-
Par fée des agrumes le 8 Septembre 2010 à 14:00
J’ai rencontré Pierre Rabhi en virtuel puis en vrai, je dis rencontre parce que, comme mon ami Boris, j’ai trouvé en ses paroles des échos à mon univers interne et le partage de quelques minutes en sa compagnie fut simple, authentique et magique, profondément humain. La sortie de son nouveau livre était un bon prétexte pour commencer ma collection et j’avoue l’avoir dévoré très rapidement.
Il commence par le Sahara où il décrit, sans angélisme, avec ses souvenirs d’enfance la simplicité d’une vie sobre et tranquille peu à peu détruite par la modernité et ses horaires, sa monnaie, ses transports, la consommation présentée en voie unique du bonheur. A vingt ans, il comprend déjà que c’est une monumentale imposture parce que l’argent devient valeur dominante et que le capitalisme engendre des inégalités insupportables. Puis vinrent les années en région parisienne comme travailleur, ouvrier spécialisé. En pleine croissance après- guerre, ses camarades de labeur croient en un avenir meilleur pour leurs enfants, l’espoir de leur offrir les études qu’ils n’ont pu faire eux- mêmes, le confort conjugués à leur foi dans le progrès donnent sens à leurs sacrifices, leur aliénation dans des emplois insensés. Seulement, avec la surabondance, grandit un malaise, un ennui profond et l’avoir écrase l’être.
En parallèle, la paysannerie s’étiole, disparait avec la mesure et l’humilité de l’homme dans la nature qui lui sont attachées. Massacrée à la guerre de 14-18, arrachée à la terre pour fournir la main d’œuvre aux usines, elle est complètement démantelée comme ses structures sociales traditionnelles. Servitude volontaires des hommes à l’aide de la propagande exaltant le progrès, pillage de la planète pour nourrir la révolution industrielle, multiplication des abstractions, prédominance de l’intellect, mobilité détachant l’être du corps social, du territoire. Le monde rural est aliéné par le remembrement, l’agrochimie, la frénésie de la production à tout crin ; la loi du profit immédiat appauvrit des paysans coupés de la terre nourricière qui n’est plus un bien commun et vital à préserver pour les générations suivantes.
La modernité ? Arrogante, hypocrite, elle uniformise et standardise le monde, elle est incapable de conjuguer ses progrès bénéfiques sur les plans politique, technologique, médical, … avec les acquis antérieurs. L’homme (de préférence occidentalisé) est un prédateur de la nature, un dieu la dominant pour son profit, un homme coupé de l’intelligence de la vie. Intuition, sensibilité, subjectivité n’ont que peu de place face à des pensées fragmentée (hyper spécialisation de chacun) et mécaniques. Une rationalité sans âme vouée à la finance a construit le monde actuel engendrant ennui et désabusement.
La pyramide répartit les humains : en bas ceux qui triment et gagnent peu, en haut, ceux qui cumulent les bénéfices, entre les deux, les échelons à gravir et à ne surtout pas dévaler, pyramide pérennisée par le système éducatif d’emblée. Culture hors sol, enfermement constant dans des boites (par exemple, emploi dans des petites ou grandes boites, sorties en boite, balades en caisses, pour finir dans la boite ultime), horizon bouché et fermé des citadins habitant des espaces exigus, multiplications des clefs, codes, serrures, caméras de surveillance.. Ambiance carcérale généralisée. Cette suspicion n’engendre que le sentiment d’insécurité.
La technologie galopante, normalement au service des hommes, les rend dépendants, les enferme toujours plus derrière leurs écrans et gadgets. L’information à flux tendus assomme en véhiculant vérités et contre- vérités, indiscrétion généralisée jusque dans la plus grande intimité de tous.
La plaie et l’erreur fondamentale faite au cours de l’évolution technologique est la subordination du destin collectif, de la planète au LUCRE, c'est-à-dire la finance engendrant le gaspillage et l’avarice, une prédation humaine sans fin, avide et irraisonnée, immodération fondée sur des désirs inassouvis et concurrentiels constamment attisés par la comparaison, la compétition, la publicité. L’homme transpose ses fantasmes sur l’or, les pierres précieuses, l’argent, les matières minérales et donne une importance énorme à des superflus devenus indispensables.
La technologie donne un pouvoir énorme, inégalé dans l’histoire alors que la conscience, elle, n’a pas évoluée. L’homme est grisé par sa puissance et transgresse les limites naturelles.
Inévitablement, les inégalités s’amplifient, entre le Nord et le Sud, au sein d’un même pays (Que deviendraient de nombreux habitants de France sans les aides de l’Etat ?) Simplement parce que ne compte plus pour richesse que la finance. Fragmentation sociale, cloisonnement provoquent angoisses, consommation d’anxiolytiques médicamenteux ou par l’illusion de la possession. Frustration, colère, révolte côtoient sensation de toute puissance en réponse aux peurs d’insignifiance et de finitude d’une vie humaine devenue dérisoire.
Explosion des notions essentielles de temps : d’un temps de cycle naissance- mort, de rythme intervention- repos, nous sommes passés à un temps indexé sur l’argent, un temps à gagner, à ne surtout pas perdre d’où une frénésie en mode d’existence collective, un temps perpétuellement fragmenté secouant le corps par la vitesse toujours plus grande des déplacements et communication amplifiée encore par l’informatique et son immédiateté. Explosion des notions de temps et d’espace devenu psychologiques réductibles et extensibles à l’infini.
Notre société (notre civilisation ?) est véritablement la plus vulnérable, la plus irrationnelle qu’ait connue l’homme. Tout y est confus, déstructuré, les inégalités d’autant plus révoltantes que la technologie permettrait d’offrir une vie décente à tous dans le respect de la planète, de l’autre. Alors quoi ? Que faire ? Constater et se soumettre ? Accepter par tacite consentement ? Certainement pas !
La réponse : la sobriété volontaire.
Penser qu’une croissance infinie sur une terre finie est un leurre, une illusion abominable, une chimère. Nous avons le pouvoir (le devoir ?) de dire, d’abord en soi « cela suffit » (je vous recopierai une histoire tirée du livre dans le prochain article à ce propos).
