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De l’amitié en adversité
Il est très courant d’entendre que c’est dans l’épreuve que l’on reconnait les vrais amis.
Je n’en suis pas certaine.
Des personnes vivant loin et/ou ne pouvant se déplacer ont-elles à être inquiétées de me savoir si mal ? Ne vont-elles pas se culpabiliser d’être loin et/ou incapables de venir ?
Ces amis que je crois fragiles, que je veux préserver, peuvent –ils supporter ma déchéance ?
Ces amis pour qui la vue ou simplement l’idée de ma chute, voire de ma mort est intolérable ont-ils à être jugés parce qu’ils ne viennent pas, ne téléphonent pas ?
Et que penser de ceux qui sont trop bouleversés pour supporter ma simple vue dans cet état ? De ceux qui ont peur de mal parler, de se mal taire, de mal faire, d’être maladroits submergés par la souffrance ? De ceux qui débordés par le travail, le quotidien se prennent les terribles nouvelles quand il espérait retrouver celle qu’il avait connue si active et pleine d’entrain quelques mois auparavant? De ceux qui n’acceptent pas, sous l’emprise de la révolte ou en fuite.
Renvoi également à sa propre finitude : Cet être que j’aime et que je voudrais tant croire permanent, comment peut-il sombrer, disparaitre ?
Comment moi, que je voudrais croire permanent, puis-je sombrer, disparaitre?
Le psychisme humain est incapable d’envisager sa fin, l’autre en miroir déstabilise par sa chute, renvoie à l’impensable.
Qui peut dire que c’est parce qu’ils sont là qu’ils sont de véritables amis ?
Il y a ceux qui viennent par politesse, parce qu’ils ont peur de s’entendre dire qu’ils ne sont pas venus, parce qu’ils ont tellement peur de ce que certains pourraient penser d’eux, de ceux qui viennent uniquement pour eux et l’image d’eux.
Il y a ces vautours qui ne viennent que pour se repaître du malheur des autres afin de se rassurer sur leur propre vie ou encore pour ajouter à la liste des malheurs qu’ils aiment à étaler dans leurs discours de pauvres victimes du destin.
Dans l’emprisonnement du corps en souffrance, j’ai beaucoup pensé à ces questions. Je n’ai pas de réponse, ne les aurais probablement jamais. J’ai fait des expériences de rencontres intenses dont quelques épisodes sont narrés de ci de là.
Au hasard des rencontres, de l’autre, d’ ami de longue date ou rencontre impromptue que la vie offre en cadeau. Ici, ailleurs, partout et nulle part., en soi principalement.
De la complexité de l’être.
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Commentaires
;)
Je pense qu'il y a les amis qui seront là et les autres, tu as raison d'ailleurs pour tout un tas de raison. Une relation (je ne parlerai pas d'amie, ce n'est pas le cas, mais c'est l'amie d'une très bonne amie) a fait une grosse attaque cérébrale il y a un an et demi pour laquelle elle est toujours hospitalée. Notre amie commune m'a proposée de l'accompagner à l'hôpital mais ça m'est impossible, cela me fait trop peur et me renverrai trop à moi.
Ensuite, la réaction des amis dépend aussi de sa propre réaction et acceptation, je ne suis pas sûre que je pourrais accepter d'être vue dans un état de grande déchéance, c'est probablement de la fierté mal placée mais j'ai déjà tellement honte (je sais que c'est con) d'être malade.
Enfin quand on sous estime pour soi-même les choses et garde tout pour soi, c'est difficile pour les amis de savoir ce qui se passe vraiment et d'être le soutien qu'on espère peut-être quelque part...
Voilà, ça part dans tous les sens, mais ça n'est pas facile tout ça... c'est en tout cas la façon dont je vois et vis les choses
C'est très long, désolée
à bientôt fée des agrumes ;-)
pour avoir fréquenté les malades au pied de leur lit chaque jour pendant 10 ans en tant qu'infirmière, je ne suis pas pour autant vaccinée ni de la maladie de mes proches ni de la mienne.
merci de ce joli témoignage , il est une superbe leçon de vieQuelle lucidité à propos de "ces relations" avec les autres.
Tu as parfaitement fait le tour du "problème", des différents cas de figure.
Finalement, il me semble que tu admets quand même que seuls les vrais amis restent présents dans les moments difficiles.
