• Alors que nous étions tranquillement dans le salon à papoter de choses et d’autres, fiston intervint à mon encontre. Etait- ce dans le but de signaler son exaspération face à mes comportements peu orthodoxes ? J’ai oublié. Toujours est- il qu’il entama la complainte du pôvre adolescent victime d’une mère abominable. Usée à ces reproches incessants, je me contentai d’un soupir de lassitude devant tant d’amertume et de rancœur, aucune de mes réponses n’ayant grâce à ses yeux. Annie, rapidement, au détour d’une articulation, lui rétorqua :

    «  Non, non, c’est une mère AIMANTE ! »

     Il renchérit immédiatement peu enclin à entendre ce qu’elle avait dit, continuant sa complainte formulant colères, frustrations, révoltes et catégories de jugements.

    «  C’EST UNE MERE AIMANTE ! Ce qu’elle fait est guidé par son amour pour toi, elle le fait parce qu’elle te veut le meilleur » insista t- elle.

    De mon côté, je fus sonnée, peu habituée à entendre ce genre d’affirmation avec tant de conviction. Les mots ne prirent sens qu’au bout de quelques secondes et je me sentis inondée de reconnaissance devant tant de soutien face aux opprobres du fiston.

    -       Qu’est- ce que ça me fait comme bien de t’entendre dire ces mots, Annie ! lançai- je heureuse. Parce que d’après lui, je suis la pire de toutes les mères quoi que je fasse.

    -       Il n’a pas à parler de toi ainsi, ne le laisse pas te dénigrer  comme d’autres l’ont fait auparavant !  Tu es une mère AIMANTE !

    Et mon fiston d’ajouter :

    -       Ah pour ça, ma mère, oui, c’est une mère AIMANTEE !

    La répartie me fit rire immédiatement (ce qui n’est pas la meilleure attitude p’têt bien) ; sur le coup, l’idée me plut, j’avoue. Garçon avait un sourire honnête, je n’y vis rien de négatif, au contraire, il était fier de son jeu de mot et  je m’imaginai plutôt bien avec un corps et une tête aimantés, à l’affût de tout ce qui peut être capté, saisi, un peu foldingue sur les bords puisque constamment en éveil. Au bout du compte, tant qu’à faire, j’aime être une mère aimante ET aimantée.


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  •  

    Chez Annie, je fis la connaissance de son compagnon. La présence d’un tel homme fut, à mes yeux, précieuse car, par son vécu, sa personnalité, il offre à mon garçon en construction le contact avec une masculinité vivante, positive et bénéfique. Ceci dit, nous ne savions rien l’un de l’autre hormis les échos d’Annie ; nous prîmes donc le temps de se raconter mutuellement, en partage de nos expériences et réflexions. Certaines paroles, attitudes menèrent à des interrogations, des besoins de clarté et d’explicitation d’autant que les écrits d’un blog ne sont pas exhaustifs de ce que sont nos existences, ils ne sont qu’une fenêtre que nous choisissons d’ouvrir plus ou moins consciemment avec ses pudeurs, le choix de se dire ou non.

    Je m’entendis ainsi raconter succinctement les étapes de ma vie, l’entourage, le contexte familial et social, les circonstances de ma construction, quelques événements, le contexte également dans lequel grandit mon fiston. Je suis habituée à les verbaliser car longtemps, je m’y suis grandement penchée afin de donner du sens à ce passé douloureux et violent (merci mon ami Boris, ouvreur de voie) et avec l’aide d’accompagnants, thérapeutes et Cie. Néanmoins, mon résumé cinglant, lucide a de quoi choquer non par les mots que j’utilise mais bien la réalité qu’il dépeint. Evidemment, Annie souvent me rappela la nécessité de sortir des schémas toxiques du passé devenus obsolètes au présent, ces violents du passé n’ont plus lieu d’avoir de place maintenant car la leur laisser équivaut à pérenniser le poison qui les ronge(aie)nt. Il n’en reste pas moins que ce récit est celui de mon parcours et en m’écoutant, je sentis le besoin de changer d’orientation.

     Certes, ma vie est jalonnée d’abandons, pertes, insécurité, dangers, poisons intergénérationnels et actes violents subis dans l’indifférence ou la lâcheté générales, mais il est principalement remarquable que jamais, je n’ai baissé les bras.  Constamment, opiniâtrement, envers et contre toute apparence fragile, j’ai tenu le cap avec la volonté permanente de sortir de la violence, de répondre par l’empathie, l’écoute, l’ouverture, la bonté aux actes abjects et aux événements violents. J’ai nourri mon esprit de beau, j’ai cherché des voies saines me trompant souvent encore sous le poids des discours malsains et de ma faille narcissique. Jusque dans la dégénérescence physique alors que la mort rôdait au plus près, j’ai tâché de rester digne, entière, authentique, sincère, l’âme belle. Envers et contre toutes les prédestinations sociales, j’étais à l’université, j’ai trouvé un emploi humain, je résiste à la morosité généralisée, je ne sombre ni dans les drogues, ou la misère et encore moins dans la facilité. En permanence, je lutte contre l’enfermement et le jugement hâtif. Je vis ma vie avec la volonté de rester intègre, au plus près de mes convictions profondes.

    Relaté ici, ce changement d’orientation est long alors qu’à cet instant de notre conversation, l’éclair se fit à mon esprit tel une fulgurance évidente en quelques secondes. Je n’eus qu’un silence fugace et ces mots : « Quand j’y pense, finalement, je suis une force de la nature. Bien peu sont capables de supporter ce que j’ai traversé. »

     

    Depuis ce moment, je songe avec joie à cette formulation, à l’effet qu’elle produisit en moi, de ce qu’elle reflète de mon parcours, je m’y baigne et m’y nourris l’âme.

    Grand merci à mes chers interlocuteurs d’avoir permis cette conscientisation.

     Parce que si je sens en moi cette force au- delà de tout ce qui est palpable,  mesurable, calculable, au-delà de bien des frontières, je suis heureuse de rencontrer tant d’anges gardiens.


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  • Parce que je suis constamment titillée par la curiosité et la soif de découverte, je ne suis pas forcément adepte de l’unanimité et du consensus, j’aime à découvrir d’autres ensorcèlements du monde, à partager et m’enrichir d’être déstabilisée, conduite vers d’autres angles de vue. Aussi, si vous n’êtes pas d’accord, n’hésitez pas à le dire en commentaire, sans violence il va s’en dire (en outre, excellent exercice de communication non violente ! ).

    Je l’avais d’ailleurs noté en préambule dans l'Accueil.

     

    Pensée spéciale pour Mag. coeur-qui-eclate-autour-de-la-t-te.gif


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  • Ces temps- ci, je suis très fatiguée. Les activités quotidiennes accaparent mon énergie et aussi stupide que ce soit, je trouve même difficilement de la volonté à pratiquer le Qi Gong. Vaquer à mes soins quotidiens liés à la maladie et ses handicaps, préparer à manger, ranger et nettoyer - à minima, travailler, faire les courses, la vaisselle et le linge et me voilà très lasse. Gérer le budget mini- riquiqui en calculant comment venir à bout des dépenses élémentaires et de base (se loger, avoir de l’eau, de l’électricité, de quoi manger) n’est pas envahissant certes cependant chaque jour est un questionnement sur le plan individuel et collectif : comment terminer le mois? Comment tenir les réserves alimentaires assez longtemps ? Comment habiller et chausser mon garçon qui grandit si vite ? Pourquoi donc la situation est- elle constamment bloquée malgré mes démarches internes et externes ? Comment une société peut- elle traiter aussi violemment ses membres ?

    Je n’ai pas besoin de recevoir un poisson, j’ai besoin de pouvoir pêcher.

    Mon combat ne s’alimente pas de volonté de profiter ou de profit, il ne tient qu’en un seul terme : dignité. Il n’est pas normal et humainement soutenable d’avoir à se battre pour préserver sa dignité, une véritable société humaine digne de ce nom en est garante.

    Utopie n’est pas chimère.

    Alors, ma foi, je continue de méditer, d’être présente à mes actes, de travailler et de vivre avec humanisme.


    Il y a quelques jours, fiston était très fâché, désagréable, voire agressif. Me doutant bien qu’il me parlait de lui par son attitude, je l’interrogeai sur les raisons de son comportement. D’abord, il évoqua ses reproches à mon encontre en longue diatribe.

    -       Qu’est- ce que ce serait pour toi une mère idéale alors puisque je ne réponds pas à tes attentes?

    -       Une mère qui a de l’argent !

    -       Ah bon, et c’est tout ce que tu changerais ?

    -       Oui, oui !! La même que toi en caractère, comportement, tout ça MAIS avec de l’argent !

    Je réfléchis quelques secondes, interpelée par sa demande. J’écoutais ensuite la liste de ce qui lui faisait envie observant les variations au fil des mois, semaines ou jours. Après tout, ce n’est pas le manque de ces choses qui le blesse, c’est plutôt le fait de les voir chez d’autres et l’envie provoquée en lui.

    -       Je suis désolée que tu ne puisses avoir ce dont tu rêves. Je fais de mon  mieux pour chercher des solutions afin d’améliorer notre situation matérielle.

    -       Ouai m’enfin, ça ne marche pas tes trucs.

