• Fin de semaines.

     


    Pourquoi donc sont-elles si pénibles ? Il n’y a que dans la semaine, avec le travail, les déplacements et les rencontres que je me repose, c’est fou.

     Mon garçon va mieux, il se passionne pour l’escalade, prend son millepertuis, dort mieux, sourit plus et s’énerve moins, riant de lui- même et de ses colères… sauf quand il est à la maison et passe son temps à jouer aux jeux vidéos. La tension monte et je m’énerve de ne pas le voir venir manger, de ne pas s’habiller, de ne pas parler d’autre sujet que ces jeux, de se détacher complètement de son activité scolaire… Grrrrr. Dur dur de l’en décoller. Bien qu’essayant de garder le cap façon CNV et de poser les limites, je finis par lâcher en vivant ou ma colère ou en  méditant ou en pratiquant le Qi Gong.

    Chaque rencontre avec SeN finit en eau de boudin. Je me fâche, je m’insurge ou je reste abasourdie. C’est comme si les douze années de camaraderie et d’amitié, les huit ans de collaboration plus proches n’avaient jamais existé, n’étaient qu’un épais brouillard glauque et grouillant d’enjeux inconscients malsains et inextricables. Et je ne décolère pas, et je me tourmente, et je m’interroge, incrédule sans trouver de solution. Je m’attèle à avoir de l’empathie pour moi- même, je mesure le chemin parcouru et tourne la tête vers d’autres relations plus authentiques, sereines, dynamiques, constructives. Quelle gageure que de se défaire de ses boulets du passé quand tout l’être est pleinement dans un présent entièrement renouvelé !

    Inévitablement, la vessie lâche quand l’ambiance se fait délétère et je me penche benoitement sur ces aléas physiques en écho aux aléas de la relation aux autres.  Je ne dis pas qu’ils sont responsables de mes tourments, entendons- le ! Ces baromètres corporels relèvent de ma responsabilité personnelle.

     Jérôme de Sèze avait répondu à une de ces questions qui me taraudent :

    - Pourquoi, quand je suis énervée ou contrariée, mon corps s’exprime t-il entre ces douleurs neurologiques, ces malaises ou ces lâchages de vessie ?

    - C’est que les voies nerveuses utilisées par les fonctions physiques et les réactions psychologiques sont infiniment proches. Dans ce type de maladie, corps et psychisme sont intimement liés.

    Formidable ce baromètre ?

    Colette, médecin généraliste homéopathe sans qui je me demande réellement comment je supporterais les traitements et leurs effets secondaires a évoqué cette semaine le langage courant devant mes difficultés récurrentes tant de suées nocturnes que de vessie: « Pour ne pas le dire plus crûment, c’est votre façon d’exprimer vos sentiments : Qu’est- ce que vous me faites suer !!! »… Suer, péter, uriner… C’est tout du lâchage de toxines, le corps  évacue en résonnance avec mon psychisme en mutation.

     J’essaie de comprendre sans harceler par le mental ; je me penche tendrement sur mon interne et laisse passer les sentiments, ressentis, pensées et émotions. C’est une tâche de longue haleine, perpétuelle.

     Les signes de changements sont évidents par les événements qui surviennent quotidiennement et dont le flot dépasse mes capacités à les raconter ici par manque de temps, je me sens également sereine, en paix, heureuse au creux de moi. Néanmoins, je coince, accroche sur des relations. Si avec ma mère, les résultats sont probants, avec fiston, la course est marathonienne, avec SeN, je me sens affreusement démunie après avoir tenté tout ce qui était en ma possession, seule devant son mutisme, sa colère, ses indécisions, ses peurs.