Comme il l'est dit dans un "commentaire", nous sommes et restons définitivement seuls. Seuls de la naissance à la mort.
C'est précisément ce que j'ai tenté d'expliquer au frère de mon père quelques jours après son enterrement. Il s'offusquait de ne pas avoir été averti de son état dépressif et de ses "TS"... mais cela faisait des années qu'ils ne se voyaient pas.
Tu vois, que ce que tu écris se rencontre partout.
En plus, les amis c'est périssable.
Personnellement, j'ai beaucoup voyagé pour le travail et un peu comme après les rentrées scolaires, les changements d'école, on perd de vue les amis (pas les copains... mais les amis). Comme je suis très "exigent" sur la qualité de la relation finalement on se rend compte que ces amitiés étaient... très fragile. Elles ne résistent ni au temps, ni à l'éloignement ET ENCORE MOINS aux "problèmes" que tu rencontres.
C'est ainsi depuis...
Je dois t'avouer que je ne cesse de penser à ton fils... comment vit-il cette situation ? (mais peut-être est-ce difficile d'en parler, ou... indiscret. Tu n'es pas obligée de répondre)
Bien à toi.8HélèneMercredi 18 Juillet 2012 à 12:10
- Ceux qui sont là en cas de pépin,(et dans mon cas, j'ai eu de sacrées surprises!)
- Ceux à qui tu sens que tu peux montrer qui tu es; mais nous n'aimons pas sombrer dans le pathos, n'est-ce pas?
- Ceux qui ont confiance en toi, et n'écoutent pas la rumeur.
Je ne crois pas qu'ils soient là par pur désir d'être vus.
Nos vrais amis ne comprennent pas toujours: ils ne sont pas dans notre peau. Et c'est pour cela que lorsque je vais très mal, je me réfugie au fond de ma caverne. Parce qu'ils peuvent aussi, souffrir de ne pas comprendre, et parfois même, de ne pas être à notre place!
Difficile pour notre orgueil, de nous montrer comme nous sommes...
Tes textes m'interpèlent. Peut-être n'ai-je pas le temps de me poser les questions en temps et en heure.
C'est pour cela aussi que je ne vais quasiment plus sur la toile:
trop de choses à vivre!
FDA, Bonne route à toi. Beaucoup de bonheur, d'amour et d'amitié.9HélèneMercredi 18 Juillet 2012 à 12:10
Je pense qu'on est toujours seul, dans le malheur, la souffrance. Et qu'en tant qu'ami, je ne peux dire que:"je suis là; je t'écoute et essaye de te comprendre".
Mais tu as raison; ma maladie, si elle m'affecte par les phrases "on-off" de la vie quotidienne, n'est pour l'instant perceptible que par ceux qui me connaissent. Elle m'a donné une échéance, a redonné un sens à ma vie. Et même si la douleur est là, à chaque instant, je veux moi-aussi vivre, aimer mieux mes amours, (et surtout mes enfants); mais aussi me battre. Pour ceux qui ne sont plus en état de le faire. J'ai fait des erreurs, moi aussi; mais je peux dire que c'était par amour.
Et l'heure est venue pour moi de vivre ma vie différement; ce ne sera pas facile, mais j'arriverai à cette liberté que je n'ai peut-être pas su donner, ni ressentir.
Voilà. Continue à écrire, il me semble que tu peux faire passer de vrais messages. A chacune son chemin: je dois accepter à me servir de ma plume pour autre chose.
Amitié sincère.A Mariev:
1. Tout à fait d'accord avec toi en ce qui concerne ceux qui passent par l'épreuve d'un autre pour se faire valoir vis-à-vis d'eux mêmes ou des autres. Entre miroir et contre miroir, nous vivons par l'autre avec la multiplicité des possibilités d'être. Que chacun vive avec sa conscience. A l'instant ultime, nous y sommes confrontés et si ce n'est pas nous, ce sera un suivant qui se prendra dans la figure ce que nous n'avons pas réglé. Elle est là aussi la communauté humaine, nous sommes tous responsables les uns des autres et avant tout de nous même.
Sais -tu Mariev que je bois tes paroles? Des atomes sensibles très très proches, je sens.
Bises à toi.2.