    -       Pour l’instant, oui ; cela ne m’empêche pas de continuer tout le temps. C’est loin d’être facile tu sais bien.

    Nouvelle pause de silence en réflexion.

    -       C’est un choix de société.

    Actuellement, ne comptent que le profit, l’argent, le matériel.

    Imaginons une seconde que je reçoive un euro pour toutes les personnes que j’ai aidées, accompagnées, écoutées…

    Il me coupa la parole :

    -       Oh ben maman, tu serais millionnaire !!!

    Honnêtement, j’ai pris ses remarques pour des compliments et je suis heureuse de notre échange. Ensuite, j’ai entendu ses envies, ses frustrations, je lui ai laissé la place demandée et depuis, il est sorti de sa colère, bidouillant, réfléchissant à des solutions pour dépasser les limitations matérielles. En lui- même, il sait que mes choix de vie touchent à des valeurs fondamentalement humanistes, que je suis en harmonie et paix avec moi- même, que mon interne et mon externe parlent de concert. Cette richesse-là ne se mesure pas avec les valeurs comptables actuelles.

    Pourtant, le quotidien matériel reste identique à l’heure actuelle et nous sommes en survie sur ce plan malgré toutes mes démarches, mon cheminement, cette énergie et cette volonté dont j’ignore où elles puisent leurs ressources. Je me sens préoccupée vaguement, en surface, ma joie de vivre, d’être au monde et à soi n’étant pas entamées.


    Il y a plus d’un mois, je constatai des vertiges, un malaise diffus au quotidien et une grande fatigue. Rendez- vous chez le médecin : petite tension d’emblée. Traitement homéopathique pour améliorer les nuits en sueur, les rêves agités et un petit coup de pouce au tonus. Léger mieux puisque les vertiges disparurent.  Une semaine après, je rencontrai un thérapeute pharmacien de formation, naturopathe, iridologue et Cie par conviction. Questionnaire d’une heure puis plongée dans mes yeux. : «  Ah, ça se voit que vous avez une bonne hygiène de vie ! Il n’y a rien à redire ! »

    Les seuls marqueurs sont : le système nerveux central (Devic, évidement) et… le stress.

    « Ces préoccupations matérielles quotidiennes me mineraient- elles plus que ce que j’imagine ? » pensai-je au fil des jours.

    Aujourd’hui, je me dis que la frontière est ténue entre le système nerveux régissant le corps et celui régissant les émotions, les pensées. Ils sont intimement liés, leur proximité infinitésimale. Les douleurs aléatoires, variables, capricieuses des dernières semaines sont peut- être le reflet de ces préoccupations primitives quant à nos besoins élémentaires d’abri, de sécurité, d’eau, de lumière, de chaleur constamment sur la tangente, les caprices critiques du système urinaire, le reflet de mes peurs instinctives, la fatigue récurrente, le reflet de l’énergie dépensée afin de parer à ces besoins élémentaires. Je n’en sais rien, je ne contrôle rien. Je vis, je m’adapte au gré des circonstances continuant mon chemin vers l’abondance. Et je n’appelle pas le neurologue parce que je ne saurais quoi lui dire (déni ou lucidité ?).

    Ainsi, je travaille, je m’occupe de moi, de mon fiston, de notre foyer, de mon budget, de notre présent, de notre avenir, de nos besoins, de nos envies, de nos rêves, de ceux qui croisent mon chemin puis je tricote, je lis, j’écoute, je couds, je pense, je dessine,  j’élabore des projets créatifs et pratiques, je médite, je médite, je médite. L’énergie d’écrire vient ponctuellement, en accord avec mes possibilités, sans pression. La transition est là. Désormais, un autre rythme anime ce blog- déversoir, je ne suis plus dans l’urgence de survivre, je suis dans la marche engagée du quotidien.


     

    Impossible de la trouver en français ou en version originale, ceux qui connaissent les films reconnaîtront le passage ( traduction en dessous pour ceux qui ne parlent pas  italien) :

     

     

     


      Les deux tours, Peter Jackson. 

     

    - Vous êtes adroite avec une lame.

    - Les femmes de ce pays ont appris à les manier; celles qui n'en ont pas meurent par elle. Je ne crains ni la douleur, ni la mort.

    - Que craignez- vous, gente dame?

    - Une cage. Rester derrière des barreaux jusqu'à ce que l'usure et l'âge les acceptent et que toute forme de courage ait disparu irrévocablement.

    - Vous êtes fille de roi, damoiselle protectrice du Rohan, alors ceci ne sera pas votre destin.

     


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  •  Mine de rien, cette quête d’explicitation de ma colère me conduit bien au- delà de ce que j’entrevoyais à l’écriture du premier article sur ce sujet. Les silences entre chacune des publications sont le reflet du temps dont j’ai senti le besoin. La nuit voit se multiplier les rêves agités, les journées en deviennent traînantes. Lâcher prise fut une nécessité, rester chez moi un but quotidien, centrer constamment mon attention à mes actes et gestes afin d’y être présente et surtout ne pas penser, ne pas analyser, dépasser le mental ; quotidiennement, j’ai donc médité. Je savais qu’un article sur la demande se préparait, quelques bribes de phrases survenaient mais manquaient un fil conducteur, une énergie.

    Hier soir, j’eus une pensée fugace pour cette peur terrible formulée au dernier article et je réalisai en quelques secondes qu’elle parlait également de mon enfance, de ma jeunesse. Longtemps, constamment, quotidiennement, j’ai vécu dans la violence, les adultes ont détourné la tête, des chapes de plomb se sont succédées. Non seulement je vivais dans l’insécurité et la peur, et en plus, mes besoins fondamentaux étaient niés. Parce que les plus proches étaient aveugles et sourds à leurs propres sentiments et besoins insatisfaites, qu’il leur était insupportable de regarder en eux- même hors des jugements, accusation/ victimisation, haine/ culpabilité, destruction/ auto destruction, fuite/ sentiment d’impuissance, il leur était impossible de simplement accorder de la place à mes besoins (à ce je, j’ajoute ma sœur en pensée), ils en sont devenus destructeurs, maltraitants. Mue par un instinct de survie et une volonté de vivre profonde, je me suis engouffrée très tôt dans la culture, la pensée, l’art,  la réflexion sur l’humain, la création; j’ai pris souvent la fuite, mon fils naquit par accident, j’ai lutté, j’ai lutté avec opiniâtreté ; une part de moi refusait d’entrer dans ces jeux de violence, de destruction, de mortification, alors je me suis révoltée, j’ai fait comme j’ai pu au gré des circonstances et de mon état. «  Votre vie est un long parcours de souffrance et de violence mais comme vous êtes bonne et intelligente, très tôt, dès la petite enfance, vous avez décidé de chercher à comprendre. » m‘avait dit ce thérapeute en Allemagne.

    Avec SeN, j’ai répété la même danse maléfique car cette ambiance ressemblait à ce que j’avais connu, j’ai ouvert la porte à une nouvelle maltraitance par non- estime de moi.  Autodestruction programmée jusqu’à la maladie auto immune en cri d’alarme d’un corps porte- parole d’un intérieur confronté à sa survie. Me reviennent en mémoire les paroles de ce même thérapeute vu en juillet 2006 : «  Il faut que vous fassiez une psychanalyse parce que si vous arrivez à guérir de ça, vous ferez autre chose ! », je mesure chaque jour plus la pertinence fulgurante de ces quelques mots.

    Finalement, la maladie et l’éventualité d’une mort proche et rapide dans d’atroces souffrances ont été un déclic, il y avait urgence à régler ces vieilleries afin de ne pas en charger mon fils,  et surtout pouvoir partir en paix avec moi- même. S’en suivit ce parcours que je raconte sur ce blog, en pointillé : le retour à la vie, au corps et à soi, les rencontres, la découverte de ma valeur, le Qi Gong, la communication bienveillante, ces deux jours méditatifs de stage (1-2-3-4), l’ouverture des yeux, la psychanalyse, … Tout s’éclaire d’une logique incroyable désormais.

    La violence ordinaire, sourde, invisible était omniprésente dans ma vie. Une part profonde et indicible de moi a choisi de s’en défaire, d’en sortir luttant contre cet inconscient conduisant à répéter incessamment les mêmes scénarii malsains avec le vain espoir de réparer des plaies anciennes. Quel marathon laborieux et douloureux! Et pourtant, si la mésestime de soi fut évidente, j’ai choisi d’être guidée par l’amour, la vie, la joie et non la rancune, la mort, la haine. L’expérience de la maladie m’a acculée à ce qu’il y a de plus élémentaire en l’humanité : la question de sa survie (je ne parle pas du groupe humain mais bien de ce qui fait notre essence, notre identité d’espèce- par- delà l’égo, évidement). Ce que j’ai vécu, la chance inouïe d’en sortir, la rage de vivre m’ont amenée à vouloir agir, il n’était plus question de gâcher ce temps si fugace et précieux qu’est la vie d’un être humain.

    Ce blog a été induit par la demande de soignants de l’hôpital, je m’y suis mise dubitative. Peu à peu, il est devenu le déversoir de ces années de quête de sens (logique que mon cher ami Boris y paraisse tel un ange gardien bienveillant puisque sa rencontre est à l’image de ce que je vivais), ce blog est devenu un plaidoyer contre la violence ordinaire et là réside la demande.

