• Du sport, renoncer. 1

    Rapidement, l'évolution de la maladie me contraignit à l'enfermement dans mon propre corps. Je ne le sentais plus que par la douleur, j'étais incapable de le mouvoir, de le diriger, j'étais coupée de lui alors qu'il hurlait constamment de l'intérieur. Il prenait toute la place, celle que je ne lui avais pas accordée certainement, le mal aimant, le mal traitant à coup de mal alimentation, non alimentation ou suralimentation selon les âges, l'épuisant à force d'efforts, de demandes, d'exigences, de chocs émotionnels ravalés.

    Clouée au fauteuil puis au lit, aveugle, j'étais souvent effondrée à l'idée de ne plus pouvoir marcher, courir, danser, nager si j'échappais à la mort. La rééducation fut âpre marquée par ma volonté, mon opiniâtreté saluées tant par les médecins que par les kinés bien que pour moi, elles semblaient des plus banales, spontanées, naturelles. Élodie me parla de la mémoire du corps, un entraîneur sportif de l'hôpital ajouta « Vous étiez sportive avant, ça se sent, ça se voit». C'était dit, entendu et j'en fis une base pour partir à sa reconquête dès que les traitements opérèrent. SeN me promit mille et une activités dès mon retour sur pieds, notamment celle de danser ainsi que son soutien pour mes démarches.

    J'eus à tout réapprendre. Maintenir le buste, retrouver l'agilité fine des mains et bras, soutenir la station debout, tenir l'équilibre, se lever, s’asseoir, lever et avancer les jambes, les pieds, marcher. Les yeux échappaient totalement à mon contrôle, j'adaptais l'environnement, les lumières sans soutien puisqu'à la maison, nul ne voulait comprendre et mettre en œuvre les aménagements minimaux. Mes bras avaient changé avec les circonstances, la paralysie des membres inférieurs les ayant largement sollicités pour effectuer les transferts, soulever les fesses, les jambes quand plus rien ne répondait. Mes longueurs de piscine d'autrefois avaient été bénéfiques pour les muscles des bras, des épaules, du dos. Tous les autres avaient fondus en raison de mon immobilité.

    Dans ces circonstances, tout était à reconsidérer. Il n'était plus question de mouvements et d'action automatiques, sans présence au corps, encore moins de performance. J'en étais simplement à vouloir récupérer de quoi être autonome au quotidien. La première verticalisation fut difficile, je tins cinq minutes manquant de m'évanouir tant le malaise était grand, se lever seule demanda une énergie et une opiniâtreté fortes lors de plusieurs tentatives, les premiers pas nécessitèrent des efforts énormes de concentration, de volonté, de mobilisation de chaque muscle du bout des orteils jusqu'au bout des doigts, monter des escaliers, se tenir sur les béquilles, avancer, ma première sortie de la maison, à pieds qui m'épuisa après 50 mètres au grand étonnement de ma voisine, la vessie qui s'agite et inonde. J'ai déjà raconté ces épisodes. Le sport en soi était un absolu inaccessible en ces heures.

    A suivre.

    Ps: j'ai coupé en plusieurs parties car mon texte initialement prévu est devenu énorme.

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