    J’ai fait le gros ménage en moi, mon entourage est encore habitué aux fonctionnements anciens, ils sont certainement démunis devant ces nouvelles donnes - c’est si confortable de continuer ses petites habitudes ronronnant depuis des années.  Comment pourrais- je leur en vouloir ? Les cartes ont été transformées, je me suis transformée. Tout est à remanier, chacun a le choix d’accepter ou non la nouvelle danse. Il est des naissances douloureuses, initiatiques, tous n’en veulent pas et c’est leur droit. Quant à moi, il s’agit de me nettoyer de ces oripeaux du passé en douceur, sans me violenter, sans les violenter… Et que c’est laborieux !! Parce que je suis humaine, avec des colères, des débordements émotionnels, des mots sortant de travers et blessants, une personnalité complexe et ambivalente, des contradictions, une imperfection généralisée !

     

    « Tu es une grande guerrière… mais n’oublie pas tes propres préoccupations !» m’a dit un être venu des tréfonds du monde en des circonstances dont je parlerai en son temps ; j’ai souri, tout était dit.

    Maladie auto immune, auto- destructrice, enfermement programmé, perte de la perception sensitive de l’environnement extérieur, le corps me ramena à l’essentiel. Par une chance inouïe, j’ai échappé à une mort abominable, mes yeux intérieurs se sont ouverts, j’ai pris la mesure de ma valeur, de la violence que je m’infligeais en m’oubliant, en me sacrifiant pour les autres au sens rituel.

    Maladie d’initiation, de transfiguration… parce que c’est le sens que je lui ai choisi. Je panse mes blessures profondes, je couvre de baumes mes travers, erreurs du passé, je pose un regard éclairé sur mon existence, j’ai retrouvé le goût de la vie en frôlant la mort. C’est ma voie et non celle des autres ; ils ont leur propre cheminement, leurs propres choix, leur propre responsabilité.

    Le cheminement vers la libération est long, chaotique, jamais acquis ; ces aléas relationnels sont des relans d’un passé malsain dont les puanteurs me suivent au gré des tempêtes, des reflux d’égouts, coriaces, résistances aux grandes eaux purificatrices que je déverse en nettoyant mon interne par la méditation, l’ouverture à mon inconscient, l’acceptation de mon être passé et présent dans sa complexité. A chacune de ces difficultés, mon corps me ramène à la seule véritable priorité.

     Lâcher, lâcher ! Il n’y a guère d’autre alternative. Accepter que mon parcours n’est pas celui d’autrui. Accepter de les laisser assumer leur propre responsabilité. Accepter que je ne suis pas là pour les sauver. Accepter notre humanité complexe, variable à l’infini et si imparfaite. Accepter que nous n’en avons JAMAIS terminé avec nous- même. Perpétuelle mutation dont nous avons les rennes en main, conscientes ou non ; terrible labeur interminable que nous entamons… ou non.

     


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  • Commentaires

    1
    Lundi 15 Mars 2010 à 06:57
    Annie
    C'est à ça que sert l'écriture: à poser les questions, puis trouver soi-même les réponses. J'ajoute que parfois, si on met délibérement un ton joyeux, à la fin du travail, on l'est! Au cas où inconsciemment on ait écrit tristement, aucun doute sur l'état d'esprit qui s'en suivra.
    C'est nous qui créons notre vie, et les choix des autres leur appartiennent. Notre intérêt est donc de la créer dans une version la meilleure et la plus joyeuse possible.
    Affectueusement.
    2
    Lundi 15 Mars 2010 à 08:03
    Philippe
    C'est toujours "délicat" de venir commenter des choses aussi personnelles que celles que tu évoques : relation parents/enfant(s), maladie (reflet de l'âme), fin d'une relation "amoureuse"...