     La conscience des sentiments et besoins insatisfaits ne suffit pas, la clarté acquise est certes bénéfique mais en rester là équivaut à garder les bras chargés voire encombrés de ces trouvailles. Afin de continuer sur une voie vivante, il s’agit de passer à l’étape de la demande, elle seule permet de dépasser la violence ordinaire. Faire une demande c’est être en lien avec soi quand elle est faite à soi, c’est être en lien avec l’autre quand elle est faite à l’autre. Elle a à être concrète et négociable, accepter que l’autre puisse ne pas y accéder n’est pas aisé mais ô combien nécessaire.

    Mes demandes à SeN, à ses parents n’ont pas abouti et j’étais en colère pour cette raison, j’avais à accepter ces refus. J’aurais pu choisir le reproche et la rancune perpétuelle, les condamner, les accuser, j’ai préféré chercher à  voir clair en moi et je me suis faite la demande de tout mettre en œuvre pour y arriver. Doucement, lentement, j’y suis parvenue. Aujourd’hui, mon besoin de reconnaissance de la maltraitance dont j’ai fait l’objet ainsi que le besoin de justice qui l’accompagne sont sans issue, c’est verrouillé et je m’épuiserais sur cette voie stérile. Alors, je suis allée voir plus profond ces derniers jours et je réalise que ce blog est à l’image d’une demande que je n’avais pas formulée explicitement: je veux sortir de la violence ordinaire silencieuse destructrice pour moi et pour les autres. Dans ce but, je témoigne des circonstances anodines où elle s’installe. Donner du sens à mon vécu, à mes ressentis diffus et sensibiliser celui qui se perdrait ici à ces petits riens malsains pour ne plus me retrouver dans une telle situation et l’éviter pareillement ne serait- ce qu’à une seule personne. Dans une dynamique de vie, logiquement, naturellement, j’offre également des pistes de réflexion, de résolution. Il s’agit donc ici d’ouvrir les yeux sur les ravages de la violence ordinaire d’autant plus insupportable qu’elle touche des personnes vulnérables et fragiles.

    A moi- même, je fais la demande :

    -       de me préserver : Concrètement, j’ai élaboré un réseau de contacts avec des interlocuteurs professionnels efficaces dont je sais qu’ils sauront réagir de manière appropriée en cas de nouvelle dégringolade physique, je les contacte également face aux difficultés matérielles afin de limiter les dégâts de la violence de la société. Désormais, je médite sur les voies permettant d’améliorer ma situation financière, matérielle.  Je m’attèle surtout à transformer ma pensée vers l’abondance.

    -       De continuer mon action quotidienne : d’abord Qi Gong et  communication bienveillante pour agir à l’échelle personnelle puis garder au cœur la volonté de continuer mes écritures et interventions en reflet d’un cheminement intérieur avec l’espoir que cela puisse être utile à d’autres pour sortir de cette violence ordinaire et sournoise.

    A vous qui passez et acceptez de l’entendre, je fais la demande : prenez soin de vous.

    N’imaginez pas un instant être capable de prendre soin de qui que ce soit si vous ne le faites pas avec vous- même ! Cherchez la clarté, accordez de la place à vos sentiments et ressentis, identifiez vos besoins insatisfaits et faites la demande qui permettra d’être en relation à soi, à l’autre et de dépasser cette violence ordinaire.  Je n’ai pas dit autre chose aux élèves infirmiers de première année lors de ma dernière intervention.

     

    Ces articles sur la colère ont nécessité du temps, de longues heures de méditation. Les esclandres aux déclencheurs matériels m’ont conduite à plonger très profond et j’en suis heureuse.  Maintenant, je sais que je suis ailleurs. SeN, les siens n’occupent plus mon esprit, je ne suis plus dans la confusion à leur évocation. Ils ont été des révélateurs bien que j’eusse préféré ne pas passer par ces épreuves, c’est ainsi. Désormais, je suis à la vie, à l’être, à la joie, ce que je vis n’a plus rien à voir. C’est d’autant plus flagrant que je vois mon fiston si mal en point il y a quelques mois sortir lui aussi de la mortification et plonger dans la vie en lui et autour de lui. Mon travail interne rayonne alentour, au bénéfice de mes proches et amis, de certains de mes soignants, des camarades d’activités, des voisins, de mes élèves, des rencontres fortuites, au hasard au quotidien, partout, partout. « Une étoile » m’a si joliment dit Yolande. Je me fais la demande de continuer à alimenter son feu.

     

     

    Look no further
    Look no further
    I look no further

    Cruelest, almost
    Always to ourselves
    It mustn't get
    Any better, off

    It's in our hands
    It always was
    It's in our hands
    In our hands

    It's all there
    In our hands
    It's all there
    In our hands

    Well, now aren't we
    Scaring ourselves
    Unnecessarily?
    Aren't we trying too hard?

    'Cause it's in our hands
    It's in our hands
    It's all here
    It's in our hands

    Look no further
    I look no further

    It's in our hands
    It always was
    It's in our hands

    It's in our hands
    It's in our hands
    It's in our hands

     


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  • Après l’entrevue au jardin, je revins vers Nadine car nous parlions à notre dernière réunion de ces relations interpersonnelles houleuses. Nos expériences respectives conduisent à la réflexion et ensemble, nous cherchons des alternatives à la violence en partant de situations concrètes. Mes esclandres avec SeN sont parfaits sur ce point. A nouveau, elle m’accompagna, me souffla des pistes de réflexion sur lesquelles je méditai ; en parallèle, j’entamai l’écriture de mes articles sur la colère. Doucement, au fur et à mesure, sans violence, reproche, accusation, culpabilité/ culpabilisation, mes besoins insatisfaits trouvent leur place et sont entendus. Les voici sur une trame quasi chronologique :

    -       besoin de constance: les doutes,  changements d’avis, avancées puis reculs dans l’expression des sentiments, buts et projets de SeN m’ont laissée dans le désarroi. Chacun des revirements me conduisaient à proposer des solutions en vaines négociation, j’en fus épuisée.

    -        besoin de reconnaissance, d’acceptation de mes besoins, de mes aspirations, de mes rêves, de mes espérances.

    -       besoin de concertation, de discussion, de partage, d’écoute

    -       besoin de sécurité et d’avoir des repères, des projets, des buts, de savoir où j’allais.

    -       Besoin de cultiver le beau autour de moi. La guerre de tranchée autour des travaux de la maison et du jardin ne permettait nullement une approche saine de ce besoin. Là-dessus, et pour d’autres points, le besoin d’avoir un impact sur l’environnement et les événements resta lettre morte.

    -       Le besoin d’être acceptée pour ce que j’étais. Les remarques, critiques acerbes et perpétuelles sur mes tenues, mes coiffures, mon maquillage, mes chaussures, mes choix de couleur et d’association me tapaient sur les nerfs et provoquaient des réactions viscérales, emplies de colère, de révolte. Le besoin d’estime de soi n’était pas folichon avant, ce genre d’attitude à mon égard l’enfonça d’autant plus violemment que nous étions censés être un couple fondé sur des sentiments réciproques. J’évoque également rapidement cette récurrence à nous positionner fiston et moi en dehors de la famille.

    -       Les besoins de rituels,  d’officialisation, de naissance. Rien que de les évoquer, j’ai comme un écœurement général. Refus du mariage, du pacs, de l’enfant. Pourquoi fêter les anniversaires ? En dehors de la famille (majoritairement la sienne puisque la mienne est riquiqui), nous n’avions quasiment pas de sorties ou d’invitation. De toute façon, nous étions loin de tout et tous. Souvenons- nous également de cette fête de Noël 2006 que je crus être la dernière.

    -       Le besoin de réalisation de soi était non seulement insatisfait mais en prime complètement nié par la réponse sempiternelle des « Pourquoi faire ? Ça sert à quoi ?» 

    -       Le besoin de relation et d’authenticité dans la relation ainsi que celui de clarté. Bien des informations m’étaient cachées, je ne savais rien de certains points pourtant intimement liés à la vie commune. Nos véritables rencontres étaient tellement rares que je me demandais ce que je fichais là, avec le sentiment que fiston et moi étions de trop, à peine tolérés à côté de SA famille.

    -       Besoin de découvrir.  Trois voyages- vacances en 8 ans et la bataille fut rude pour partir. Tant que cela ne l’intéressait pas pleinement dans ses domaines connus, il ne venait pas et je partais seule avec fiston en visite au loin, aux expositions, au cinéma, aux spectacles. D’ailleurs, lui, partait souvent seul de son côté ne souhaitant pas nous traîner parce que nous étions trop pénibles dans notre comportement avant la maladie et ensuite parce que mes handicaps étaient trop lourds.

     

    Il y en aurait encore d’autres, je n’en doute pas. Ce sont néanmoins des plans grandement négociables, aux possibilités multiples et variables à l’infini. Avec un tant soit peu d’échange, de partage, de discussion, d’honnêteté, de respect mutuel,  d’imagination aussi, nous aurions pu trouver des solutions…  ou j’aurais pu partir sur un constat d’échec relationnel notoire (ce que j’envisageais avant d’être malade).  Mais là où je crois que la plus grande souffrance s’est faite, ce fut l’insatisfaction et la non considération de mes besoins VITAUX aux heures terribles de la maladie !

