• 1. Après sa visite chez les parents de SeN, j'avais senti une gêne chez mon garçon. Sentant que le temps lui était nécessaire pour y mettre de la clarté, je n'insistai pas. Plusieurs semaines après, il passa quelques heures avec SeN lui- même, à l'improviste; je n'en sus rien hormis qu'ils avaient allègrement jasé sur mon dos, en particulier, mon incapacité à me taire ou du moins, mon défaut de trop parler. Il y eut une espèce de cirque et mes fugaces échanges avec SeN furent grotesques, il affichait une ironie,un cynisme outrageux, ne quittait pas un sourire voire un rire tonitruant, amer et acide dans son ton et ses mots; l'important à mes yeux était que mon garçon ait trouvé ce dont il avait besoin et après l'avoir remercié de son accueil ( ce qu'il n'accepta pas sous prétexte que c'était encore trop de paroles), je fus heureuse de quitter ces lieux empoisonnés. Décidément, je ne trouvais rien de sain à vivre ces rares échanges même pas courtois.

    Les jours passèrent sans que fiston ne m'en reparlât et je n'y pensais plus quand tout à coup, au hasard d'une conversation légère, il me dit: « Maman, j'ai compris. Je n'y retournerai plus, c'est fini. Je ne suis plus un gamin ». Ce fut un éclatant soulagement.

     

    2. - Et ton chéri? Comment ça va?
    - Je ne sais pas. Il travaille beaucoup, par monts et par vaux. Quand il a quelques jours, il rentre régler ses affaires, voit son fils, prépare son nouveau déplacement et repart.

    - Il ne t'appelle pas? Ne vient pas te voir?

    - Très peu, quasiment pas.

    - … Il n'est plus amoureux?

    - Amoureux non, mais je sais qu'il m'aime.

    - Ah... Vous êtes encore ensemble?

    - Je ne sais pas.

    - … Vous ne l'êtes plus? … Simplement des amis?... C'est fini?...

    - Je n'en sais rien et je ne veux pas mettre de mots dessus. Qu'est- ce que cela veut dire être ensemble? Ne plus être ensemble? Je sais que quand nous nous retrouvons, les échanges sont riches, nous sommes présents l'un à l'autre, vivons ce que nous avons à vivre ensemble. Autrement, chacun vit ce qu'il a à vivre, ailleurs, seul. S'il n'a pas envie de me parler, je le respecte, si je n'ai pas envie de lui parler, il le respecte tout comme nous respectons nos envies subites de causer légèrement, sérieusement. Parfois, il m'appelle simplement pour me dire qu'il est heureux de m'avoir rencontrée car j'ai engendré des changements salvateurs dans sa vie de part mon attitude, mes remarques et paroles, parce que je l'ai accepté tel qu'il est. Évidemment, cet éloignement n'est pas toujours facile car la turbine à mental s'agite régulièrement et je passe par des états variables tout en sachant que c'est du délire, que je n'ai pas à m'y attacher, que ce que je pense ou imagine n'est pas la réalité, ni la sienne, ni la mienne, ni la nôtre, qu'il y a autre chose derrière ces remous du mental et c'est sur ce quelque chose que je me penche afin de mettre de la clarté en moi. Je refuse la dépendance, les attentes, poisons engendrant confusion et frustrations, il n'y a pas à attendre d’un autre qu'il identifie et réponde à mes besoins alors que moi- même je n'en suis pas capable. Il sait et accepte que la place laissée est une porte ouverte à une autre rencontre, je ne la ferme pas sous prétexte qu'il existe. Ne serait- il que de passage pour m'enseigner ce qu'est être en relation, préambule d'un autre à venir? Aura t- il un déclic un jour, que ses peurs se déliteront, rassuré de ce qui lui est possible de vivre avec moi? Je ne sais absolument rien et ça m'est égal. Il y a tellement d'expériences chaque jour à vivre et de toute façon, il y a toujours quelque part quelqu'un à aimer, quelqu'un prêt à nous aimer.

    Condensé des conversations avec ceux qui m'interrogent sur cette rencontre. J'en ai évacué les épisodes où je clamais une décision arrêtée par ras- le- bol ou constat parce qu'elles étaient complètement remises en question dans la foulée par un appel, un échange surprenant et vivant rappelant combien, après de longs silences, la joie de se connaître revient en force.

    Mon garçon, peu loquace habituellement sur ma vie personnelle lance de temps en temps: « Je ne vois vraiment pas où est le problème, vous êtes faits l'un pour l'autre, c'est évident. Le reste n'est dû qu'aux circonstances, avec cet emploi, ce n'est pas facile pour lui, ne sois pas si dure, Maman! Ce serait trop con de passer à côté de ça maintenant que vous vous êtes trouvés ». Tu es mignon mon garçon, c'est que quelque soient nos âges, nous avons tous à apprendre. Comme je ne comprends rien à ces histoires d'amour, de couple, d'engagement et compagnie, j'ai besoin de prendre le temps de mettre un soin particulier à la notion de relation.

    Fin mars, je me suis retrouvée devant un ostéopathe pratiquant l'éthiomédecine. Colette, médecin, généraliste hors compétition avait insisté pour que j'y aille et le hasard par quelqu'un d'autre m'y conduisit. Je ne rentre pas dans les détails, j'argumente le contexte précédemment évoqué.

    C'était en pleine auscultation- traitement, il me parlait alors que j'eus préféré qu'il se contentât de faire ses manipulations ( je raconterai peut- être plus tard, c'est en relation avec Devic): 

    - Je ne vous écoute pas, je pense à mon fils 

    - Ah bon, comment ça?  

    -Il me dit souvent que je suis trop dure 

    - Avec lui?  

    - Non, avec les hommes en général 

    - Ah, et vous en pensez quoi vous des hommes? 

    - Pfff! De nos jours, ils ont tous peurs et ne veulent pas s'engager. 

    - Ouai ouai, ça, c'est votre tête qui parle, votre cœur me dit autre chose.  

    - Quoi?! Et qu'est- ce qu'il vous dit, MON cœur?, j'étais offusquée 

    - Que vous aimeriez avoir un homme qui vous fasse des câlins et non pas qu'il s'engage mais qu'il S'IMPLIQUE dans la relation. Et vous n'avez pas besoin des hommes, un seul suffit... et laisse -lui le temps de s'impliquer.

      La différence entre engagement et implication me fut particulièrement éclairante car oui, sincèrement, l'engagement, ça me gonfle. Agir ou décider parce qu'on pense que c'est comme ça qu'il faut faire sous prétexte de je ne sais quelle obligation ou représentations, non merci! Je me barre immédiatement. Quant à ce que ce thérapeute a senti au fond de moi, par delà ma tête, je lui donné de la place et je l'ai écouté. Je sais que cela est. Et plutôt que de me casser la tête inutilement, je retourne à mes dents. Elles bougent, la thérapie avance et il est fort probable qu'en parallèle de cette transformation de bouche, bien des éléments se mette- ro- nt en place: le chéri, lointain, à venir, identique ou différent et moi. En attendant, ma foi, la vie continue et je deviens moins stupide, du moins, je l'espère.

