affaires sans savoir véritablement où j’allais ; la quête d’un appartement était en marche depuis plus d’un an et demi (je reparlerai de ces aventures dans un autre article, cela vaut le détour) , je sentais que les limites étaient atteintes, certains deuils s’étaient faits lentement, les derniers liens chimériques s’étiolaient.
Dans le lâcher prise intégré en moi- même, je me laissai porter par les circonstances, cheminement intérieurement loin du mental et des tourments, des peurs.
Il y eut des visites d’appartements, seule, rebondissant incessamment sur les sempiternelles incompréhensions jusqu’à ce que quelques mots d’une assistante sociale fissent écho en mon intuition : cet organisme- là avait signé une convention avec la MDPH (maison départementale des personnes handicapées) et était sensibilisé à la problématique du handicap. Quand je pus visiter l’appartement pour la première fois après moult tractations avec la mère du locataire (et oui, des intermédiaires, des intermédiaires !), j’y allais confiante.
A l’arrivée, je fus enchantée par l’immense arbre planté devant les fenêtres et le banc posé à son ombre, allez- savoir pourquoi, ce fut en ce lieu que je me vis pour les prochains jours ensoleillés. Appartement de trois pièces, 67 m², caves et grenier, au rez-de-chaussée... trois marches à l’entrée, cinq pour accéder au palier, le plain- pied n’y était pas. A l’intérieur, un jeune couple avec des tout-petits, un flottement dans la décision, une colère récurrente contre cet organisme, l’envie de partir et de le contrarier.
Une grande cuisine, un petit salon, un long couloir, des placards immenses aménagés, une salle de bains praticable, des toilettes très grandes, deux chambres aux mesures raisonnables et surtout, un petit balcon par l’arrière où je pensai qu’il était possible d’y aménager une rampe si jamais… Du logement social qui n’y ressemble pas tout à fait avec des pièces posées intelligemment, du parquet et du carrelage au sol, quatre appartements par cage d’escalier, des espaces verts immenses, un alentour propre, accueillant, le calme et la liberté de planter sur les pelouses ses propres fleurs, de laisser son linge et son mobilier de jardin dehors sans craindre le vol.
Etait- ce parce que le soleil était vif ce jour- là ? Mes yeux ne virent que les dimensions et l’agencement des pièces, l’extérieur… aucunement la tâche de rénovation nécessaire pour rendre l’appartement vivant.
J’en visitai un autre quelques jours plus tard, ailleurs, de plain- pied, plus grand et neuf avec une terrasse. Il était beau, ça oui, à quelques minutes du travail, plus cher aussi. Avec vue sur le parking et les garages ; je m’y vis déprimer peu à peu.
Des fuites incessantes liées à une énième infection urinaire me prirent étrangement sur les lieux, ma tête n’était nullement à cet appartement aux multiples aberrations : les chambres étaient trop petites, la porte des toilettes coincée par un lave-main mal placé, la vue close entre route et béton. Tous me rebutèrent.
Mon cœur balançait: l’un m’invitait à le rejoindre avec ses espaces verts ouverts et cet autre accessible cloisonné ; il est vrai que j’avais entendu parler d’une aide au déménagement si le logement était accessible. Que faire ?
Et puis basta, je me décidai pour le premier ! À craindre de me retrouver en fauteuil sans cesse, n’était- ce pas le meilleur moyen d’y revenir effectivement ? Je mis toute l’équipe en branle et le premier septembre, envers et contre toute prévision, je fis l’état des lieux.
J’avais tant hâte de quitter l’autre maison que je ne réfléchissais pas, je ne me fiais qu’à mon instinct. A la veille de la rentrée du fiston dans son nouveau collège, nous nous y installâmes avec une table, quatre chaises, un futon, un micro-ondes pour tout ameublement. L’aventure était lancée dans un désordre incompréhensible pour tant d’autres ; il n’est pas de mon tempérament de choisir la facilité, le confort ou la sécurité quand je me sens emprisonnée, réprimée, restreinte et conditionnée. Je fais partie de ces crétins qui prennent le risque d’être libres sans les barrières rassurantes et protectrices des vies enfermées.
Les dés étaient jetés.
