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Into the wild
Ma sœur fut la première à me parler de cette histoire :
un jeune homme, Chris Mc Candless est retrouvé mort, seul, dans un bus abandonné au milieu de la forêt, en Alaska après deux années d'errance sur le territoire nord- américain, dans le plus grand dénuement. Ses parents ignoraient totalement ce qu'il faisait, où il était depuis la cérémonie de remise des diplômes de fin d'études. Il était brillant, issu d'une famille très aisée de la côte est, promis à un bel avenir.
J'ai d'abord regardé le film de Sean Penn dont j'avais lu les louanges sur l'ode à la nature à travers des images magnifiques. Oui, les images sont magnifiques mais je n'ai pas vu dans ce film une ode à la nature parce qu'il m'a laissé un goût étrange, une interrogation et un sorte de malaise diffus, innommable. J'y ai vu l'errance d'un jeune homme perdu, en quête de lui- même, pris à son propre piège. J'avais le sentiment que malgré le caractère exceptionnel de son périple, les rencontres et les expériences fortes qu'il a vécues, il n'avait pas d'issue. S'il n'était pas mort en Alaska, je l'imagine suicidé ou mort ailleurs. A mon humble avis.
Ayant le livre sous la main, j'eus envie de le lire afin de me faire une idée de l'adaptation du film dans un premier temps, d'y trouver quelques éclaircissements dans un second.
Into the Wild, voyage au bout de la solitude, de Jon Krakauer.
L'auteur est un journaliste interpellé par un petit article évoquant la découverte du corps d'un jeune homme quelque part en Alaska, rubrique faits divers. Il fit son enquête et reconstitua le parcours de Chris Mc Candless.
Dérangeant et déstabilisant.
Je ne parlerai pas beaucoup de l'Amérique et de sa description à travers ce livre parce que je ne la connais pas concrètement. J'ai été interpellée par ces humains qui décident de vivre en marge de la société consensuelle américaine, j'ai été interpellée par certains comportements fats dans les petites choses de la vie quand ils vivent comme coupés de la réalité de la nature (gaspillage des ressources naturelles, gros véhicules utilisés pour aller chasser dans des zones reculées et sauvages par exemple), j'ai été interpellée par la grande solitude de ceux qui ne se satisfont pas des valeurs habituelles, j'ai été interpellée par l'indifférence des nantis à l'égard des moins nantis...
J'ai été interpellée mais je n'ai pas les moyens d'en discuter, ce pays ne m'intéresse pas. Mes curiosités à son égard ne m'ont pas portées à en avoir une vision positive bien au contraire. (Désolée, oui, je suis anti Amérique triomphante) Face à mon ignorance et mon parti pris, je ne me m'étends donc pas plus sur ce sujet.
Pour Chris Mc Candless, rien ne laissait préjuger une telle fin. Très intelligent, il avait tout pour réussir selon les valeurs américaines. Et pourtant, il a tout renversé violement, partant avec le strict minimum, faisant don de toutes ses économies à une œuvre luttant contre la faim dans le monde, coupant totalement les ponts avec ses amis et sa famille. Il refusait le système, refusait de se sentir prisonnier de ces valeurs, il est allé à l'extrémité de son idéal de liberté et d'ascèse. Il fut apprécié de tous ceux qui le croisèrent, aucun ne se sent capable de l'oublier. Il a marqué les consciences.
Il ne fut pas le premier à se lancer dans ces aventures extrêmes, il ne sera certainement pas le dernier, son parcours n'en reste pas moins incroyable au sens de non compréhensible. Que cherchait- il? Le savait- il lui-même ?
J'y vois une quête désespérée d'identité sans issue. Une vie où les idéaux suprêmes deviennent vénéneux, mortifères puis mortels. Je doute que survivant à son séjour en Alaska, il ait pu trouver la paix en lui et entrer dans la vie des hommes sans encombre. J'imagine une vie forcément sans issue. J'imagine car personne ne saura jamais ce qu'il serait arrivé en d'autres circonstances.