A Chris spé:
Je n'en doute pas. Tout ce qui n'est pas donné est perdu et ce qui n'est pas marchandable a d'autant plus de valeur.
Moi aussi, virtuelle et sincère, bulle de rien dans l'immensité du monde, sans autre sens que celui de donner et recevoir.
BizzzzzzzzzzA pandora:
...
A Isabelle:
Infirmière? Tiens donc...
Je suis certaine que tu as aussi de belles leçons de vie à partager.
Traverser la souffrance, la sienne, celle de l'autre ne la rend pas plus supportable, ni tolérable.Mon ami Boris m'accompagne en ces mots quand je dis que les événenements n'ont de sens que par celui que nous leur donnons, en pouvant se les approprier.A Hélène:
1. Hélène, bonsoir,
Tu évoques souvent la peau, être dans la peau, cela m'interpelle. Quel sens cela peut -il avoir?
Si la vie est là, pleine et entière, pourquoi se poser des questions? Vivre dans l'instant et faire de son mieux en toute circonstance, c'est pas mal du tout. La maladie est un déclencheur chez moi; tout, le passé, le présent, ma vie entière, me revient violement dans la figure et quand j'ai su que c'était grave, ce fut comme si tout ce que j'avais porté en moi depuis ma conception était tombé à mes pieds. Le poids de ces traces conscientes et inconscientes , l'amas incompréhensible qu'elles formaient, les puantes, pourries mélées aux plus belles... Qu'allai- je en faire? J'ai décidé de faire le grand nettoyage, pour être en paix avec moi- même et les miens, mon fils surtout. Une part de moi est morte et je suis en pleine reconstruction. Pour ne pas avoir à répéter les mêmes erreurs abominables, je me pose des questions, je chemine sur la voie de ma vie dont je veux désormais être totalement actrice, en pleine conscience et non plus une petite fille perdue qui court d'une brèche à l'autre désespérement.
Sois heureuse Hélène, en paix avec toi même et la question de la peau se pose autrement. Tu peux aussi lire un ou deux livres de Boris, c'est tellement fort et vivant.
Chaleureusement,
Une petite fée d'entre deux mondes.2. L'empathie... Mon ami Boris en dit que c'est la voie de ceux qui connaissent la souffrance. Une voie aux multiples possibles en raison de la multiplicité des êtres. Et ta propre peau? Voilà ma question dont la réponse est pour toi et non pour moi.
Oui, tu as raison sur toute la ligne, sur toutes les lignes.
Sauf qu'il n'y a pas de je dois . C'est ou je veux, ou je veux parce que je me sens obligée de le faire ( mais pourquoi alors? pour qui? est- ce vraiment ce que je veux? )
Nous avons tous une échéance, seules certaines circonstances nous ramènent à sa réalité, parfois. Parce que le psychisme ne peut pas imaginer sa fin, c'est clinique.
Que ta plume te mène à la vie libre et sereine parmi les tiens!
Je suis là pour un moment je pense, tu seras toujours la bienvenue et je suis heureuse de te savoir en bonne voie, malgré la maladie...
Maladie, déclencheur de vie.A Philippe:
Je parlerai de mon fils dans un article, il y a de quoi en dire et en redire. Petit bonhomme incroyable.
Etre seul? Je ne sais pas. Nous nous nourrissons les uns les autres et nos vies n'ont pas de sens sans l'autre. Nous sommes seuls et habités des autres. D'où la douleur du rejet, de l'abandon.
Je crois.
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cela te rend plus juste vis-à-vis de toi-même et des autres, plus juste dans ta vision de l'humanité...
car tu as quand même, et même mieux, repéré les vautours
lors de mon "épisode dépressif", certains ne m'ont jamais appelée et je comprends, certains collègues se sont montrés présents et attentifs et j'ai senti leur sincérité, d'autres ont fait le vautour (dès que ça pue, dès que ça casse, ça les intéresse, comme s'ils prenaient soudain davantage d'importance et de pouvoir à leurs propres yeux, j'imagine), etc ...
je me suis rapprochée ainsi de ce que tu décris ici, mais pas encore tout à fait dans la sérénité et la plénitude qui pulse en toi...
Tiens, il y a une guerre des Bisous qui sévit sur OverBlog, et je t'en fais Grande Victime avec plaisir!
BISOUHOUHOUHOU
;)