Refuser la toute puissance de la finance en revenant prioritairement à une agriculture capable de nourrir sainement TOUS les humains de la planète, sur leurs terres ou près de chez eux
Revenir à une société où « l’individu est à la place où il est utile à lui- même et aux autres », une société régie par l’assistance mutuelle, une société reliée à la terre, l’eau, les savoirs et savoirs –faire. Honorer l’homme, tous les hommes avec la sagesse pleine de bon sens.
Retrouver la valeur des présents de la vie, la gratitude à l’égard de la terre nourricière et renouer ainsi avec la plénitude et la conscience de sa présence au monde, sortir de la toute- puissance de l’argent décidant à lui seul ce qu’est la richesse, la pauvreté et la misère. Retrouver la valeur des choses par l’effort qu’elles nécessitent, en finir avec le gaspillage, la dilapidation des ressources, revenir à la modération, à la sobriété et ne plus se jeter dans la consommation sans limite sous prétexte qu’il y a opulence. Et si abondance il y a, qu’elle n’ait de but que d’être équitablement partagée. Quitter la prédation extensive, l’obsession du stockage et l’appropriation, se défaire du superflu.
Renouer avec la liberté donnée par la frugalité où force, patience, endurance et légèreté se conjuguent. Construire un art de vivre avec tranquillité et légèreté.
« La sobriété heureuse, pour moi, relève résolument du domaine mystique et spirituel. Celui-ci, par le dépouillement intérieur qu’il induit, devient un espace de liberté, affranchi des tourments dont nous accable la pesanteur de notre mode d’existence. ».
Rendre la mesure à toute chose en quittant l’illusion de la toute puissance de la pensée humaine parce qu’elle est minuscule, limitée, éphémère. Contempler le monde hors des questionnements incessants, des attentes et des ambitions afin d’ouvrir notre être profond.
Sortir du temps –argent afin de reconquérir sa liberté, privilégier la méditation, l’immobilité, le silence, la calme, la lenteur.
Enfin, il raconte son parcours : orphelin de sa mère à 4 ans, son père le confie à un couple de Français sans enfant qui l’adopte, il grandit entre deux cultures, deux représentations du monde parfois contradictoires. Après une scolarité médiocre, il lit les philosophes, les mystiques, se penche sur l’histoire, s’interroge sur la civilisation. Il quitte sa terre natale dans les années 50 avec la guerre et la violence de la libération algérienne dans une grande solitude. Il travaille comme ouvrier spécialisé en région parisienne, rencontre sa femme avec qui il part s’installer dans la Cévenne ardéchoise. Afin d’obtenir le crédit nécessaire pour acheter une terre, il se forme en agriculture ingurgitant en un an le programme de trois parce qu’ils n’ont pas les moyens de les financer. A la banque, le conseiller ne comprend pas son obstination à acheter 4 hectares de terre rocailleuse et en garrigue sèche avec un bâtiment nécessitant de gros travaux et seulement quelques trentaines de mètres cubes d’eau pluviale collectés dans des réservoirs creusés dans des failles naturelles ; à ses yeux, il emmène sa famille à un mort certaine. Malgré les remontrances, ils s’installent, vivent sobrement, travaillent et lentement, transforment le lieu en un petit oasis refusant l’agriculture industrielle, se souciant constamment de choix écologiques. Autolimitation, rigueur, rationalité et objectivité sont nécessaires à l’élaboration de leur projet promouvant constamment le sens, la cohérence et l’importance fondamentale du lien social afin de ne pas vivre en marginaux.
Après 15 ans de vie très sobre parfois à la limite de l’indigence, il s’interroge sur sa démarche, l’évolution de la société, la place de son choix dans cette société. Parce qu’il vit en France, dans un pays riche, il se sait privilégié et se dit même capitaliste ne serait- ce que par la possession de sa voiture moyenne nécessaire à ses déplacements pour les conférences. Par delà la satisfaction de ses besoins élémentaires, lui aussi possède du superflu et proclame que nous sommes nombreux à ignorer combien nous sommes capitalistes. Il reconnait également que la notion de sobriété n’a aucun sens pour les plus démunis et peut être interprétée comme une provocation au regard du fonctionnement actuel de la société parce les différences sont criantes, révoltantes, engendrent la violence, la peur. « La responsabilité de soi- même que la société doit impérativement permettre à chacun » n’est possible qu’en renonçant au modèle actuel. Il s’agit de changer de paradigme en replaçant l’être humain et la nature au cœur de nos préoccupations. Surtout, il nous est nécessaire de réenchanter le monde en évoluant vers un humanisme authentique, trouver une façon juste d’habiter la planète et d’y inscrire notre destin d’une manière satisfaisante pour le cœur, l’esprit et l’intelligence. Générosité, équité et respect.
Le système actuel n’est pas rasfistolable, il y a à renoncer aux mythes fondateurs de la modernité, à revenir au vivant, à protéger les biens vitaux, les extraire de la spéculation financière, considérer les milieux naturels en tant que biens communs à préserver, harmoniser la relation humains/ nature, ré équilibrer le masculin et le féminin parce que les femmes sont bafouées et négligées, promouvoir une pédagogie de l’être fondée sur la coopération, la conscience de la complémentarité des êtres, le rapprochement de la terre, la revalorisation du travail manuel afin d’extirper les enfants de leur seul rôle de consommateur, structurer les espaces différemment afin de privilégier les relations humaines, la solidarité dont surtout celle à l’égard des anciens, etc.
Pierre Rabhi n’est ni un idéaliste, ni un passéiste, encore moins un réactionnaire ou un doux rêveur. Il observe, partage ses pensées, constate et propose des solutions. Il ne se fait guère d’illusion parfaitement conscient du caractère aléatoire des humains et de leurs défauts. Néanmoins, il fait sa part, aussi infime soit- elle. Il appelle à l’indignation constructive, à la mobilisation de chacun d’entre nous afin de changer de paradigme proposant des pistes, ouvert à toute initiative allant dans le sens du manifeste Terre et humanisme. Mon texte exprime ce que j’en ai perçu et retenu, incorrectement probablement. Si la question de notre place sur cette terre vous intéresse, allez piocher par vous- même dans ses textes, je vous y invite grandement.