    Si tu me le permets, je te dirais de savoir trancher net avec cet homme. En chirurgie on parle d'amputation, qui d'ailleurs engendre - parfois - un syndrome du membre fantome, mais dans ton cas, tu devrais totalement tourner la page de cet ami-amant (?) qui est enfermé avec ses "démons personnels".
    Sans parler de "refaire une vie" (car ce qui a été vécu ne peut et ne doit être effacé de sa vie) personnellement, pour avoir trop attendu à rompre un mariage sans issu avec quelqu'un qui souffrait de nombreux traumatismes remontant à l'enfance dûs à des "conflits non résolus avec ses parents", j'ai finalement hypothéqué le reste de mes jours...
    Certes nous pouvons vivre seuls, ça a même ses avantages (dixit un scktech de Dany BOOM), mais à trop attendre il est des retours en arrière ou de nouvelles possibilités de rencontre qui deviennent impossibles.

    La difficulté à élever un/des enfant(s)... c'est un sujet qui a déjà été évoqué. Tenir. Tenir. Tenir bon. Si on est convaincu d'être dans le vrai, il faut pouvoir imposer les règles de vie, de morale, de... C'est très difficile à faire. Le danger... c'est ce qui nous est arrivé avec notre fils ; ma femme a - je pense - manqué de doigté dans la façon d'imposer ses idées. Finalement notre fils c'est enfermé dans un mutisme et le rejet de sa mère, coupant tout liens avec elle à partir de 15 ans.
    Pour l'éducation des enfants nous cheminons sur le fil du rasoir...

    Courage.
    3
    Magali
    Mercredi 18 Juillet 2012 à 12:04
    Magali

    "You piss me off !" C'est ainsi qu'en anglais on dit aux autres qu'ils nous font, non pas chier (les Français sont bien plus scatos, lol) mais pisser !
    Les expressions sont si parlantes !

    4
    fée des agrumes Profil de fée des agrumes
    Jeudi 15 Août 2013 à 17:49

    A Annie:

    Quand j'ai commencé cet article, j'étais dans le flou: où allais- je?
    En avançant doucement, en structurant la pensée, j'ai mis de l'ordre au fouillis intérieur. A la conclusion, j'étais soulagée, c'est une marche supplémentaire dans mon parcours. Tourner la page et prendre la distance nécessaire, c'est à mon humble avis positif.
    Belle journée
    Réponse de fée des agrumes le 15/03/2010 à 09h20

    A Philippe:

    Mercredi, je disais au neurologue que je peux difficilement parler d'autre chose que de ce que je vis.. ou alors, ça devient de la fiction.
    Pour mon fiston, je suis opiniâtre, nous avançons, les jalons se posent petit à petit. Les weekends ne sont pas forcément faciles, il a néanmoins la chance d'avoir une mère qui l'écoute et lui laisse sa place. Quand il sort de sa colère ( qui ne me concerne pas systématiquement), il est heureux de discuter, partager, rire avec/ de nous.
    Stéph est incapable de prendre une décision, d'avoir une position claire, le doute l'habite en permanence. j'ai tranché souvent, cela ne l'empêche pas de revenir malgré mes distanciations. Le souci actuel est que j'ai encore des affaires dans la maison à cause des réglements logistiques compliqués, La matérialité  réglée lâchera les derniers poids relationnels et ce sera la coupure définitive. Je ne suis pas du genre à m'encombrer des indécisions d'autrui.
    je ne suis pas très vieille, je suis dans des projets multiples et solides. La rencontre viendra (ou non) , ma vie est simplement remplie... et peut être que je ne suis pas de ceux qui envisagent le couple de façon conventionnelle. Ce sera naturel , une relation saine ou ce ne sera pas. J'ai soupé, ça suffit les enjeux malsains en répétition de vieilleries familiales.
    A propos du fil du rasoir, j'aime cet échange entre mme Bonaparte et Freud. Elle lui demanda comment faire avec les enfants; il lui répondit "Quoi que vous fassiez, ce sera mal!" Et c'est tant mieux, il n'y a rien de plus insupportable que des parents parfaits!!
    Réponse de fée des agrumes le 15/03/2010 à 09h41

    A Magali:

    Je vais l'apprendre par coeur celle- là! Elle est d'une évidence lumineuse et cinglante! 
    Réponse de fée des agrumes le 15/03/2010 à 11h23
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