Je ne peux également m'empêcher de faire le rapprochement entre l'auteur et Chris Mc Candless , tous deux dans une relation au père très particulière et toxique. C'est là, je pense, que réside la grande béance dans la vie de Mc Candless. Pas de difficulté matérielle, pas de problème d'éducation, un lien brisé atrocement simplement.
Quand les parents sincères croient faire au mieux pour leurs enfants et qu'ils passent à côté de leur enfant.
Quand le père tue son fils avec la plus grande innocence et les meilleures intentions.
Parce que la sœur de Chris s'entend très bien avec ses parents, je crois que c'est le lien père/fils qui est en cause. La faille était si profonde que rien à mes yeux ne pouvait la combler.
Quant à la nature, elle apparait grande et magnifique, superbe, généreuse et froide. Froide aux tourments des hommes, froide à leurs épanchements à son égard, froide à leurs agitations. La Terre porte et nourrit les hommes. Et puis ? Et puis rien. Les hommes passent et disparaissent dans l'indifférence de la Terre. Comme toutes les autres espèces passées, présentes, à venir. La Terre n'a pas besoin de nous, finit par nous le rappeler à un moment ou à un autre. La Terre nous tue et nous balaie froidement. Terrible mère nature.
Si quelqu'un a vu le film, lu le livre, qu'il me donne son avis s'il vous plait. Il y a dans cette histoire quelque chose de froidement étrange, l'idée qu'il est nécessaire de se poser des questions sur notre place sur cette Terre, parmi les siens, dans la société, dans l'humanité.
Qui sommes- nous pour nous croire si peu ?
Qui sommes- nous pour nous croire si importants ?
Tags : homme, fils, interpelle, grand, nature
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Commentaires
Commentaires
Pour ce qui concerne l'Amérique elle ne m'attire pas non plus, mais il faut se rendre à l'évidence qu'elle déteint sur nous et que tous ses travers arrivent chez nous de plus en plus rapidement.
Pas si bêtes que ça les frenchies
;)
n'oublie pas de me dire ce que tu en as pensé en le lisant, si l'occasion se présente.
Très matinale Annie
:)
Je reste avec ce goût étrange.
Disosn que je trouve cette quête extrême et extrémiste et que dasn sa recherche de nature, le héros en oublie les autres et se retrouve à mourir seul...
Je crois que dans ses dernières phrases avant de mourir il se rend compte du besoin de l'Autre...
Voilà, bon ça date de presue un an pour moi, alors c'est un peu loin
Bonne journée Fée ;-)
Oui, il est allé au bout de lui- même dans l'absolu pour se rendre compte que nous ne valons rien sans les autres.
Mais quel prix à payer pour le réaliser!
Aurait- il pu revenir à la vie en société malgré cette réalisation? Je n'en sais vraiment rien et c'est là qu'est mon trouble, je pense.
Destabilisant.
La quête de soi. parcourir le monde pour trouver ce qui est en nous.
paradoxale et terrible fatalité des hommes?
mais il me semble que ton analyse est juste : celui-ci, parmi tous ceux qui ont eu cette "démarche" ou cette "pulsion", ne pouvait revenir ... peut-être un jour construire sa cabane au fond de la forêt ... mais, et la solitude? et ce besoin de bouger? pour aller à la Rencontre ... mais laquelle?
une béance , en effet, abyssale semble-t-il
peut-être s'il avait rencontré un compagnon (une compagne) dans le même état d'esprit ... mais on peut se dire que ça n'aurait reculé l'échéance que de quelques mois... quelques années
tel que tu nous le racontes : il est allé à la Rencontre de la Nature et s'y est fondu, vaincu peut-être par cette révélation qui semble t'avoir effleurée, euh, griffée plutôt : la Terre n'a pas besoin de nous ... et si les Hommes n'ont pas besoin de nous, alors que faire?
tu évoques l'identité aussi ... ah la la, vaste sujet qui me passionne ; j'avais commencé à imaginer l'histoire d'une jeune femme qui quittait tout et tout le monde, et partait ailleurs, s'installait ici ou là, se donnait un nom, et essayait de voir ce dont elle ne pourrait jamais se défaire, qu'elle soit chauffeur de poids lourd en Amérique, serveuse à Hamburg, garde-forestier en Suède ou marcheuse dans un désert d'Afrique
...
belle journée à toi, Fée!