3 commentaires -
Par fée des agrumes le 1 Août 2010 à 12:30
Dans la famille, nous sommes de grands amateurs des films d’animation Pixar, courts ou longs métrages. Nous attendions le troisième opus de Toy Story depuis l’annonce de sa sortie parce que les deux premiers nous avaient plu. Aussi, le 14 juillet, fiston tint absolument à aller le voir et j’acceptai facilement.
Il est coutumier que les suites soient médiocre, heureusement, Pixar n’est pas de ce genre et nous nous sommes régalés.
Andy a grandi et se prépare à partir à l’université ; chargé de ranger sa chambre, il trie ses jouets entre ceux à jeter, ceux à donner et ceux à mettre au grenier. Woody l’accompagnera, les autres seront mis dans un sac destiné au grenier. Suite à une méprise, ils se retrouvent dans une crèche dont le monde des jouets est dirigé par Lotso, gros ours parfumé à la fraise. Derrière une belle image idyllique, se cache en fait un régime autoritaire. La troupe des jouets d’Andy se prépare à l’évasion.
Comme d’habitude, les niveaux de lecture sont multiples, régalant ainsi chaque tranche d’âge. Il y a l’aventure et ses péripéties, les astuces et parallèles en clin d’œil à des références variées, les sous- entendus subtils. Il y a de quoi rire aux éclats avec le délirant défilé vestimentaire de Ken, les séances de tortures de Barbie avec ses tenues favorites, un Buzz l’éclair version espagnole fantastique. Il y a de quoi pleurer (et je suis une véritable madeleine en la matière !) avec l’épisode à l’incinérateur à déchets en profonde réflexion sur la fin de l’existence, la disparition.
Le plan d’évasion est plein de trésors d’ingéniosité, les dialogues sont piquants et enlevés avec quelques surprises comme par exemple une phrase de Barbie que tous les spectateurs adultes ne sont pas forcément capables de comprendre.
Le temps qui passe, la fin de l’enfance, la blessure de l’abandon et de ce que chacun en fait, la transmission, la solidarité, la fidélité, notre responsabilité dans le choix de société … et oui, il y a tout cela dans Toy Story 3.
Evidemment, la qualité graphique est au rendez- vous, la technologie évoluant si rapidement que les animateurs eux- mêmes reconnaissent le fossé existant entre le premier opus et ce troisième.
Bref, nous sommes ressortis de la salle enchantés, avec la certitude que nous le regarderons encore et encore avec un plaisir identique. Et puis, mon garçon n’a pas manqué, parmi les jouets, un Totoro en peluche, clin d’œil aux films de Hayao Miyazaki dont nous sommes également de grands amateurs. Il n’est guère étonnant que nos univers mentaux se croisent et se reconnaissent, instinctivement, intuitivement.
2 commentaires -
Par fée des agrumes le 10 Juillet 2010 à 10:07
Je l’ai connue il y a plusieurs années alors qu’elle était jeune fille au pair dans la région. En quête de cours de français, elle était venue chez moi et nous avions sympathisé. Inévitablement, Ana est repartie à Sao Paulo. Ce n’est jamais facile et une partie de mon cœur est partie avec elle au Brésil. Heureusement, Facebook nous réunit malgré les kilomètres et les décalages horaires, je m’efforce de lire le portugais que je ne connais pas et je raffole de ses photos.
Dernièrement, alors que j’échangeais avec Janaïna (brésilienne installée en Suisse que j’espérais revoir au concert) au sujet d’Hindi Zahra , Ana m’interrogea sur ces Eurockéennes. Du coup, armée de mon appareil énervant, je lui ai concocté un petit reportage afin de lui montrer l’ambiance, le site, le décor. Comme elle les as déjà vues avec mes commentaires sur Facebook, il ne me reste plus qu’à les montrer ici, aussi mauvaises puissent être certaines. Pour une réussie, combien de tentatives avortées! Ces appareils laissent rarement la place à la spontanéité… à moins que je ne sache pas m’en servir. Les logiciels correcteurs sont d’un compliqué en prime et il fait trop chaud pour rester à se creuser la tête devant l’ordi…
Voici donc, mon hommage à Ana, par delà les mers et les heures. Parce qu'elle est avec moi.
La foule, la foule, sous le soleil et dans la chaleur.
Dans ses allers-et- venues
Devant les toilettes et le distributeur de billets, côte à côte,
Les vues depuis quelques unes des plates-formes
Quelques concerts,
De jour,
Mika
Ethiopiques
Emilie Simon
Au crépuscule,
Hindi Zahra et El Tambura
De nuit,
Lcd Sound System
The Hives
Massive Attack
Dans le bruit. Boom boom boom. Quand les basses résonnent dans les cages thoraciques. en coeur.
3 commentaires -
Par fée des agrumes le 5 Juillet 2010 à 17:30
Cette édition a été motivée par Emilie Simon et Massive Attack de passage le samedi et le dimanche, je décidai donc d’y aller deux jours. Seule. Quiconque désirant me rejoindre était bienvenu, je savais que je trouverais sur le site des accompagnateurs sympathiques et bienveillants, aussi, je n’avais aucune inquiétude.
Coutumière de l’impromptu, j’ai à nouveau vécu quelques péripéties incroyables au point qu’au lendemain de ces deux jours, je suis légèrement assommée, de sommeil, d’incrédulité ou quelque autre ressenti non identifié là. Je pense que le temps me sera nécessaire pour mettre en mots ordonnés et clairs mes pensées ; je ferai donc plusieurs séquences.
En premier lieu, je me contenterai de faire le tour des concerts sélectionnés, des hasards des déambulations d’une scène à l’autre, c’est un cadre nécessaire en ces heures aléatoires et brumeuses internes.