    -       Besoin de boire et manger. Clouée au lit, je ne pouvais plus m’occuper de quoi que ce fut, j’étais tributaire d’autrui pour la préparation des repas, pour la découpe des aliments, très mal- voyante, pour la séparation des parties abimées ou grasses, entre autres exemples. Pendant des mois, mes envies et désirs alimentaires étaient à peine entendus. Quand je proposais quelques arrangements, c’était mal supporté. Les achats m’échappaient, la composition des repas également. Honnêtement, ces semaines passées à manger ces préparations rapides et fades ne furent guère agréables. Pour simple constat, quand j’entrai à l’hôpital en janvier 2007, je ne pesais plus que 49 kg. La fonte des muscles due à mon inactivité totale n’explique pas tout.

    -       Besoin d’éliminer les déchets. Voilà certainement un des points les plus délicats inhérent au précédent. J’étais complètement paralysée, les systèmes d’évacuation détraqués par l’atteinte sur la moelle épinière nécessitaient des attentions toute particulières. Les protections étaient mal supportées parce que coûteuses et encombrantes dans la poubelle. L’idée que des urines et des selles s’évacuassent en dehors des sentiers habituels était insupportable. Les écoulements nocturnes me valaient des protestations et des reproches et/ ou quand j’avais tenté de me rendre aux toilettes seule et qu’il était nécessaire de nettoyer les accidents. L’évacuation des selles telle qu’elle était opérée étaient une torture et une humiliation qui me laissaient fréquemment en larmes tourmentée par la culpabilité d’infliger un tel spectacle. Instinctivement, j’avais compris que les irrigations coloniques m’étaient bénéfiques mais j’eus à combattre âprement pour y être conduite malgré mon état et les oppositions. Le refus des travaux pour aménager les toilettes ne fut que l’ultime surdité à l’égard de mon besoin vital d’évacuation. S’il fabriqua des rampes avec des accoudoirs de bancs récupérés, ce fut de loin insuffisant au regard de mon état aux pires heures. Souvent, je tombais sans pouvoir me relever, souvent j’échappais aux bras qui me portaient et un jour, un ambulancier dut même venir m’en tirer car ma mère n’avait plus de force pour me rhabiller et me transférer sur le fauteuil roulant.

    -       Être propre. Quand j’étais à la maison en mauvais état, des travaux furent recommandés pour aménager la salle de bains. Refus cinglant. D’abord il y  eut une planche en travers de la baignoire rapidement inexploitable, les ergos nous prêtèrent ensuite un siège pivotant. Sœur Thérèse fit part du besoin d’avoir deux personnes pour me laver, elle ne pouvait me porter seule. Il ne voulait pas d’étrangers dans la maison, il la toléra elle quand il travaillait du matin et elle ne venait pas quand il était présent. Devant la difficulté de la tâche avec mon corps en contorsion au contact de l’eau chaude et ou glissant sur le siège, j’entrais en combat quotidien pour exiger d’être lavée. L’arrivée d’une équipe supplémentaire exigea un front commun de toute l’équipe de l’hôpital à mon retour.  

    -       Se vêtir, se dévêtir. Quand le corps échappe, les membres deviennent ballants et il est difficile d’habiller un corps récalcitrant, incontrôlable. Je subis donc rapidement les tenues peu avenantes. Je dus batailler chaque matin avec SeN pour ne pas traîner en vêtements de nuit ou survêtement difforme toute la journée.  Que dire alors de la coiffure, de l’épilation, du parfum et autres futilités ?  La moindre des choses que je demandai était de sentir bon… demande constamment répétée comme si elle n’avait pas valeur à être retenue.

    -       Maintenir sa température. Dans la maison aux multiples possibilités, régnaient les courants d’air. Avant la maladie, ils étaient désagréables , dans la douleur physique, ils devinrent abominables. J’avais beau me couvrir de couches de laines et autres textiles chauds, mon corps était transpercé d’airs cinglants et pointus. Le changement des portes et fenêtres effectués par les parents- propriétaires fut insuffisant. Et il n’était pas question de déménager.

    -       Bouger, avoir une activité, maintenir une bonne posture, être stimulé. Mes envies de sortir, de voir et/ ou sentir autre chose que ce qui se trouvait entre les quatre murs conduisaient à des conflits. Comme il avait refusé les travaux de mise en accessibilité, je restais tributaire du bon vouloir de porteurs. Constamment enfermée, j’étais heureuse des séances à l’hôpital, je voyais du monde, je discutais, j’avais des relations, je bougeais, je respirais. En dehors de celles- là, aux pires heures de la fin d’année 2006, je me retrouvais souvent complètement seule pendant des heures,  incapable de changer les stations de radio ou les cd sur la chaîne puisque je ne voyais rien des touches de la télécommande et que l’appareil était trop éloigné de moi,  incapable de bouger sur un matelas et un lit inadaptés. N’ayant personne pour me tourner dans le lit régulièrement, je commençai à avoir des escarres.

    -       Être en sécurité. Que ce fut par le non aménagement de la maison, de son intérieur et de son extérieur, les refus et barrages aux aides techniques et humaines, ma solitude pendant des heures alors que j’étais incapable de bouger, d’appeler ou de répondre au téléphone, d’ouvrir ou fermer les portes, les fenêtres, je fus dans une très grande insécurité. Il y eut en plus cette foutue incapacité à prendre une décision, ne serait- ce que pour contacter un médecin en urgence alors que j’étais complètement effondrée, dans des douleurs incommensurables, clouée au sol, au canapé, au lit. En ces moments terribles, je devais hurler à SeN de le faire car il était tétanisé à l’idée d’exécuter cet acte.

     

    Evidemment, dans cette non- considération de mes besoins vitaux, comment pouvait—il y avoir de la place pour les besoins moins élémentaires ?

    -       Avoir de l’aide pour l’entretien de la maison, du linge pour les besoins d’ordre et de propreté.

    -        Accéder à ma demande d’ordonner les choses avec constance afin que je pusse compenser ma déficience visuelle

    -       Avoir une vie sociale, culturelle, nourricière d’âme et d’esprit. Seul fiston âgé de 9 ans prit le temps de me faire la lecture et de mettre des films en audio vision. Mes limites physiques étaient souvent prétexte au refus de sorties parce que c’était trop compliqué à gérer. Les quelques-unes effectuées le furent par mon opiniâtreté et mes prises de décision face aux adaptations nécessaires.

    -       Alors que je me sentais mourir, que je me préparais à cette fin ultime, j’ai passé outre mes besoins parce que je pensais que bientôt je ne serais plus là, je ne me souciais que de mon entourage et de leur vie par- delà ma mort. J’avais besoin d’être soutenue, accompagnée, considérée, de faire la paix, de partager des instants précieux de profonde communion, de régler nos vieilleries et la vie d’après moi afin d’être sereine quant à l’avenir de mon fils, de mes affaires. Je voulais pouvoir mourir en paix, apaisée et autour de moi, se multipliaient les conflits, les cris, les colères, les fuites, l’inconstance et l’incapacité à prendre des décisions ou de changer des habitudes.  Quand j’allai mieux, j’aspirai à une vie pleine et entière, à la joie d’être présente au monde, de partager dans l’authenticité des relations assainies et positives ... et je me retrouvai face à un mur.

     

    Certes la dégringolade fut fulgurante et tout est allé si vite que l’adaptation nécessitait des décisions rapides. Si SeN fit de son mieux avec l’énergie du désespoir, il n’entendit pas mes besoins, il alla jusqu’à les nier refusant les aides, les aménagements. Dépassé, choqué, il cherchait à tout contrôler afin d’apaiser SES angoisses. Seulement, avec cette attitude, je subis des conséquences dignes de la maltraitance par négligence ou obstacle aux soins. Là, maintenant, réside la raison fondamentale de ma colère.

    Quand il était présent, attentionné, à l’écoute de mes besoins, j’étais heureuse, je me répétai à l’envi «  Ca y est, il a compris ! Nous l’aurons notre belle vie ensemble désormais » ce qu’il me promit lui aussi à plusieurs reprises lors des crises de larmes et de peurs. Et puis, si peu face à l’ampleur de la déferlante, le pire étant certainement l’absence de discussion, de négociation ; les seules réponses étaient des ultimatums, des menaces, des jugements, des colères conjugués à des longs intervalles d’indifférence, de silence, de renfermement, de mutisme ou de plaintes en victime. 

     

    « Je ne te pardonnerai jamais ! » lui ai- je répété à plusieurs reprises. Grâce à Nadine, j’y ajoute « tant que je n’aurai pas le sentiment que toi et tes parents  aurez mesuré le mal que vous nous avez fait à fiston et moi ! ». Pourtant, rester dans cette rancœur n’a pas d’issue et je n’y songe que lorsque les circonstances m’y ramènent, de moins en moins, en parfait règlements de contes.

    Je sais dorénavant que ce chambardement interne est le reflet confus d’une notion clairement définie : la peur terrible de me retrouver complètement  dépendante  de personnes tellement empêtrées et aveuglées par leurs propres sentiments et besoins insatisfaits qu’elles en deviennent maltraitantes par incapacité à entendre mes besoins vitaux .