     

    Youpi! Je crois en avoir fini avec ce bazar, je me réjouis de vous raconter d'autres trucs bien plus drôles. Je vous réserve plus d'une surprise.

     


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  • J'ai évoqué l'état de ma mère lors de fêtes de fin d'année. Ce n'était rien par rapport à ce qu'elle vivait réellement avec sa manie de cacher, de ne rien dire ou alors d'une telle façon qu'elle me devient agaçante. Depuis des mois, elle était traînée d'un spécialiste à l'autre, prenant tel médicament pour ci, tel autre pour ça aux interactions plus ou moins malheureuses et résultats peu concluants. Elle multipliait les examens et les avis, ironisant ou s'énervant sur l'attitude des médecins tout en continuant de se laisser porter, se plaignant de futilités ou médisant sur les uns, les autres, se fâchant avec un tel ou une telle, ne respectant pas les consignes données par les soignants. Elle n'écoutait rien de ce que ma sœur et moi lui disions, n'entendant pas nos inquiétudes ou les balayant d'un geste, d'un mot. J'étais démunie prise entre son vécu et les discours de ma sœur noyant ses angoisses dans l'agressivité ou le cynisme. Finalement, l’oncologue se décida à l'envoyer voir un neurochirurgien parce qu'il ne trouvait pas de réponse diagnostic; quand ce dernier vit son dossier et son état, il l'hospitalisa d'urgence sans lui laisser le temps de rentrer récupérer des affaires. Partie pour une consultation, elle se retrouva coincée à 60 km de chez elle, sans rien sous la main, ses trois chats et son chien seuls à la maison sans organisation, ses activités du matin suspendues dans l'attente de son retour au soir. Ma sœur est écrasée par ses problèmes de santé, ses difficultés sociales et son travail et n'a pas de permis. Devinez donc qui donc se retrouva à courir partout pour s'occuper de ce beau monde?

    Pendant plus d'un mois, ma mère fut prise en charge. Elle avait un nerf coincé au niveau du sacrum, syndrome de la queue de cheval et tellement d'ostéoporose qu'elle se tassait sur – elle même: opération pour décoincer le nerf, toute une ligne de broches posées sur la colonne pour être redressée et maintenue, rééducation en hôpital une semaine puis trois semaines en maison de repos. Bien sûr, ce fut salvateur et bénéfique. Elle retrouva la marche et la capacité à se mouvoir, à faire les gestes du quotidien seule et mon garçon s'étonna de la voir si ragaillardie. Bien sûr. Seulement, parallèlement, je m'occupais de lui ramener des affaires prenant la route à plusieurs reprises dans l'urgence ou la précipitation, trimbalant fiston et frangine pour chaque expédition avec les demandes de chacun, échangeant les courriers, réglant des administratifs effarants, épongeant des dettes et des impayés PLUS les animaux.

    Un voisin sortait le chien de temps en temps, j'y allais deux fois par semaine majoritairement seule parce que celle- ci était épuisée ou celui- là trop occupé. Je promenais le vieux chien pendant une bonne heure, nettoyais l'appartement ravagé par les animaux restés seuls pendant des heures voire des jours, nourrissait la ménagerie avec ce que j'avais acheté avant de venir et ramassais tout ce que ma mère avait laissé traîner depuis des mois. Je descendis dix sacs poubelles de déchets, sans compter les sacs de tri, débarrassais les aliments périmés, lavais des kilos et des kilos de linge. Le tout au cinquième étage sans ascenseur. L'une des chattes avait mauvaise mine; âgée de 16 ans, ma mère et ma sœur pensaient qu'elle avait sa première portée ( une première incroyable en plus de 10 ans puisque ma mère a un matou non castré et deux femelles non stérilisées enfermés dans son petit deux pièces). Elle gonflait du ventre alors que ses os saillaient ailleurs, je la trouvai très faible et quand je la laissai le premier jour, j'en eus des remords. Tourmentée, je la ramenai chez moi deux jours plus tard pour la surveiller au cas où elle mettrait bas. Avec mon garçon, nous la lavâmes car elle était dans un état de saleté avancé et prîmes soin d'elle. Au lundi, j'avertis ma mère que je la menais chez le vétérinaire car son état m'inquiétait grandement, je me pris une volée de bois vert. Arrivée chez le véto, le constat fut sans appel: elle ne portait pas mais était en phase terminale de grave maladie. Depuis des mois, un chat vomissait et se vidait, ma mère ne savait pas lequel et n'en s'en était pas inquiétée plus, c'était évidemment elle. Touchées que nous étions la véto et moi, nous prîmes la décision de l'euthanasier afin de soulager ses souffrances. Je ne voulais pas qu'elle vive ce qu'un précédent chien avait traversé, agonisant pendant des mois dans d'atroces souffrances jusqu'à ce que n'en pouvant plus, j'avais sommé ma mère de le conduire chez les vétérinaire où l'euthanasie se fit alors qu'il était véritablement à bout de force et de vie. Je restai près du chat le temps qu'elle s’endormît en la caressant et lui souhaitai bon voyage avant de filer payer. Au retour dans la voiture, je fondis en larmes, débordée par la lourdeur des circonstances. Quatre jours plus tard, j'amenai la deuxième chatte dont ma mère disait qu'elle avait mauvais caractère, une malformation cardiaque et respiratoire de naissance. Un autre vétérinaire l'ausculta et m'expliqua qu'elle avait probablement un coryza chronique ancien ou quelque chose de plus grave, que ses dents étaient très infectées, son état général mauvais, qu'elle nécessitait des soins importants sur la durée. Zou! Piqûre d'antibiotiques de cheval. Cela lui fit le plus grand bien et elle en devint toute différente... jusqu'à ce que le traitement cesse son effet. Une amie très sensible à la condition animale m'aida pour les caser, trouver des solutions afin de soulager et les animaux et ma mère qui n'en veut plus. Comme ils sont vieux et malades, nul n'en veut. Leur vie continue donc comme avant, jusqu'à ce que mort s'en suive?