Samedi 3 juillet :
1. Broken Social Scene.
Difficile d’ouvrir les festivités, ce collectif n’a pas accroché mon attention, je me souviens seulement qu’ils étaient 6 sur scène, que c’était du pop rock habituel, rien de transcendant. De toute façon, j’avais la tête ailleurs: mettre de la crème solaire, ajuster le chapeau, regarder le paysage, discuter avec les accompagnateurs, les autres festivaliers présents sur la plate- forme. Sous la chaleur, je souriais intérieurement de ces étalages de chair humaine entre les gars torse nu, tête couverte et les filles en short et maillot. Quel choc ce serait pour nos arrière- grands- parents ! J’observais la diversité des faciès et corpulences, les attitudes, les interactions avec détachement, constamment ébahie de la multiplicité des êtres. Effluves de chichon, les gobelets remplis de boisons diverses brandis en danse et gesticulation… Je me mettais dans l’ambiance, doucement avec un fond musical.
- 2. Emilie Simon.
-
Là, j’étais en d’autres terres. Elle était l’origine de ma venue ce jour et je me réjouissais de la revoir à nouveau. Néanmoins, j’étais agacée de ne que l’apercevoir. La plate- forme sous le chapiteau est plus éloignée de la scène, elle était habillée en foncé dans un décor sombre aux lumières virevoltantes certes mais peu contrastantes. Finalement, je n’ai eu de place que pour sa musique et sa voix. Je reconnus évidemment les titres et expliquai à mes accompagnateurs son parcours, ses albums bien que dans le son soit très fort dans ces circonstances. Elle a joué principalement des extraits de son nouvel album, Big machine avec des jeux de lumière envolés et riches. Fleur de saison en acoustique et Opium en remix trop long à mon goût. Ils n’étaient que trois sur scène et je n’ai pas retrouvé les originalités des spectacles précédents. Les chansons ne m’ont pas déçue, je suis convaincue, le show peut- être un peu après tout. Elle a revendiqué d’ailleurs cette approche plus directe et frontale dans une interview entendue le lendemain sur Couleur 3.
- 3. Hindi Zahra et el Tambura
-
C’était la deuxième excuse pour venir le samedi : une expérience spéciale pour les Eurock entre la chanteuse berbère et les tambours d’Egypte. Un régal pour l’amatrice de musique du monde que je suis ! Chants, danses, alternances et mélanges des registres ; c’était envolé, rythmique, joyeux, j’ai dansé avec entrain.
- 4. General Elektrics
-
Traîner dans le stand pour manger et papoter, organiser les prises en charges pour tous m’ont empêché d’en profiter et quand nous étions prêts à y aller, le concert était terminé. Dommage, il y avait des morceaux détonants et une ambiance terrible. J’ai écouté deux ou trois titres de loin, tant pis, ce sera pour une autre occasion.
- 5. The XX
-
J’avais prévu de les écouter et les circonstances ne s’y sont pas prêtées alors je les ai entendus de loin. Forcément ça n’aide pas à se mettre dans le bain.
- 5. The Hives
-
J’y suis allée par curiosité connaissant leur titre phare. Ils ont commencé en retard, une grosse averse nous a trempés et je me suis demandé si j’allais traîner longtemps sur le site sentant une lassitude m’envahir. Finalement, je suis restée et j’ai découvert une mise en scène concise, des tenues originales. C’était puissant et le chanteur avait une présence incroyable sur scène (je l’ai mis en parallèle avec Mick Jagger, en pensée furtive). Après deux bons tiers du spectacle, à minuit, j’avais ma dose et je suis partie sur la scène suivante.
- 6. Ghinzu
-
Ambiance du tonnerre et morceaux envolés. La fatigue a été plus forte que moi ; au bout de quelques titres, je suis partie. Au moins je les aurai aperçus.
Dimanche 4 juillet :
Après une courte nuit et une petite sieste, je suis repartie en piste pour la deuxième séance.
- 1. The drums
-
C’était chouette, les titres enthousiastes, diversifiés, le chanteur essayait de mobiliser le public en entrée de la journée ce qui est loin d’être facile. Bonne petite mise en bouche après tout.
- 2. Ethiopiques
Classé soul, j’avais grandement envie d’aller goûter à ce groupe éthiopien et heureusement, leur spectacle était plus long que celui des Drums. J’entrainais Yannick l’accompagnateur dans cette belle et courte aventure. Ce fut un délice entrainant et joyeux. C’est là qu’il me dit que j’avais de belles sélections depuis l’année dernière qu’il m’accompagne dans mes pérégrinations festivalières. Héhé.
- 3. Julian Casablancas
-
Membre des Strokes, il joue ici seul. Si le registre me plait en général, j’ai été contrariée par le son et les basses trop fortes cassant la mélodie.
- 4. LCD Sound System
Pure électro, je me suis remuée sur leurs titres mouvementés et scandés. Ça m’a plu, j’étais contente. J’ai loupé la fin pour rejoindre la grande scène où les places pour voir Mika depuis la plate- forme étaient comptées.
- 5. Mika
-
Je n’ai pas de disques ni même de titres de Mika chez moi. J’aime les chansons gaies et énergiques passant sur les ondes sans toutefois aller jusqu’à acheter quoi que ce soit. J’avais envie d’aller m’amuser pressentant une forte présence sur scène. Je n’ai pas été déçue, vraiment. Non seulement les décors et les costumes étaient travaillés dans un univers à la Lewis Carrol en plus, c’est un spectacle total qui nous a été offert. Il saute, danse et bouge avec une énergie folle, il implique le public pleinement dans le déroulement du show (vers la fin, il me semble qu’il a fait monter un gars du public sur scène pour participer aux tambours et chorégraphie). Un univers coloré, explosif, lumineux, une bouffée de joie de vivre revitalisante qui a soulevé le public. J’ai sauté et dansé autant que possible, ravie de partager cet instant avec la foule ; combien de mes compagnons handicapés se sont levés ou ont dansé du haut du corps dans leur fauteuil ? C’était une communion vivifiante et joyeuse avec un Mika généreux, heureux d’être là, déchaîné, humble et authentique.
Après le spectacle, il s’est produit un petit événement qui mérite à lui seul un article tant il est remarquable. Je n’en dis pas plus, ce sera pour plus tard. Patience.