     

    Enfin, j’ai identifié mes sentiments, mes besoins insatisfaits, arrive maintenant la dernière étape fondamentale et en dynamique vivifiante, celle de la demande.


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  • De longs mois furent nécessaires afin de démêler ce flot de sentiments envahissants, mouvementés et aléatoires conduisant à mes colères et je n’y serais pas parvenue sans l’aide rencontrée au long de ce parcours. En outre, l’écriture de ces articles me fait progresser grandement car au départ, j’avais certes quelques identifications réussies mais je ne soupçonnais pas que ces deux ou trois besoins insatisfaits en cachaient tant d’autres. La vague est immense. D’abord, je parlerai de ce que j’ai trouvé au gré des constatations consécutives aux expériences puis j’ouvrirai les vannes de ce que ces écritures récentes ont révélé. Allons- y, c’est parti pour la déferlante !

    Pour commencer.

    Si la psychanalyse permit un travail de fond sur mes fonctionnements, le sens attribué aux  événements de ma vie, la quête de soi passa grandement par nos échanges en réunion de communication non- violente/ bienveillante. Empêtrée dans mes émotions, je partageais régulièrement mes aventures. Elles m’accompagnaient et nous cherchions ensemble ce qui se jouait, ce qui revenait constamment sur le ring.  Non que j’aie pu identifier tous les besoins insatisfaits (cela viendra par la suite), je réalisai alors combien leur négation avait été une tragédie. Parce que le besoin n’a pas besoin d’être satisfait et qu’il a simplement besoin d’être entendu, je m’étais retrouvée avec une charge immense, celle de ces besoins insatisfaits, leur non- entente, leur négation et donc l’impossibilité de négocier. Face à l’impasse, à la surdité environnante, que pouvais- je faire d’autre que de HURLER mon insatisfaction sur la toile, à la face du monde ? Malgré les colères, les cris, les menaces, les jugements assénés grandissant avec la multiplication des articles, je m’y engouffrais et déversais ce que je ne pouvais plus supporter en silence. Parce que j’avais simplement besoin d’être entendue avec bienveillance, sans jugement.

     

    Ensuite

    Mon déménagement a été très compliqué. A tout petit budget, je n’avais pas les moyens de payer une société de transport ; les bonnes volontés ne manquaient pas mais trouver le bon jour, la bonne heure, les bonnes circonstances déboucha sur rien. Je songeais à contacter une entreprise d’insertion et demander de l’aide à tout vent quand SeN signifia qu’il ne voulait pas que des étrangers rentrassent dans sa maison, il préférait s’en charger lui- même. J’étais donc coincée et tributaire de sa bonne volonté. Il toléra quelques voisins et amis ponctuellement mais cela prit des semaines, des mois. En attendant, je vivais avec mon fiston en camping, dans le plus grand dénuement. Ce ne fut pas le plus gênant car je suis d’un tempérament à m‘adapter facilement, le pire vint des changements de décisions, des colères, des flous renvoyés par SeN. Dans ces sables mouvants, je pris peur.  Je craignais ne pas récupérer mes affaires. J’avais besoin de constance et d’être assurée du bon déroulement de ce déménagement. Les changements incessants et les coups d’éclat me laissaient en désarroi, en insécurité. S’y ajoutait un profond sentiment d’injustice car pendant que fiston et moins vivions de très peu, il avait toute la maison, jouissait de ce qui m’appartenait tant que c’était chez lui alors que j’ai nettement moins de possibilités matérielles et financières que lui.

    Puis.

    Nous partîmes en vacances aux Amanins à l’été 2010.  Alors que le séjour se terminait, je réalisai tout à coup que, à aucun moment, je n’avais eu de pensée pour SeN et les siens, je les avais oubliés. Je me sentis légère et heureuse présageant de ma libération vis- à-vis d’eux. Naturellement, l’explication me vint. En ces lieux, nous partagions activités, idées, repas, les relations se multipliaient au gré des circonstances, nous étions entourés, en sécurité. Si quelque lien me retenait à SeN et les siens, c’était parce qu’ils avaient traversé la maladie avec moi, et dans ma peur de me retrouver confrontée seule aux mêmes épreuves, je me rattachai à ce qu’ils représentaient en aide potentielle. Evidemment, je compris dans la foulée l’absurdité de ce genre de pensées inconscientes ; ils avaient coupé les ponts, ne voulaient plus rien savoir de moi et SeN n’avait que colère à mon encontre, comment pouvais- je espérer compter sur eux ? J’avais besoin d’être rassurée sur le fait que face à une recrudescence de la maladie, je ne serai pas abandonnée à mon sort, seule. Par extension, je réalisai que j’avais besoin de me savoir acceptée telle que j’étais, d’être entourée, rassurée et soutenue en cas de difficultés.

    Alors.

    Survinrent les derniers accrochages autour du jardin relatés auparavant. Ma peur de perdre persistait toujours face aux changements et colères, pareillement pour ce sentiment d’injustice. Refusant d’en rester aux insultes et jugements émis autour d’un déclencheur prétexte, j’y revins et l’écoutais. Je tâchais de l’accompagner dans l’identification de ses sentiments, la colère n’étant qu’une surface. Quand il eut la place dont il avait besoin pour s’exprimer, il put alors entendre ce que j’avais à dire. J’essayai de rester chez moi, de parler de ce que j’avais ressenti, de ce que je traînais constamment et je surpris de temps à autre des paroles venues du creux de mon être en parfait reflet de ce que j’avais mis longtemps à identifier. D’abord, j’entendis ma souffrance et mon désarroi face à ses refus catégoriques, constants sans négotiation possible, je mesurai également la profonde déception pendant et après ces années cohabitées (« Je n’ai pas de mot pour dire quelle fut ma déception ! »), logiquement, cette abominable solitude quotidienne face au peu d’estime de mes besoins, de leur négation, l’absence de relation authentique puis il y eut le constat que je n’avais pas eu de place dans sa vie puisque d’autres et une en particulier l’occupaient tout entière. Je posais  désespérément les mêmes questions  « Pourquoi être venu me chercher ? Comment as- tu pu imaginer que nous pourrions construire quelque chose ensemble ? ». Leitmotivs sans réponse. Je racontai l’estime de soi trouvée, le goût et la joie de vivre, le refus de la violence et des relations toxiques, l’authenticité, le sentiment de vivre enfin et non plus survivre, le changement de pensées et de perspectives vers l’abondance, la clarté, la richesse d’une vie remplie d’expériences nourricières magnifiques. Pour rien au monde, il n’était question de revenir en arrière. Ce jour- là, des idées se firent limpides, je pouvais désormais aborder ma colère plus sereinement.

    Je n’imaginais pas à quel point les vannes s’ouvraient. Prochaine déferlante.


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  • Nous, humains avons tous les mêmes besoins.  Si l’évidence de respirer, manger, boire, dormir est commune, que savons- nous véritablement de nos besoins ? La pratique quotidienne a largement tendance à les nier, à les restreindre ou à les utiliser dans des buts calculés à profit, il n’est pas si aisé d’en prendre conscience, d’ouvrir son esprit, ses habitudes à leur présence et encore moins facile de les entendre, de les identifier, de leur accorder la place qu’ils demandent. Ainsi, souvent empêtrés dans le flou de nos besoins, nous jugeons violemment, nous insultons, nous donnons la responsabilité à l’extérieur de ce malaise que nous ressentons à l’intérieur. En outre, dès notre conception,  nous sommes structurés dans le jugement incessant à soi ou à l’autre. Quand un autre est lui aussi pris dans le flou de ses besoins, qu’il nous agresse, nous insulte, nous juge, nous nous le prenons en pleine figure et l’engrenage de la violence continue allègrement sans que rien ne soit résolu. Une des voies possibles afin de sortir de ces cloisonnements qui enferment, coupent de soi et des autres est un pas de côté, un recul, une question, la communication non violente/ bienveillante de Marshal Rosenberg, inscrite au patrimoine mondial de l’humanité à l’Unesco.

    J’avoue qu’à sa découverte, j’ai été déstabilisée, très dubitative, voire méfiante. Cependant, ma part vivante avait grand faim après la remontée ardue face à la maladie, les bouleversements opérés par la psychanalyse ; j’aspirais véritablement à d’autres comportements, d’autres relations. Ce ne fut certainement pas un hasard si je rencontrai Nadine et Yolande à ce moment alors que nous étions voisines depuis des années sans se croiser; mon mode vibratoire était en branle et résonnait en d’autres sphères. La vie cohérente et logique, constamment, nous renvoie à ce qu’il se passe en nous.

    D’abord, je pris conscience des liens qui nous unissent. Parce que nous avons tous les mêmes besoins (et les mêmes structures mentales), il est possible d’être relié à l’autre, à ce qu’il ressent sa présence n’étant pas nécessaire. Dans mon cas, l’expérience fut incroyable : alors que nous parlions d’une situation précise vécue par une des participantes, je ressentis précisément ce que vivait la personne non présente avec laquelle était le conflit. Ce fut fort et puissant, un éclair inattendu d’autant que je ne la connais absolument pas. A partir de là, je lâchai mes doutes et suspicions.  