    La veille du retour de ma mère, une équipe de choc des copines de la danse et moi passâmes toute une journée en force à nettoyer et ranger l'appartement. Rentrée, elle rouspéta de nos interventions, prisonnière de ses angoisses, ne se soucia pas plus des animaux qu'auparavant et reprit ses habitudes. Elle me sollicita pour faire ses courses; me cantonnant uniquement à faire le chauffeur, elle finit par trouver d'autres solutions seule, son corps le lui permettant désormais. Pour moi, il était plus que temps car j'étais au bout du rouleau, épuisée et lessivée, physiquement, financièrement. Comme je racontai ces aventures alentour, j'entendis mille fois: « Mais ce n'est pas possible! Il y a des aides, il faut voir avec une assistante sociale, faire les démarches auprès des services sociaux, blabla … » Une amie souleva l'idée que j'étais prisonnière de mes sentiments d'obligation vis- à- vis de ma mère, que j'en tirais la difficultés à demander de l'aide, à lâcher, déléguer. Je la coupai court: « Quand les parents ne peuvent subvenir à leurs besoins, les enfants sont mis à contribution et dans la région, ils vont jusqu'à se tourner vers les petits enfants. Je ne vais pas charger mon fils de cette obligation dès son entrée dans le monde des adultes. Toutes les assistantes sociales contactées ont déclaré ne rien pouvoir faire pour ma mère, quand les soucis d'argent sont devenus trop importants, la banque s'est tournée vers moi. Qu'est- ce que je pouvais faire? Humainement d'emblée et légalement ensuite? En ce qui me concerne, je n'ai pas besoin d'aide, j'ai besoin que chacune des parties fasse ce qui relève de sa responsabilité. Ma mère, ma sœur, mon fils, les médecins, les soignants, les services sociaux. Je fais ce que j'ai à faire parce que j'agis en fonction de mes valeurs et de mon éthique mais j'en ai vraiment marre de tous ces gens qui se déchargent et se déresponsabilisent avec des tas d’excuses toujours bien fondées et justifiées.» Silence pour toute réponse.

    Alors, oui, j'en suis là. Chaque année depuis cinq ans, ma mère subit des travers de santé mouvementés avec des hospitalisations, opérations, prises en charges souvent in extremis. Elle laisse en plan son bazar général, ses animaux et s'en occupe qui veut en l’occurrence moi. Toutes les démarches opérées restent lettre morte, ma mère ne franchissant pas certains caps nécessaires parce que tétanisée par l'immensité des tâches qu'elle imagine avoir à surmonter. Il paraît qu'il y a tellement de profiteurs des aides sociales, ce n'est certainement pas chez nous. Malgré ses difficultés, ma mère n'y a pas droit et quand j'insiste, il m'est répondu que je n'ai qu'à m'en occuper moi- même. Bravo! Bonne réponse.. déjà que je ne profite pas du peu d'aides auxquelles j'aurais droit. De toute façon, nous n'avons que ce que nous méritons, non? Nous n'avons qu'à être jeunes, riches et en bonne santé.

    ( à suivre)

     


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  • Mon chéri ne serait pas là pour les fêtes de Noël, je le savais, il avait été appelé pour son travail au loin et c'était mieux ainsi car lui et ma mère ne s'apprécient guère, chacun jugeant l'autre irrespectueux à mon égard ( étonnant jeu de miroir?). Je n'avais de toute façon pas l'énergie pour m'occuper de leurs différents.

    J'espérais l'avoir parmi nous pour le réveillon du Nouvel An, mes copines aussi et celle qui nous accueillait l'avait invité clairement. Connaissant son mode de vie et ses conditions de travail, je ne m'inquiétai pas de l'absence de nouvelles. Il m'appela un peu honteux le 28 décembre après avoir passé plusieurs jours chez lui sans me joindre. Je ne m'en offusquai guère, j'étais sous le choc des jours précédents et peu attachée à des « conventions amoureuses». Puis, plus rien. Silence total.

    Le 31 décembre, j'attendis une réponse à mes demandes quant à sa présence ou non, vainement jusqu'en fin d'après- midi. Fâchée et impuissante, je lui envoyai une photographie de la définition du mot respect tirée du grand Robert en lui signifiant que la moindre des politesses était de prévenir la personne qui l'avait invité. Rien. Aux émotions précédentes, s'ajouta la colère.

    Arrivée chez ma copine hôtesse, j'appris qu'il lui avait envoyé un tardif SMS en s'excusant de ne pouvoir venir. A ma propre surprise, j'éclatai de rire et balançai que vraiment, il ne me méritait pas, que je n'avais pas de temps à perdre avec une personne se conduisant de la sorte. « Qu'il aille se faire voir».

    Plus tard, mes autres copines, en arrivant, s'étonnèrent de me trouver sans lui, déçues et interdites. « Comment ce si grand amoureux d'autrefois pouvait- il ne pas être présent ce soir? ». Je fus assez crue sur son incapacité à dire franchement et directement ce qu'il se passait et ces circonstances n'entamèrent pas ma gaieté d'être à cette soirée avec elles. J'étais heureuse, ce fut comme un soulagement de le constater car je n'étais pas dans des dépendances affectives vis- à- vis de quelqu'un. Après tout, il y a toujours quelqu'un, quelque part à aimer, avec qui partager et être en relation. Ce soir- là, j'étais entourée de notre saine énergie et nous avions de quoi danser toute la soirée, à boire, à manger, tant à partager. Bien évidemment, j'étais déçue, j'avais ravalé bien des absences et silences depuis des mois, celle- ci fut un déclencheur. Colère à son égard parce que j'en avais assez d'être la cinquième roue du carrosse, de ne pas avoir plus de place dans sa vie. Bien évidement la turbine à mental tenta à plusieurs reprises d'entamer la valse des films délirants sur ces circonstances, je ne m'y pliai pas et je passai le cap de la nouvelle année dans la joie.

    Plusieurs jours après, il m'appela d'une voix enchantée depuis sa voiture. Je le reçus froidement et balançai un « Monsieur, je crois bien que vous allez faire 2014 sans moi, vous voilà libéré. Je ne veux pas de ce genre de relations, je ne veux pas passer mon temps à attendre ce qui ne vient pas. Merci de venir récupérer vos affaires et de me rendre les miennes au plus vite. ». Il accepta et rapidement, l'échange se fit. J'étais désolée de ce gâchis et m'étonnai de quelques larmes retenues lors de cette entrevue fugace. Finalement, j'étais complètement désorientée et incapable d'y voir clair, d'abord en moi et donc forcément avec autrui. Je savais simplement que j'en avais assez et lui avait omis de me dire qu'il avait été appelé en urgence pour son travail le 31 décembre; son dur labeur terminé, il m'avait appelée sur le chemin du retour. Cette couche supplémentaire ouvrit d'autres écoutilles et dans ce flot, je lâchai les émotions, leur laissai toute la place, dans la mesure de mes tâches quotidiennes les jours suivants.

    Ainsi, je vécus ce que j'avais à vivre et après avoir mis de la clarté en moi, j'eus quelques conversations vivantes avec lui faisant du bien au cœur et à l'âme sans toutefois savoir ni l'un, ni l'autre où cela nous menait. Je croyais me remettre de ces événements, je croyais avoir grandement avancé quand notre réunion de communication non violente mensuelle se fit la semaine suivante...