;)
Et notre nature qui nous amène à comprendre et chercher le sens de notre vie.
Magnifique formule sous ta plume:
La terre n'a pas besoin de nous.. et si les hommes n'ont pas besoin de nous alors que faire?
je me retourne vers Boris et son livre, Sous le signe du lien.
Certains neurones, certaines parties de notre cerveau ne se développent pas sans lien affectif. Un nourrisson bien traité mais non cajolé se laisse mourir de faim
Il y a des tuteurs de résilience possibles,certes mais l'accumulation de petites blessures affectives mènent à des quêtes désespérées, des fins tragiques.
Des béances fatales.
Pourquoi? Pour Quoi?
Comment?
Pourquoi lui? pourquoi moi? pourquoi toi?
L'impossibilité de répondre.
passage qui confirme quelque chose de "révélé" avec ma somato ... très étrange découverte, aussi
;)
:D
Certes, la Terre n'a pas besoin de nous. Sûrement que les Hommes non plus. Sauf si on considère qu'on fait tous partie d'un Tout, qu'on est lié les uns aux autres, les éléments les uns avec les autres. Nous sommes rien et tout à la fois. Je crois sincèrement qu'on ne peut chacun à notre niveau pas savoir ce qu'est le mystère de la vie dans son ensemble, que ça nous échappe. Mais qu'en ajoutant tous les points de vue de chacun les uns aux autres, en "collant" la "vision" de tous les êtres, plantes, animaux, etc de cette Terre, là, on a la connaissance du Tout.
Je sais pas, en fait, c'est juste ce que je crois...
T'en penses quoi?
Etre rien et être tout, oui, tout à fait.
Etre rien pcq nous sommes tout petits, être tout pcq nous inventons le monde constament.
Nous sommes liés pcq nous sommes tous créés à partir des mêmes matières profondes.
La voie du milieu est également LA voie des bouddhistes, la seule voie efficace pour libérer de la souffrance.
;)
héhé
Comme chaque élément qui participe à chaque règne de la nature l'est...
Socialement, cette notion d'importance m'indiffère complètement, en revanche...
Et je profite de ce com' pour te remercier de tes gentilles visites... elles sont importantes, pour moi.
Je t'embrasse,
Tous uniques et également tous identiques.
une communauté d'humains.
Ces petites banalités résonnent pour nous faire ressentir l'extra ordinaire aventure
de la vie,
la chance d'être là et d'exister.
C'est un plaisir de visiter ton blog et tes jeux de mots si lares.
;)
et tout à coup se fait jour une différence ... cruciale
;)
Consience de soi, de l'autre, de la vie, de la fin et de l'espace, de l'éternité, de l'immensément petit à l'immensément grand, du tout et du rien.
C'est notre fatalité et notre liberté.
Notre angoisse ultime et notre libération possible.
Oui, Mariev, je suis sur les mêmes chemins que toi.
:)
je t'en veux de lancer un tel sujet de réflexion alors que je n'ai pas trop le temps de "papoter".
Encore une fois... quelle écriture tu nous offres. Ca change de bien des textes... et ce subjonctif que tu maîtrise tellement !
J'ai entendu parler du film lorsqu'il est sorti, mais je ne l'ai pas vu ni lu le livre dont il est tiré. Je me permets une question... qui a écrit le bouquin et à partir de quoi a-t-il été écrit ?
Ca me fait penser à la remarque que les auteurs font des "analyses" de leurs textes par les "pros" du décorticage. Dernièrement, c'était Grand Corps Malade qui était ébahi par ce qu'il était sensé avoir voulu dire (he oui... il fait parti des classiques et ses textes sont étudiés dans les cours de français...).
On se pose des tas de questions à propos de nos contemporains, pourquoi a-t-il/elle fait ci, fait ça ? et comment ?
Nous apportons NOS réponses en fonctions de "notre" personnalité, suite à la lecture que nous avons faites avec nos codes de décryptage, d'analyse... Je pense qu'il est impossible de se mettre dans la peau d'une personne, sauf lorsque, comme toi, tu décris, tu analyses et commentes ce que tu vis, a vécu et enduré.