    Je ne saurai dire quelle furent les étapes de mon apprentissage, ce fut une vague générale, un mouvement de fond indubitable. J’ai tâtonné dans ma vie personnelle avec des maladresses et des erreurs engendrant un changement total d’ambiance et de relation à mon entourage. Il y eut une recrudescence de violence et de scènes avec certains et la multiplication des rencontres avec d’autres. Un tri radical se fit entre ceux qui acceptent d’entrer en relation et ceux qui la refusent parce que c’est trop déstabilisant, inhabituel, dérangeant. Changer de mode relationnel effraie beaucoup car cela induit le changement d’habitudes profondément ancrées, un travail sur soi, une prise de conscience de sa responsabilité et la décision de sortir de fonctionnements anciens qui, bien que toxiques, sont connus et tellement rassurants du fait d’être connus ne fut- ce qu’inconsciemment.

    A priori, la communication non- violente/ bienveillante de Rosenberg est simple :

    A partir d’une situation concrète, identifier les sentiments et émotions sans jugement puis trouver le besoin non satisfait qui s’exprime en cet instant en n’oubliant pas  qu’un besoin n’a pas besoin d’être satisfait, il a besoin d’être entendu. Enfin, faire une demande négociable afin de tenter de répondre à ce besoin.

    Cette démarche s’effectue soit avec un interlocuteur autour d’un déclencheur qui a provoqué le conflit violent, soit avec quelqu’un que l’on accompagne, soit avec soi- même, à l’intérieur.

    Les difficultés résident dans les identifications des sentiments. Pour ce faire, je renvoie au livre de Thomas d’Assembourg, Cessez d’être gentil, soyez vrai ! où sont listés les sentiments :

    -       ceux que nous éprouvons lorsque nos besoins sont satisfaits : à l’aise, allégé, amusé,  calme, béat, comblé, confortable, content, enjoué, fier, gai, heureux, intéressé, proche, radouci, ravi, satisfait, serein, stimulé, touché, vivant, entre autres

    -        ceux éprouvés lorsque nos besoins ne sont pas satisfaits : abattu, alarmé, agacé, apeuré, blessé, bloqué, contrarié, crispé, déçu, démoralisé, démuni, ébranlé, effrayé, épuisé, écœuré, excédé, fâché, grognon, honteux, inerte, irrité, jaloux, morose, lourd, nerveux, paresseux, perplexe, avoir peur, ramolli, renfermé, secoué, seul, sombre, soucieux, tiraillé, triste, vexé, etc.

    -       et - merveilleuse et intrigante liste !- ceux que nous croyons être des sentiments alors que ce sont des interprétations et des jugements de ce que l’autre nous fait, exemples flagrants : abandonné, abusé, acculé, attaqué, bête, coupable, délaissé, déconsidéré, dupé, trompé, écrasé, floué, harcelé, humilié, ignoré, incompris, insulté, isolé, jugé, manipulé, minable, menacé, mis en cage, nié, pas accepté, pas aimé, rabaissé, trahi, utilisé… etc. Cette dernière, en particulier,  me sauta aux yeux car je compris que chez nous, nous ne nous envoyions incessamment que des jugements et des interprétations, il y avait un sacré boulot !

    A mon humble avis, la priorité est de se relier à soi car :

    -       comment être relié à l’autre si nous ne sommes pas reliés à soi- même ?

    -       Comment identifier les sentiments de l’autre si nous ne savons pas identifier nos propres sentiments?

    -       ET comment identifier les besoins non satisfaits de l’autre si nous ne savons pas identifier nos propres besoins ?  

    L’empathie vis- à- vis d’autrui est une donnée que je connaissais bien, ma vie en est marquée. Doucement, je pris simplement conscience du peu d’empathie que je m’accordais. En relation fusionnelle, tout était mêlé et pendant des années, j’ai endossé et souffert des malheurs et souffrances d’autrui, incapable de m’accorder le droit d’être en souffrance moi- même ; en privilégiant prioritairement les besoins  d’autrui, j’étais incapable d’accorder de la place aux miens. D’ailleurs comment pouvais- je la leur accorder puisque je n’avais pas conscience que ces besoins existaient et étaient légitimes ? J’ai été d’une dureté extrême à mon égard et le prix fort en fut l’auto destruction programmée. Pas étonnant d’en arriver à une maladie auto- immune, finalement puisqu’apparemment les relations destructrices n’étaient pas suffisante dans mon programme malsain. Au fur et à mesure que je plongeais en moi, que je mis des mots sur mes sentiments, que je pris lentement conscience de mes besoins, je mis de l’ordre et de la lumière dans cette caverne sombre refoulée. Du coup, je devins plus clairvoyante des réactions d’autrui, je remis chaque sentiment et réaction à sa place, je sortis de la fusion, je détachai ce qui relevait de mon histoire et ce qui relevait de la sienne- car oui, dans chaque conflit, c’est tout notre histoire personnelle, nos ressentis et nos insatisfactions que nous remettons sur le tapis, balançons à la figure de l’autre ! Je ne me construisis ni une forteresse, ni une carapace, je m’entourai d’une bulle qui grandit constamment. Elle me protège des jugements et réactions de l’autre tout en me permettant de rester en contact avec lui et de lui montrer que je suis présente et ouverte à la relation, s’il est d’accord.

    Le changement est évident.  Je ne côtoie plus les mêmes personnes, je vis des moments intenses avec ceux qui sont restés dans mon entourage, ils avancent également vers des voies insoupçonnées par l’énergie et l’impulsion que j’ai données à ma vie et que je partage avec eux, les rencontres au travail, dans la rue, des endroits improbables, ne serait- ce qu’au téléphone ou sur la toile sont extrêmement riches, je lis physiquement les tensions qui se délient sur les visages, les corps, dans les yeux, dans la voix, je vois le soulagement et la joie des moments partagés. Néanmoins, c’est une tâche ardue et pénible souvent. La persistance des coups d’éclats, des insultes et jugements que je profère, ces colères et scènes que je vis en certaines compagnies en sont la preuve. Il n’y a que depuis quelques semaines que j’arrive enfin à entrevoir ces besoins insatisfaits qui me poursuivent depuis  des années, j’en entrevois surtout désormais l’ampleur.

    Quels sont donc nos besoins ?

     Les informations ne manquent pas sous le registre besoins fondamentaux.  Attendez- vous à être surpris de la longueur des listes !


    • Maslow proposa une pyramide : hiérarchie de bas en haut selon l'échelle des besoins prioritaires d'un individu.

     

     

    5 : les besoins de réalisation de soi

    4 : les besoins d'identification, d'estime, de réputation, de dignité

    3 : les besoins de reconnaissance

    2 : les besoins de sécurité

    1 : les besoins physiologiques (manger, boire, dormir)

     
    • Dans Cessez d’être gentils, soyez vrai ! , Thomas d’Assembourg propose:

     Survie :

    Abri, air, eau, mouvements/ exercices, nourriture, repos/ permanence, sécurité/ protection. (Ça commence bien déjà, non ?)

    Autonomie :

    Affirmation de soi, appropriation de son pouvoir, choix/ décider par soi- même, indépendance, liberté, solitude/ calme/ tranquillité, temps/ espace pour soi.

    Nourriture ( au sens large) :

    Affection, chaleur, confort, douceur, relaxation/ détente/ plaisir/ loisirs, sensibilité, soins/ attention/ présence, tendresse, toucher.

    Intégrité :

    Authenticité/ honnêteté, but/direction/ savoir où aller, connaissance de soi, déterminer ses valeurs/rêves/ visions, équilibre, estime de soi, respect de soi, rythme/ temps d’intégration, sens de sa propre valeur, de sa place.

    Expression de soi :

    Accomplissement/ réalisation, action, apprendre, créativité, croissance/évolution, actualisation, développement, guérison, générer/ être la cause/ participer, maîtrise.

    D’ordre mental:

    Clarté/ compréhension (par la réflexion, l’analyse, le discernement, l’expérience), cohérence/ adéquation, concision, conscience, exploration/ découverte, information/connaissances, précision, simplicité, stimulation.

    D’ordre social:

    Acceptation, amitié, amour/affection, appartenance, appréciation, communication, compagnie, concertation, confiance, connexion, contact, donner/servir/contribuer, écoute/ compréhension/empathie, équité/ justice, expression, honnêteté/ transparence, interdépendance, intimité, partage/ échange/ coopération, présence, proximité, recevoir, reconnaissance (résonnance, écho, feed- back), respect/ considération, sécurité (fiabilité, compter sur, confidentialité, discrétion, stabilité, fidélité, permanence, continuité, structures, repères, etc.), soutien/ assistance/ aide/ réconfort, tolérance/ accueil de la différence/ ouverture.

    D’ordre spirituel :

    Amour, beauté/ sens esthétique, confiance/ lâcher prise, espoir, être, finalité, harmonie, inspiration, joie, ordre, paix, sacré, sérénité, silence, transcendance.

    Célébration de la vie (accueil de la vie dans ses différents aspects) :

    Communion, deuil/ perte, fête, goût d’expérimenter l’intensité de la vie en soi, humour, jeu, naissance, rendre grâce, ritualisation.


    • Les 14 besoins fondamentaux de Virginia Henderson eux, sont enseignés aux futurs infirmiers et aide- soignants :
    1. Respirer :

    Capacité d'une personne à maintenir un niveau d'échanges gazeux suffisant et une bonne oxygénation.