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  • Après les fêtes de Noël, depuis trois ans, mon garçon a pris pour habitude de rendre visite à SeN et ses parents, c'est son rituel et je le respecte. Son histoire avec eux lui et leur appartient, elle est différente de la mienne, je comprends qu'il puisse avoir le besoin de les revoir et c'est un cadeau que je lui fais en me chargeant de l'organiser. Plusieurs jours auparavant, j'avais donc appelé pour savoir s'ils étaient d'accord précisant que l'heure d'arrivée varierait en raison des autres impératifs du jour. Si mon interlocuteur fut surpris de la demande, il l’accepta et j'arrangeai le déplacement au mieux: ramener ma mère avant d'y aller, déposer le fiston et faire mon tour de visites. Si mes voisins d'autrefois étaient absents, j'avais d'autres personnes à voir et je convins avec fiston de lui laisser jusqu'en début de soirée en compagnie de ses hôtes.

    D'abord, je ramenai ma mère. La montée des cinq étages lui fut particulièrement pénible, l'arrivée au milieu des dégâts occasionnés par les animaux laissés seuls deux jours d'autant plus qu'elle était mal en point; fiston et moi fûmes choqués de ce capharnaüm et de ces saletés. Nous fîmes ce que nous pûmes dans l'urgence, l'un sortant le chien, l'autre ramassant et rangeant de ci de là. Le temps manquait et ma mère nous pria de partir assurant qu'elle prendrait le temps de faire ce qu'il y avait à faire à son rythme, tranquillement. Je n'étais pas rassurée, nous étions cependant engagés par ailleurs et l'après- midi était déjà largement engagée, je la laissai à contre cœur.

    Mon garçon arriva après 15h 30, bien au- delà de ce que nous avions espéré. « Après tout, me dis- je, jusqu'à 18 h 30 cela lui laisse quelques belles heures» . Je filai de mon côté et me posai chez des anciens voisins multi- culturels avec plaisir. Entre le thé, les bla- bla en deux ou trois langues et une séance de vernis à ongles artistiques par la plus jeune des filles, je me réjouissais et savourais. Vers 16h30, surprise, un message du fiston me parvint: « Maman, tu peux venir me chercher? Ils doivent bientôt partir». Je n'en crus pas mes yeux, il n'avait pas passé une heure sur place, qu'est- ce que cette histoire?. Je présentai mes excuses à mes hôtes qui insistèrent pour que je revinsse avec mon garçon mais j'étais perturbée par les circonstances ainsi que la météo mauvaise, la nuit tombante, aussi, déclinai- je les invitations avec regrets. Arrivée devant la maison, j'attendis plusieurs minutes dans la voiture puis, comme il ne venait pas, j'allai sonner.

    Devant la porte, je retrouvai les émotions d'appréhension d'autrefois, cette maison et ces parents étant les seuls de tous mes camarades de lycée à provoquer ces peurs dont j'ignore la source, les raisons ( qu'il eut été fort judicieux de se fier à cette intuition ancienne). S'y ajoutaient les émotions traversées lors des événements des dernières années et j'en étais donc d'emblée à prendre sur moi afin de ne laisser paraître ou sortir quelque attitude inopportune par respect pour moi et mon fils. La porte s'ouvrit et mon grand dadais parut un sachet à la main discutant avec je ne sais qui. Derrière lui, la mère de SeN. J'observai malgré moi que rien n'avait bougé alentour ou dedans, elle faisait comme si de rien n'était, tout sourire, phrases enjouées et aimables. Je restai sur le qui- vive connaissant désormais ce jeu creux de façade (Ne déclare t- elle pas à qui veut l'entendre que les huit années de son fils passées avec moi était une aventure qui l'avait traumatisé ?) Je lui trouvai mauvaise mine mais j'avais franchement d'autres préoccupations aussi restai-je sur le mode qu'elle opérait. Bla- bla sans importance sur des broutilles, je les remerciai toutefois vivement de leur accueil à mon garçon au grand sourire ravi, le corps traduisant une gêne. Je me surpris en entendant un «A la prochaine! » en partant.

    Dans la voiture, j'étais mal à l'aise, entre curiosité et souci. Je demandai alors simplement « ça s'est bien passé? », mon garçon se dépêcha de répondre que oui, qu'ils n'avaient pas l'air d'avoir été embarrassés de sa venue, qu'ils avaient l'air même contents. Ils avaient discuté de choses banales les concernant et interrogés fiston sur l'état de ses mère, tante et grand- mère. Comme les nouvelles ne sont pas généralement bonnes pour les deux dernières, je laissai échapper un « J'espère au moins que tu as dit que j'étais heureuse, que je sortais beaucoup avec les copines, que j'avais une belle vie! » Il m'expliqua comment il avait raconté mes péripéties hospitalières de l'année écoulée sur un ton comique ( les aventures de sa mère ne l'étonnent plus depuis belle lurette), sans plus:

    - Et avec SeN, c'était comment?

    - Ben, il n'était pas là, il est déjà là où ils partent maintenant.

    - Ah ... Et tu es déçu?

    - Oui, un peu, j'aurais bien aimé le revoir aussi.

    Au fond de moi, j'étais remuée, comment avaient- ils pu le faire venir tout en sachant qu'ils avaient à partir et que SeN ne serait pas là? S'ils avaient prévenu, nous aurions pu faire autrement. Pour des gens soit- disant tellement irréprochables en comportement social et grands donneurs de leçons en ce domaine, je les jugeai particulièrement grossiers sur ce coup- là d'autant que mon garçon ne vient qu'une fois par an. Consciente de tout ce qui se jouait en moi à cet instant, je tâchai de garder à l'intérieur ces pensées, jugements, tourments déplacés et inutiles. De toute façon, mon garçon n'est pas très loquace concernant ses relations avec cette famille car il y ramène des vieilleries sur des représentations qu'il s'est construites de moi suite aux scènes de rupture et il s'échauffe facilement à mes questions imaginant que j'y remets des enjeux du passé ( de par son tempérament et son âge, il rentre, en plus, très souvent dans le camp des adultes en conflit avec moi prenant fait et cause pour eux), inutile donc d'en rajouter. Il ouvrit son sachet et y découvrit une grande boite emballée dans un papier à motif enfantin. Je lâchai malgré moi un « Tiens, ça se voit qu'ils sont grand- parents maintenant; ils auraient pu ne rien mettre plutôt que ça pour un grand de presque 17 ans, non? ». Fiston haussa les épaules sans mot dire puis trouva une enveloppe au milieu des chocolat où une petite somme lui tourna le cœur:

    - Oh , maman, regarde ce qu'ils m'ont donné! Vraiment, ça me met mal à l'aise, je suis gêné.

    - Tu leur as dit que tu en venais pas pour l'argent j'espère

    - Non, mais ils le savent.

    - Je n'en suis pas certaine vois- tu.