Tags : sans, d’un, d’y, appartement, autre
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Commentaires
Je pense à ces paroles d'une chanson : "A chaque choix on parie contre le sort". Je trouve que ce qu'Annie, Pandora et toi dites de votre choix illustre bien cette phrase ...
Alors ... et maintenant? Y es-tu bien?
Je t'embrasse ;)Je pense que tu as raison de ne pas trop penser aux différents "si" ("si" je suis en fauteuil roulant, "si" ça, "si" ci (sissi l'impératrice Pardon c'est nul ). Pandora et toi parlez d'une épée de Damoclès, mais quand on y réfléchit bien nous l'avons tous, cette épée! On peut avoir un accident de voiture, ou penser être en bonne santé et puis tout à coup être diagnostiqué porteur de telle ou telle maladie, etc etc. Donc si on vit qu'avec des "si", on devient vite "si"phonné
4pandoraMercredi 18 Juillet 2012 à 12:05
Sauf qu'avant ma sep, je rêvais de duplex et ne voulait surtout pas de rdc...
J'ai hésité, beaucoup, visité et aimé un duplex au troisième sans ascenseur et failli le prendre, mais ça ne s'est pas fait en dernière minute et j'y ai vu un signe que ce n'était pas le bon (je prenais quand même beaucoup de risque, même pour une poussée temporaire)
J'ai finalement trouvé un duplex au premier sans ascenseur, un risque calculé puisqu'au pire je pourrais habiter temporairement le premier niveau en cas de souci, mais une quinzaine de marches à monter tout de même, pour accéder à mon appart, qui pourraient poser probème.
Je ne veux pas que la sep dirige, déjà, ma vie.A Annie:
La joie de vivre transpire à travers moi, dans mon corps, ma voix, ma présence, je l'ai entendu à plusieurs reprises ces dernières semaines, je vous le raconterai.
Dans l'appartement, je le transforme, je le métamorphose. Cela nécessite du temps, puis viendra le temps de la porte ouverte avec table pareille, l'art et la manière de revenir aux fondamentaux.
Parce qu'en plus, je suis généreuse...
Réponse de fée des agrumes le 23/10/2009 à 20h39
A Pandora:
Ce qui est fou, c'est que personne ne pense à un accident bénin, un vieillissement en construisant, en achetant, en s'installant. Non qu'il faille y penser, tout simplement accepter l'idée qu'il y a de la place pour TOUS dans la société.
Attends seulement de lire le récit de cette recherche d'appartement;
handicap + faibles revenus soulèvent bien des masques et des hypocrisies!!
Tant pis pour les ignorants! Ils vivent dans une illusion qui leur reviendra un jour ou l'autre en pleine figure, parce que personne n'est à l'abri.
Sans solidarité véritable, l'espèce humaine n'aurait jamais survécu, j'en suis persuadée, l'égoïsme cause certainement sa perte.
Quand le corps fout le camp, ne serait- ce qu'un caillou devient un obstacle effrayant.
Ici et maintenant, tu es sur tes deux jambes, demain sera autre; là, tu décideras en conséquence.
Annie était déclarée foutue par les médecins et puis elle est là, debout. Nul ne sait. Vivre pleinement ici et maintenant, c'est ce que nous avons à faire de mieux.Réponse de fée des agrumes le 23/10/2009 à 20h48A Mariev:
J'aime cette phrase.
Y être, c'est déjà quelque chose. Je travaille longuement et âprement à mon rythme pour le rendre vivant, l'occuper pleinement.
je prends mon temps pour vous raconter tout ça, il se passe tellement de choses. C'est toujours le bazar, je ressens les besoins de propreté et d'ordre, heureusement, je suis patiente sinon, je deviendrai folledingue!!!!!Réponse de fée des agrumes le 23/10/2009 à 20h53A Coq:
C'est ce que j'ai dit à Pandora, sans les jeux de mots.. le dernier vaut le coup, héhéRéponse de fée des agrumes le 24/10/2009 à 22h00
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Pour le fauteuil, je pense comme toi, c'est en y pensant qu'on y retourne à coup sûr! Il faut donc tout faire pour ne pas se mettre dans cette situation.
Pour ce qui concerne les travaux, ils n'auront qu'un temps et si ta joie de vivre est là, elle rejaillira sur ton entourage, à commencer par ton fils. Donc elle sera là!