    1. Boire et manger.

    Capacité d'une personne à pouvoir boire ou manger, à mâcher et à déglutir. Également à avoir faim et absorber suffisamment de nutriments pour capitaliser l'énergie nécessaire à son activité.

    1. Éliminer.

    Capacité d'une personne à être autonome pour éliminer selles et urine et d'assurer son hygiène intime. Également d'éliminer les déchets du fonctionnement de l'organisme.

    1. Se mouvoir,  maintenir une bonne posture et une circulation sanguine adéquate.

    Capacité d'une personne de se déplacer seule ou avec des moyens mécaniques, d'aménager son domicile de façon adéquate et de ressentir un confort. Également de connaître les limites de son corps.

    1. Dormir, se reposer.

    Capacité d'une personne à dormir et à se sentir reposée. Également de gérer sa fatigue et son potentiel d'énergie.

    1. Se vêtir et se dévêtir.

    Capacité d'une personne de pouvoir s'habiller et se déshabiller, à acheter des vêtements. Également de construire son identité physique et mentale.

    1. Maintenir sa température corporelle dans la limite de la normale.

    Capacité d'une personne à s'équiper en fonction de son environnement et d'en apprécier les limites.

    1. Être propre, soigné et protéger ses téguments.

    Capacité d'une personne à se laver, à maintenir son niveau d'hygiène, à prendre soin d'elle et à se servir de produits pour entretenir sa peau, à ressentir un bien-être et de se sentir belle. Également à se percevoir au travers du regard d'autrui.

    1. Éviter les dangers.

    Capacité d'une personne à maintenir et promouvoir son intégrité physique et mentale, en connaissance des dangers potentiels de son environnement.

    1. Communiquer avec ses semblables.

    Capacité d'une personne à être comprise et comprendre grâce à l'attitude, la parole, ou un code. Également à s'insérer dans un groupe social, à vivre pleinement ses relations affectives et sa sexualité.

    1. Agir selon ses croyances et ses valeurs.

    Capacité d'une personne à connaître et promouvoir ses propres principes, croyances et valeurs. Également à les impliquer dans le sens qu'elle souhaite donner à sa vie.

    1. S'occuper en vue de se réaliser.

    Capacité d'une personne à avoir des activités ludiques ou créatrices, des loisirs, à les impliquer dans son auto-réalisation et conserver son estime de soi. Également de tenir un rôle dans une organisation sociale.

    1. Se divertir, se récréer.

    Capacité d'une personne à se détendre et à se cultiver. Également à s'investir dans une activité qui ne se centre pas sur une problématique personnelle et d'en éprouver une satisfaction personnelle.

    1. Apprendre.

    Capacité d'une personne à apprendre d'autrui ou d'un événement et d'être en mesure d'évoluer. Également à s'adapter à un changement, à entrer en résilience et à pouvoir transmettre un savoir.

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    Si les formulations varient, l’essentiel s’y retrouve et ce vaste tour est à l’image de la multiplicité de nos besoins. Evidemment, ils n’ont pas tous la même importance selon les moments de notre vie et en prime, très fréquemment, nous ne les avons pas ensemble en même temps d’où bien des incompréhensions et des conflits. Réaliser que cet autre qui énerve a des besoins identiques aux siens change déjà la donne, le tout est de voir que cet instant à lui est le nôtre ailleurs, en d’autres circonstances et inversement. Les réactions violentes, agressives, vécues comme telles ne sont en fait que le témoin d’alerte de besoins insatisfaits et plus ils sont insatisfaits, plus ils explosent. Là commence la compréhension de la colère. Je ne doute pas que vous qui suivez mes écritures  entrevoyez  ce qui s’est réellement passé.


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  • Le choc fut ainsi le maître mot de mes émotions au cours de ces années partagées ; évidement, un cortège d’autres lui emboitèrent le pas : consternation, rancœur, ressentiment, tristesse, solitude, révolte, agacement, … Avant la maladie, j’étais anéantie, empêtrée et désemparée par le cours des événements, je résistais psychiquement en cherchant des alternatives à mon chagrin par des activités extérieures riches en expérience humaines (via mon travail- sacerdoce), j’anesthésiais mes souffrances par la multiplication des activités physiques (natation, course à pied, marche, roller, …), violemment, je me coupais de moi- même pour ne plus souffrir, je m’épuisais, je me vidais jusqu’à vouloir donner mon sang. Avec cette mystérieuse maladie, ce corps sur lequel j’avais toujours compté en ultime recours et tant malmené lâcha chaque jour d’avril 2006 à janvier 2007 : perte des jambes, perte du contrôle des sphincters, perte des yeux, douleurs permanentes, lancinantes et atroces, insuffisance respiratoire, les bras et le visage étaient atteints quand le traitement m’a sauvée. Je me retrouvai clouée au fauteuil, au lit, en totale dépendance à autrui. Bloquée, acculée, fauchée, atterrée, mots lucidement utilisés évoquant mon état en ces jours sombres, parce que cette maladie était le parfait reflet extérieur de ce que je vivais à l’intérieur.

    Jusqu’à la première perfusion de mitoxantrone, je me sentis mourir à petit feu ; le chaos autour de moi rajoutait à mes douleurs alors que je me sentais tellement impuissante. Contrainte par les limites physiques, je revins à moi et sans véritablement m’en rendre compte, je méditais en permanence afin de ne pas cumuler douleurs physiques et souffrances psychiques. Penser, ressasser, prévoir signifiaient me torturer. Ne sachant combien de temps il me restait, je m’occupai de chercher la paix en moi et tentai de profiter au maximum de ce qu’il me restait pour être dans l’amour avec mes proches. Mentalement, je faisais fi de mes besoins et sentiments tâchant de ne pas brutaliser l’entourage de mes peurs et tourments internes face à la douleur, la souffrance, la mort, je me préoccupais de leur devenir, de leurs sentiments et émotions, je ne demandais qu’en ultime recours songeant que cela n’avait pas d’importance puisque bientôt je ne serais plus là. A mes yeux n’importait que la vie par- delà ma mort.

    La prise en charge médicale, les rencontres magnifiques qu’elle m’offrit conjuguées aux séances de psychanalyse bouleversèrent mon interne.   Comment ? Ces inconnus appréciaient cet être incontinent, amaigri, complètement dépendant, la mine défaite, en total dénuement physique ?  Ni coiffée, ni épilée, ni maquillée, en couche, en blouse d’hôpital ou affreux survêtements, incapable de bouger et voir, j’étais portée, lavée, sondée. Une loque ? Ce n’était pas du tout ce qu’ils me renvoyaient. Quoi donc, j’étais aimable et estimable en SOI et non pour ce que je faisais ou paraissais ? Ce fut une vague d’amour immense, j’étais respectée, appréciée, mes besoins avaient de la place, étaient entendus, je n’avais pas à lutter ou prouver pour exister, j’étais, point. Reconnaissante à souhait, j’ouvris les bras à ce flot d’humanité et remerciai chaleureusement la vie d’un tel cadeau. Un jour alors que nous discutions de mon retour à la maison, je racontai à l’assistante sociale de l’hôpital cette merveilleuse expérience elle eut ces mots incroyables qui m’inondèrent d’un nouveau flux revigorant et lumineux : «  Mais vous savez mademoiselle, nous sans vous, nous ne sommes rien. C’est vous qui nous donnez envie de le faire, c’est vous qui nous liez et nous donnez la volonté de tout mettre en œuvre pour vous. »

     

    La maladie fut un raz- de- marée qui dévasta tout, certes mais au milieu des décombres, je rencontrai quelqu’un et ce quelqu’un, c’était moi. Grâce au miroir de ces inconnus, je pris conscience de la béance immonde de ma faille narcissique et peu à peu, je me reconstruisis intérieurement.  Dans ces circonstances, les yeux intérieurs s’ouvrirent et la marche vers la clairvoyance commença. Tout était à revoir et lentement , je pris ma place. Evidemment, ceux qui s’étaient allègrement accoutumés à ma négation en furent déstabilisés et rapidement, le tri se fit. Si j’étais d’un naturel à dire ce que je pensais en toute circonstance depuis longtemps, là, je posais des limites afin de sortir des fusions toxiques et m’y tenais n’ouvrant plus les portes à la pérennisation de ma non- estime personnelle. Désormais, je savais que j’étais quelqu’un d’estimable, d’aimable, que je méritais le bonheur, l’épanouissement, le respect ; il n’était plus question de s’accommoder de bric et de broc.

    Pendant des mois et des mois, j’ai tâché de me relier à SeN, à ses proches, jusqu’à n’en plus pouvoir; même partie j’ai essayé, rien n’y faisait, j’étais devenue la méchante, l’ingrate, l’atroce médisante les salissant tous de mots cruels et infondés. Malgré l’accompagnement de Nadine et Yolande  vers la non- violence/ la bienveillance et quelques réussites ponctuelles, c’en fut fini de ma présence dans leurs vies.  Des ponts furent définitivement coupés, mes rencontres avec SeN contraintes par le règlement matériel de mon départ (déménagement, changement d’adresse et des facturations, récupération des divers biens, etc) engendraient des colères et des scènes détestables. Seulement, ayant cheminé en Qi Gong, en communication non- violente/ bienveillante, en connaissance et estime de moi, je revenais constamment sur la situation, rarement avec SeN, majoritairement en moi : que s’était- il passé exactement ? Quel fut le déclencheur de la scène?  Qu’avais- je ressenti ? Quel besoin non satisfait s’était exprimé ? Là enfin, j’entrai en relation avec moi- même et ouvrai les portes de mon interne avec empathie sans plus y mêler qui que ce fut.