    Quelques minutes de silence se firent dans l'embarras de mon garçon puis il lâcha du bout des lèvres conscient au fond de lui que cette question n'était pas anodine:

    - Avant que je ne parte, ben, elle m'a demandé quel était le but de ma visite.

    Grande secousse en mon intérieur qu'il ressentit puisqu'il enchaîna immédiatement:

    - Mais tu vois, maman, sans y réfléchir, spontanément, j'ai répondu que c'était parce que je les aime bien et que j'ai plaisir à les revoir!

    Je ne répondis rien de suite trop occupée à gérer les émotions qui m'envahissaient et dans un élan profond, je demandai en silence à l'univers que cette visite fût la dernière car vraiment, je voulais nous protéger, fiston et moi de ces gens. Je réussis à lui dire calmement:

    - C'est bon signe qu'elle te pose la question, elle avait un besoin de clarté et elle a fait ce qu'il y avait à faire pour y répondre.

    Il acquiesça en silence d'un mouvement de tête.

    - Et c'est une leçon pour toi. Il y a quelque chose à en apprendre, c'est certain.

    Nous n'en parlâmes plus et j'en fus heureuse car j'avais vraiment ma dose pour ces derniers jours.

    Rentrée à la maison, j''eus envie de me changer les idées en surfant un peu sur la toile avant d'aller au lit. L'ordinateur avait néanmoins quelques soucis et ramait nécessitant des attentions que mon garçon, qui y avait mis le bazar, ne voulait pas lui donner, dispute tonitruante à notre sauce inévitable rajoutant une couche légère sur les émotions précédentes. Laborieusement et sans sa coopération, je parvins à trouver un échappatoire et je m'affalai, abrutie devant l'écran avec l'espoir de passer à autre chose... et n'en croyant pas mes yeux, j'appris le décès d'Anaïs.

    Je lus et relus le fil des conversations, incrédule, son dernier message rieur et enfin, l'annonce après la montée des inquiétudes de ceux qui échangeaient avec elle par téléphone alors qu'elle entrait à l'hôpital pour recevoir un énième traitement porteur d'espoir d'une amélioration pour les fêtes de fin d'année. Je suivis les messages d'effroi, de choc, de chagrin... J'étais assommée. Je rapportai la nouvelle à mon garçon, seul vivant à portée de voix qui répondit d'un « C'est moche». J'éteignis la machine, pris une douche puis me couchai dans un état second.

    Les jours suivants passèrent dans une espèce de léthargie, je vivais comme en veille Les gestes habituels, quotidiens me tenaient, les contacts avec mes copines me reconnectaient au monde. Parfois, les larmes montaient et m’inondaient, surtout sous la douche et je pleurais, pleurais. Bien que floues, indéterminées, je laissais toute la place à mes émotions parce que ce que j'avais à vivre, je le vivais. Fiston comprit et le respecta dignement. J'en parlai à ma mère, ma sœur, elles n'entendirent rien trop embourbées dans leurs propres problèmes, d'autres évitèrent le sujet en parlant vite fait d'autre chose, j'échangeai avec quelques malades en direct et formulai cette évidence: cet événement tragique est le terrible rappel de la gravité de cette maladie. Aussi forts soient le choix, la volonté féroce de vivre pleinement, cette réalité est prégnante, irrémédiable, omniprésente.

    Les jours suivants, il y eut la fête du Réveillon avec mes chères copines de la danse; en m'y voyant, nul n'eut pu imaginer ce que je vivais et j'en fus heureuse car avec elles, c'est une belle aventure pleine de joie, de vie, de respect, de considération, d'attention. Grâce à leur présence, j'eus l'énergie pour profiter de la fête, y mettre mon entrain et supporter ce qui se joua ce 31 décembre. Car oui, il y eut un autre événement chargé émotionnellement en ces eaux d'entre- deux.

    A suivre donc...


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  • Négociations et tractations furent nécessaires pour arriver à rassurer et calmer chacun, avoir quelque chose qui ressemble à une fête de Noël: je me chargeai de tout, repas et cadeaux puisque nul n'avait les moyens d'y contribuer et il n'était pas question de faire la moindre remarque sur ce point car c'était mon choix mûrement réfléchi. Ma sœur accepta de venir le 25 au soir, ma mère traîna et hésita, déprimée par son état de santé et sa condition matérielle, fiston exprima son exaspération sur ces conditions et histoires de famille rendant ces fêtes si compliquées voire douloureuses. Comme il s'attristait de n'avoir personne pour le réveillon du 24, je sollicitai ma mère qui, finalement, céda si je venais la chercher. Ma sœur manqua ne pas venir parce qu'encore mal en point et comme je m'arrangeai avec elle, au lieu d'arriver dans l'après- midi, elle vint en début de soirée. Je préparai la chambre du fiston pour ma mère qui restait deux nuits, le couchage du fiston sur le canapé, la décoration très succincte du salon, de la table, les repas grâce à des morceaux choisis d'Amap et mis de côté ainsi que quelques rajouts, l'installation des cadeaux et tout le bataclan sommaire. Ma sœur jongla périlleusement afin d'ajouter quelques menus compléments, chocolats, toasts, petits présents à la hauteur de ses possibilités et ma mère habituellement critique, au mieux dans le silence osa dire que les repas étaient bons, agréables. Tous semblaient ravis, je fus heureuse d'avoir insisté. Ma sœur passa du temps avec le fiston content de la tournure des événements jusque tard dans la nuit avec des jeux de société, j'étais trop fatiguée pour entamer un Monopoly à partir de 23h30 et je les avais lâchés pour retrouver mon lit, éprouvée par ces jours de fête. Parce que oui, j'étais éprouvée. En plus de l'organisation, des tractations, des préparatifs, j'étais abasourdie de l'état de ma mère.

    Je l'avais cherchée chez elle, accompagnée et aidée dans ses transport et déplacements, installée confortablement chez nous pensant qu'elle s'y sentirait bien, capable de participer. Or, pendant son séjour, je me pris en pleine figure sa souffrance et ses douleurs. Elle passait du fauteuil à la chaise, de la chaise au fauteuil, du fauteuil au lit. Tous ses déplacements nécessitaient un soutien, elle avait besoin d'aide pour se lever, se coucher, s'asseoir. Elle regardait les autres faire, les bras croisés, attendant d'être servie. La coucher fut une aventure périlleuse, pareillement pour la lever. En vue de la soulager et la détendre, je lui fis, le 25, un bain bouillonnant avec de l'huile essentielle et du bicarbonate. Je découvris son corps meurtri, blessé, tuméfié, enflé, difforme couvert de bleus, de plaies. Elle ne put entrer et sortir seule de la baignoire malgré une chaise posée à côté, les appuis de mes bras. Je compris alors qu'il lui était difficile de se laver depuis des semaines. Mal à l'aise, angoissée, elle manqua renoncer au bain et comme je la rassurai, elle s'y plongea et savoura pendant une heure et demie les bulles, parfum, savon, shampoing. Je l'aidai pour se mouvoir, se frotter et lui fis part de mes sentiments quant à son état: comment supporter la dégradation de son corps alors qu'autrefois elle était une si belle femme? Comment supporter les limitations aux soins et gestes essentiels du quotidien? Est- ce parce que j'étais passée par ces moment terribles d'entrée en Devic que je mesurai l'ampleur de ses difficultés, de sa peine tant d'effort que psychologique? Toujours est- il que j'ai été bouleversée. Je la taquinai après son bain bouillonnant car elle restait assise les bras croisés avec un sourire bienheureux: « On dirait que tu as fumé un joint tellement tu as l'air béat! ». Elle était propre, entourée, accompagnée, rassurée, nourrie sur de nombreux points et l'ambiance était détendue envers les présupposés précédents, elle n'avait à se préoccuper de rien, elle était tranquille, au calme, dans un environnement propre, agréable. Ses besoins étaient satisfaits. C'était flagrant.