- 6. Massive Attack
-
Heureusement, il y avait une plage d’une heure entre Mika et ce groupe de trip hop parce que le contraste est important. Leur dernier passage n’avait pas été folichon à ce que j’avais entendu et cela m’avait réconfortée. Avec un nouvel album sorti après 7 ans de silence, c’était une bonne occasion d’en profiter. Scène sombre illuminée de laser et images reportées à l’arrière, j’ai été surprise par les chiffres et libellés exposés : en français, sur des sujets d’actualité en France et dans le monde, des parallèles effrayants sur la folie des hommes entre la frénésie consumériste et le désastre des conditions de vie de la majorité des humains sur la planète, les dangers environnementaux et l’irrationalité humaine dilapidatrice des ressources, évocation de faits divers « people » et autres aberrations politiques. J’avoue que j’ai préféré les lâcher afin de jouir pleinement de la musique planante. C’était hypnotique, profondément interne. J’avais envie de me mettre au Qi Gong là, tout de suite. Bon, d’accord, j’en suis adepte depuis plusieurs années et il m’est aisé d'y entrer avec délectation. Une plongée en transe forte savoureuse, en terrain conquis ? Et oui.
Petit tour musical de ces deux journées qui me laisse un goût de reviens-y (si les programmations me conviennent). C’est une sélection toute personnelle faite parfois au prix d’un choix cornélien, il est malheureusement impossible de tout voir sur 3 jours, 5 scènes et 75 concerts.
Ces artistes ont des destins variables, plus ou moins longs, avec plus ou moins de bonheur et de postérité ; il n’empêche que je suis fière de constater qu’à presque 40 berges, je suis toujours en piste sur l’actualité musicale, que mon oreille reste ouverte et affutée.
A suivre…
1 commentaire -
Par fée des agrumes le 20 Juin 2010 à 12:21
J’aime mon travail, mon métier malgré l’ingratitude et la non- reconnaissance décrétées par les valeurs régissant les représentations de réussite contemporaines.
Je l’aime parce qu’il est à l’image de mes valeurs humanistes ; de là à savoir s’il l’est fondamentalement ou si je le construis ainsi, je ne saurais le dire précisément ; c’est en tout cas une histoire d’engagement, celui d’une troupe quasi militante silencieuse néanmoins active.
Je l’aime pour les rencontres que j’y fais, la chaleur qui y règne, la richesse des échanges.
Je l’aime parce qu’il nourrit également ma curiosité infinie à l’égard du monde tant sur le plan humain, émotionnel, sensitif que sur le plan intellectuel.
Je suis enseignante dans la formation continue.
Le champ des matières, des niveaux que j’aborde est si vaste que je ne rentre pas dans le détail aujourd’hui. J’aborde simplement la question des préparations aux différents concours, notamment ceux des écoles type aide- soignant, infirmier, éducateur, etc. Régulièrement, par ce biais, j’étudie avec les stagiaires (non des élèves, ce n’est pas l’école) des textes, des documents touchant aux sphères médico- sociales. Hormis les thèmes classiques aux questions habituelles, il arrive de temps en temps que les sujets révèlent des trésors dans l’absolu. Il y a peu, j’ai eu l’immense joie de découvrir celui- ci donné à un concours d’entrée d’école d’éducateur:
Il y avait autrefois un roi riche et puissant et une reine qui était maigre, pâle et triste. Elle n’avait aucun appétit ni pour la nourriture, ni pour la vie. Le roi observait sa reine et ne savait pas comment lui redonner les rondeurs qu’elle avait eues quelques années auparavant.
Un jour, le roi regarde par la fenêtre de son palais, quand il voit passer dans son jardin une femme qui respire la santé, une femme bien ronde et bien plantée, une femme au corps généreux et au regard radieux. C’est la femme du jardinier ! Il est abasourdi. Sa femme a lui a tout ce dont elle peut rêver, tout ce qu’une femme peut souhaiter et elle est maigre comme un clou rouillé. Le jardinier lui, n’a pas de quoi se nourrir tous les jours et il a une femme opulente.
Le roi sort de chez lui et va trouver le jardinier :
- Ta femme est resplendissante, la mienne est souffrante, dis- moi, de quoi la nourris- tu ?
- Moi, répondit le jardinier, je nourris ma femme tous les jours avec la chair de la langue.
- C’est tout ?
- Oui, c’est tout.
Le roi rentre précipitamment chez lui et va trouver son cuisinier :
- Tu vas me préparer un banquet avec les langues de toutes sortes, assaisonnées de toutes les manières possibles. Je veux une palette de saveurs qui soit digne des palais les plus exigeants.
Le lendemain, les tables sont recouvertes de toutes sortes de plats avec des langues de bœuf, de veau, des langues de moutons, de lapins, d’alouette, de moineau et d’aigrette. Des langues grillées, mijotées, rôties, farcies, bouilles et puis toutes sortes de sauces avec des épices du monde entier.
Le roi va chercher la reine et l’accompagne, fier de lui, jusque dans la salle à manger. Il l’invite à se servir. La malheureuse voit toutes ces langues baigner dans des jus de couleurs étranges, elle a mal au cœur. Elle regagne immédiatement sa chambre.
Le roi est dépité. Il va de nouveau trouver le jardinier et lui dit :
- Tu vas prendre ma femme chez toi pendant six mois et la tienne viendra vivre au palais !
Les désirs des rois sont des ordres. Dès le lendemain, l’échange est fait.
Il en faut du temps dans la vie… dans les contes, il suffit de deux mots. Voilà les six mois qui viennent de s’écouler.
La reine revient au palais resplendissante. Elle est toute ronde et rit à la vie. La femme du jardinier, quant à elle, a dépéri. Elle est maigre et grise, son teint est blafard et son visage ne sait plus sourire.
Le roi, qui ne comprend plus rien, demande aux femmes de s’expliquer.
- Quand mon mari rentre le soir, dit la femme du jardinier, il est de bonne humeur. Qu’il ait de quoi acheter à manger ou pas, il me raconte sa journée ; les fleurs qui ont éclos, les arbustes qui ont poussé, les fruits qui se sont épanouis, la pleine lune dans la nuit. Quand il a fini, il joue de la musique et il chante puis me raconter des histoires, me récite de la poésie et les soirées avec lui prennent la saveur d’un paradis.