    Ainsi, la prochaine étape d’explicitation de ces colères sera donc l’identification de ces besoins non satisfaits cachés derrière ces sentiments et émotions mouvementés, aléatoires et  explosifs.


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  • Alors que je me croyais capable d’écrire à ce sujet aisément, je réalise depuis quelques jours que la tâche n’est pas si évidente. Dans ma tête, en mon cœur, en mon corps, se déverse une multitude de sentiments, d’émotions comme si longtemps ils avaient attendu l’ouverture des portes. Ce n’est pas violent, c’est un flux tel les eaux quittant l’esprit de la rivière polluée nettoyée par Chihiro dans le film de Miyazaki, parallèle évident avec l’image utilisée en qualification du cataclysme provoquée par la maladie (j’y reviendrai).  C’est un processus naturel finalement car pour comprendre la colère, il y a à identifier les sentiments et émotions ressentis, les besoins non satisfaits qu’elle cache. Il n’est pas question de condamner ou de juger qui que ce soit, il s’agit de rester chez soi, c’est- à- dire comprendre ce qu’il s’est joué en moi dans cette histoire. Lancer des « il m’a menti », « il m’a trahie », «  il m’a abandonnée », c’est exprimer un jugement sans se pencher véritablement sur moi- même et lui infliger toute la responsabilité; « il n’a pas été honnête », «  il a un problème »,  « il est malade », « il a besoin d’une bonne psychanalyse », bla bla sont du même registre, c’est analyser et nullement me connecter avec mon interne et ma part vivante. Alors, dans ces eaux grouillantes, je me suis plongée et y ai observé la vie qui s’y était jouée.

    Etrangement, le premier qualificatif qui envahit mes pensées fut : CHOC.

    Choc de ses premiers mots évoquant l’ambiguïté de ses sentiments à mon égard. Nous étions amis depuis de nombreuses années et je ne m’attendais absolument pas à ce virement. Ce fut digne d’un coup de tonnerre violent dans un ciel serein et tranquille, j’ai été bouleversée, bousculée. C’en suivit un travail sur moi- même car l’estimant grandement, je ne voulais pas venir avec des tourments déplacés et mal juger. J’ai souffert à tâcher de mettre de l’ordre dans ma tête, j’ai sollicité un positionnement clair de sa part pendant des mois. Un an et demi de doutes, de mises au point, de remises en question et de demandes vaines de clarté. J’étais impuissante et démunie devant le flou qu’il me renvoyait, désorientée par ses changements constants de décision. Finalement, le pas fut franchi et je crus que la confiance gagnée avec le temps nous permettrait de construire ensemble une vie riche et belle.

    Choc de nos premières vacances ensemble où je découvris une personne que je ne soupçonnais pas. Après 3 jours, je fondis en larmes, atterrée, abasourdie.

    Choc à son refus d’habiter avec nous après quelques années de promenades et week- end partagés. J’en fus écorchée et cette cicatrice me marqua longuement. 

    Choc du fossé existant entre ce qu’il disait être et la réalité du quotidien, choc de certains discours de sa part et de son entourage.

     Chocs successifs de ses refus de mariage, pacs, achats mobilier  et immobilier communs, chocs des territorialisations inconscientes de l’espace de la maison, choc irrémédiable du refus de l’enfant.

    Choc de ses refus d’aménagement au cours de pires mois de la maladie, choc de son renfermement à mon retour de l’hôpital, choc de ses refus de travailler ensemble sur nos modes relationnels, choc des perpétuelles disputes à la maison alors que je me sentais mourir ou que je remontais laborieusement et péniblement de ma chute vertigineuse.

    Ainsi, tout au long de notre histoire, je fus choquée. L’onde de ces chocs résonnait très profondément en moi, m’anéantissait, me fauchait, me laissait démunie et tétanisée .Ma frustration était une évidente récurrence ; au fil des années, mes rêves, mes espoirs ont été anéantis, balayés violemment, toutes les pistes que j’ouvrais, proposais se refermaient et avant d’être malade, je chutais perpétuellement au point de n’avoir pour seule impression que celle d’être acculée au fond d’une impasse aux murs épais sans fenêtre (ici). Je songeais déjà à partir vers d’autres horizons, ouverts eux ; je m’interrogeais sur les dispositions matérielles du départ quand la maladie est entrée dans notre vie et me cloua sur place. Consciente que cette épreuve supplémentaire à un parcours de vie déjà chargé était insupportable, je sus d’emblée que j’étais incapable de la gérer seule. Je fonçais alors en psychanalyse, anéantie à l’idée de mourir avant de régler mes vieilles histoires et mes travers.

    Je l’ai déjà abordée à plusieurs reprises (Allées et venues en psychanalyse).  Peu à peu, les questions fondamentales survinrent et bien que n’ayant pas d’idée arrêtée sur ce sujet, je réalisai en écho aux paroles d’Elodie la corrélation du corps et de l’esprit :

    Pourquoi cette maladie ? Et pourquoi s’exprimait- elle de cette façon ? N’était- elle pas le reflet de ce qui se jouait en moi ?(D’ailleurs, les portes ouvertes par ses questions m’accompagnent quotidiennement et me conduisent à envisager les événements sous d’autres angles, constamment).

     Mes relations malsaines à SeN revenaient continuellement en séance car elles empoisonnaient mon quotidien et là, entre les murs du cabinet, mes doutes avaient leur place, je ne risquais pas les visages ahuris ou réprobateurs de ceux qui ne voulaient entendre mes nuances quant au dévouement de SeN à mon égard. Après des mois de rendez- vous hebdomadaires, je me pris un nouveau choc en pleine figure : je compris subitement qu’il était un avatar d’une relation du passé. Cette personne n’a pas pu/su exprimer son affection à mon égard. Longtemps, j’ai tâché de devenir celle dont j’imaginais qu’elle pouvait rêver et de nombreux choix lui sont inconsciemment liés. Ce fut un échec, une longue suite de blessures, frustrations, révoltes engendrant chez moi une profonde tristesse aggravée par d’autres tourments de l’entourage. Si je sais désormais que cette personne était elle- même  poursuivie par une relation toxique à sa mère (une femme mauvaise et méchante, aigrie et dévorée par ses tourments internes), que ses paroles évoquaient  ses propres frustrations, j’ai souffert de cette relation parce que j’avais besoin d’un retour d’image positive, je n’ai eu qu’en miroir des remarques et réflexions blessantes, humiliantes, une litanie de critiques.  Mes couples ne furent que des répétions de cette relation. L’un me renvoyait à la destruction en écho à l’image que je m’étais construite de moi-même, une forme de suicide programmé dont la venue de fiston m’a sauvée (un instinct de survie déjà), SeN était la répétition de cette personne prisonnière de son histoire personnelle déversant ses frustrations, colères, sentiments d’impuissance et d’échec.  

    J’étais effondrée à l’instant de cette découverte, pleurant toutes les larmes de mon corps et je poussai ce cri de désespoir : « Qui me dit que je ne recommencerai pas une troisième fois alors ?! ». La psychiatre me répondit  simplement: « Cela n’arrivera plus parce que maintenant, vous en avez conscience ». Et oui. A partir de ce jour, je décidai de tout mettre en œuvre pour sortir des relations toxiques et étais toute à l’espoir de re- fonder ma relation à SeN sur des bases assainies et positives, je ne doutais pas qu’il s’embarquerait dans l’aventure avec moi. Malheureusement, il en fut autrement, il se replia sur lui- même, refusa les discussions, les aménagements, les négociations. J’étais face à un mur. Je fus à nouveau choquée, puis passai ensuite alternativement par la colère, le ressentiment, le découragement, n’ayant pas de mot pour dire ce que je ressentais véritablement. Mon ultime échappatoire fut de fuir.

    Plus tard, en discutant avec mes camarades de communication non violente/ bienveillante, un intervenant m’offrit le sens de RELATION. Être en relation, c’est être relié à l’autre, partager nos sentiments, nos ressentis, c’est partager ce qui est vivant en chacun. Et force était de constater que si un lien inconscient est fondateur et puissant entre nous, SeN et moi n’étions pas en relation. Toute notre histoire n’est que la répétition malsaine de schémas du passé. Comme nous étions enfermés chacun dans notre histoire personnelle, la rencontre a périclité puisque qu’il n’y a pas de place pour l’autre là-dedans, il n’est qu’un prétexte à rejouer la même petite chanson ratée d’autrefois que nous avons cherché à recoller, à réparer, vainement. Toutefois, dans ces propos, j’analyse et pense, je ne suis pas dans ce chemin vers soi. Ce fut lors d’autres évènements que je commençais à comprendre ce qui se cachait derrière ma colère et mes accès de fureur lors de mes retrouvailles hasardeuses avec SeN ou le croisement d’un des membres de son entourage.


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