    Bien sûr, ces fêtes passées, je me trouvai fatiguée, ces efforts s'ajoutant aux conséquences de l'intervention chirurgicale. Je n'en avais cependant pas terminé.

     


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    Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois. Pour les voyants, c'est l'enfer.

     

    C'est de cette phrase que je commentai les derniers jours de 2013. Ils furent particulièrement bouleversants et je commence à peine à m'en remettre grâce à la présence de certains parce que je n'avais plus que la force d'être portée par d'autres. J'avais pourtant préparé l'hiver en assistant au cours de Qi Gong fin novembre. Les organes à travailler en cette saison sont les reins et la vessie. Aïe Aïe! Pendant le cours, j'avais senti un léger malaise, une grande peine à exécuter les mouvements; à la maison, à chaque tentative d'exercice, ou la tête me tournait ou je me sentais mal ou j'en ressortais épuisée. Il était évident qu'en plus d'être à plat, je n'avais pas les moyens de me ressourcer par ce biais. Au travail, il n'y avait pas foule à certains cours quand j'étais débordée à d'autres. Mes heures annuelles étaient dépassées depuis mi- novembre, je tournais à des heures supplémentaires dont je ne suis même pas certaine qu'elles seront payées. L'arrivée des vacances me laissaient dans l'ambivalence: attendues par un espoir de repos , j'appréhendais la cirque des fêtes, leurs enjeux. En prime, dans ma grande conscience, j'avais demandé à subir mon opération en fin de semaine afin de ne pas manquer au travail négligeant totalement mon bien- être. La seule date possible fut le 21 décembre. « Merdum! » m'exclamai- je quand je compris que je rentrai de l'hôpital la veille des vacances du fiston; calme et repos étaient compromis. Je bougonnai en plus quand la troisième semaine de décembre fut annulée car un site était quasi vide et qu'une coupure d'électricité général bloqua l'autre. Dans une espèce de déni, je m'imaginai rentrant pimpante à la maison pour repartir dans la foulée en sortie danse de folie avec mes copines et préparer les activités de fin d'année les jours suivants. Les traitements médicamenteux avaient déjà calmé ma vessie malgré des débuts totalement anarchiques, je commençais à profiter d'un léger calme tout en remarquant qu'une grande fatigue persistait. Les débuts en dentosophie coïncidèrent parallèlement; mon corps était donc en transformation sourde.

     

    Dans cette ambiance, il y eut les injections de toxine botulique dans la vessie suivies de peu par les fêtes de Noël en famille- riquiqui, l'absence silencieuse d'un chéri renfermé et lointain, une entrevue déconcertante, la mort d'Anaïs, un Nouvel An joyeux et tumultueux, un ras- le bol ravageur et consécutivement à tout cela, un état d’errements, assommée et bouleversée que j'étais.

     

    Je m'en vais donc raconter ces péripéties pas drôles dans les prochains temps.

     


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  • Dans mes précédents articles sur le dernier concours de circonstances, j'ai oublié de mettre les photos prises à l'hôpital. J'y remédie aujourd'hui afin de partager les accessoires qui m'ont amusée.

    D'abord, vous reconnaîtrez la protection 1950:

    1950

    Conjuguée à ce boxer jetable, vous imaginez bien le confort et l'esthétisme global en telle tenue:

    boxer

    Bon, d'accord, l'hôpital n'est pas un lieu de mode. Notons toutefois qu'un mouvement a été lancé pour en finir avec les blouses qui restent ouvertes dans le dos (pétition de l'été 2012) . La protection de l'intimité et de la dignité du patient est l'argument pour demander d'autres modèles. Déjà que les personnes sont malades ou blessées, souvent en détresse, cela me semble judicieux d'autant que nous avons tous besoin de beau. Il y a donc du travail. J'entrevois des efforts avec la réfection des lieux, la mise en place de tableaux et de jolis papiers décorés:

     

    deco

    De la deuxième chambre, j'avais cette vue:

    dehors

    Elle augmentait mon envie de sortir au plus vite, représentait l'appel de la vie, cette vie à vivre pleinement avant de n'avoir plus la possibilité de sortir. Tout peut basculer tellement vite.


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  •  Il y a des tonnes de trucs à raconter sur mes péripéties des derniers mois mais franchement, je n'en ai aucune envie. Je passe par ma phase cafard.

    Chaque journée est un cadeau, chacune de mes péripéties un émerveillement parce que je me suis sentie mourir en 2006 et que j'ai la volonté de vivre pleinement le temps qui m'est donné, j'y vais à fond bravant les événements sans crainte avec force, conviction et une énergie qui m'étonnent moi- même... et, de temps en temps, il y a le cafard. NOIR.

    Si je l'écoutais, je resterais au lit sous la couette comme un légume, sans manger, boire, ouvrir les volets et je pleurerais sans interruption jusqu'à ce que les glandes lacrymales n'en puissent plus. Je n'en ai plus rien à faire de qui que ce soit et je mesure l'insondable vide des sentiments de solitude, d'abandon, d'injustice, de fatalisme qui m'habitent. Parfois, j'ai envie de prendre une cuite si forte que je ne me souviendrais plus de rien, quitte à en vomir les tripes pendant deux jours. C'est con, je sais et rien de très original. Alors, je me force à sortir du lit, à manger, à m'habiller, à m'occuper, tel un zombie, m'obligeant à penser à ce que je fais sur l'instant. Dans cette envie de néant, je jalonne ces heures d'activités pour rester connectée au vivant: couper une planche, tricoter, broder, ranger, faire à manger, écouter et discuter avec ceux qui se présentent... encore que comme par hasard, dans ces moments- là, je croise peu de gens qui de toute façon ne se rendent compte de rien. Après tout, je n'ai pas besoin de parler, d'expliquer, j'ai seulement besoin de pleurer éventuellement d'être cajolée en silence ce qui n'est pas demandable à n'importe qui. Je ne le demande pas à mon fils déjà, c'est dire. Ce dernier ne remarque d'ailleurs ces états que quand je m'affale dans le canapé à jouer des heures aux jeux vidéos ou à regarder des films et que je ne dis rien de la journée hormis le minimum poli.