- Oui, renchérit la reine. Il a toujours une belle histoire ou une parole douce à offrir et cela embellit la vie. Il donne le meilleur de lui- même, la chair de la langue.
Nul ne sait si le roi a vraiment compris.
Certains disent que ce jour- là, les deux femmes ont choisi de vivre avec le jardinier. D’autres plus optimistes racontent que le roi s’est mis à raconter de beaux récits… et que sa femme a vécu le restant de ses jours épanouie.
(Extraits de Contes curieux des quatre coins du monde, choisis, traduits et racontés par Praline GAY-PARA, Actes Sud, 2007)
Pensées spéciales pour mon ami Boris.
1 commentaire -
Par fée des agrumes le 11 Mai 2010 à 11:05
Je lus ce livre avant Derniers fragments d’un long voyage évoqué ici mais la publication de cet article n’avait de sens à mes yeux qu’après le récit de mes effroyables découvertes sur ma relation à SeN. Michel en ADELO m’avait parlé d’elle pour la première fois et noté ce titre sur un bout de papier. J’avais accroché immédiatement. La raison en est évidente, clairement. Et alors ?
Je précise qu’elle l’a écrit bien avant la maladie, bien avant l’imminence fatale d’une mort certaine.
Difficile de trouver les mots pour en parler.
Il règne dans cette œuvre une poésie, une délicatesse de vue sur les petits riens de la vie révélateurs de ce qu’il y a de plus profond en l’humain. La langue n’est pas banale, parsemée de joyaux de vocabulaire et de structures. Une finesse et une douce merveille, ode à la vie et à ses trésors. Œuvre d’une rare beauté.
Etre vivant, c’est s’engager. S’engager c’est rendre hommage à la vie, le minimum que l’on puisse lui rendre pour le cadeau fantastique et improbable qu’elle nous fait d’être là. Savourer chaque seconde de l’instant présent et braver les stéréotypes stériles et sans issue de la bonne pensée de ceux qui ont peur. Les mondes personnels qui se croisent et se décroisent. Tenter d’aller vers l’autre pour ne pas passer à côté de sa beauté, de la sienne, de la nôtre. Accepter le changement, élément inhérent à la vie. Prendre conscience de soi, de sa valeur, car rien en ce monde n’en aura si nous ne voyons pas la nôtre, intime et profonde. Voilà ce que j’en ai retenu.
Petit livre de 120 pages en poche, comme celui de Michel Serre, il se lit, se relit, se réfléchit, nourrit et éveille l’âme.
Vivre, exister et être
Pleinement
Entre Elodie et les merveilles transmises par l’intermédiaire de Michel, n’aurai- je pas trouvé le sens de ma/la vie ?
Quand les livres lus parlent de soi… Vous vous souvenez ?
2 commentaires -
Par fée des agrumes le 1 Mai 2010 à 17:17
Une neuro- anatomiste victime d’un accident cérébral raconte ses incroyables découvertes.
Jill Bolte Taylor est brillante : elle a étudié la psychologie physiologique, la biologie humaine, les neurosciences, elle enseigne l’anatomie macroscopique, la neuro- anatomie, l’histologie, elle est chercheur à la faculté de médecine de Harvard sur l’anatomie de l’encéphale. Membre du comité national de la NAMI (Alliance nationale pour la maladie mentale), elle parcourt les Etats- unis afin d’accroître les dons de cerveaux sur lesquels elle travaille, en particulier ceux de malades, portée par la schizophrénie de son frère. C’est une femme très active et sollicitée.
Au matin du 10 décembre 1996, sa vie bascule : accident vasculaire cérébral. Hémorragie due à une malformation congénitale des vaisseaux sanguins irriguant le cerveau. Elle a trente- sept ans. Ce livre raconte son expérience.
Après un cours sérieux sur les particularités du cerveau (que je compte lire et relire vu la complexité du sujet très intéressant), elle raconte la succession des événements de ce matin-là. Etrange écriture décalée. Elle évoque ses sentiments, ses émotions, ses sensations, ses réactions en y juxtaposant son discours analytique de médecin. Récit de la souffrance et la perte progressive de ces capacités, récit de la progression du sang dans les différentes zones et ses conséquences. C’est une écriture à multiples voies et niveaux qui m’interroge grandement sur le plan stylistique, l’effet qu’elle produit. Suivent son cheminement médical, sa prise en charge, les médecins qui la considèrent quasiment comme un tas de viande négligeable ou du moins débile, ceux qui au contraire ont de la considération pour elle malgré son évidente diminution, l’interne stupide obnubilé uniquement par l’intérêt du cas pour sa formation, l’interne respectueux, les soignants sans considération, les attentionnés. Tout le panel des possibilités humaines y passent avec cette particularité terrible de l’hôpital où le patient est diminué, parfois à la merci du personnel. J’y ai noté pareillement quelques caractéristiques du système américain et remercié à nouveau ma chance d’être malade en France où nous avons la Sécurité Sociale. Pauvre et inconnue, aurait- elle eu le même sort ? Certainement pas.
