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Réentrainement à l’effort. 2e.
Pour ce qui est de mes exploits sportifs, je n’ai pas grand-chose à en dire. Je me suis simplement régalée à essayer ces machines bien que ce fut fatigant (je n’étais pas là pour regarder les autres se fatiguer tout de même). Je ne peux toutefois empêcher les interrogations incessantes sur mes capacités : dans quelles mesures relèvent-elles de capacités normales ? Quel est l’impact du handicap ? Est-il possible de le dépasser ? Jusqu’à quel niveau mon corps peut- il supporter ces sollicitations physiques ?
Questions sans réponse.
Au départ, ils nous ont montré des exercices avec un bâton à lever, soulever, transvaser. Comme je passais mon temps à papoter avec Valérie, j’ai rapidement été évincée de cet atelier. Ma réputation était établie : une pipelette. C’est que messieurs, les femmes sont capables de faire plusieurs choses en même temps.
Ayant cerné les énergumènes, nous eûmes nos exercices chacune adaptés à nos capacités respectives, rarement ensemble. Je commençais en général par 20 minutes de vèlo puis enchaînais avec les machines diverses et variées. Nous finissions avec des étirements avant de repartir.
J’étais curieuse, posais des tas de questions, devisais avec plaisir en leur compagnie et fus admirative de leur passion du sport englobant tant leur vie professionnelle que privée. Les gabarits étaient différents, les activités multiples, ils n’étaient que du muscle ces entraineurs ! Ayant pratiqué dans de tout autres registres, je pus partager ma nostalgie du temps où je courais, nageais, patinais, où tout me paraissait possible physiquement avec de l’entrainement et un effort constant. Sniff. Je relatais en particulier combien j’étais affligée de ne pouvoir danser plus sérieusement. Par manque de moyen d’abord, par manque de partenaire ensuite puis par crainte de ne pouvoir y arriver avec ce corps fragilisé. L’un des entraineurs me réchauffa le cœur et j’eus envie de l’embrasser quand il me fit remarquer que j’avais du potentiel, il se voyait que j’étais sportive avant et il n’y avait pas de raison de tirer un trait définitif sur mes envies de bouger. (Bon, ma grande, il ne reste plus qu’à trouver les moyens matériels de s’y mettre ! A défaut, en attendant, je danse en Qi Gong et à la maison.).
Dans l’action, j’ai testé les machines qui m’avaient tant attirée du temps où j’étais clouée dans le fauteuil à tenter de simplement retrouver des fonctions motrices élémentaires.
Le tapis de marche m’attirait, je m’y voyais courant comme ces gens qu’on montre à la télévision tenue par l’espoir d’aller courir un jour dans la forêt, à travers champs. Il était pourtant rarement disponible et il se passa plusieurs séances avant que nous pûmes en bénéficier à tour de rôle. Pas en reste, je demandais à utiliser l’autre appareil à côté dès la première séance d’entrainement, un truc de marche elliptique (je crois que ce mot est quelque part dans la dénomination). « Ah, ça, ce n’est pas évident, vous voulez vraiment essayer ? » Ben oui ! Je le connais pour l’avoir utilisé en cabinet libéral du temps de ma rééducation de sortie d’hôpital. Les bras activent des manches et les jambes montent et descendent dans une espèce de marche magique hors sol. J’adore même si c’est très crevant ! Parce que j’y bouge de tout le corps, j’aime y danser, suspendue sur des coussins d’air, j’ai l’impression de sauter dans le ciel, d’un nuage à l’autre. Un mouvement généralisé me ramenant aux mouvements de la nage, aux mouvements du roller, aux mouvements de la danse. Un régal.
Avec le tapis de marche, c’est une autre affaire. Marcher devant un mur blanc à projeté gris/ bleu n’a vraiment rien de transcendant d’autant que toutes les conversations et actions se passent dans le dos. Est-ce pour nous ramener aux sensations physiques ? Cela en deviendrait presque un exercice de méditation. Avec la modulation de la machine, chacun est contraint à un rythme programmé par les chefs d’entrainement. Entre les barrières latérales et celle de devant, comment se tenir ? Devant, cela oblige à rattraper constamment la course, sur les côté, ce me fut rébarbatif. Comme le balancement naturel des bras manque ! Avec des troubles de l’équilibre, il ne m’était guère évident de lâcher ; quand je m’y essayais, je craignais de me laisser emporter par le tapis, le fil passé autour des épaules pour bloquer l’appareil en cas de chute ne m’inspirait pas confiance. Quel travail que de se maintenir sur ce truc en mouvement alors que le paysage est statique ! En bout de course, méfiance, le tournis guette, il s’agit de s’asseoir quelques minutes pour se repositionnement dans l’espace. Je préfère de loin les balades en forêt, c’est une évidence.