Reste, que j'ai noté au passage cette question à propos de ce jeune Ricain et d'un problème avec son père. Je dois dire, que ce n'est qu'assez tardivement que j'ai compris que, moi qui me croyais un "père modèle" vis-à-vis de mon fils, peut être que je ne le suis pas tant que ça. On agit souvent en pensant bien faire, mais... encore une fois, c'est en fonction de nos codes et bien des années après on peu découvrir qu'on s'est planté.
Personnellement, nous avons une relation "quasi normale" avec mon fils mais... va savoir si dans son ressenti il me trouve si bon "parent".
Je relève aussi combien notre "anti américanisme primaire" est fort. En ce moment, arte diffuse des films, des documentaires sur l'amérique de 2008 et essaye de faire tomber les "clichés". J'en ai regardé plusieurs et malheureusement, les clichés que nous leur "collons" sont justifiés !
Hier soir, deux étudiants de Berkley expliquaient le lien indissociable entre la possession d'une arme à feu et la démocratie ! C'était... heu... affligeant !
"J'ai un feu pour me défendre si la police n'arrive pas ! C'est à moi d'assurer ma défense et "l'Etat" doit me protéger, sans rien m'interdire.. ben... j'ai pas tout compris.
Je n'ai pas pu faire le lien entre auto-défense qui est plus synonyme d'Anarchie et Démocratie... sacrés Ricains.
La semaine passée, c'est le film sur EMINEM qui était diffusé... ben... leur vie de merde, dans les roulottes... c'est ni mieux, ni pire que chez nous... ; ce pays dans lequel les adultes sont de grands enfants pas très matures et pas toujours réalistes, est-ce réellement le "top" ?
Alors, le modèle américain... qu'ils se le gardent.
Bien à toi... encore
Je recommence, en moins bien, forcément.
Bonjour matutinal...
Ton premier § (c'est + rapide à écrire...) me "rassure", car les "administrateurs" d'over-blog m'avaient répondu qu'ils n'étaient pas au courant (et pourtant EdF n'est pas encore en grève).
Non, je n'ai pas lu ton article, mais en ce moment... je déborde. Pardon... mon emploi du temps déborde. Je fais visiter la maison pour l'évaluer et teste ainsi les agences imobilières (que des "bonimenteurs" ces gens... des vendeurs d'apirateurs, de verres cassés, des marchands de sable pour bédouins perdus dans le Sahara... Bon, c'est le seul moyen pour avoir une idée de ce que vaut ma maison avant que je fasse mon annonce sur PAP.fr
En plus je "bidouille" mes chiffres pour ce foutu projet de moutons. Je passe des heures à sauter de blog en blog... Tu vois... il ne me reste pas de temps pour lire ton article.
Mais... comment ferais-je si je travaillais ?
Salaud de feignant !
Il faut que j'aille me fouetter, me mortifier (comme Soeur Emmanuelle ? oups...) car mes frères humains bossent comme des chiens pour me payer mon Rémi...
Tu me rassures aussi en disant que les parents ne doivent pas être "parfaits". Ouf !
Je me consolais en me disant qu'un ado ne doit pas l'être trop non plus (ben vu que je n'étais pas trop parfait pendant cette période, c'est une méthode un peu lâche, mais...). Je pense quand même que les parents doivent pouvoir être considérés comme "une valeur refuge" (rien à voir avec la bourse, hein... ; c'est juste sur le plan "moral"). C'est à nous de faire passer ce qui nous semble important : le respect de soi, le respect des autres, les relations humaines, l'indépendance (d'esprit et financière), le rejet du mercantilisme... tout ça quoi.
Totalement encore en accord (beurk... quelle symphonie de corps... hummmm) avec ta phrase sur les neveux de l'oncle SAM (pas TOM...).
Bien à toi.
Et les mondes parfaits sont... inhumains!
Au plaisir!
;)
Mille excuses si tu les acceptes. Bon, je vais lire et je reviens.
Bise
Je te souhaite un très beau dimanche !