Après son opération réussie, elle raconte comment sa mère est venue habiter avec elle en dévouement total, materner comme elle l’avait déjà fait au début de sa vie. Il lui fallait tout réapprendre, se réapproprier et son corps, et l’espace, son corps dans l’espace, tout, absolument tout. Au bout de sept ans, elle en ressort totalement guérie et transformée. Elle est là, elle- même, complètement différente pourtant parce que son hémorragie a eu lieu dans son hémisphère gauche, le rationnel, le calculateur, le contrôlant, l’individualiste, le critique. Son sang l’ayant fait taire, elle a vécu pleinement son hémisphère droit, l’universel, le fusionnel, le compassionnel, l’artiste, l’émotionnel, le mystique, le bienheureux et pour rien au monde, elle ne voudrait revenir à son mode de fonctionnement antérieur. Elle y a trouvé une joie de vivre et d’être incommensurable. Jouer de la musique, créer, méditer, aimer sans réserve, remercier chacune de ses cellules pour chaque journée offerte dans la vie, être heureux d’être là, ici et maintenant, avoir conscience que nous sommes partie de l’univers tout entier et qu’en mourant, nous lâchons nos particules pour continuer la vie de cet univers…
Cependant, ce ne sont pas ces découvertes –là qui m’apprirent quelque chose, ma propre expérience ayant des conclusions similaires. Si mon intellect se réjouit des connaissances physiologiques mises en parallèle avec celles apprises auprès de mon ami Boris, je suis surtout enthousiaste par les notions de plasticité du cerveau. Les neurones sont là, les connexions se créent au gré des apprentissages surtout dans la petite enfance et nous n’avons absolument pas conscience que nous possédons le pouvoir de générer le cerveau que nous voulons par un travail, une discipline quotidiens non de ces travaux et disciplines rébarbatifs et violents mais bien ceux de la méditation par la présence à ce que nous pensons, vivons et faisons. Quand une pensée négative nous envahit, nous pouvons la corriger en mobilisant d’autres voies neuronales… et plus nous mobilisons ces voies positives, plus elles se transforment en voie privilégiées. Evidemment, certaines atteintes du cerveau sont très lourdes suite à une maladie mentale, à un accident, des malformations, nous ne sommes pas tout puissants, nous pauvres humains mortels pourtant, il existe des cas incroyables comme ceux qui vivent (quasi) normalement avec une partie du cerveau en moins ou encore ceux montrés dans ce documentaire vu sur Arte (cf. article ici).
Par ce livre, se bousculent dans ma tête des idées en pagaille engendrant des liens foudroyants de l’une à l’autre. Mon ami Boris, les méditants, les interlocuteurs croisés dans mon propre parcours, Gilles, Solange, Elodie, les barbares et les humains, une scène du fabuleux destin d’Amélie Poulain reliant cerveau et univers… tant d’autres … et décidément, je n’en reviens pas.
Dans notre boite crânienne réside une merveille de la nature aux possibilités infinies.
1 commentaire -
Par fée des agrumes le 20 Avril 2010 à 12:00
Il était annoncé depuis plusieurs semaines par le mouvement Colibri de Pierre Rabhi et je l’attendais vaguement. Les films genre Home, non merci, ils sont tellement consensuels qu’ils me paraissent dépassés. Par Facebook et les liens que j’y entretiens (quelques amis, Colibri, Greenpeace par exemple), j’avais entrevu des extraits, lu des avis au point qu’au jour de sa sortie, j’étais déterminée à le voir. J’ai évidemment lancé l’idée autour de moi, assuré sa promotion et ce fut avec Valérie que j’y suis allée.
Du point de vue technique, c’est assez déplorable pour les puristes des plans, montages, cadrages etc ; à mon humble avis, cela ne donne que plus de force à son caractère militant. C’est filmé sur un coin de table, dans des jardins, des salles basiques, des lieux improbables comme des images volées à un pouvoir contrôlant et censeur.
Coline Serreau explique, avec l’éclairage de connaisseurs insoumis, comment la paysannerie du monde a été/ est détruite par les grandes multinationales qui ont transformé l’agriculture en débouché pour les produits issus des guerres. Expropriation de savoirs et de transmission ancestraux, enfermement dans des dépendances commerciales, économiques, destructions des sols, des sociétés, des humains. Musèlement, soumission au point de conduire des milliers d’hommes au suicide, écrasement des femmes. Ou comment la société capitaliste hyper masculine n’aspirant qu’à produire de l’argent pour de l’argent écrase la place de la féminité dans la société, détruit le lien unissant humains et environnement, terre nourricière. Tableau effarant et révoltant.
Puis viennent les alternatives réelles, concrètes. A travers le monde, des individus s’organisent, s’associent pour sortir de cette spirale infernale et sans issue.
Vadana Shiva agit en Inde pour la préservation de la biodiversité et le maintien d’une paysannerie cultivant biologique, Lydia et Claude Bourguignon sont parmi les derniers connaisseurs en microbiologie du sol (les chaires d’université ont été fermées à travers le monde entier !), Devinder Sharma dénonce les aberrations systémiques actuelles, Philippe Desbrosses docteur en sciences de l’environnement agit pour la biodiversité et l’agriculture biologique, Dominique Guillet, président de Kokopeli en lutte contre le brevetage des espèces par les multinationales, la diffusion des nouvelles semences stériles et promeut les semences biologiques et reproductibles, Serge Latouche, professeur d’économie à Paris est l’un des penseurs de la décroissance, Joao Pedro Stedile, activiste social brésilien, membre du mouvement des Sans –Terre, Ana Primavesi, ingénieur agronome auteure de nombreux articles dénonçant les pratiques destructrices de l’agriculture actuelle, Antoniets Semen Sviridonovitch fondateur d’un kolkhoze biologique du temps de l’URSS est actuellement à la tête d’une immense ferme biologique certifiée Ecocert en preuve des alternatives possibles à l’agriculture intensive chimique et stérilisante, Pierre Rabhi militant de longue date promoteur de l’agro- agriculture à travers le monde. Ajoutez- y les exemples en Inde, en Afrique, au Brésil, en Europe de paysans vivant de leur production, en harmonie avec la terre.
Quiconque s’informe n’apprendra rien de neuf sur l’aveuglement et la cupidité des dirigeants, les réseaux de pouvoir et d’argent, le risque de pénurie alimentaire à l’échelle planétaire, l’érosion et l’empoissonnement des sols, la mauvaise santé généralisée entre la misère et la déplorable qualité des produits offerts sur le marché. Pourtant, la mise en parallèle par les images, les interventions permet de mesurer l’ampleur du désastre !
A ce rythme, nous en avons tout au plus pour 50 ans…
Je n’ai pas été choquée, je savais déjà. Mon penchant à la révolte, à l’insoumission, à l’indignation en est ressorti revigoré, gonflé à bloc. Je sais que malgré mes tâtonnements et erreurs, je suis dans le juste. Parce que nous consommateurs avons le pouvoir ! Aussi, je vous invite TOUS à aller voir ce film d’autant que sa diffusion dépendra de son succès lors des premières semaines. C’est un acte MILITANT nécessaire et indispensable pour qui refuse l’absurdité du système destructeur et stérile présenté en seule voie du bonheur !