Impossible de nommer les autres machines. Il y avait celle où il s’agit de s’asseoir en rameur pour tirer une ficelle lestée d’avant en arrière ou de bas en haut, celle où on se couche pour soulever des poids, une autre pour ouvrir et fermer les jambes, celle où on ouvre et ferme les bras, celle où on soulève vers la poitrine une barre tenue par le dessous. Je les ai toutes testées ne fussent qu’un seul essai. De la sorte, je voulus tenter celle où l’on se couche sur le dos afin de soulever des poids, je fus mise en garde contre cet exercice plutôt masculin. Avec ma tête de mule, j’insistai et je tentai l’expérience. Coriace, j’ai résisté tant bien que mal et compté les levers de poids douloureusement. Pauvres petits bras malingres ! Dire qu’avant les sollicitations répétées dans l’inertie des jambes, ils étaient plus menus, en véritable guimauve de foire.
J’ai pris plaisir à cavaler d’un repère à l’autre au pas le plus rapide possible, à me contorsionner en geste de Qi Gong ou d’étirement devant les grands miroirs de la salle de sport (mes désirs frustrés de danse y sont certainement pour beaucoup).
Les séances touchant à leur fin, je demandai comment mettre à profit les poids achetés auparavant. J’eus des essais avec ceux du service et quelques expansions possibles à la maison : je suis ravie de m’y exercer plusieurs fois par semaine, du bout des jambes ou du bout des bras depuis. Quand j’en ai assez de n’avoir pu marcher dehors pour cause de fatigue, de pipi impérieux, de contrainte météorologique ou spacio- temporelle, je m’y mets. Particulièrement, je les apprécie quand le froid me traverse. Rien de tel que ces exercices de musculation au salon pour stimuler le recentrage sur soi et solliciter les calories réchauffant mon corps à la maigre couche de graisse protectrice.
Le réentrainement à l’effort est fortement recommandé parce qu’il permet des récupérations notables dans de nombreuses pathologies neurologiques (sep, avc et autres réjouissances). Il est primordial de préserver les muscles, de ne pas les laisser fondre, de penser au-delà de l’instant de crise. Ma prise en charge pendant les mois noirs de la maladie a eu certainement des bénéfices essentiels. Alitée et complètement paralysée, j’avais des séances de mobilisations des membres dans mon lit à coussin d’air. Contacts humains, entre deux, avec soi, représentation du corps et de son intégrité, positionnement dans l’espace malgré l’absence totale de sensation… Complètement renfermée en moi- même par l’aveuglement et les paralysies, la rééducation permit la réappropriation du corps en convalescence lente ; avec le retour de la marche, la natation et la pratique du Qi Gong, dans leurs mouvements, je me réappropriais l’espace; dans ces séances sportives, je concrétise l’étendue de ma place dans le monde physique. Car depuis des mois, cette première perfusion de mitoxantrone en janvier 2007, j’investis l’espace en l’ouvrant comme un enfant grandit. Elodie ne m’a-t-elle pas dit qu’après une épreuve terrible de cet ordre, nous repassions toutes les étapes du développement humain ?
(Mes facéties seront l’objet de l’article suivant, je ne rate jamais l’occasion de partager des expériences singulières, c’est plus fort que moi ou, je préfère ce terme, tellement naturel. )
Après la musculation de ce matin, je vous quitte pour danser, dans la foulée sur cette chanson que j'aime parce qu'elle déborde de VIE ( si quelqu'un peut me dire de quoi elle parle, je serai ravie!!)... Une rareté musicale connue par Yves Blanc et son émission La planète Bleue dont je suis une inconditionnelle depuis des années!!!
Tags : danse, corps, marche, autre, celle
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Commentaires
2pandoraMercredi 18 Juillet 2012 à 12:04A Annie:
Voilà pourquoi je l'ai mis en italique.
la question de la limite entre capacité physique et volonté est celle qui me taraude... jusqu'où puis- je aller? parce que je suis une obstinée qui aime à découvrir ses capacités.Réponse de fée des agrumes le 09/02/2010 à 21h46A Pandora:Il faut et ses variations n'existent pas. Tu le feras quand ce sera le moment où tu l'auras décidé, pour toiRéponse de fée des agrumes le 11/02/2010 à 18h36
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En cessant de se comparer on trouve beaucoup de sérénité, et c'est valable dans tous les domaines. L'uniformité n'est pas de ce monde.