    L'enfance fracassée, les tourments d'années de souffrance, l'incompréhension face à la loterie de la vie, cette saleté de maladie, les rencontres dévastatrices, les fuites, les lâchetés, l'hypocrisie, les souffrances de l'entourage reviennent de plein fouet. Des milliers de pourquoi parfaitement inutiles et stériles puisque tout cela n'a aucun sens. Par écho, mes pensées sont envahies par les épreuves de ceux que j'aime et je suis écrasée pendant des heures. Épuisée. Anéantie.

    Il n'y a rien à faire si ce n'est laisser passer. Je donne de la place à cette profonde tristesse, ce désarroi, ce désespoir, je vis ce que j'ai à vivre.

    Lui succédera la phase de la colère et de la révolte où tout le monde en prend pour son grade. Puis je retournerai à ces jours bénis où je savoure le moment présent avec gratitude dans la joie et la bienveillance.

    Le temps nous est compté sur une durée que nous ignorons totalement. Ces phases rythment mon existence et parlent de la vie qui est en moi, du combat incessant de l’Éros et du Thanatos, de l'angoisse de mort qui nous habitent tous. Il n'y a rien là d'original ou de particulier, c'est un universel. Je l'accueille avec plus ou moins de réussite pour ce que c'est, une expérience de VIE... car il n'y a que dans la mort que nous ne ressentons plus rien.


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  • Plusieurs jours, l'histoire de famille me préoccupa et j'en parlais largement avec quelques amis, mon chéri. Ils me soutinrent, m'éclairèrent, m'accompagnèrent, j'ouvris mes esgourdes, mes yeux en m'attachant à entendre ce qu'ils disaient, à voir ce qu'ils montraient. Je réalisai. Je mesurai. Petit à petit, grâce à eux, je posai des limites, commençai à dire non. Certes, j'ai encore largement donné, répondant à une urgence où je fus acculée, et pourtant, j'ai pris le temps d'y réfléchir, je suis sortie du huis clos en cherchant de l'aide ailleurs, je me suis penchée sur ce qu'il se passait en moi, j'ai pris la décision en harmonie avec mon interne malgré les pressions, les crises de larmes et de panique, les coups de colère, les jugements à l'emporte- pièce, le terrorisme des impuissants. Ainsi, j'ai donné non pour aider, colmater in extremis une situation jugée vitale mais parce que je ne pouvais, au regard de mes valeurs de solidarité et d'entraide laisser sans réponse cette non- demande d'aide ( puisqu'elle n'a pas été formulée explicitement, comme si c'était une évidence). Je n'ai pas complètement accédé pour sortir de cette foutue obligation que, parce que j'ai un peu plus, il est normal que je donne à des proches en grande difficulté et c'est nous respecter chacun que de ne pas tout prendre en charge et de laisser de la place à leurs ressources, leur responsabilité. Comme avec SeN, je redevins la méchante, l'abominable, lot de ceux qui refusent de continuer sans réfléchir les anciens fonctionnements. Je sais que quoiqu'il en soit, je m' attelle à une nouvelle strate dans le grand chambardement provoqué par Devic.

    Parallèlement, j'ai laissé de la place à leurs représentations, fait appel à leur propres ressources et pris conscience de l'aveuglement par l'argent, considéré comme seule alternative, seule solution; aucunement, le système défaillant, branlant, néfaste ou toxique n'est regardé, jugé et remis en question. J'en ai été attristée et sidérée car comment envisager des solutions quand il n'en a que pour et par l'argent? Il n'y a alors aucune alternative. C'est stérile, glacial, sans issue.

    J'en étais encore à ces travers familiaux quand je retrouvai une copine de la danse lors d'une sortie tissus pour les costumes de scène. Sous le coup du précédent épisode, je lui racontai ces circonstances et elle enchaîna sur son expérience avec un magnétiseur venu à domicile. Il lui avait parlé de programmes fixés sur certains objets de son intérieur: un ex ayant imprimé sa volonté de revenir chez elle l'empêchant ainsi de trouver une relation stable et durable avec un autre, les marques sur les murs de sa grande fille refusant de couper le cordon, le poids plus ou moins conscient des transferts de ses parents. En l'écoutant, quelque chose se mit en branle très profondément et une armoire me revint en pleine figure (et oui, encore une armoire en pleine figure). La jolie et solide armoire qui trône dans ma chambre depuis que j'ai quatorze ans se révélait tout à coup porteuse d'un programme, la fidélité à ma mère souffrante et désespérée, symbole de mon extrême préoccupation envers ses peurs de perdre, de manque, de non considération, son schéma de solitude interminable que je soulagerais chimériquement en partagent ce sort avec elle. Blam!

    J'avais choisie cette chambre avec elle il y a 26 ans, à mon goût, regrettant déjà à l'époque l'achat d'un lit une place et non deux qui me semblait plus approprié au cours de la vie. J'y avais renoncé parce que c'était trop cher, trop encombrant, bien des excuses pour ne pas laisser de place à une vie au- delà de l'adolescence, au- delà de la relation mère- fille. Je l'ai ensuite transportée à chaque déménagement car j'aime ses courbes, sa solidité, sa facilité à être démontée et remontée sans s’abîmer depuis des lustres et parce que ma mère n'a pas de place pour la garder. Pendant cinq ans, dans la chambre partagée avec SeN, elle fit face à sa propre chambre d'adolescent ramenée de chez ses parents ( alors qu'eux ont la place pour la stocker, que certains éléments sont abîmés voire cassés). Abominable miroir! L'un et l'autre, nous nous sommes reconnus dans cet autre chargé des mêmes travers de fidélité familiale.

    Au cours des seize dernières années, j'ai mis cette armoire en place d'honneur dans mes chambres successives, m'obstinant à y ranger mes affaires alors qu'elle déborde, parfois ne ferme plus sans forcer. Ce bazar commençait déjà à m'irriter quand je rencontrai mon chéri l'année dernière. Ses visites en traînant sa valise et ses sacs n'avaient pas de sens à mes yeux et je réfléchissais de plus en plus à lui trouver de la place. Survinrent l'incident de la chute de l'armoire, celle de l'aide d'urgence et l'éclairage sur ces programmes et ces fidélités. Il était temps d'en finir, de tourner la page et aussitôt ces évidences mises en conscience, plutôt que de m'attarder sur des explications et des remémorations incessantes, je décidai de trouver une armoire digne de moi, de nous, grande, spacieuse, permettant d'y ranger nos affaires. Si je peux sortir, après des mois de labeur et d'effort de l'argent pour aider un proche en difficulté, je peux très bien acheter une chambre d'adultes en couple. Zou!