Visitez allègrement le site du film (ici) et diffusez alentour pour montrer que nous ne sommes pas des moutons de Panurge prêts à se jeter du haut de la falaise aveuglément, passivement pour le bon confort d’une minorité avide.
TOUS EN SALLE !!
5 commentaires -
Par fée des agrumes le 18 Avril 2010 à 21:12
Il y a quelques jours, en compagnie d’amies et de mon fiston, nous sommes allés voir le dernier Tim Burton. J’avoue que je suis adepte de ses films qu’ils soient d’animation ou non. C’est un univers particulier loin des sentiers habituels, sombres et mystérieux, à l’humour légèrement noir. Une ambiance.
Je ne sais pas exactement d’où lui est venu l’inspiration ; j’avais entendu parler De l’autre côté du miroir mais comme je ne l’ai pas lu, je ne saurais dire. Evidemment, nous y retrouvons les personnages connus du livre d’origine, les situations absurdes et insensées, les transformations de l’environnement et de la jeune fille au hasard des circonstances.
Alice est devenue une jeune fille de 19 ans. Son père est décédé et sa mère espère la marier à un lord pour assurer son avenir ; cependant, ce lord est affreusement guindé, froid, pédant, laid. Alice est perdue. Elle s’échappe de la grande cérémonie de demande en mariage en suivant le lapin blanc. Après sa chute entre les racines d’un arbre, elle arrive dans le pays des merveilles où une Alice est attendue pour le sauver de la tyrannie de la reine rouge. Bien que niant être cette sauveuse, elle est entrainée dans l’aventure et retrouve avec d’étranges sensations des personnages qu’elle reconnait dont en particulier le chapelier fou. Entre les histoires racontées par son père dans son enfance et cette aventure, elle divague. Finalement, elle remplit sa mission après de nombreuses péripéties et retourne dans le monde réel pour refuser le mariage et devenir l’associé de feu son père qui aurait dû être son beau-père.
Si je raconte la fin, c’est parce que j’ai trouvé rocambolesque cette appropriation moderne d’une histoire de l’époque victorienne. La jeune fille qui bouleverse les plans de vie qui lui étaient destinés pour devenir une sorte d’aventurière, c’est un thème très contemporain. Qui aurait osé imaginer pareille revirement du temps de Lewis Carroll ? Le livre d’origine est donc une base sur laquelle une aventure aux valeurs actuelles se développe. En outre, les jeux de mots si particuliers de l’original n’apparaissent nullement dans les dialogues ou les situations de ce film. Autant le dire alors, c’est une interprétation visuelle d’Alice par Tim Burton. Variation délicieuse néanmoins puisque j’aime ces ambiances, variation donc pour les adeptes de cette esthétique.
Dans les arbres, les décors, certains personnages grotesques, j’ai vu Les noces funèbres et L’étrange Noël de Monsieur Jack. Dans le personnage du chevalier noir au service de la reine rouge, j’ai vu Sleepy Hollow ; dans les personnages cocasses, Charlie et la Chocolaterie. Dans le plan d’entrée sur la scène de bataille, Beetlejuice. Dans l’univers de la reine blanche, des échos d’Edward aux mains d’argent. En bref, un synopsis de la filmographie de Tim Burton.
Avec la 3D, c’est un léger plus pour donner de la profondeur au décor, je ne pense pas cependant que ce soit indispensable ; tout est si chargé et opulent qu’il y a suffisamment à regarder sur divers plans, en divers visionnages normalement.
La conclusion est somme toute traditionnelle avec cette Alice renversant les règles de la vie réelle grâce à la force que lui donne son imagination développée dans le pays de merveilles. L’esthétisme est travaillé gracieusement, Tim Burton s’éclate, se lâche grâce aux possibilités d’étrangeté offertes par l’œuvre originale et la technique actuelle du cinéma. Les personnages en particulier sont richement caractérisés et méritent d’être vus et revus. Dommage que ces décors opulents, ces costumes recherchés et enlevés, ces personnages atypiques, cet immense travail d’orfèvre servent une narration stéréotypée. Je ne suis pas certaine que ce film me marquera parce qu’il y manque un soupçon d’originalité... est- ce là le contrôle de Disney ? Tant pis, j’aurais préféré plus d’audace sur le fond et pas uniquement sur la forme.
4 commentaires -
Par fée des agrumes le 15 Mars 2010 à 14:00
C’est étrange, il y a quelques jours, je pensais à lui, il y avait plusieurs mois que je n’avais écouté ses chansons. Un pincement au cœur me prit et je décidai de retrouver le cd au milieu du bazar pour me plonger à nouveau dans cet univers beau et riche.
Jean Tenenbaum de son vrai nom échappa à la déportation alors que son père, juif russe réfugié en France mourut à Auschwitz après avoir été arrêté par la Gestapo. Jean avait 11 ans et attendit longtemps son père.
Sauvé par des militants communistes, il garda à l’égard de cette idéologie une reconnaissance infinie.
Tout au long de sa vie, il se battit pour la dignité humaine, à contre courant souvent des modes.
Adepte d’une vie simple et authentique, il a chanté la nature et les gens simples
Les poèmes d’Aragon avec une émotion rare
Partisan de la paix et de la non- violence (je retombe décidément toujours sur mes pieds),
il dénonce la petitesse des frileux confortablement installés prônant de grândes idées avec un humour ravageur.
Je partage avec lui cette France magnifique des droits de l’homme, de la liberté, de l’égalité et de la fraternité porteuse d’idéal, d’intelligence et de beauté.
Dans son histoire, j’entrevois un parcours tel que mon ami Boris peut en relater, celui d’une souffrance abominable transfigurée par l’art.
Libre penseur, artiste engagé, il fut à mes yeux un être profondément humain, authentique dont les chansons et la voix chaude nourrissent mes espérances dans l'humanité, un être tel que je les aime, simplement.
Jean Ferrat n’est plus, c’est un grand homme qui disparait.
Au revoir monsieur et bon voyage.
4 commentaires
Suivre le flux RSS des articles de cette rubrique
Suivre le flux RSS des commentaires de cette rubrique