    Dans les jours qui suivirent, je fouillai tous les catalogues de meubles, comparant les qualités, les prix, les possibilités de modularités ( avec ma manie de déménager constamment), je visitai des sites sur la toile et me rendis même dans une boutique luxueuse de la région pour regarder ce qu'ils proposent. Sans crainte, j'y convins d'un rendez- vous à domicile et une spécialiste vint dans ma chambre prendre les mesures; j'attends désormais son projet d'aménagement tout en continuant d'en discuter et de partager les modèles, modules, annonces, catalogues et sites avec mon chéri parce que c'est un projet COMMUN.

    Dorénavant, je suis soulagée. La petite armoire sera mise à l'abri en attendant d'avoir sa place, hors de ma chambre, accessoire, à côté. Je sais également que ma démarche est un processus salvateur tant pour moi que pour mes proches; en refusant de pérenniser des fonctionnements et des relations malsaines, j'enclenche une autre énergie, un autre fonctionnement qui leur sont bénéfiques car eux aussi souffrent de ces enfermements. Il n'est guère étonnant que ces dernières semaines, j'ai vendu, trié, jeté, déconstruit et reconstruit. La vie est naturellement en perpétuel renouvellement, nous autres humains, angoissés perdons tant de temps à vouloir la figer.

    J'arrive au bout d'un texte laborieux à écrire; il y a plus d'une semaine que je le travaille, le compose, le décompose, le construis, le déconstruis. Il y a tant d'autres aventures bien plus drôles à raconter et je bute sur ce sujet. Il me semblait cependant nécessaire de le rapporter car Devic est un choc engendrant des ondes se multipliant et résonnant à l'infini. Les prises de conscience s'étalent sur des années, c'est un long cheminement. Souvent , je me dis que j'aurais préféré avancer sans subir pareille épreuve, était- elle nécessaire? Ces souffrances ont- elles un sens? Pour Colette Portelance oui. Mon ami Boris parle du sens que nous donnons pour survivre aux traumas. Je n'ai pas de réponse.

    Bon, j'en finis enfin avec ce machin et retourne à un joli début d'angine. Car oui oui, comme après l'armoire sur la tête en avril, je refais un début d'angine après le coup sur la tête de ma propre armoire. Coïncidences? C'est quand même gros non? Nous n'en avons jamais fini avec notre inconscient me répétait la psychiatre. Je demande une trêve à ma caboche, j'ai besoin de repos.

    A bientôt pour plus de légèreté!


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  • Je me remets doucement. Tout doucement. Ma voix déraille sporadiquement et j'ai souvent besoin de calmer les grattouilles de la gorge à coup de bonbon. Bon sang! Qui eût cru que ces petites choses de ci de là pouvaient traîner sur trois semaines aussi laborieusement? Le traitement immunosuppresseur est probablement une explication rationnelle. Et je reste si lasse. S'il n'y avait ma vessie sensible pour me sortir du lit, j'y traînerais longuement de tôt le soir à plus tard le matin. C'est fou.

    Pendant plusieurs jours, je me suis pourtant reposée. J'ai renoncé à un cours, mon obstination au suivant se teinta de quintes de toux incessantes m'empêchant de parler ce qui est plutôt gênant dans l'enseignement. Il y eut deux jours à lenteur généralisée, tricoter un rang, finir péniblement le deuxième et prendre le temps de se reposer avant d'y revenir... Se reposer d'avoir tricoter?!! OUI OUI, j'en étais là! J'ai regardé des épisodes en pagaille, somnolant sur la table, affalée dans mes bras. J'espérais vadrouiller, picoler, picorer et m'amuser en bonne compagnie pour mes 41 ans et finalement, je me suis légumée, amorphe chez moi. J'ai annulé une tournée à multiples visites envisagées depuis des semaines à la rencontre de personnes chères pas vues depuis des années. Près de 8 heures de route en quatre jours? Je ne m'en sentais pas le courage, le train étant tellement compliqué sur certaines lignes, j'ai tout lâché à contre- cœur raisonnable. C'était objectivement au delà de mes forces.

    Je réussis à suivre la deuxième journée de formation à 150 km après quinze jours de convalescence; c'était nettement moins éprouvant qu'à la première bien que je n'échappai pas à un germe attrapé dans le train ou sur le lieu de formation. Je courus aux toilettes très souvent; par intuition, j'avais les bons remèdes sous la main et au soir, je ne sentis pas les brûlures. Au retour, j'allai danser à l'écoute de mes capacités pour retrouver mes copines, cette si belle ambiance et la joie de mouvoir le corps en ondulations libératoires. C'était quelque peu brouillon, je ne participai pas à la dernière chorégraphie certes mais cela me fit grand bien. Bon, d'accord, le lendemain, j'étais lessivée et je baillai tout l'après- midi amusant ainsi les stagiaires, changeant de la toux précédente.

    Les cheveux rasés repoussent par dessus la cicatrice, elle se perd en eux, se fait invisible. Quand je suis énervée, frappée par l'attitude de certains proches, des tensions me traversent le crâne en suivant son chemin, j'aimerais mieux que cette sensation disparaisse et ne s'éternise pas. Je n'ai aucune envie de ce genre de prise de tête au sens propre.

    Mon amoureux arrivé par surprise, avec fermeté, embarqua l'armoire pour la déchetterie. Je réussis à sauver les portes en massif et les fonds, pas les corniches malheureusement, « Cette armoire est empreinte de mauvaises ondes et de trucs à virer!» argumenta t-il. Je rattrapai quelques pièces métalliques avant la bascule dans la benne puis lui fus grandement reconnaissante de m'en avoir enfin libérée.

    Peu à peu, je retrouve mes forces, je déambule, marche. Le corps se remet et me rappelle de temps en temps par des coups de fatigue que le dodo réparateur est une nécessité pertinente. Si l'histoire de l'armoire est réglée, la prise de tête familiale, elle, persiste. A moins qu'il n'y ait là une coïncidence, un écho? Force est de constater que je reste encombrée de liens malsains, l'armoire n'étant que la surface émergée d'un iceberg. Je l'ai traînée une dizaine d'années, sur trois logements différents, la montant, la démontant, la remontant, tâchant de la préserver, de la réparer, de la rénover. Je me la pris sur la tête violemment, son sort fut alors réglé et mon amoureux s'y est mis. Ce fut salvateur. Un révélateur. Parce que son débarras, finalement, laissa indifférent. Pourquoi m'en ferais- je alors? Quoi qu'il en soi, un événement ces derniers jours a suivi l'épisode armoire ramenant sur le tapis les mêmes enjeux. Je tâcherai de vous raconter cela quand ma caboche aura réussi à mettre en mot cette expérience. Ou pas.

     


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